Les Plantes potagères/Chicorée sauvage
Indigène. — Vivace. — Feuilles radicales, d’un vert foncé, sinuées, à lobes aigus, dentés ou découpés, à côtes étroites, velues, souvent rougeâtres ; tiges de lm,50 à 2 mètres, cylindriques, pubescentes, vertes ou rougeâtres, à rameaux étalés ; fleurs bleues, grandes, presque sessiles, axillaires. Graine ordinairement plus petite, plus brune et plus luisante que celle de la chicorée endive ; au nombre d’environ 700 dans un gramme et pesant 400 grammes par litre. Sa durée germinative est de huit années.
La Ch. sauvage, commune presque partout à l’état spontané, a été employée de tout temps comme salade et plante médicinale. La culture en rend le produit plus abondant et en améliore la qualité en atténuant l’amertume des feuilles. Forcée l’hiver, à l’abri de la lumière, la Ch. sauvage ordinaire fournit un produit très estimé sous le nom de Barbe-de-capucin ; une de ses variétés cultivées donne, dans les mêmes conditions, un légume très apprécié en Belgique, où il est connu sous le nom de Witloof.
Culture. — La Ch. sauvage ordinaire est d’une culture extrêmement facile. On la sème au printemps en place, en rayons et le plus souvent en bordure ; le semis se fait d’ordinaire très dru : les feuilles de chicorée sont par suite très serrées les unes contre les autres. On les récolte au fur et à mesure des besoins, en les coupant un peu au-dessus de terre avec une faucille ou un couteau ; elles peuvent être ainsi coupées plusieurs fois dans l’année. Il est bon de faire chaque année de nouveaux semis et de détruire les anciens, dont le produit diminue et qui tendent à monter à graine.
Chicorée sauvage ordinaire (Barbe-de-capucin). réd. au sixième. |
Pour produire la Barbe-de-capucin y on se sert de plantes semées assez clair en pleine terre vers le mois de juin. A l’entrée de l’hiver, on les arrache, on coupe les feuilles à 0m,01 environ au-dessus du collet de la racine ; puis on monte, dans un endroit obscur et dont la température n’est pas trop froide, des sortes de talus composés de lits alternatifs de sable ou de terre saine, et de racines de chicorée, qu’on a soin de placer la tête ou le collet en dehors, de telle sorte que les feuilles puissent se développer librement. On arrose légèrement si la terre employée parait trop sèche, puis on laisse le tas à lui-même, et au bout de trois semaines environ, si la température n’est pas trop basse, on peut récolter des feuilles longues de 0m,20 à 0m,25. Depuis quelques années, on a commencé, aux environs de Paris, à employer pour ce genre de culture la chicorée à grosse racine, qu’on laisse parvenir à la grosseur du doigt avant de la forcer. Ces racines, bien droites et bien régulières, sont faciles à placer en tas, et les feuilles en sont généralement plus larges et plus vigoureuses que celles de la Ch. sauvage ordinaire.
Usage. — On mange les feuilles en salade, soit à l’état naturel, soit blanchies par étiolement ; hachées en lanières étroites et assaisonnées à l’huile et au vinaigre, elles sont très employées dans certains pays comme assaisonnement du bœuf bouilli.
Cette variété se distingue par le développement de sa racine, qui est renflée, droite, et atteint une longueur de 0m,30 à 0m,35, sur 0m,04 ou 0m,05 de diamètre au niveau du sol. C’est celle qui est employée dans l’industrie pour la préparation du café de chicorée. Ce produit s’obtient par la torréfaction des racines, qui sont débitées en tranches minces, puis grillées et pulvérisées. La culture de la chicorée à café est surtout répandue en Allemagne, en Belgique et dans le nord de la France.
On en distingue deux variétés bien nettement tranchées :
Chicorée à grosse racine de Brunswick. réd. au cinquième. |
Chicorée à grosse racine de Magdebourg. réd. au cinquième. |
Celle de Brunswick, qui a les feuilles très découpées, divisées comme celles d’un pissenlit et plus ou moins complètement étalées, et celle de Magdebourg, dont les feuilles sont au contraire entières et tout à fait dressées. Cette dernière passe pour être la plus productive des deux races. Les racines en sont plus longues et plus grosses, quoique un peu moins régulières de forme. Il n’est pas rare d’en voir dont le poids atteint 4 et 500 grammes et dont l’apparence se rapproche beaucoup de celle des betteraves blanches à sucre de petite race, telles que les betteraves allemandes, quand elles ont été cultivées serrées.
Comme nous l’avons dit plus haut, la Ch. sauvage à grosse racine est souvent employée pour la production de la Barbe-de-capucin.
Cette plante peut être considérée comme une sous-variété de la Ch. à grosse racine de Magdebourg. Son principal mérite consiste dans la largeur de ses feuilles et dans le grand développement de leurs côtes. Elle produit, au moyen d’une culture que nous allons indiquer, le légume appelé Witloof en flamand, que nous avons mentionné plus haut. Il se compose de la réunion, en une sorte de pomme analogue à un cœur de romaine, des feuilles de la plante forcée, artificiellement blanchies.
Culture. — Pour obtenir de belles pousses de Witloof, il faut soumettre à la
Ch. à grosse racine de Bruxelles (Witloof). réd. au tiers. |
Si l’on veut faire entrer immédiatement les racines en végétation, on étend sur la surface qu’on veut forcer un lit de fumier dont l’épaisseur doit varier selon la nature même du fumier et la température régnante, mais ne doit pas être inférieure à 0m,40 ni supérieure à 1 mètre. Au bout d’un mois à peu près, la pousse sera développée ; on enlève alors le fumier, on déterre la racine, et l’on en détache la pomme blanchie avec une portion du collet.
On a essayé, avec un certain succès, de chauffer de nouveau les racines ainsi traitées ; il se développe alors tout autour de la plaie faite au collet de la racine de nouvelles pousses assez nombreuses, composées chacune d’un certain nombre de feuilles qui donnent un produit intermédiaire, comme aspect, entre le Witloof et la Barbe-de-capucin ordinaire.
Usage. — Le Witloof s’emploie cru en salade et aussi en légume cuit, comme les chicorées frisées.
Plante différant beaucoup, comme aspect, de la Ch. sauvage ordinaire,
Chicorée sauvage améliorée. réd. au huitième. |
C’est une variation de la précédente, à feuilles maculées et flagellées de rouge, qui paraît brun sur les feuilles développées au grand air, mais qui reprend toute sa vivacité de coloris sur celles qui se sont développées dans l’obscurité. Cette panachure, qui est très vive, fait de cette plante une très jolie salade quand elle a été blanchie artificiellement.
Cette variété, très curieuse par l’aspect de ses feuilles, qui sont très finement découpées, laciniées et frisées, paraît tenir, jusqu’à un certain point, de la Ch. endive. Il y a aussi d’autant plus de motifs de supposer qu’elle provient d’un croisement entre les deux espèces, qu’elle est d’une variabilité extrême, que les feuilles en sont souvent presque entièrement glabres, et qu’elle ne paraît pas aussi complètement rustique que les autres formes jardinières de la Ch. sauvage.
M. Jacquin aîné, qui s’est occupé avec constance et succès de l’amélioration de la chicorée sauvage, a réussi autrefois à fixer assez complètement un certain nombre d’autres formes qu’il désignait sous les noms de Ch. sauvage améliorée demi-fine ; demi-fine à feuilles jaunes ; demi-blonde, forme de laitue pommée ; brune, forme de laitue pommée.
Nous ne croyons pas que la culture de ces diverses races ait été continuée après lui.