Les Opalines/La vierge de la vallée

L. Vanier (p. 88-89).

LA VIERGE DE LA VALLÉE

Elle était fille d’un matin d’été,
Et sa mère, c’était la brume
Qui pait le fond du val en liberté,
Que l’aube en s’habillant parfume.

Sa chair était d’air frais, candide et pur,
Que rosait la moindre surprise,
Son regard un frémissement d’azur
Et son haleine un peu de brise.

Sa chevelure en vague sur son dos
Etait un flottement de soie,
Et sa taille avait des gestes très beaux
Comme l’herbe quand elle ploie.


Pour cœur elle avait un léger paillon
D’or, tombé d’une fleur pour elle,
Et dans sa tête un joli papillon
Des blés en guise de cervelle.

Or, quand vint l’automne en manteau cuivré,
On la vit qui devenait sombre ;
Ses regards, jadis de joie enivrés,
Se remplissaient de tristes ombres.

Dans les prés du val elle alla s’asseoir,
S’étreignit des deux mains, et, lasse,
Rendit son âme à la brume du soir.
Une source coule à sa place.