Les Souspirs amoureux de François Beroalde de Verville 1589/Au plus creux de mon cœur je retien enfermee

XVIII.


Au plus creux de mon cœur je retien enfermee
La douce passion dont je vis icy bas :
Et de ces yeux divins les bien-heureux appas
Font que dedans mon sang ma vie est animee,

D’un si benin glaçon mon ame est enflammee,
De discords si plaisans je resens les debats,
Par les effets d’amour, que je ne voudrois pas
Esteindre cette guerre en mon ame frmee.

Plustost je veux tousjours renouveller en moy
L’agreable soucy de mon heureux esmoy,

Pour vivre ainsi constant que mon cœur le desire,

Encores crains-je, helas ! de mourir sans souffrir
La peine, & le soucy qu’il me plaist de sentir
Adorant les beautez qu’en mon ame j’admire.