Les Quatre Saisons (Merrill)/Solitude

Les Quatre SaisonsSociété du Mercure de France (p. 26-27).

SOLITUDE

On dit que des rois morts ont foulé ce sentier
Qui mène au banc de pierre où nous aimons nous asseoir,
Alors que sur la solitude tombe la paix du soir
Et que nos cœurs sont pleins de chants muets, comme des psautiers.

De ce rocher on vit, sous les fanfares de la conquête,
La plaine se hérisser soudain d’épis de fer,
Et des multitudes, revenues des étés et des hivers,
Rouler comme un fleuve rouge vers la grande ville en fête.


Mais ni la chevauchée ensoleillée sous les bannières,
Ni le doux tonnerre des tambours dans le printemps,
Ni le cri des clairons dressés en corolles d’or,

Ne valent ce silence où notre fatigue s’endort,
Et la caresse des ombres qu’entremêlent les vents
Et la minute éternelle de notre baiser, cette prière !