Degorge-Cadot (p. 14-22).

LIVRE DEUXIÈME

Satan, planant dans les airs, au-dessus de l’Amérique, jetait un regard désespéré sur cette partie de la terre, où le Sauveur le poursuit comme le soleil qui, s’avançant des portes de l’Orient, chasse devant lui les ténèbres : le Chili, le Pérou, le Mexique, la Californie, reconnaissent déjà les lois de l’Évangile ; d’autres colonies chrétiennes couvrent les rivages de l’Atlantique, et des missionnaires ont enseigné le vrai Dieu aux sauvages des déserts. Satan, rempli de projets de vengeance, va aux enfers rassembler le conseil des démons.

Il déroule devant ses compagnons de douleurs le tableau de ce qu’il a fait pour perdre la race humaine, pour partager le monde crée avec le Créateur, pour opposer le mal au bien sur la terre, et, au delà de la terre, l’enfer au ciel. Il propose aux légions maudites un dernier combat ; il veut armer toutes les nations idolâtres du nouveau continent, il veut unir toutes ces nations dans un vaste complot, afin d’exterminer les chrétiens.

C’est au milieu des Natchez qu’il aperçoit les passions propres à seconder son entreprise. » Dieux de l’Amérique, s’écrie-t-il, anges tombés avec moi, vous qui vous faites adorer sous la forme d’un serpent ; vous que l’on invoque comme les génies des castors et des ours ; vous qui, sous le nom de Manitous, remplissez les songes, inspirez les craintes ou entretenez les espérances des peuples barbares ; vous qui murmurez dans les vents, qui mugissez dans les cataractes, qui présidez au silence ou à la terreur des forêts, allez défendre vos autels. Répandez les illusions et les ténèbres ; soufflez de toutes parts la discorde, la jalousie, l’amour, la haine, la vengeance. Mêlez-vous aux conseils et aux jeux des Natchez ; que tout devienne prodige chez des hommes où tout est fêtes et combats. Je vous donnerai mes ordres : soyez attentifs à les exécuter. »

Il dit, et le Tartare pousse un rugissement de joie qui fut entendu dans les forêts du Nouveau-Monde. Areskoui, démon de la guerre, Athaënsic, qui excite à la vengeance ; le génie des fatales amours, mille autres puissances infernales se lèvent à la fois pour seconder les desseins du prince des ténèbres. Celui-ci va chercher sur la terre le démon de la renommée, qui n’avait point assisté au conseil infernal.

Le soleil ne faisait que de paraître à l’horizon lorsque le frère d’Amélie ouvrit les yeux dans la demeure d’un sauvage. L’écorce qui servait de porte à la hutte avait été roulée et relevée sur le toit. Enveloppé dans son manteau, René se trouvait couché sur sa natte de manière que sa tête était placée à l’ouverture de la cabane. Les premiers objets qui s’offrirent à sa vue, en sortant d’un profond sommeil, furent la vaste coupole d’un ciel bleu où volaient quelques oiseaux, et la cime des tulipiers qui frémissaient au souffle des brises du matin. Des écureuils se jouaient dans les branches de ces beaux arbres, et des perruches sifflaient sous leurs feuilles satinées. Le visage tourné vers le dôme azuré, le jeune étranger enfonçait ses regards dans ce dôme, qui lui paraissait d’une immense profondeur et transparent comme le verre. Un sentiment confus de bonheur, trop inconnu à René, reposait au fond de son âme, en même temps que le frère d’Amélie croyait sentir son sang rafraîchi descendre de son cœur dans ses veines, et par un long détour remonter à sa source : telle l’antiquité nous peint des ruisseaux de lait s’égarant au sein de la terre, lorsque les hommes avaient leur innocence et que le soleil de l’âge d’or se levait aux chants d’un peuple de pasteurs.

Un mouvement dans la cabane tira le voyageur de sa rêverie : il aperçut alors le patriarche des sauvages assis sur une natte de roseau. Auprès du foyer, Saséga, laborieuse matrone, faisait infuser des dentelles de Loghetto avec des écorces de pin rouge, qui donnent une pourpre éclatante. Dans un lieu retiré, la nièce de Chactas empennait des flèches avec des plumes de faucon. Céluta, son amie, qui l’était venue visiter, semblait l’aider dans son travail ; mais sa main, arrêtée sur l’ouvrage, annonçait que d’autres sentiments occupaient son cœur.

