LA COURONNE D’ÉPINES
Et puis, le grand château fut désert. Ni l’éphémère gouvernement provisoire, ni la royauté « citoyenne » ne se risquèrent à s’abriter sous ce toit redoutable que les trois Euménides, — Alecton, Mégère et Tisiphone, — semblaient jalousement défendre contre l’intrusion des ambitieux. Louis-Philippe, le nouveau roi, souhaitait ne pas quitter son Palais-Royal où, durant plus d’un an, il eut à subir l’assaut de continuelles émeutes. Sauf quelques banquiers, un certain nombre de politiciens convoiteux d’un portefeuille, plusieurs amis dévoués, voilà ses seuls partisans : les royalistes déplorent la chute des Bourbons aînés ; les bonapartistes appellent de leurs vœux le fils de Napoléon ; les libéraux se déclarent dupés et veulent la république ; les démagogues s’agitent et préconisent l’anarchie ; les gouvernements étrangers boudent et ne dissimulent pas leur défaveur ; tous traitent Louis-Philippe d’usurpateur et l’infortuné prince, comme un acrobate sur la corde raide, s’efforce de garder l’équilibre aux yeux de tant d’adversaires qui espèrent le voir tomber.
Malgré son désir de ne point renoncer à la vie de famille, que les siens et lui-même ont toujours préférée à l’existence monotone et quasi claustrale de la Cour, il sent bien qu’il ne sera pas vraiment roi tant qu’il n’habitera pas les Tuileries. Après un an d’hésitation, il se résigne, et bien à regret, non, peut-être, sans quelque gêne et fâcheux pressentiment, à emménager aux vieux palais, théâtre de tant de drames. En prenant cette résolution, il cédait, disait-il, aux instances de l’empereur d’Autriche ; celui-ci, fort dédaigneux de son confrère improvisé, lui donnait-il ce conseil dans la conviction que le séjour dans ce château funeste à ses habitants hâterait la chute de cette royauté d’aventure[1] ?
À la fin de septembre 1831, Louis-Philippe reçut pour la première fois aux Tuileries. Un journal légitimiste publia, à ce sujet, une caricature représentant « l’usurpateur » qui, vêtu en ramoneur et noir de suie, se mirait dans une glace du salon de Charles X, et soupirait : « Dieu ! que je me suis sali pour arriver jusqu’ici ! » La répartition des appartements n’est plus celle des règnes précédents : celui du premier étage, habité par l’empereur et les derniers rois, est transformé en salles de réception ; la chambre à coucher de ces trois souverains est devenue une salle de billard ; le cabinet de Napoléon et son cabinet topographique servent de passage. Le roi, fidèle à ses habitudes bourgeoises, partage avec sa femme tout le rez-de-chaussée donnant sur le jardin. Sa sœur, — son Égérie, — Mme Adélaïde, s’est attribuée les pièces du rez-de-chaussée sur la cour, naguère occupées par le roi de Rome. « Je ne suis pas logée, mais campée, disait-elle ; j’aurais bien pu trouver un appartement plus convenable au pavillon de Marsan ; mais c’est si éloigné ; et je souffre de mes migraines ; c’eût été, pour la reine et les enfants, une affaire de venir me voir[2] », et c’est le duc d’Orléans, prince royal, qui a pris le rez-de-chaussée de la duchesse de Berry au pavillon de Marsan, dont les étages supérieurs sont répartis entre ses frères Nemours et Montpensier.
Rien de pompeux ; rien qui rappelle les grandeurs d’autrefois ; point de Cour ; car il ne faut pas choquer les envieuses susceptibilités des démocrates aux aguets : « Jamais, écrivait l’un des invités à cette pendaison de crémaillère, jamais ce palais ne m’a paru plus sombre, plus morne ; les salles des gardes sont vides ; les salons, autrefois peuplés de chambellans et de maîtres de cérémonies, semblaient déserts ; à peine un domestique pour ouvrir les portes. Nous voici dans la salle du Trône ; le tapis est changé, les tentures ont disparu ; plus de fleurs de lis, plus d’armoiries ; du velours grenat a remplacé ces emblèmes[3]… » Louis-Philippe s’excuse d’être là ; il ne s’y plaît pas ; il juge les Tuileries « lugubres » : « Voyez combien, malgré tant de lumières, ces pièces sont obscures et tristes. Et ce petit salon de ma femme… — il se reprend et dit de la reine — est-il comparable à la belle galerie où elle recevait au Palais-Royal ?… J’ai fait un grand sacrifice aux convenances en venant habiter cet appartement si noir. » Il passait une partie de la soirée dans le salon de la reine qui, assise avec ses filles et sa belle-sœur à une table ronde, sur laquelle était posée une lampe, travaillait au bonnet de velours qu’elle brodait de fleurs et qu’elle destinait à son mari. Elle sera bientôt légendaire, cette table ; chacune des princesses y a son tiroir numéroté où elle serre son ouvrage et toutes, assidûment, cousent, soutachent, festonnent ou tricotent.
On les y trouve tous les soirs ; les hauts fonctionnaires et les hommes politiques sont admis, sans convocation, à rendre visite, — autrefois on eût dit « faire leur cour », — à la famille royale. À dix heures, la réception est terminée ; le roi s’approche alors de la table à ouvrage ; il reste ordinairement debout, les mains posées sur le dossier d’une chaise : on est entre soi, en confiance : les jeunes princes, — Chartres, Nemours, Joinville, Aumale et Montpensier, — taquinent leurs sœurs, — Louise, Marie et Clémentine[4], — tous si vifs, si respectueux pourtant. Le général comte de Rumigny, — un dévoué, un fidèle sûr, — a tracé de ces soirées intimes des croquis attendrissants : plus de rôle à jouer, plus de méfiante réserve, plus d’hostilités à vaincre, plus d’affronts à redouter. Chère Majesté, disent « les enfants » quand ils s’adressent à leur mère ; Père quand ils parlent au roi ; les rires, les voix s’élèvent ; c’est ordinairement celle de Moumours (Nemours) ou de Toto (Montpensier). « Père, racontez-nous une histoire. » Le roi obéit après avoir consulté du regard sa bonne reine : c’est ainsi qu’il désigne sa femme, et il conte : il en a vu des choses et des pays ! Il en a connu des gens ! Il se souvient de Marat à la tribune de la Convention ; il a erré sous un faux nom à travers le monde, donnant des leçons pour vivre ; il a parcouru l’Europe depuis la Sicile jusqu’au cap Nord ; il a vu la Cour de Versailles au temps de sa splendeur et il a encore dans les yeux l’image de la belle reine coquette et rieuse. Sa mémoire est un livre, et, à tous ses enfants qui naissent à la vie, — Chartres, l’aîné, a vingt et un ans en 1831, Toto, le plus jeune, sept ans seulement, — le roi fait l’effet d’un magicien possédant tous les secrets de l’humanité. Ces jeunes princes, curieux d’Histoire, demeurent bouche bée quand leur père commence : « Il y a aujourd’hui cinquante-quatre ans, j’ai été reçu cordelier de l’ordre du Saint-Esprit dans la chapelle de Versailles… J’avais pour parrains les deux frères dont l’un est devenu Louis XVIII et l’autre Charles X… » — ou bien, par contraste, passant à d’autres épisodes de sa vie tourmentée : « À Reichenau, en Suisse, j’étais si pauvre[5]… »
La bonne reine Marie-Amélie tremblait sans cesse. Sauf quand elle tenait son mari et tous ses enfants autour de la table ronde, elle vivait dans l’angoisse, redoutant l’attentat qu’annonçaient chaque jour des menaces anonymes « rédigées avec une perfidie diabolique ». « Non, ma chère, disait-elle à une amie[6] qui cherchait à la rassurer, pas un jour, pas une heure, pas un instant, à Fontainebleau comme à Paris, comme dans ma chambre à Neuilly, c’est toujours, toujours, toujours… » Son roi bien-aimé était la cible de tant d’assassins ! Ne devait-il pas, en 1835, voir son état-major tomber autour de lui sous la décharge d’une machine infernale ? La chose était passée en habitude ; le duc d’Aumale racontait, sur ses vieux jours, que son père, étant roi, avait consulté un professeur de maintien pour apprendre de lui une façon galante de saluer, quand il venait d’essuyer le feu de quelque régicide. Un soir, comme Louis-Philippe s’était endormi sur ses journaux et que toute la famille, respectant son sommeil, gardait le silence, une canne à gros pommeau qu’il avait posée contre un meuble glissa sur le parquet et tomba avec bruit. Ce fut un terrible émoi : pâles et tremblantes, la reine et les princesses s’étaient précipitées pour protéger le roi en le couvrant de leurs corps. Jamais Marie-Amélie ne nommera autrement que la catastrophe la révolution qui l’a faite reine.
