Les Plantes potagères/Pois gris

Vilmorin-Andrieux
Vilmorin-Andrieux & Cie (p. 474-476).
POIS GRIS


Pisum sativum L. var. arvense. — Pisum arvense L. ?


Synonymes : Bisaille, Pisaille, Pois à fourrage, P. de brebis, P. des champs.
Noms étrangers : angl. Field grey peas. all. Feld graue Erbsen. ital. Piselli grigi da foraggio. esp. Guisantes pardos, Chicharos.


Malgré l’autorité de Linné, nous avons bien de la peine à considérer les pois à fleur violette, communément cultivés pour fourrage, comme appartenant à une autre espèce botanique que les pois à fleur blanche des cultures potagères ; ou plutôt nous doutons que la plante uniflore rencontrée sauvage dans les terres cultivées soit bien le pois gris, que tous ses caractères rapprochent si visiblement du pois cultivé. Il présente, en effet, toutes les mêmes particularités de végétation, de la levée à la maturité, varie sous tous les rapports parallèlement aux autres pois, et ne s’en distingue en somme que par la couleur de sa fleur, dont les ailes sont rougeâtres et l’étendard violacé. Or, une différence de couleur dans la fleur, surtout si l’une des formes considérées est à fleur blanche, ne saurait être regardée comme spécifique. Des modifications de cette sorte s’observent tous les jours dans la plupart des plantes cultivées, et, pour ne pas chercher d’exemples en dehors des légumineuses, les haricots et les fèves présentent constamment des variations analogues dans la couleur de leurs fleurs et de leurs graines. Les pois à fleur violette présentent, comme les autres, des variétés à rames et des variétés naines, de hâtives et de tardives, d’uniflores et de biflores ;

enfin les unes sont pourvues et les autres dénuées de membrane parcheminée à l’intérieur de la cosse. La couleur du grain est variable : tantôt il est verdâtre ou roux et de teinte uniforme, tantôt moucheté de rouge ou de brun sur un fond plus clair.

Comme pois fourragers, ce sont les formes les plus grandes, les plus vigoureuses et les plus ramifiées qui sont recherchées de préférence aux autres. On en cultive surtout trois variétés : le P. gris de printemps et le P. perdrix, qui se sèment après l’hiver ; et le P. gris d’hiver, qu’on peut semer dès l’automne. Il va de soi qu’on ne peut penser à soutenir au moyen de rames des pois fourragers. On leur fournit ordinairement un point d’appui en semant en même temps qu’eux du seigle ou des variétés d’avoine à forte tige, en choisissant, bien entendu, des variétés supportant l’hiver, quand le semis se fait à l’automne.

La durée germinative des pois à fleur violette est la même que celle des pois à fleur blanche, c’est-à-dire de trois ans au moins.


POIS GRIS DE PRINTEMPS.


Plante très vigoureuse, très ramifiée, à tiges longues et minces, d’un vert pâle, pouvant s’élever jusqu’à 2 mètres de hauteur, garnies de feuilles nombreuses, de grandeur médiocre, abondamment maculées de gris clair. Les fleurs, violettes à étendard gris violacé, sont toujours réunies par deux ; elles sont petites et deviennent verdâtres en se fanant. Les premières apparaissent vers le dix-huitième ou le vingtième nœud, juste au-dessus du point de départ des ramifications, qui sont au nombre de trois ou de quatre et parfois presque aussi hautes que la tige principale. Un seul pied, bien venu, peut porter jusqu’à soixante ou quatre-vingts cosses, qui sont petites et étroites et s’ouvrent souvent d’elles-mêmes à la maturité. Elles contiennent de cinq à sept grains un peu anguleux, rougeâtres ou légèrement bronzés. Les grains secs pèsent 790 grammes par litre, et 10 grammes en contiennent 70 en moyenne.

Nous en avons observé, en Auvergne, une sous-variété dont les fleurs sont assez souvent réunies par trois, mais qui ne présente, en dehors de cette particularité, aucun caractère remarquable.