Le frère d’Amélie s’était endormi l’homme de la société, il se réveillait l’homme de la nature. Le ciel était sur sa tête, comme le dais de sa couche ; des courtines de feuillages et de fleurs semblaient pendre de ce dais superbe ; des vents soufflaient la fraîcheur et la santé ; des hommes libres, des femmes pures, entouraient la couche du jeune homme. Il se serait volontiers touché pour s’assurer de son existence, pour se convaincre qu’autour de lui tout n’était pas illusion. Tel fut le réveil du guerrier aimé d’Armide, lorsque l’enchanteresse, trouvant son ennemi plongé dans le sommeil, l’emporta sur une nue et le déposa dans les bocages des îles Fortunées.

René se lève, sort, se plonge dans l’onde voisine, respire l’odeur des sassafras et des liquidambars, salue la lumière de l’orient, les flots du Meschacebé, les savanes et les forêts, et rentre dans la cabane.

Cependant les femmes souriaient des manières de l’étranger ; c’était de ce sourire de femmes qui ne blesse point. Céluta fut chargée d’apprêter le repas de l’hôte de Chactas : elle prit de la farine de maïs, qu’elle pétrit avec de l’eau de fontaine ; elle en forma un gâteau qu’elle présenta à la flamme, en le soutenant avec une pierre. Elle fit ensuite bouillir de l’eau dans un vase en forme de corbeille ; elle versa cette eau sur la poudre de la racine de smilax : ce mélange exposé à l’air se changea en une gelée rose d’un goût délicieux. Alors Céluta retira le pain du foyer et l’offrit au frère d’Amélie ; elle lui servit en même temps, avec la gelée nouvelle, un rayon de miel et de l’eau d’érable.

Ayant fini ces choses avec un grand zèle, elle se tint debout fort agitée devant l’étranger. Celui-ci, enseigné par Chactas, se leva, imposa les deux mains en signe de deuil sur la tête de l’Indienne, car elle avait perdu son père et sa mère, et elle n’avait plus pour soutien que son frère Outougamiz. La famille poussa les trois cris de douleur appelés cris de veuve : Céluta retourna à son ouvrage ; René commença son repas du matin.

Alors Céluta, chargée d’amuser le guerrier blanc, se mit à chanter. Elle disait :

« Voici le plaqueminier ; sous ce plaqueminier il y a un gazon ; sous ce gazon repose une femme. Moi qui pleure sous le plaqueminier, je m’appelle Céluta, je suis fille de la femme qui repose sous le gazon ; elle était ma mère.

« Ma mère me dit en mourant : Travaille ; sois fidèle à ton époux quand tu l’auras trouvé ; s’il est heureux, sois humble et timide ; n’approche de lui que lorsqu’il te dira : Viens, mes lèvres veulent parler aux tiennes.

« S’il est infortuné, sois prodigue de tes caresses ; que ton âme environne la sienne, que ta chair soit insensible aux vents et aux douleurs. Moi, qui m’appelle Céluta, je pleure maintenant sous le plaqueminier ; je suis la fille de la femme qui repose sous le gazon. »

L’indienne, en chantant ces paroles, tremblait, et des larmes coulaient comme des perles le long de ses joues : elle ne savait pourquoi, à la vue du frère d’Amélie, elle se souvenait des derniers conseils de sa mère. René sentait lui-même ses yeux humides. La famille partageait l’émotion de Céluta ; et toute la cabane pleurait de regret, d’amour et de vertu. Tel fut le repas du matin.

À peine cette scène était terminée qu’un guerrier parut : il apportait une hache en présent à l’étranger, pour qu’il se bâtît une cabane. Il conduisait en même temps une vierge plus belle et plus jeune que Chryséis, afin que le nouveau fils de Chactas commençât un lit dans le désert. Céluta baissa la tête dans son sein : Chactas, averti de ce qui se passait, devina le reste. Alors, d’une voix courroucée : « Veut-on faire un affront à Chactas ? Le guerrier adopté par moi ne doit pas être traité comme un étranger. »

Consterné à cette réprimande du vieillard, l’envoyé frappa des mains, et s’écria : « René, adopté par Chactas, ne doit pas être regardé comme un étranger. »

Cependant Chactas conseilla au frère d’Amélie de faire un présent à Mila, dans la crainte d’offenser une famille puissante qui comptait plus de trente tombeaux. René obéit : il ouvrit une cassette de bois de papaya ; il en tira un collier de porcelaine : ce collier était monté sur un fil de la racine du tremble, appelé l’arbre du refus, parce que la liane se dessèche autour de son tronc. René faisait ces choses par le conseil de Chactas ; il donna le collier à Mila, à peine âgée de quatorze ans, en disant : « Heureux votre père et votre mère ! plus heureux celui qui sera votre époux ! » Mila jeta le collier à terre.