Quant à son mari, il prend son parti des avanies, des invectives, voire des attentats réitérés : « Si on me rend la vie trop dure, disait-il, j’abandonnerai tout ; je me retirerai à Eu avec ma bonne reine. » En attendant, il ne change rien à son règlement de vie : entre sept et huit heures, il quitte le lit conjugal ; pas de petit ni de grand lever ; pour tout cérémonial, il fait un paquet de ses vêtements, les met sous son bras et gagne son cabinet de toilette. Là, il s’enveloppe d’une grande redingote qui lui tombe sur les talons, allume son feu et se met au travail. Ensuite, il fait sa barbe, opération qui se prolonge et durant laquelle il reçoit l’aide de camp de service et le contrôleur du château. À onze heures, il s’habille, déjeune de riz cuit à l’eau, d’un échaudé et d’un verre d’eau. Puis il part pour sa promenade quotidienne et gagne, à pied, Saint-Cloud ou Neuilly ; les promeneurs le rencontrent presque tous les jours, coiffé d’un chapeau défraîchi, vêtu d’un vieil habit, le parapluie légendaire sous le bras[7]. Pour quatre heures, il est rentré aux Tuileries : c’est l’heure du dîner, mais, si l’on est en famille, on commence sans lui ; il n’entre dans la salle à manger, — la galerie de Diane, — qu’au moment du second service, exige que personne ne se lève, prend place ; on lui apporte quatre ou cinq potages ; il fait un mélange de toutes ces soupes, — c’est son régal, — boit un verre de vin d’Espagne, mange une tranche de viande rôtie, un peu de ragoût, un peu de légumes et termine par un plat de macaroni.
La bourgeoisie déblatérait naguère contre la morgue des courtisans, jugeait ridicule et blessant l’orgueil exclusif de l’aristocratie ; maintenant qu’elle est au pouvoir, c’est elle qui compose la Cour, — « cette Cour de France, autrefois asile des plaisirs, du luxe, des fêtes, de la beauté, des amours ; cette Cour si noble, si chevaleresque, si heureuse, si enviée, dont rêvaient les princesses des autres pays comme du paradis sur la terre[8]… ». Quelle déchéance ! Fidèle à son rôle de monarque populaire, Louis-Philippe offre, chaque hiver, à cette bourgeoisie triomphante une série de concerts et de grands bals. Elle est chez elle aux Tuileries et se plaint d’y être reçue sans déférence : chacune de ces fêtes est l’occasion de venimeux brocards contre la lésinerie du roi, contre la société « mêlée » qui se bouscule au château. La famille royale, pour qui ces bagarres sont un supplice, fait de son mieux ; l’esprit de parti ne désarme pas et les gazetiers dénigrent sévèrement l’hospitalité du pingre souverain, « qu’on paie pourtant assez cher » ! « Quel bal et quel sabbat ! écrit l’un d’eux, au lendemain d’une de ces réjouissances. Jamais bal masqué de théâtre de troisième ordre n’offrit plus horrible cohue ; on se poussait, on se heurtait, on se bousculait, surtout du côté du buffet que l’on mettait au pillage. Les salons étaient jonchés de rubans, d’épaulettes, de gants ; quelques bottes avaient marché sur quelques souliers de satin que les pieds n’avaient pu retrouver ; les femmes étaient fripées et chiffonnées, marbrées et zébrées de coups de coude[9]… » Ailleurs, on publie les impressions d’un garde national de service au château pendant une nuit de fête : il est placé en sentinelle devant le buffet avec la consigne de crier Passez au large ! afin d’éloigner les consommateurs assoiffés, « précaution d’ailleurs superflue dans une salle où, pour tous rafraîchissements, on ne trouve à prendre que des coups d’air ». Sous le grand péristyle, se cognent fiacres, cabriolets, coucous et autres véhicules démocratiques ; l’arrivée des piétons varie agréablement le coup d’œil ; ils sont assaillis par des décrotteurs, aussi nombreux qu’autour du bal des artistes. Il s’est formé, sur la place du Carrousel, et, dit-on, au profit de la cassette royale, de petits vestiaires où chacun peut louer, moyennant cinquante centimes, un habit à peu près propre et une culotte à faux mollets. « Sous ce même vestibule abondent les marchands de coco, de gâteaux et autres boissons ou comestibles, débitant leurs marchandises aux danseurs et danseuses qui, en haut, ne trouvant rien à se mettre sous la dent, redescendent l’escalier pour venir se désaltérer et se nourrir au bas[10]. » Le tableau est chargé, on n’en peut douter ; néanmoins, de l’aveu du prince de Joinville, ces bacchanales populaires dégénéraient parfois en « chahuts » insolites dans la vieille demeure des rois. « Ces grands bals, écrivait-il, étaient une forte corvée pour mes frères et pour moi, qui devions, à tour de rôle, en faire les honneurs jusqu’à la fin. Je me souviens cependant d’avoir ri de bon cœur un jour que cette consigne m’était échue, en voyant un garde national, coiffé d’un tricorne surmonté d’un grand plumet et dont la vision était troublée par le dîner qu’il venait de faire, vouloir absolument prendre pour danseuse le suisse d’appartement en hallebarde qui se tenait à l’entrée des salles. Il cherchait à l’entraîner avec ivresse et il n’interrompait ses tentatives que pour essayer de le séduire en exécutant devant lui des pas de la chorégraphie la plus excentrique[11]. » Il paraît certain que, bien peu d’années auparavant, les galanteries de ce clodoche ivre auraient singulièrement déparé les réceptions compassées de Mme la duchesse d’Angoulême. Les nobles dames qui avaient eu l’honneur de s’y tant ennuyer jadis, boudaient aujourd’hui le château et, dans leurs papotages, ne manquaient pas d’amplifier généreusement les incongruités qui s’y commettaient. On en racontait des choses à frémir : n’y voyait-on pas des gardes nationaux vêtus d’habits à boutons d’étain ! Les députés s’y présentaient en bottes, en cravate écossaise et en gants verts ; l’avocat Dupin avec ses bas plissés comme un jabot, retombant sur ses gros souliers, y était admis et écouté ! — Des horreurs !
