Les Pensées d’une reine/L’Amour

Calmann Lévy (p. 51-58).

III

L’AMOUR


I

Les enfants de l’amour sont généralement beaux et intelligents. Quelle critique de nos ménages modèles !


II

Le soleil est le premier amoureux de la fleur. Pour les jeunes filles, le soleil est quelquefois une lampe à demi éteinte. Comment voulez-vous qu’elles s’épanouissent ?


III

Un amour malheureux est, pour l’homme, un prétexte de plaisir sans amour.


IV

Le pardon est presque de l’indifférence : on ne pardonne pas quand on aime.


V

Vous haïssez une femme malheureuse que vous auriez voulu consoler.


VI

L’amour est comme l’écureuil, hardi et timide à la fois.


VII

L’amoureux ressemble à l’autruche : il croit qu’on ne le voit pas, lorsqu’il ne voit pas les autres.


VIII

On pardonne à l’adultère, quand son bâtard est un génie.


IX

L’amour maternel est un instinct ; mais il y a des instincts qui ont un souffle de divinité.


X

On ne devient pas mère ; on l’est de naissance. La famille nombreuse satisfait la vocation ; elle ne la donne pas.


XI

Une maison sans enfants est comme une cloche sans battant. Le son qui dort serait bien beau, s’il y avait quelque chose pour le réveiller !


XII

La jalousie de celui qu’on aime est un hommage ; de votre mari, c’est une offense.


XIII

Le chant du rossignol et le miaulement des chats sont deux manières d’exprimer le même sentiment ; mais, entre eux, ils ne se comprennent guère.


XIV

Entre mari et femme on devrait toujours se faire un brin de cour.


XV

Étant réellement humble, on ne saurait être jaloux ; on s’en prendrait toujours à soi-même d’être moins aimé.


XVI

L’indifférence est une fleur solitaire qui pousse sur un marais.