La paix descendit sur la cabane le reste de la journée ; Céluta retourna chez son frère Outougamiz ; Mila, chez ses parents ; et Chactas alla converser avec les sachems.

Le soir on se rassembla sous les tulipiers : la famille prit un repas sur l’herbe, semée de verveine empourprée et de ruelles d’or. Le chant monotone du will-poor-will, le bourdonnement du colibri, le cri des dindes sauvages, les soupirs de la nonpareille, le sifflement de l’oiseau moqueur, le sourd mugissement des crocodiles dans les glaïeuls, formaient l’inexprimable symphonie de ce banquet.

Échappés du royaume des ombres et descendant sans bruit à la clarté des étoiles, les songes venaient se reposer sur le toit des sauvages. C’était l’heure où le cyclope européen rallume la fournaise dont la flamme se dilate ou se concentre aux mouvements des larges soufflets. Tout à coup un cri retentit : réveillées en sursaut dans la cabane, les femmes se dressent sur leur couche ; Chactas prête l’oreille ; une Indienne soulève l’écorce de la porte, et ces mots se pressent sur ses lèvres : « Les méchants Manitous sont déchaînés : sortez ! sortez ! » La famille se précipite sous les tulipiers.

La nuit régnait : des nuages brisés ressemblaient, dans leur désordre sur le firmament, aux ébauches d’un peintre dont le pinceau se serait essayé au hasard sur une toile azurée. Des langues de feu livides et mouvantes léchaient la voûte du ciel. Soudain ces feux s’éteignent : on entend quelque chose de terrible passer dans l’obscurité, et du fond des forêts s’élève une voix qui n’a rien de l’homme.

Dans ce moment un guerrier se présente à la porte de la cabane ; il adresse à Chactas ces paroles précipitées : « Le conseil de la nation s’assemble ; les blancs se préparent à lever la hache contre nous ; il leur est arrivé de nouveaux soldats. D’une autre part, le trouble est dans la nation : la Femme-Chef, mère du jeune Soleil, est en proie aux mauvais génies ; Ondoure paraît possédé d’une passion funeste. Le grand-prêtre parle d’oracles et de songes ; on murmure sourdement contre le Français que vous voulez faire adopter. Vous êtes témoin des prodiges de la nuit : hâtez-vous de vous rendre au conseil. »

En achevant ces mots, le messager poursuit sa route et va réveiller Adario. Chactas rentre dans sa cabane : il suspend à son épaule gauche son manteau de peau de martre ; il demande son bâton d’hicory, surmonté d’une tête de vautour. Miscoue avait coupé ce bâton dans sa vieillesse ; il l’avait laissé en héritage à son fils Outalissi, et celui-ci à son fils Chactas, qui, appuyé sur ce sceptre héréditaire, donnait des leçons de sagesse aux jeunes chasseurs réunis au carrefour des forêts. Un Indien complétement armé, vient chercher Chactas, et le conduit au conseil.

Tous les sachems avaient déjà pris leur place : les guerriers étaient rangés derrière eux ; les matrones, ayant à leur tête la Femme Chef, mère de l’héritier de la couronne, occupaient les sièges qui leur étaient réservés, et au-dessous d’elles s’asseyaient les prêtres.

Adario, chef de la tribu de la Tortue, se lève : inaccessible à la crainte, insensible à l’espérance, ce sachem se distingue par un ardent amour de la patrie ; implacable ennemi des Européens, qui avaient massacré son père, mais les abhorrant encore plus comme tyrans de son pays, il parlait incessamment contre eux dans les conseils. Quoiqu’il révérât Chactas et qu’il se plût à confesser la supériorité du sachem aveugle, il était cependant presque toujours d’un avis opposé à celui de son vieil ami.