Aux jours officiels, tels que l’ouverture des Chambres ou le 1er mai, fête du roi, le cérémonial n’est guère plus respecté. On a les lettres que l’honnête et fruste Magne, député de Limoges, écrivait à sa femme restée au pays. En 1844, il fait partie, avec vingt-quatre autres représentants, d’une délégation qui va haranguer le roi. Celui-ci, à leur arrivée, s’assied sur son trône et se couvre ; mais il a dû se tromper de chapeau car on le voit « faire des efforts inouïs pour essayer d’entrer sa tête dans ce couvre-chef trop étroit ». Une autre fois, il se tient au milieu du salon pour recevoir les membres du corps législatif, sans prendre la peine de monter sur son trône. Voyant libre cette auguste estrade, les députés, pour dominer la scène, y grimpent sans façon ; Magne en fait autant, un peu gêné pourtant de se trouver dans son vieil habit, avec sa cravate mal mise, ses gants déchirés et ses souliers couverts de poussière, sous le dais solennel, à cette place où Napoléon a reçu tant d’hommages. Louis-Philippe, ce jour-là très enrhumé, doit interrompre son discours pour dire, « comme un simple mortel » : « Excusez-moi, Messieurs, vous constatez que ma voix est fort enrouée. » Ce discours consiste, d’ailleurs, en cinq ou six phrases visiblement apprises par cœur et qu’il débite timidement et très vite. Ce qui n’empêchera pas le Moniteur du lendemain d’imprimer que Sa Majesté a répondu avec un à propos admirable et une merveilleuse présence d’esprit. Un peu plus tard, Magne le voit au théâtre de la Cour ; le roi est vêtu en bourgeois ; il s’assied, pose son chapeau par terre, entre ses jambes et en tire un livre, afin, sans doute, de se distraire si le spectacle l’ennuie. Mais il n’en fut rien, car il lorgna avec un plaisir manifeste les mollets des danseuses et même « ne paraissait-il pas fâché quand leurs jupons s’élevaient un peu plus haut[12] ».
Si la sacro-sainte étiquette des Cours a largement souffert de la Révolution de 1830, le château des Tuileries en a grandement profité. On a prudemment pris soin, au cours de cette chronique, de ne pas abuser de la topographie, matière aride et de nature à rebuter les plus patients des lecteurs. Il faut bien y revenir car Louis-Philippe, grand bâtisseur, transforma si complètement les dispositions intérieures du château qu’on ne peut se dispenser de mentionner tout au moins ces modifications. On rappelle que les constructions du XVIe siècle se composaient encore, en 1830, du pavillon central et de deux galeries de douze arcades ouvertes au rez-de-chaussée et formant terrasse au premier étage. Louis-Philippe, soucieux, en mari modèle, de faire ménage avec sa femme, logée, au rez-de-chaussée, dans l’ancien appartement de Marie-Antoinette, annexa à cet appartement les douze arcades qui l’unissaient au pavillon central ; fermées par des croisées, elles lui procurèrent sept pièces nouvelles dont cinq à deux fenêtres, de plain-pied avec celles qu’habitait la reine. Il installa dans cette prolongation son cabinet, celui de ses secrétaires, son salon particulier, un autre pour ses aides de camp, un troisième pour les visiteurs et une antichambre ouvrant, au bout de cette enfilade, sous le grand péristyle du château. Il se décidait, en même temps, à remanier de fond en comble toute une moitié du palais. Jusqu’alors on accédait aux grands appartements par le vieil escalier de Levau, où les suisses avaient subi l’assaut de l’émeute au 10 août 1792. La situation de ce grand degré, dont la première volée s’arrêtait à mi-étage, au niveau de l’ancienne chapelle, interceptait toute communication facile entre la partie sud et l’autre côté du château ; cet obstacle obligeait les visiteurs se rendant du pavillon de Flore au pavillon de Marsan, soit à se perdre, comme on l’a vu, dans les sous-sols, soit à passer par la cour. Pour parer à cet inconvénient, tout était à refaire ; l’architecte Fontaine présenta un projet qui ne laissait subsister des constructions de Catherine de Médicis et de Louis XIV, que les façades ; encore l’une d’elles, — celle du premier étage de l’ancienne chapelle, — devait-elle être déplacée et avancée du côté des jardins de façon à offrir, au nord du pavillon central, dans la galerie d’arcades et à l’emplacement de la terrasse qu’elle supportait, l’immense cage d’un nouvel et superbe escalier. On ne peut dire par quel prodige de rapidité et d’industrie Fontaine parvint à mener à bien ce bouleversement, sans gêne ni interruption pour la vie courante de la Cour, ni sous quel énorme écran de charpentes il dissimula ces travaux, la formidable masse de gravois qu’on eut à remuer et l’incessante circulation des maçons, plâtriers, couvreurs, décorateurs, des charrois et des tombereaux indispensables. On sait seulement que, dans les derniers jours de 1832, la transformation du château était terminée. Louis-Philippe avait, la veille, échappé à un attentat[13]. Le corps diplomatique se rendit, suivant l’usage, aux Tuileries, pour exprimer au roi ses condoléances et c’est dans ces circonstances que furent inaugurés les nouveaux aménagements. Le grand appartement s’est complété ainsi, dans l’aile du nord, d’une longue galerie, dite de la Paix, qui, de plain-pied avec la salle des Maréchaux et éclairée par dix fenêtres sur le Carrousel, est décorée de pilastres à l’antique, « dans le genre de Versailles et de Fontainebleau[14] ». Elle aboutit à un salon d’attente dont le plafond en bois sculpté a été rapporté de la chambre d’Anne d’Autriche au château de Vincennes. De ce salon, qui sert de vestibule au grand escalier, on passe dans la galerie des Travées, formant, par sept larges fenêtres de glace, tribune à la chapelle du rez-de-chaussée. Enfin, on parvient à la salle de spectacle par une antichambre à colonnes et une petite galerie de glaces qui sert de foyer à la loge royale. Tout le premier étage du palais se trouve ainsi de niveau, et, depuis le pavillon de Flore jusqu’au pavillon de Marsan, compose une réception de 300 mètres de long. Quant au nouvel escalier d’honneur, c’est la merveille de ces innovations : coupé par trois repos, il s’élève droit, entre deux soubassements de pierre, sculptés d’emblèmes et de trophées divers, depuis un spacieux vestibule à colonnades, jusqu’à la porte de bronze de la tribune de la chapelle, et au salon d’attente des grands appartements. À la hauteur du premier étage, règnent deux larges balcons à lourds balustres, d’où, aux soirs de galas, on peut contempler les cortèges qui montent ce superbe degré, entre deux alignements de hauts candélabres en bronze doré.
Les Parisiens, quand eurent disparu les échafaudages, ne manquèrent pas, bien entendu, de critiquer les changements apportés par ces nouveautés à l’aspect extérieur du palais ; on regrettait surtout, non sans raison, la disparition d’une des terrasses à ciel ouvert ; l’avancement de l’étage à l’aplomb du rez-de-chaussée rompait la symétrie de l’ensemble et accentuait la monotonie de cette longue façade sans saillies. Ces endommagements offusquaient les seuls artistes ; mais le haro fut unanime quand on vit les terrassiers ouvrir, à quelque distance du château, une profonde tranchée dans toute la largeur du jardin des Tuileries. On se perdait en conjectures sur le but de cette profanation ; l’émotion fut telle qu’on en fit le sujet d’une pièce de théâtre, Le Fossé des Tuileries[15]. On y voyait les badauds consternés regardant les ouvriers creuser le sol et échafaudant des hypothèses sur la destination de ce travail : l’un croit savoir que ce fossé devra servir d’appartement à la girafe ; l’autre prétend qu’on y mettra de l’eau pour humecter la Seine en temps de grande sécheresse ; un troisième assure que ce souterrain servira à cacher la colonne Vendôme dans le cas d’une nouvelle invasion prussienne. Paraît alors le Petit homme rouge, le lutin protecteur des Tuileries ; il explique que, dans ce vilain trou, on va enfouir tout ce qui gêne, tout ce qui déplaît, tout ce qui est impopulaire : le budget d’abord, qui, par son énormité en comblera une bonne partie ; — la conférence de Londres ; — la question hollando-belge ; — la fournée des trente-six pairs… Et défilent ainsi les actualités, dont chacune est saluée d’un couplet frondeur et d’allusions satiriques, assez anodines, du reste, contre les politiciens, le juste milieu, l’administration et la royauté citoyenne.