POIS PERDRIX.


Noms étrangers : angl. Partridge pea, Maple P., Marlborough P.


Cette variété est complètement distincte du P. gris de printemps, bien qu’on l’emploie à peu près dans les mêmes conditions. La taille en est presque la même, mais les tiges sont beaucoup plus grosses et plus épaisses dans le P. perdrix ; le feuillage et surtout les stipules sont très amples et les nœuds sont plus espacés que dans le P. gris de printemps ; les tiges sont aussi moins ramifiées. Les fleurs, à ailes violet clair et à étendard gris bleu veiné de violet foncé, sont grandes et quelquefois, quoique rarement, solitaires. Elles commencent à paraître vers le quinzième ou le seizième nœud, sensiblement plus tôt, par conséquent, que dans le P. gris de printemps. Elles font place à des cosses plus longues et plus larges que celles de ce dernier pois et contenant des grains larges, aplatis, un peu carrés, abondamment mouchetés de rouge brun sur fond chamois. Un litre de grains secs pèse 680 grammes, et 10 grammes ne contiennent que 50 grains.

Le P. perdrix est un peu plus productif en fourrage que le P. gris de printemps, mais il est plus délicat et demande une terre plus riche et un climat plus égal. On le cultive surtout en Angleterre et dans l’ouest de la France.


POIS GRIS D’HIVER.


Observé au moment de la floraison, quand il a pris tout son développement, ce pois ne paraît pas différer du P. gris de printemps : il a la même taille, le même port et tous les mêmes caractères. Mais, examiné au début de la végétation, il présente des particularités qui lui sont propres et qui permettent de le distinguer sûrement de tous les autres pois. La jeune tige, en effet, au lieu de se dresser dès sa sortie de terre, s’applique et s’étend sur le sol et donne immédiatement naissance à des ramifications qui s’étalent également sur terre. Toutes ces jeunes pousses sont garnies de stipules situées à la base de feuilles rudimentaires, stipules très rapprochées les unes des autres et si petites, qu’il est difficile, à première vue, de se persuader qu’elles appartiennent à un pois. La plante reste dans cet état pendant toute la durée des grands froids, et ce n’est qu’au mois de mars que les tiges commencent à grossir, à se redresser et à se garnir de feuilles développées d’une façon normale. Il arrive souvent que la tige principale s’atrophie complètement et que les ramifications partant du pied de la plante prennent seules de l’accroissement. A partir de ce moment, les caractères de la plante sont entièrement les mêmes que ceux du P. gris de printemps, pourtant le grain est d’ordinaire plus petit, plus rond et d’une teinte plus verdâtre dans le P. gris d’hiver.

Semé au printemps, le P. gris d’hiver commence aussi par s’étaler sur terre et par produire des tiges toutes minces et portant de petites stipules ; mais ce premier état dure peu, et bientôt le pois se développe comme les pois de printemps ; il reste néanmoins plus tardif que toutes les autres variétés. Un litre de grains secs pèse 810 grammes, et 10 grammes contiennent en moyenne 80 grains.

En France, on ne distingue guère que les trois variétés de pois fourragers dont nous venons de parler ; tout au plus en existe-t-il quelques races locales dont les caractères s’écartent très légèrement de ceux de l’une ou de l’autre des précédentes. En Angleterre, au contraire, il en existe quelques variétés bien distinctes, dont les suivantes sont les principales :

Hastings grey pea. Variété aujourd’hui peu répandue, ressemblant au P. Warwick grey, mais notablement plus tardive.

Rounceval grey pea. Le plus grand et le plus tardif des pois fourragers, mais en même temps le plus productif après le P. perdrix. Il a le grain déprimé et presque ridé, de couleur chamois, avec l’ombilic noir.

Warwick early grey pea. Sous-variété du P. gris de printemps, plus hâtif que lui d’environ trois semaines, et en même temps bien productif, quoique de petite taille. Le grain en est rougeâtre moucheté de brun.