Les bras pendants et immobiles, les regards attachés à la terre, il prononça ce discours :

« Sachems, matrones, guerriers des quatre tribus, écoutez :

« Déjà l’aloès avait fleuri deux fois, depuis que Ferdinand de Soto, l’Espagnol, était tombé sous la massue de nos ancêtres ; déjà nous étions allés combattre les tyrans loin de nos bords, lorsque le Meschacebé raconta à nos vieillards qu’une nation étrangère descendait de ses sources. Ce peuple n’était point de la race superbe des guerriers de feu[1]. Sa gaieté, sa bravoure, son amour des forêts et de nos usages, le faisaient chérir. Nos cabanes eurent pitié de sa misère, et donnèrent à Lasalle[2] tout ce qu’elles pouvaient lui offrir.

« Bientôt la nation légère aborde de toutes parts sur nos rives : d’Iberville, le dompteur des flots, fixe ses guerriers au centre même de notre pays. Je m’opposai à cet établissement ; mais vous attachâtes le grand canot de l’étranger aux buissons, ensuite aux arbres, puis aux rochers, enfin à la grande montagne ; et, vous asseyant sur la chaîne qui liait le canot des blancs à nos fleuves, vous ne voulûtes plus faire qu’un peuple avec le peuple de l’Aurore.

« Vous savez, ô sachems ! quelle fut la récompense de votre hospitalité ! Vous prîtes les armes ; mais, trop prompts à les quitter, vous rallumâtes le calumet de paix. Hommes imprudents ! la fumée de la servitude et celle de l’indépendance pouvaient-elles sortir du même calumet ? Il faut une tête plus forte que celle de l’esclave pour n’être point troublée par le parfum de la liberté.

Elle prend la démarche et la contenance d’un vieillard, afin de donner un plus grand air de vérité à ses paroles (page 20, col. 2).

« À peine avez vous enterré la hache[3], à peine, vous reposant sur la foi des colliers[4], commencez-vous à éclaircir la chaîne d’union, que, par la plus noire des perfidies, le chef actuel des Français veut vous attaquer sur vos nattes. La biche n’a pas changé plus de fois de parure que je n’ai de doigts à cette main mutilée en défendant mon père, depuis que les derniers attentats des blancs ont souillé nos savanes. Et nous hésitons encore !

« Peut-être, enfants du Soleil, peut-être comptez-vous changer de désert, abandonner à vos oppresseurs la terre de la patrie ? Mais où voulez-vous porter vos pas ? Au couchant, au levant, vers l’étoile immobile[5], vers ces régions où le génie du jour s’assied sur la natte de feu[6], partout sont les ennemis de votre race. Ils ne sont plus, ces temps où tous les fleuves coulaient pour vous seuls. Vos tyrans ont demandé de nouveaux satellites ; ils méditent une nouvelle invasion de nos foyers. Mais notre jeunesse est florissante et nombreuse ; n’attendons pas qu’on vienne nous surprendre et nous égorger comme des femmes. Mon sang se rallume dans mes veines, ma hache brûle à ma ceinture. Natchez ! soyez dignes de vos pères, et le vieil Adario vous conduit dès aujourd’hui aux batailles sanglantes ! Puissent les fleuves rouler à la grande eau les cadavres des ennemis de ma patrie ! Puissiez-vous, ô terre trop généreuse des chairs rouges, étouffer dans votre sein le froment empoisonné qu’y jeta la main de la servitude ! Puissent ces moissons impies, épandues sur la poussière de nos aïeux, ne porter sur leur tige que les semences de la tombe ! »

Ainsi parle Adario. Les guerriers, les matrones, les vieillards mêmes, troublés par sa mâle éloquence, s’agitent comme le blé dans le boisseau bruyant qui le verse à la meule rapide. Ondouré se lève au milieu de l’assemblée.

Le grand-chef des Natchez, bien qu’il fût encore d’une force étonnante, touchait aux dernières limites de la vieillesse : sa plus proche parente, la violente Akansie, était mère du jeune fils qui devait hériter du rang suprême ; ainsi l’avait réglé la loi de l’État. Akansie nourrissait au fond de son cœur une passion criminelle pour Ondouré, un des principaux guerriers de la nation ; mais Ondouré, au lieu de répondre à l’amour d’Akansie, brûlait pour Céluta, dont le cœur commençait à incliner vers l’étranger, hôte du vénérable Chactas.