Il n’a pas disparu, ce fossé ; il est si peu gênant que bien peu de Parisiens en ont remarqué l’existence : c’est le seul vestige des travaux de Louis-Philippe, désireux de rendre à peu près confortable le séjour des Tuileries. Avant lui, le pavillon de l’Horloge, centre du palais, n’était accessible qu’aux piétons ; outre qu’un très large perron de cinq marches régnait, du côté du jardin, sur toute la longueur de la façade, le grand péristyle était lui-même coupé par six marches, le sol de la cour du Carrousel étant plus élevé que celui des parterres, en sorte qu’on ne pouvait descendre de voiture au bas du bel escalier de Fontaine ; afin d’obvier à cet empêchement, et aussi, sans doute, pour posséder un bout de jardin où il lui fût loisible de se promener avec sa famille, sans servir de cible aux balles des assassins, le roi avait résolu de réserver à son usage la moitié des parterres et d’entourer ce lopin de terre d’un fossé protecteur. Le sable et les gravois qu’on en retira servirent au nivellement du terrain, presque insensiblement déclive depuis le grand bassin rond jusqu’au porche du pavillon central ; ainsi disparut sous ce remblai le perron de Lenôtre[16]. Le roi y trouvait ses aises ; mais les promeneurs des Tuileries n’étaient pas contents : « Napoléon, Louis XVIII, Charles X avaient habité le palais et ils s’en étaient accommodés sans toucher au jardin. La famille d’Orléans était-elle bien venue à se montrer plus exigeante ? De la part d’une monarchie qui, naguère, se disait populaire, c’était un procédé un peu cavalier de reléguer à distance le peuple souverain et cet empiétement semblait en présager d’autres[17]. »
Ainsi frondaient les Parisiens : ils avaient ri des rois de droit divin ; mais ce monarque constitutionnel, issu d’une révolution, leur impose moins encore ; tout ce qu’il entreprend est motifs à critiques et à sarcasmes souvent cruels. Réfugiée dans l’intimité de son mari et de ses enfants, la pitoyable reine Amélie est d’avance résignée à tout. Elle est lourde à porter « sa couronne d’épines » et quand, frappée dans son amour maternel, elle pleurera sa fille Marie, puis son fils bien-aimé, son cher prince royal, — si jeune, si gai, si brave, si aimant, — c’est elle qui remontera le courage du roi, abîmé dans sa douleur. Ah ! comme ils les maudissent, ces Tuileries calamiteuses, dont l’hébergement se paie par tant d’angoisses et de larmes ! Louis-Philippe semble calme et paraît se posséder entièrement ; sa dignité l’oblige « à se montrer ferme de corps et d’esprit » ; mais, livré à lui-même, il s’abandonne au désespoir, se retire dans quelque coin obscur de son appartement, appuie son front contre ses mains et se met à crier : « Pourquoi est-il mort, mon pauvre fils ? C’est moi qui devais mourir ! » Et l’on entend ses sanglots jusque dans les parties les plus reculées du palais. Alors la reine accourt, le prend par le bras, l’exhorte : « Vous devez vivre ; vous ne vous appartenez pas ; c’est à nous, c’est à la France que vous appartenez[18]. »
Les plus dévoués à la famille royale reconnaissaient que, « des murailles du vieux château des Médicis, se dégageait une influence délétère, fatale à tous ceux qui s’y succédaient[19] ». Louis-Philippe, naguère d’intelligence si avisée et de volonté si tenace, insensible aux taquineries de ses ministres, fermait volontairement les yeux sur les dangers qui menaçaient sa couronne et se complaisait dans un optimisme béat. On dit que, dans la nuit du 23 au 24 février 1848, alors que l’émeute grondait dans Paris, il disait : « C’est un feu de paille ; il s’éteindra de lui-même ; il ne sera même pas nécessaire de souffler dessus[20]. » Il dormit paisiblement jusqu’à l’aube ; le 24, il se leva à son heure habituelle ; les avertissements, les admonitions des hommes politiques qu’il reçut dans la matinée ne le troublèrent nullement. À onze heures, on servit, comme à l’ordinaire, dans une salle du rez-de-chaussée, le petit déjeuner de la famille royale. On se mit à table ; et, tout à coup, la fusillade éclate ; l’ordre est donné de faire avancer les voitures ; le roi et les siens iront à Saint-Cloud attendre la fin des troubles ; mais les deux berlines commandées, — la Saverne et la Moselle, — sont arrêtées au sortir des remises, par les insurgés, qui les entraînent, les bourrent de paille et y mettent le feu ; l’un des piqueurs est tué d’une balle à bout portant, sous l’arc de triomphe du Carrousel où il s’est réfugié. Tout de suite, au château, c’est le désarroi, la panique ; Louis-Philippe est passé dans son cabinet ; il s’est jeté dans un fauteuil, les deux mains au front, accablé. Ceux qui l’entourent se taisent ; la reine sanglote. Il y a là Bugeaud, Thiers, La Moricière, Soult, Piscatory, la duchesse d’Orléans, le duc de Montpensier. Un nouveau personnage entre, haletant : c’est Émile de Girardin : « Abdiquez, Sire ; abdiquez, il n’est que temps ! » La reine s’indigne : « Non, mon ami, tu ne feras pas cela ; monte à cheval ; l’armée te suivra… » — « Abdiquez, père, insiste Montpensier ; les balles sifflent jusque dans la cour… » — « Il y a des traîtres ici », murmure la reine. Le roi ne sait que faire ; il interroge du regard son entourage : « Toute défense est-elle impossible ? » gémit-il. « Impossible, impossible ! » Alors, il s’approche de son bureau, s’assied, dispose lentement son papier et sa plume : « Plus vite ! Plus vite ! — Je vais aussi vite que je peux, Messieurs… — Sire ! Je vous supplie de vous hâter. — J’ai toujours écrit lentement ; ce n’est pas le moment de changer mon habitude. » Et, posément, d’une main ferme, en gros caractères, il commence : « J’abdique cette couronne que la voix nationale m’a appelée (sic) à porter… » Il date, il signe ; des mains se tendent pour saisir le papier. « Enfin ! nous l’avons ! » Il est midi et demie.
