Les Quatre livres/Préface du traducteur

(attribué à)
Traduction par Séraphin Couvreur.
Imprimerie de la mission catholique (p. v-vii).

PRÉFACE.

Les Quatre Livres sont la Grande Étude, l’Invariable Milieu, les Entretiens de Confucius et de ses disciples, et les Œuvres de Meng tzeu. Ils forment avec les cinq King la base de l’enseignement classique. Les cinq King sont le Cheu King ou Recueil des Poésies, le Chou King ou Anciennes Annales de l’Empire, le Li Ki ou Mémorial des Devoirs et des Cérémonies, et le Tch’ouenn Ts’iou ou Annales particulières de la principauté de Lou. La Grande Étude et l’Invariable Milieu sont des parties détachées du Li Ki.

Un grand nombre de commentateurs ont expliqué les livres classiques. Le plus en vogue est 朱熹 Tchou hi, né en 1130 et mort en 1200. Il est le coryphée de l’école fondée par les deux Tch’eng tzeu, sous la dynastie des Soung. Les deux Tch’eng tzeu étaient frères. L’aîné, 程顥 Tch’eng Hao vécut de 1032 à 1085 ; et le second, 程頤 Tch’eng I, de 1033 à 1107.

Tous les écoliers ont entre les mains les 四書章句 Seu Chou tchang kiu Quatre Livres revus, mis en ordre, divisés en chapitres et annotés par Tchou Hi, et les 四書備旨 Seu Chou pei tcheu Explication complète des Quatre Livres.

Les Seu Chou pei tcheu contiennent : 1° les annotations tchou des Seu Chou tchang kiu de Tchou Hi ; 2° une paraphrase kiang, à la fois claire et élégante, entièrement conforme au commentaire de Tchou Hi ; 3° une analyse des chapitres et des paragraphes ; 4° des notes philologiques, historiques et géographiques. Cet ouvrage, composé par 鄧林 Teng Lin, sous la dynastie des Ming, a été publié en 1779 avec des additions importantes par 杜定基 Tou Ting ki, et continue d’être réédité sous le titre de 四書補註附考備旨 Seu Chou pou tchou fou k’ao pei tcheu Explication complète des Quatre Livres revue et augmentée.

Nous avons reproduit le plus fidèlement possible l’interprétation et les principaux développements donnés dans ce manuel scolaire.

La notice placée en tête des Œuvres de Meng tzeu est tirée de la collection des auteurs classiques 十三經註疎 Cheu san King tchou chou. La remarque citée à la page 479 sur l’éducation est du 日講四書解義 Jeu kiang Seu Chou kiai i, Paraphrase ou Explication quotidienne des Quatre Livres faite à l’empereur par ses maîtres et publiée par ordre de K’ang Hi.

Toutes les autres notes imprimées en petites lettres chinoises se trouvent dans les Seu Chou pei tcheu. La plupart sont de Tchou Hi. En les lisant, l’étudiant s’habituera à consulter et parviendra bientôt à comprendre par lui-même les commentaires et les ouvrages modernes du Céleste-Empire. Il aura soin de lire à la fois les deux traductions, en français et en latin, parce que souvent l’une contient des éclaircissements qui ne sont pas dans l’autre. La liste des souverains de la Chine et le vocabulaire placés à la fin du volume lui donneront des renseignements historiques et géographiques, et la valeur exacte des termes.

Dans l’intérêt des commençants, il a paru bon de figurer en lettres européennes la prononciation des caractères chinois.

Les Quatre Livres sont ici rangés dans l’ordre adopté communément. Si quelqu’un préfère étudier les Œuvres de Meng Tzeu ou le Liun iu avant le Ta Hio ou le Tchoung Ioung, qui offrent plus de difficultés, il le pourra sans inconvénient, à l’aide des renvois marqués dans le vocabulaire.

Dans les écoles, l’étude des monuments littéraires de l’antiquité précède naturellement celle des chefs-d’œuvre des âges suivants. Car les écrivains se sont toujours approprié, et continuent de s’approprier et de fondre dans leurs périodes les expressions des anciens livres, comme les prédicateurs dans leurs discours emploient celles de l’Écriture-Sainte.

Les auteurs anciens nous font connaître les idées qui de tout temps ont été comme l’âme de ce peuple, les principes qui ont toujours régi et régissent encore l’individu, la famille et la société. En Chine, les siècles passent ; les traditions, les coutumes demeurent sans altération notable.

L’étude de la littérature est particulièrement recommandée aux missionnaires, qui, pour attirer les infidèles et les préparer à recevoir les enseignements chrétiens, comme S. Paul devant l’Aréopage, mettent d’abord en relief les vérités qui se sont conservées d’âge en âge au sein même du paganisme. « Quo vero iidem Evangelii præcones magis idonei fiant ad populus illos ad fidem adducendos, neque tantum ad plebem, verum et ad homines superioris conditionis Christi religione imbuendos,… (S. Congregatio) mandat ac præcipit ut in singulis quinque regionibus,… speciale studium ac veluti Academia sinensis linguæ erigatur, et ex singulis vicariatibus… missionarii designentur qui ad hujusmodi litteraturam serio incumbant… » (S. Congr. de Prop. Fide, die 18 octobris 1883).

Le Souverain Pontife Léon XIII, sans vouloir aucunement sanctionner toutes les inventions du P. de Prémare, a loué hautement sa méthode, ses recherches, et le travail de ses éditeurs. « Gratulamur idcirco vobis, Dilecti Filii, qui usi doctis disquisitionibus præterito saeculo institutis ab altero e Patribus Societatis Jesu missionariorum munere functis iis in regionibus, novaque diligentia versatis sacris Sinarum libris vetustorumque sapientum operibus, clara ex ipsis vestigia duxistis dogmatum et traditionum religionis nostræ sanctissimæ ; quæ doceant eam jamdiu nuntiatam fuisse illis regionibus, et antiquitate sua longe excedere scripta sapientium e quibus Sinæ religionis suæ normam ducunt et documentum. » (Datum Romæ, die 12 augusti 1878).

Ho kien fou, le 1 mai 1895.