Dévoré d’ambition et d’amour, ayant contracté tous les vices des blancs, qu’il détestait, mais dont il avait l’adresse de se faire passer pour l’ami, Ondouré avait pris la résolution de se taire dans le conseil, afin de se ménager, comme à son ordinaire, entre les deux partis ; mais son amour pour Céluta et sa jalousie naissante contre René l’entraînèrent à prononcer ces paroles : « Pères de la patrie, qu’attendons-nous ? Le grand Adario ne nous a-t-il pas tracé la route ? Je ne vois ici que le sage Chactas qui puisse s’opposer à la levée de la hache. Mais enfin le vénérable fils d’Outalissi montre un trop grand penchant pour les étrangers. Fallait-il qu’il introduisît encore parmi nous cet hôte dont l’arrivée a été marquée par des signes funestes ? Chactas, cette lumière des peuples, sentira bientôt que sa générosité l’emporte au delà des bornes de la prudence : il sera le premier à renier ce fils adoptif, à le sacrifier, s’il le faut, à la patrie. »

Comme autrefois une bacchante que l’esprit du dieu avait saisie courait échevelée sur les montagnes, qu’elle faisait retentir de ses hurlements, la jalouse mère du jeune Soleil se sent transportée de fureur à ces paroles d’Ondouré : elle y découvre la passion de ce guerrier pour une rivale. Ses joues pâlissent, ses regards lancent des éclairs sur l’homme dont elle est méprisée : tous ses membres sont agités comme dans une fièvre ardente. Elle veut parler, et les mots manquent à ses pensées. Que va-t-elle dire ? que va-t-elle proposer au conseil ? La guerre ou la paix ? Exigera-t-elle la mort ou le bannissement de l’étranger qui augmente l’amour d’Ondouré pour la fille de Tabamica ? Demandera-t-elle, au contraire, l’adoption du nouveau fils de Chactas, afin de désoler, par la présence de René, l’ingrat qui la dédaigne, afin de lui faire éprouver une partie des tourments qu’elle endure ? Ces paroles tombent de ses lèvres décolorées et tremblantes :

« Vieillards insensés ! n’avez-vous point songé au danger de la présence des Européens parmi nous ? Avez-vous des secrets pour rendre le sein des femmes aussi froid que le vôtre ? Lorsque la vierge trompée sera comme le poisson que le filet a jeté palpitant sur le sable aride ; lorsque l’épouse aura trahi l’époux de sa couche ; lorsque la mère, oubliant son fils, suivra éperdue dans les forêts le guerrier qui l’entraîne, vous reconnaîtrez, mais trop tard, votre imprudence. Réveillez-vous de l’assoupissement de vos années ! Oui, il faut du sang aujourd’hui ! La guerre ! il faut du sang ! les manitous l’ordonnent ! un feu dévorant coule dans tous les cœurs. Ne consultez point les entrailles de l’ours sacré ; les vœux, les prières, les autels, sont inutiles à nos maux ! »

Elle dit : sa couronne de plumes et de fleurs tombe de sa tête. Comme un pavot frappé des rayons du soleil se penche vers la terre et laisse échapper de sa tige les gouttes amères du sommeil, ainsi la femme jalouse, dévorée par les feux de l’amour, baisse son front, dont la mort semble épancher des sueurs glacées. La confusion règne dans l’assemblée ; une épaisse fumée, répandue par les esprits du mal, remplit la salle de ténèbres ; on entend les cris des matrones, les mouvements des guerriers, la voix des vieillards. Ainsi, dans un atelier, des ouvriers préparent les laines d’Albion ou de l’Ibérie : ceux-ci battent les toisons poudreuses, ceux-là les transforment en de merveilleux tissus ; plusieurs les plongent dans la pourpre de Tyr ou dans l’azur de l’Hindostan : mais, si quelque main mal assurée vient à répandre sur la flamme la liqueur des cuves brûlantes, une vapeur s’élève avec un sifflement dans les salles, et des clameurs sortent de cette soudaine nuit.

Toutes les espérances se tournaient vers Chactas ; lui seul pouvait rétablir le calme ; il annonce par un signe qu’il va se faire entendre. L’assemblée devient immobile et muette, et l’orateur, qui n’a pas encore parlé, semble déjà faire porter aux passions les chaînes de sa paisible éloquence.