L’ex-roi déjà, a dépouillé son habit de colonel général de la garde nationale ; la reine l’aide à passer une ample houppelande ; elle le coiffe d’un chapeau haut de forme et, par le petit perron qui, du cabinet du roi, descend aux parterres, elle entraîne son mari, lui donne le bras. Suivis du duc de Montpensier, de la duchesse de Nemours, de la princesse Clémentine qui entraînent à grands pas leurs jeunes enfants, les deux vieux époux, appuyés l’un sur l’autre, fuient tout le long de la grande allée du jardin, dont une bise aigre secoue les arbres dépouillés ; quelques domestiques les accompagnent. On contourne le grand bassin ; on passe entre les terrasses, et c’est la place de la Concorde où la foule est grande. Un petit coupé bleu attend là ; il y est parvenu en suivant le quai ; le roi s’y enfourne avec la reine, tandis que, parmi la cohue, les princesses sont dispersées…
À la chapelle funèbre de Dreux, ils sont tous maintenant réunis dans la rotonde de la crypte froide. Le roi, seul, est debout ; la reine, sa femme, agenouillée, se serre contre lui comme pour le protéger encore ; et, tout autour, sont couchées les effigies de marbre de leurs enfants, — Chartres, Nemours, Joinville, Aumale, Marie, — groupés ainsi qu’autour de la table ronde des Tuileries : sur ces morts, tombe le jour bleu d’un vitrail figurant Notre-Dame-des-Sept-Douleurs. Marie-Amélie a voulu peut-être qu’il fût placé là comme un avertissement à ceux qui seraient tentés d’envier les lourdes pompes du pouvoir, ou comme une confidence suprême des tortures qu’elle a endurées et dut taire durant toute sa vie de reine.
Au château, subitement déserté, plus un poste de garde, plus une sentinelle ; toutes portes ouvertes ; entre qui veut : journalistes en quête d’une chronique, artistes désireux de visiter le palais, d’en connaître les splendeurs, gens paisibles, simples curieux. Ils rôdent, un peu timides, dans cette solennelle demeure qui, une heure auparavant, était encore pour eux un sanctuaire inviolable ; quelques hommes du peuple, moins réservés, se mêlent à ces premiers intrus ; satisfaits de pénétrer en conquérants dans l’intimité des hôtes disparus, ils s’attablent dans la salle à manger et consomment le déjeuner interrompu de la famille royale : nappe blanche, bols de fine porcelaine, cafetières d’argent au chiffre L. P., petits pains dans des corbeilles[21]. On mange, on trinque, on rit. Au premier étage, un loustic s’est assis sur le trône et salue les groupes qui défilent de cette formule traditionnelle par laquelle, au dire des railleurs, le roi commençait tous ses discours : « Messieurs, c’est toujours avec un nouveau plaisir que je me retrouve au milieu de vous. » Mais déjà la foule grossit, ouvre toutes les portes, s’étonne de la complication incommode des couloirs sombres et anfractueux, d’escaliers dérobés qui doublent les beaux salons ; on s’y perd ; on joue à cache-cache, on s’appelle, on se cherche et quand on se retrouve, on danse en rond. Il y a des vitres brisées, des armoires enfoncées ; comme si la tradition révolutionnaire le commandait, on en tire de somptueux falbalas, de monumentaux chapeaux à plumes dont les femmes se parent.
Tout à coup, du côté du pavillon central, « s’élève une rumeur énorme, composée de vociférations et de froissements d’armes » ; le flux de l’émeute déferle sur le château ; la populace monte en houle le grand escalier, se précipite dans les appartements et, aussitôt, éclate la fusillade ; les glaces volent en éclats ; les lustres, visés par les tireurs, s’émiettent en pluie de pendeloques. Les portraits de la salle des Maréchaux sont lacérés, criblés de balles ; les bustes de marbre pilés à coups de masses. D’un bout à l’autre du palais, c’est le saccage, la dévastation farouche, implacable. Le trône est jeté par la fenêtre ; on en traînera les débris par la ville et on les brûlera au pied de la colonne de Juillet. Le cabinet du roi, sa chambre, sont dévastés ; on amoncelle les papiers et les livres ; on les brûle ; en maints endroits, sur les parquets, contre les lambris sculptés. L’intention d’incendier les Tuileries est manifeste, tenace utopie révolutionnaire, haineuse de toute beauté, de tout luxe. À ceux qui, préférant le pillage, s’opposaient à la destruction de tant de richesses, les purs objectaient : « À quoi servent ces amas de pierres sculptées ? Le terrain qu’ils occupent serait plus utile, planté de haricots et de pommes de terre. — Et les musées ? — Les musées également ; tout cela ne sert qu’à tyranniser et appauvrir le peuple[22]… » Le grotesque Caussidière, bombardé préfet de police, avisé que l’incendie menaçait les Tuileries, proclama : « Qu’est-ce que ça me fout, à moi ? Laissez-les brûler ; il n’y aura plus de repaire à tyran. » L’idée sera reprise plus tard…
Cette fois, les pillards triomphent des incendiaires ; car on pille, et copieusement. On a, il est vrai, en ostentation de l’intégrité jacobine, tracé sur les murs Mort aux voleurs ; il est permis de casser, non d’emporter ; même on fusille un malheureux pris en flagrant délit d’un vol de serviettes[23]. Mais bien d’autres sont moins maladroits ; recéleurs et revendeurs affluent, qui savent dissimuler leurs rapines[24]. Le secrétaire du roi est « fouillé et refouillé de main de maître » ; on y prend 25.000 francs en or que les bandits se partagent, disant : « L’argent n’a pas de maître, il ne se reconnaît pas[25]. » On parvient à décapiter une statue en bronze de Louis-Philippe et la tête est jetée dans les flammes[26]. Aux caves, aux cuisines, c’est la ripaille : trois mille bouteilles de vin, deux fûts de rhum sont bus et, sous l’effet de ce réconfort, la rage des déprédateurs, égayés par l’ivresse, revire en un carnaval de soûlards forcenés. Ainsi qu’aux Trois Glorieuses, des poissardes échangent leurs guenilles contre des jupes de soie et de dentelles ; des voyous de la rue se pavanent dans des habits à la française ou de riches livrées brodées sur toutes les coutures ; beaucoup remplissent leurs poches de franges, de torsades d’or et, sous le grand péristyle, en bas de l’escalier d’honneur, au sommet d’un monceau de vêtements lacérés et souillés, trône, la pique en main, une déesse de la Liberté, immobile comme une statue. Elle restera durant trois jours et trois nuits à la disposition de ses adorateurs[27].
Cet ignoble spectacle fut coupé d’intermèdes surprenants : on regretterait, par exemple, de ne point donner un souvenir à un citoyen en blouse qui, pendant le sac du château, accoudé à l’un des balcons de la salle des Maréchaux, fumait tranquillement sa pipe sans paraître intéressé par ce qui se passait autour de lui. À un journaliste, étonné de cette insouciance : « Savez-vous, dit-il, pourquoi je suis venu m’installer sur la balustrade de cette fenêtre ? C’est que, en 1830, j’avais déjà fumé ma pipe au même endroit. À tous les branle-bas, je viens fumer ici ; c’est mon privilège. Ne le dites pas : à la prochaine révolution des intrigants pourraient me prendre ma place[28]. » Il est juste de mentionner aussi l’attitude soudainement respectueuse des envahisseurs en pénétrant dans l’appartement qu’avait occupé le duc d’Orléans jusqu’au jour de sa mort. Depuis près de six ans, cet appartement était pieusement conservé par la veuve du jeune prince dans l’état où il l’avait quitté : « Son lit était défait ; on n’avait même pas jeté l’eau de la cuvette où il s’était lavé les mains avant de sortir ; sur le marbre d’une commode étaient deux chapeaux, un noir et un gris, avec des gants étalés sur les bords, et une assiette contenant des raisins que le fils du roi avait égrenés ; le Journal des débats du 13 juillet 1842, demeurait déplié sur un fauteuil[29]… » À l’entrée de ce reliquaire, les émeutiers s’arrêtèrent ; celui qui conduisait la bande se découvrit : « Pauvre jeune homme, dit-il. Silence et respect, vous autres. » Il emmena ses compagnons et referma la porte. Plus étonnant encore l’épisode qui, vers le soir, marqua la fin des ravages. Au plus fort de la bagarre, un polytechnicien, nommé Ernest Potel, se porta, avec quelques-uns de ses camarades, vers la chapelle du château : un crucifix, magnifiquement ouvragé, dominait l’autel. Potel s’en empare, en criant : « Place ! Place ! Voici notre Maître à tous ! » Il fend la presse des pilleurs qui s’écartent, se taisent, s’inclinent et lui font cortège jusqu’à l’église Saint-Roch[30]. Le curé de la paroisse reçoit cette délégation de l’émeute, place la précieuse image sur le tabernacle de l’autel de la Vierge et bénit les insurgés recueillis et agenouillés. Sur quoi, ils regagnèrent les Tuileries où la bacchanale se termina par un bal improvisé dans la salle du Trône, au son d’un piano tiré des appartements de la duchesse de Nemours ; on l’installa sur l’estrade où pendaient les loques du dais royal. Ce fut, dit-on, le fils d’un ministre de Charles X qui, ce soir-là, se mit au clavier, et par représailles sur l’usurpateur, fit danser les vengeurs du roi légitime[31].
