Les gouttelettesLibrairie Beauchemin (p. 168).

ROSÉE

Elle avait repoussé plus d’un amour banal,
Et son âme chantait une idéale stance.
Nous étions — mais j’oublie en quelle circonstance —
Au jardin que berçait un souffle matinal.

Un papillon, caché dans un lis virginal,
S’enivrait de rosée. Il paya d’inconstance.
Nous le vîmes s’enfuir une longue distance,
Et la fleur, sembla-t-il, pleura l’adieu final.

Elle la prit alors de ses beaux doigts de fée,
La mit à son corsage ainsi qu’un fier trophée,
Et le parfum semblait s’exhaler de son cœur.

Elle tourna vers moi sa figure rosée,
Et dans son œil humide, ouvert comme la fleur,
Comme le papillon je bus de la rosée.