Il se lève : sa tête couronnée de cheveux argentés, un peu balancée par la vieillesse et par d’attendrissants souvenirs, ressemble à l’étoile du soir, qui paraît trembler avant de se plonger dans les flots de l’Océan. Adressant son discours à son ami Adario, Chactas s’exprime de la sorte :

« Mon frère l’Aigle, vos paroles ont l’abondance des grandes eaux, et les cyprès de la savane sont enracinés moins fortement que vous sur les tombeaux de nos pères. Je sais aussi les injustices des blancs ; mon cœur s’en est affligé. Mais sommes-nous certains que nous n’avons rien à nous reprocher nous-mêmes ? Avons-nous fait tout ce que nous avons pu pour demeurer libres ? Est-ce avec des mains pures que nous prétendons lever la hache d’Areskoui ? Mes enfants (car mon âge et mon amour pour vous me permettent de vous donner ce nom), je déplore la perte de l’innocente simplicité qui faisait la beauté de nos cabanes. Qu’auraient dit nos pères s’ils avaient découvert dans une matrone les signes qui viennent de troubler le conseil ? Femme, portez ailleurs l’égarement de vos esprits ; ne venez point au milieu des sachems, avec le souffle de vos passions, tirer des plaintes du feuillage flétri des vieux chênes.

« Et toi, jeune chef, qui as osé prendre la parole avant les vieillards, crois-tu donc tromper Chactas ? Tremble que je ne dévoile ton âme, aussi creuse que le rocher où se renferme l’ours du Labrador !

« Préparons-nous aux jeux d’Areskoui, exerçons notre jeunesse, faisons des alliances avec de puissants voisins ; mais auparavant prenons les sentiers de la paix : renouons la chaîne d’alliance avec Chépar ; qu’il parle dans la vérité de son cœur, qu’il dise dans quel dessein il rassemble ses guerriers. Mettons les manitous équitables de notre côté, et si nous sommes enfin forcés à lever la hache, nous combattrons avec l’assurance de la victoire ou d’une mort sainte, la plus belle et la plus certaine des délivrances. J’ai dit. »

Chactas jette un collier bleu, symbole de paix, au milieu de l’assemblée, et se rassied. Tous les guerriers étaient émus : « Quelle expérience ! disaient les uns ; quelle douceur et quelle autorité ! disaient les autres. Jamais on ne retrouvera un tel sachem. Il sait la langue de toutes les forêts ; il connaît tous les tombeaux qui servent de limites aux peuples, tous les fleuves qui séparent les nations. Nos pères ont été plus heureux que nous : ils ont passé leur vie avec sa sagesse ; nous, nous ne le verrons que mourir. » Ainsi parlaient les guerriers.

L’avis de Chactas fut adopté : quatre députés portant le calumet de paix furent envoyés au fort Rosalie. Mais Areskoui, fidèle aux ordres de Satan, riant d’un rire farouche, suivait à quelque distance les messagers de paix avec la Trahison, la Peur, la Fuite, les Douleurs et la Mort.

Cependant le prince des enfers était arrivé aux extrémités du monde, sous le pôle, dont l’intrépide Cook mesura la circonférence à travers les vents et les tempêtes. Là, au milieu des terres australes qu’une barrière de glaces dérobe à la curiosité des hommes, s’élève une montagne qui surpasse en hauteur les sommets les plus élevés des Andes dans le Nouveau-Monde, ou du Thibet dans l’antique Asie.

Sur cette montagne est bâti un palais, ouvrage des puissances infernales. Ce palais a mille portiques d’airain ; les moindres bruits viennent frapper les dômes de cet édifice dont le silence n’a jamais franchi le seuil.

Au centre du monument est une voûte tournée en spirale, comme une conque, et faite de sorte que tous les sons qui pénètrent dans le palais y aboutissent : mais, par un effet du génie de l’architecte des mensonges, la plupart de ces sons se trouvent faussement reproduits ; souvent une légère rumeur s’enfle et gronde en entrant par la voie préparée aux éclats du tonnerre, tandis que les roulements de la foudre expirent, en passant par les routes sinueuses destinées aux faibles bruits.

C’est là que, l’oreille placée à l’ouverture de cet immense écho, est assis sur un trône retentissant un démon, la Renommée. Cette puissance, fille de Satan et de l’Orgueil, naquit autrefois pour annoncer le mal : avant le jour où Lucifer leva l’étendard contre le Tout-Puissant, la Renommée était inconnue. Si un monde venait à s’animer ou à s’éteindre ; si l’Éternel avait tiré un univers du néant ou replongé un de ses ouvrages dans le chaos ; s’il avait jeté des soleils dans l’espace, créé un nouvel ordre de séraphins, essayé la bonté d’une lumière, toutes ces choses étaient aussitôt connues dans le ciel, par un sentiment intime d’admiration et d’amour, par le chant mystérieux de la céleste Jérusalem. Mais, après la rébellion des mauvais anges, la Renommée usurpa la place de cette institution divine. Bientôt précipitée aux enfers, ce fut elle qui publia dans l’abîme la naissance de notre globe, et qui porta l’ennemi de Dieu à tenter la chute de l’homme. Elle vint sur la terre avec la Mort, et dès ce moment elle établit sa demeure sur la montagne, où elle entend et répète confusément ce qui se passe sur la terre, aux enfers et dans les cieux.