Les Tuileries étaient sauvées d’une destruction complète, au moins pour ce jour-là. On s’empressa d’inscrire au fronton du pavillon de l’Horloge la devise protectrice Propriété nationale ; mais on n’était pas sans inquiétude sur la façon dont les nouveaux propriétaires useraient de leur droit. Après le bal du 24, beaucoup étaient rentrés chez eux ; d’autres n’avaient pas quitté la place ; soit qu’ils fussent trop ivres pour retrouver leur domicile, soit qu’ils jugeassent le château des Médicis plus confortable que leur taudis, ils prétendaient s’y installer à demeure. Ils alléguaient qu’ils l’avaient conquis et que, d’ailleurs, dix-neuf d’entre eux étant blessés, ils ne pouvaient abandonner ces glorieux camarades. Ils restèrent donc. Où se logèrent-ils ? Qui les nourrit ? Cela n’est pas dit ; mais on peut imaginer le tableau : les couples se débarbouillant au réveil sous l’œil étonné des dieux et des déesses planant aux plafonds de Louis XIV et les ménagères cuisinant des mirotons au feu des monumentales cheminées du salon d’Apollon ou de la galerie de Diane.
L’ingéniosité du docteur Leroy d’Étioles, — un original dont l’existence fournirait la matière de plusieurs romans bourrés de péripéties[32], — débarrassa de ces hôtes insolites la demeure royale ; il proposa au gouvernement provisoire, qui n’osait pas les congédier, de consacrer le palais à l’hospitalisation des blessés du 24 février, en attendant qu’on le transformât en un asile de « travailleurs du peuple, âgés ou infirmes ». Quand Ledru-Rollin, ministre de l’Intérieur, fit connaître aux occupants cette affectation démocratique, ils se déclarèrent satisfaits mais refusèrent néanmoins de céder la place « pour ne pas avoir l’air d’être mis à la porte ». On les autorisa à séjourner encore durant quelques jours sous les lambris dorés des tyrans et, le 9 mars, ils se résignèrent pour la plupart à évacuer le palais où l’on garda seuls les dix-neuf combattants blessés. On en amena d’autres, soignés jusqu’alors dans les hôpitaux des divers quartiers de la ville ; on apporta du Val-de-Grâce des lits qu’on aligna dans les grands appartements ; on les garnit des matelas et du linge trouvés dans les réserves du château et on inscrivit, au-dessus de la grande porte du pavillon central, Hôtel des Invalides civils. Le docteur Leroy, nommé médecin-chef du nouvel hôpital, s’adjoignit les chirurgiens Deguise et Richet, ainsi que plusieurs élèves de l’École de médecine ; il appela comme infirmières les sœurs garde-malades de Bon-Secours ; ces charitables filles eurent bientôt fourni les remèdes, la charpie, les bandes nécessaires au pansement des blessures ; les appartements des princesses furent mis à leur disposition afin qu’elles y pussent vivre en communauté.
Il faut dire que le mot République inspirait, aux survivants de 1793, tant de répugnance et d’épouvante que, tout en s’en qualifiant, le nouveau régime s’efforçait de rassurer les esprits et affectait un profond respect pour la religion et le clergé ; peut-être aussi recourait-il à cet expédient dans l’espoir de refréner l’anarchie menaçante. Voilà qui explique comment le gouvernement provisoire, dont les membres étaient assurément peu dévots, jugèrent indispensable la présence d’un prêtre à l’hôtel des Invalides civils. Un ci-devant aumônier de la reine Marie-Amélie, ayant offert ses services, fut évincé avec horreur ; un autre ecclésiastique, soupçonné d’être affilié à l’ordre des pères Jésuites, ne reçut pas meilleur accueil. Discrètement endoctrinés par les bonnes sœurs, les pensionnaires de l’hospice des Tuileries réclamèrent l’abbé Denys qui, déjà, en avait visité plusieurs lors de leur séjour à l’hôpital de la Charité.
C’était un prêtre aussi adroit que zélé ; dès les premiers jours, il devint le confident et l’ami des émeutiers ; il s’extasiait sur leur vaillance, les traitait en héros, répétant à satiété qu’ils devaient à leur belle conduite l’honneur mérité d’habiter le palais honteusement déserté par la monarchie. Il triompha si bien des préventions éveillées par l’aspect de sa soutane que, le dimanche approchant, ces ouailles improvisées exigèrent une messe solennelle afin de célébrer dignement le jour du Seigneur. Le citoyen Saint-Amant, commandant supérieur du palais, refusait nettement de consentir à cette capucinade ; mais, sur l’ordre du gouvernement, il dut s’incliner. La chapelle étant dévastée, on décida de célébrer le saint sacrifice dans la salle du ci-devant Trône. Le curé de Saint-Roch la consacra selon le rite obligé ; les sœurs s’employèrent à transformer en autel la haute cheminée sur laquelle on déposa, entre des candélabres, le précieux crucifix sauvé par le polytechnicien Potel, et rapporté au château pour la circonstance. Et, au jour dit, l’abbé Denys, en aube de dentelle et en chasuble d’or, commençait les prières de l’office.
