Les Pères de l’Église/Tome 2/Notes sur les ouvrages d’Athénagore


Texte établi par M. de GenoudeSapia (Tome secondp. 381-383).

NOTES SUR LES OUVRAGES D’ATHÉNAGORE.


Jugement des écrits d’Athénagore ; ce qu’ils contiennent de remarquable.


Les écrits d’Athénagore l’ont fait passer pour un des plus beaux génies de son temps et un des plus grands ornements de l’Église. On y trouve, en effet, beaucoup d’esprit, d’érudition et d’éloquence, et une connaissance profonde des mystères les plus relevés de notre religion : ses ouvrages sont écrits avec méthode, mais le style en est un peu trop diffus et trop coupé par des parenthèses ; ses raisonnements sont soutenus et bien suivis, surtout dans l’Apologie pour les Chrétiens ; on trouvera peut-être moins de lucidité dans quelques endroits de son Traité sur la résurrection des morts, ce qu’il faut attribuer à la difficulté de la matière. Il est peu d’auteurs dans l’antiquité qui se soient expliqués avec autant de précision sur la Divinité, l’unité de substance et la distinction des trois personnes ; sur la génération éternelle du Verbe, sur la procession du Saint-Esprit, il le nomme un écoulement de Dieu, et dit qu’il en procède, comme le rayon du soleil. En expliquant l’origine et la nature des démons, il marque clairement le libre arbitre des anges et des hommes ; mais il donne dans le sentiment de plusieurs anciens, qui ont cru que les anges étaient déchus pour s’être souillés avec les femmes. Il reconnaît l’immortalité de l’âme et l’inspiration des prophètes, qu’il dit avoir été comme transportés hors d’eux-mêmes, lorsque l’esprit de Dieu les animait et agissait en eux ; manière de parler qu’il pouvait avoir empruntée des prophètes mêmes, qui disent quelquefois : « J’ai dit dans le transport de mon esprit, dans mon extase, » pour marquer le ravissement, l’étonnement et l’admiration où ils étaient, lorsque le Seigneur leur découvrait les choses cachées ; ce qui est bien différent des extases ou des enthousiasmes de Montan, qui étaient plutôt d’un fanatique et d’un furieux que d’un prophète. Nous remarquerons qu’Athénagore appelle les secondes noces d’honnêtes adultères ; mais il faut pardonner la dureté de ces expressions au zèle qu’il avait de justifier les Chrétiens des crimes d’impureté dont on les accusait, et il ne pouvait mieux faire qu’en montrant leur amour pour la virginité, et cet amour était tel, qu’un grand nombre d’entre eux demeuraient vierges toute leur vie, et que ceux qui s’étaient une fois engagés dans le mariage n’en contractaient pas un second, après la mort de leur femme. Saint Basile, qui croyait les secondes noces permises, ne laisse pas de les appeler une fornication châtiée. Tout ce qu’on peut dire, c’est qu’Athénagore et ceux des Grecs qui ont parlé un peu durement des secondes noces ne les ont pas condamnées absolument, leurs censures ne tombant que sur l’esprit d’incontinence, qui conduit pour l’ordinaire ceux qui se marient plusieurs fois. On peut encore remarquer dans les écrits d’Athénagore la charité et la pureté qui régnaient parmi les Chrétiens de son temps. Selon la différence des âges, ils regardaient les uns comme leurs enfants, les autres comme leurs frères et sœurs, et ils honoraient les personnes âgées comme leurs pères et leurs mères. Dans le mariage, ils ne se proposaient que d’avoir des enfants, et ne se permettaient rien de ce qui pouvait blesser la pureté. Ils n’assistaient point aux spectacles des gladiateurs et des bêtes, pas même au supplice de ceux qui étaient justement condamnés. Enfin ils étaient soumis aux princes, quoique païens, et priaient pour la prospérité de leur empire.


Éditions des ouvrages d’Athénagore.


Le Traité de la résurrection des morts parut pour la première fois en grec, à Paris, en 1541 (in-4°), avec la traduction latine de Pierre Nannius ; George Valla en avait déjà fait une auparavant, imprimée à Venise en 1498 et 1550 (in-folio), dans un recueil de différentes pièces ; mais comme elle était moins exacte que celle de Nannius, elle eut aussi moins de cours : ce traité fut encore imprimé en grec et en latin, à Louvain, en 1541 (in-4°) ; à Bâle, en 1550 (in-folio), dans le Micropresbyticus, et dans les Orthodoxographes, en 1555 (in-folio), et en latin, avec les Œuvres de Philon le Juif, en 1552 (in 8°). On a suivi dans toutes ces éditions la traduction de Nannius, de même que dans l’édition italienne de cet ouvrage, à Venise, en 1556 (in-4°), par les soins de Jérôme Faleti, et dans celle que Richard Parderus publia en anglais, à Londres, en 1573 ; Marsille Ficni en traduisit aussi des fragments considérables qu’il inséra dans le second tome de ses ouvrages, imprimés à Bâle en 1553, 1576 et 1593.

La Légation ou l’Apologie d’Athénagore pour les Chrétiens fut aussi imprimée séparément en latin parmi les Œuvres de saint Justin, à Bâle, en 1565 (in-fol.), de la traduction de Jean Langus, et à Cologne, en 1567 (in-8°), de la traduction de Suffridus Petri ; à Zurich, en grec et en latin, en 1557 (in-8°), et à Bâle, en 1558 (in 8°), de la version de Conrad Gesner ; en français, à Paris, en 1574 (in-8°), par Gaussard, sur la traduction latine de Suffridus Petri, et par Arnold de Ferron. On trouve une nouvelle traduction française de cette Apologie par M. Granjet, chanoine de Saint-Jacques-de-l’Hôpital, à Paris, avec celle des Apologies de saint Justin : on réunit ces deux ouvrages dans les bibliothèques des Pères, à Paris, en 1575, 1589, 1609 ; à Cologne, en 1618, et à Lyon, en 1677 (tom. II) ; mais ils n’y sont qu’en latin. L’Apologie est de la traduction de Conrad Gesner, et le livre de la Résurrection, de la version de Nannius ; on les trouve en grec et en latin dans les éditions de saint Justin, à Paris, en 1615 et 1636 (in-folio), de la traduction de Gesner et de Nannius. Henri-Étienne en donna une nouvelle dans l’édition grecque et latine qu’il fit de ces deux traités, à Paris, 1557 (in-8°) ; et pour en mieux faire remarquer la différence d’avec celles de Gesner et de Nannius, il les fit imprimer à la fin de la sienne : on les réimprima depuis à Zurich, en 1559 et 1560, et dans l’Auctuarium de la bibliothèque des Pères, à Paris, en 1624 (in-folio), et à Oxford, en 1682 (in-12), et à Leipsic, avec des notes, Rechenbergius, en 1684, 1685 (in-8°). L’Apologie de la traduction de Suffridus Petri, et le livre de la Résurrection, de la version de Nannius, à Oxford, en 1706 (in-8°) ; l’Apologie de la traduction de Gesner, et le Traité de la résurrection traduit par Nannius ; David Gumphreys, Anglais, bachelier aux arts du collége de la Trinité, à Cambridge, a traduit en anglais ces deux ouvrages d’Athénagore, et les a fait imprimer à Londres (in-8°) en 1714 ; il y a joint un fragment qu’il donne à saint Justin martyr, touchant la résurrection, imprimé pour la première fois, et deux autres sur l’état des morts, l’un attribué à Joseph, l’autre à Methodius, et enfin quelques dissertations, dont une concerne Athénagore et ses ouvrages.