Étrange cérémonie, telle que n’en avaient jamais vu les murs de ces Tuileries, témoins pourtant d’événements inouïs. Massés devant l’autel ou couchés dans leurs lits, tous silencieux, ébahis sans doute, les insurgés suivaient l’office dans un recueillement d’autant plus profond, que cette cérémonie présentait pour la plupart d’entre eux, tout l’attrait de l’inédit. Après l’évangile, l’officiant prit la parole et prononça le sermon le plus chaudement révolutionnaire qui fût jamais. « Citoyens, mes frères », commença-t-il ; puis, censurant vertement l’inertie de Louis XIII, l’orgueil de Louis XIV, les débauches de Louis XV, la faiblesse de Louis XVI, le despotisme de Napoléon, l’égoïsme des derniers rois, « aujourd’hui, poursuivit-il, le peuple, vous, citoyens, vous siégez dans ce palais, en princes, en souverains… ». Extrêmement flattés des paroles de ce brave « curé », d’où ils pouvaient inférer que, pour la première fois, les Tuileries étaient habitées par des gens recommandables, les pensionnaires de l’hospice écoutaient sans broncher les bons conseils de l’abbé Denys : « Oui, ce sont des souverains ; mais quel est leur empire ? — Le foyer domestique. — Sur qui règnent-ils ? — Sur leur famille, et ils lui doivent l’exemple des vertus qui ont manqué aux précédents possesseurs de ce palais “maudit”. » Ce thème était riche et pertinent ; les insurgés en subirent le développement avec componction et quand l’homélie fut terminée, quand les bonnes sœurs, donnant le ton et battant la mesure, eurent modulé le cantique
Comment goûter quelque repos
Dans les tourments d’un cœur coupable ?…
Aimable innocence,
Tu ravis mon coeur…
L’asile de ces indomptables champions du désordre a pris bientôt l’allure d’un couvent. L’archevêque vient les voir et les bénir : au début du carême, l’abbé Denys improvise un confessionnal dans l’embrasure d’une fenêtre du salon où Louis-Philippe réunissait le Conseil des ministres ; le prie-Dieu de la reine Marie-Amélie est disposé pour le pénitent ; le prêtre prend place dans le fauteuil qui avait servi au roi et plus de soixante-dix de ses ouailles viennent pieusement s’agenouiller devant lui. Plusieurs de ces mécréants repentis avaient pris femme sans même songer à passer par l’église ; touchés par la contrition, comme jadis Joséphine en ce même palais, ils avouèrent leur négligence à l’abbé Denys qui s’empressa de remplir les formalités et d’obtenir les dispenses nécessaires à ces régularisations. Pendant ces préliminaires, on mettait la chapelle du château en état d’être rendue au culte, et alors seulement, on put constater la disparition des objets précieux composant le trésor de ce royal sanctuaire. Une bande de pillards, formée en grande partie d’Anglais et d’Allemands, ayant réuni une forte troupe d’insurgés, sous le prétexte de sauvegarder ces richesses et d’en défendre les approches, entassa sur des brancards « tout ce qui pouvait y tenir » et, sous la protection des naïfs émeutiers, sortit du château sans difficultés, en réclamant le passage au nom du peuple souverain. Ainsi, indépendamment des vases sacrés, — dont plusieurs provenaient des trésors de Charlemagne et de saint Louis, — furent enlevés des flambeaux d’argent massif, des chasubles, des chapes en drap d’or brodées de pierreries, des reliquaires antiques merveilleusement ciselés, des missels à reliures anciennes ; et on y avait joint le trousseau entièrement neuf de la duchesse de Montpensier, cachemires de l’Inde, dentelles, soieries non confectionnées, bijoux, pièces d’argenterie…
Il fallut donc emprunter à Saint-Roch les objets et les ornements indispensables afin de regarnir la chapelle ci-devant royale ; on la meubla de ce qui restait des fauteuils, banquettes et tabourets glanés dans les divers appartements du château et, le 14 avril, dix couples, assistés de leurs témoins, de leurs parents et accompagnés de leurs enfants, reçurent la bénédiction nuptiale : un blanchisseur et une ouvrière ; un maçon et une marchande ; un doreur sur métaux et une brunisseuse, ainsi des autres, auxquels le destin narquois ménageait cette aventure invraisemblable d’être mariés dans ce sanctuaire jusqu’alors réservé aux plus augustes, aux plus puissants et aux plus nobles des grands de la terre. Le gouvernement provisoire, soucieux de marquer son approbation à ce démocratique revirement, s’y associa par un grand repas qu’il fit servir aux nouveaux époux, à leurs témoins et à leur famille. On délogea de la galerie de Diane les lits des blessés et on y dressa une table de cent couverts ; on rassembla les fines bouteilles échappées aux investigations des pillards ; l’abbé Denys, qui prit sa part du banquet, assure que la séance fut longue : « Il y régna la plus franche cordialité et une gaîté qui faisait plaisir à voir. » La charité chrétienne et son enthousiasme pour ses chers blessés l’aveuglent au point d’assurer « qu’il y a bien peu de repas de corps, dans les plus hautes régions, où il se fasse une aussi grande dépense d’esprit qu’il en fut fait ce jour-là ».
On comprend que ces braves gens, si magnifiquement hospitalisés, si comblés de prévenances et si bien nourris, n’étaient pas pressés de déménager du palais des rois. Ils prouvèrent qu’ils s’y trouvaient bien, lors des terribles journées de juin, quand, l’insurrection devenue de nouveau maîtresse d’une partie de Paris, une foule assez houleuse envahit la place du Carrousel. Les pensionnaires de l’abbé Denys jurèrent de mourir plutôt que d’abandonner, comme Louis-Philippe, le château conquis par leur vaillance et s’apprêtèrent à le défendre contre l’émeute qui, quatre mois auparavant, leur en avait assuré la possession. Les gardes nationaux formant la garnison du palais montrèrent également tant de zèle à en barrer l’accès, qu’ils ouvrirent, à l’aveuglette, le feu sur un bataillon composé de leurs camarades de la milice bourgeoise et les foudroyèrent impitoyablement, croyant tirer sur des insurgés. Il s’ensuivit une telle confusion que, ineptes fusilleurs et fusillés survivants, pris de panique, se ruèrent sur le château pour y trouver un refuge, gravissant à toutes jambes les escaliers et gagnant les combles, en quête d’un recoin ténébreux où ils pussent se tapir ; « plusieurs montèrent dans les cheminées… ».
Cet incident tragique doubla le nombre des hospitalisés et comme les lits faisaient défaut, on réunit tout ce que l’on put découvrir de tapisseries, de coussins, de rideaux, de divans ; tandis qu’on étendait les blessés du jour sur ces couches improvisées, l’une des religieuses, la sœur Sainte-Marie, parvenait à rétablir le calme parmi cette population éperdue et à lui rendre la confiance en démontrant que l’insurrection n’avait jamais menacé les Tuileries ; une fatale erreur était la seule cause de la bagarre qui venait d’ensanglanter le Carrousel.
De tous les épisodes de l’histoire des Tuileries durant ce singulier interrègne, celui qui paraît avoir davantage frappé les contemporains fut la mort de l’un des insurgés, un allumeur de réverbères, dont il ne serait pas impossible de retrouver le nom. C’était un solide gaillard de trente-sept ans, soigné au château depuis le 24 février, bien qu’il eût reçu seulement, au cours de la bataille, quelques égratignures très rapidement cicatrisées. Pourtant, il dépérissait à vue d’œil ; il souffrait de suffocations et ne pouvait s’alimenter que de quelques cuillerées de bouillon qu’il avait peine à digérer. Il trépassa enfin et nul n’en fut plus étonné que le docteur Leroy qui n’avait jamais considéré ce cas comme inspirant la moindre inquiétude.
Les camarades de ce malheureux n’étaient pas cependant sans soupçonner quelque chose : le bruit courait dans l’hôpital que ce pauvre diable, entré l’un des premiers aux Tuileries, y avait fait main basse sur quelques beaux diamants qu’il comptait bien s’approprier. Quand on annonça que les voleurs seraient fusillés, il prit peur, ne résolut pas néanmoins de renoncer à son butin ; mais, n’osant affronter, dans la crainte d’être fouillé, les gardiens postés aux grilles, il n’imagina d’autre stratagème que celui d’avaler les diamants « avec leurs montures », se fiant à la solidité de son estomac et espérant les retrouver bientôt… Rien ne passa et, se figurant qu’on le fusillerait, s’il déclarait la nature de son mal, il s’obstina à se taire et cette discrétion causa son décès.
Certains indiscrets, ayant vent de la chose, insinuèrent, avec des clignements d’œil, que l’allumeur de réverbères était mort « de la pierre ». Mais, comme il fallait, avant tout, sauver l’honneur des invalides civils, ses amis, possédant probablement son secret, s’opposèrent avec énergie à l’autopsie, alléguant qu’ils réservaient la dépouille de leur frère d’armes à de pompeuses funérailles. En vain les médecins insistaient sur l’intérêt commun, certifiant que l’examen auxquels ils procéderaient ne nuirait aucunement à la solennité des obsèques, ils n’obtinrent rien des confidents du défunt qui prétextèrent une cérémonie grandiose dont ils avaient conçu le projet. Ils consentirent à l’embaumement du cadavre, mais « par injection et sans qu’il fût ouvert ». Préparé de la sorte, ce pauvre homme qui, par une étonnante aventure était mort dans le palais des rois, « fut vêtu magnifiquement de la tête aux pieds » ; on se cotisa pour lui acheter des yeux de verre que posa un oculiste ; ainsi maquillé, on l’assit dans un fauteuil que l’on posa sur l’estrade du trône, drapée d’opulentes tentures noires ; puis, on ouvrit les portes du château, en invitant le peuple à défiler « devant cet enfant d’ouvriers que la mort avait conduit au trône ».
On imagine la bousculade. Elle ne prit fin qu’à l’heure des obsèques dont l’abbé Denys donne le détail : « Le char splendidement décoré » était traîné par six chevaux caparaçonnés de deuil, avec panaches noirs au fronteau. Le cortège passa sous l’arc de triomphe du Carrousel, entre deux haies de troupes, au son lugubre des roulements de tambour, et gagna Saint-Germain-l’Auxerrois. L’église était tendue du pavé aux voûtes, ornée de drapeaux, ainsi que le prescrit le protocole pour les funérailles d’un maréchal de France ; catafalque monumental, flammes vertes, lamentos chantés « par les meilleurs artistes », hymnes funèbres, rien n’y manqua, pas même, au cimetière du Père-Lachaise, la fusillade sur la tombe, suivant l’usage du temps, dans une concession offerte par l’État…
Ne croirait-on pas lire un de ces contes moraux si fort en vogue au XVIIIe siècle ? Ce pauvre, poussé par une tourmente dans un palais encombré de richesses et mourant, sans oser l’avouer, de cette fortune qui l’étouffe comme un remords matérialisé ; le fait est si frappant que l’on a peine à le croire vrai. On suit ici, presque textuellement, le récit de l’abbé Denys, témoin oculaire de ces scènes étranges où il tint lui-même un rôle et auxquelles il consacre tout un chapitre de son livre[33], empreint d’une discrétion et d’une réserve tout ecclésiastiques. Il s’efface avec une égale modestie quand, parvenu au dénouement de son histoire, il nous conte sa dernière entrevue avec ses blessés : c’était le 15 août 1848. Les invalides civils devaient, le lendemain, évacuer le château ; avant de se séparer des bonnes sœurs, ils remirent à la sœur Sainte-Marie, la supérieure, dont on célébrait la fête ce jour-là, une magnifique croix pectorale, achetée par souscription et que l’archevêque avait bénite ; et, à chacune des religieuses, ils offrirent une médaille commémorative de leur admiration et de leur gratitude. Quant à l’aumônier, la reconnaissance de ses paroissiens d’occasion se manifesta d’une façon plus éclatante ; ils lui apprirent qu’il était leur candidat à l’Assemblée législative : ils menaient, à son insu, une active campagne électorale qui eut pour effet de lui récolter « plusieurs milliers de voix » émanées de citoyens dont les opinions plus qu’avancées étaient certainement, sur tous les points, en désaccord complet avec celles du digne ecclésiastique ; mais ses pensionnaires se souvenaient de son sermon révolutionnaire et en concluaient qu’il était un pur.
L’abbé Denys, par chance, ne fut pas élu ; il échappait ainsi à la difficile obligation de se poser à la Chambre en défenseur et en porte-parole des insurgés. À quelque temps de là, il était nommé à la cure de Saint-Éloi et c’est à son zèle que Paris doit la construction de l’église élevée sous le vocable du saint orfèvre de Dagobert.
- ↑ Journal d’Apponyi, II, 65.
- ↑ Madame Adélaïde dut quitter plus tard cet appartement pour prendre possession du rez-de-chaussée du pavillon de Flore. C’est là qu’elle mourut en 1847. Le Drame des Tuileries, par le citoyen Saint-Amant, mai 1848, p. 31.
- ↑ Journal d’Apponyi, II, 65.
- ↑ Chartres, né en 1810 ; Nemours, en 1814 ; Joinville, en 1818 ; Aumale, en 1822 ; Montpensier, en 1824 ; Louise, en 1812 ; Marie, en 1813 ; Clémentine, en 1817.
- ↑ Souvenirs du général comte de Rumigny, 1789-1850, publiés par M. Gouraud d’Ablaincourt, passim.
- ↑ La comtesse de Boigne, Mémoires, IV, 160.
- ↑ Apponyi, Journal, 22 décembre 1831. — « Louis-Philippe, l’autre jour, revenait à pied de Neuilly avec un de ses commensaux : vieux habits, vieux chapeau, parapluie passé sous le bras, sale et crotté jusqu’à l’échine. Ils ont traversé le jardin des Tuileries dans ce brillant costume, saluant pour se faire remarquer des passants qui ne leur rendaient pas, entendant les moqueries sur cette ridicule parade, ayant tout à fait manqué le but de ce bel acte de popularité. »
- ↑ Alphonse Karr, Les Guêpes, janvier 1840.
- ↑ Alphonse Karr, Les Guêpes, mars 1840.
- ↑ Le Charivari, 1835.
- ↑ Prince de Joinville, Vieux souvenirs, 277.
- ↑ Joseph Durieux, Le Ministre Pierre Magne, 1806-1879, d’après ses lettres et ses souvenirs.
- ↑ Le coup de pistolet de Bergeron qui, avec son complice Benoît, fut acquitté, faute de preuves.
- ↑ Apponyi, Journal, II, 286.
- ↑ Comédie-vaudeville, par Dumanoir, Mallian et Lhérie, représentée au théâtre des Variétés, 1831.
- ↑ Il en subsiste, à l’entrée de l’allée de Méléagre, une petite partie qui se trouvait en dehors du jardin privé de Louis-Philippe.
- ↑ Théodore Muret, L’Histoire par le théâtre, III, 177.
- ↑ Journal de Victor de Balabine, secrétaire de l’ambassade de Russie, publié par Ernest Daudet.
- ↑ De Boigne, Mémoires, IV, 390.
- ↑ Le Drame des Tuileries, p. 33.
- ↑ Maxime Du Camp, Souvenirs de 1848, passim.
- ↑ La République dans les carrosses du roi, par Louis Tirel, ex-contrôleur des équipages de Sa Majesté, 1850, p. 95.
- ↑ Souvenirs du 24 février, par Carjat. Nouvelle revue, 1er mars 1906.
- ↑ Imbert de Saint-Amand, La Révolution de 1848, p. 289.
- ↑ La République dans les carrosses du roi, p. 91.
- ↑ Le Drame des Tuileries, par Saint-Amant, 35.
- ↑ La République dans les carrosses du roi, 84.
- ↑ Le Palais des Tuileries en 1848, par l’abbé Denys, curé de Saint-Éloi, 1869.
- ↑ La Révolution de 1848, par Imbert de Saint-Amand, p. 201.
- ↑ Potel mourut en 1909, inspecteur général des Ponts et chaussées. Le crucifix qu’il sauva du sac des Tuileries est resté à Saint-Roch où il est placé dans la sacristie. Note biographique sur Ernest Potel, par son fils Raoul Potel, inspecteur des Eaux et forêts, 1910.
- ↑ Le Palais des Tuileries, par l’abbé Denys, p. 61.
- ↑ Mémoire biographique de Leroy d’Étioles, 1796-1860, pour servir à l’histoire de la médecine.
- ↑ Le Palais des Tuileries en 1848, p. 116 et s.