Satan, arrivé au palais, pénètre jusqu’au lieu où veillait la Renommée.

« Ma fille, lui dit-il, est-ce ainsi que tu me sers ? Peux-tu ignorer les projets que je médite ? Toi seule n’as point paru dans l’assemblée des puissances infernales. Cependant, fille ingrate, pour qui travaillé-je en ce moment, si ce n’est pour toi ? Quel est l’ange que j’ai aimé plus tendrement que je ne t’aime ? Lorsque l’orgueil, mon premier amour, te donna naissance, je te pris sur mes genoux, je te prodiguai les caresses d’un père. Hâte-toi donc de me prouver que tu n’as pas rompu les liens qui nous unissent. Viens, suis-moi ; le temps presse il faut que tu parles, il faut que tu répètes ce que je t’apprendrai ; ton silence peut mettre en danger mon empire. »

Le démon de la renommée, souriant au prince des ténèbres, lui répond d’une voix éclatante :

« O mon père ! je n’ai pas rompu les liens qui nous unissent. J’ai entendu les bruits répandus par toi chez les Natchez ; j’ai vu avec transport les grandes choses que tu prépares ; mais il me venait dans ce moment d’autres bruits de la terre : j’étais occupée à redire au monde la gloire d’un monarque de l’Europe[7]. Ces Français m’accablent de leurs merveilles ; il me faudrait des siècles pour les entendre et les raconter. Cependant je suis prête à te suivre, et j’abandonne tout pour servir tes desseins. »

En achevant ces mots, la Renommée descend de son trône : de toutes les voûtes, de tous les dômes, de tous les souterrains du palais ébranlé, s’échappent des sons confus et discordants : tels sont les rugissements d’un troupeau de lions, lorsque, la gueule enflammée, la langue pendante, ils élèvent la voix durant une sécheresse dans l’aridité des sables africains.

Satan et la Renommée sortent du sonore édifice, s’abattent comme deux aigles au pied de la montagne, où la Nuit leur amène un char. Ils y montent. La Renommée saisit les rênes qui flottaient embarrassées dans les ailes des deux coursiers : démon fantastique, dans les ténèbres elle ressemble à un géant ; à la lumière elle n’est plus qu’un pygmée. L’Etonnement la précède, l’Envie la suit de près et l’Admiration l’accompagne de loin.

Le couple pervers franchit ces mers inexplorées qui s’étendent entre la coupole de glace et ces terres que n’avaient point encore nommées les Cook et les La Pérouse. La Renommée, dirigeant ses coursiers sur la croix du sud, tourne le dos à ces constellations australes qu’un œil humain ne vit jamais ; puis, par le conseil de Satan, de peur d’être aperçue de l’ange qui garde l’Asie, au lieu de remonter l’océan Pacifique, elle descend vers l’orient, pour voler sur la plaine humide qui sépare l’Afrique du nouveau continent. Elle ne voit point Tahiti avec ses palmiers, ses chants, ses chœurs, ses danses, et ses peuples qui recommençaient la Grèce. Plus rapide que la pensée, le char double le cap où un océan, si longtemps ignoré, livre d’éternels combats aux mers de l’Ancien Monde.

Satan et la Renommée laissent loin derrière eux les flammes qui s’élèvent des terres Magellaniques ; phare lugubre, qu’aucune main n’allume, et qui brûle sans gardien, au bord d’une mer sans navigateur. Ils vous saluèrent, ruines fumantes de Rio-Janeiro, monument de ta valeur, ô mon fameux compatriote !

Satan frappe de sa lance les coursiers haletants, et bientôt il a passé ce promontoire qui reçut jadis une colonie des Carthaginois. L’Amazone découvre son immense embouchure, ces flots que La Condamine, conduit par la céleste Uranie, visita dans sa docte course, et que Humboldt devait illustrer.

À l’instant même, le char traverse la ligne que le soleil brûle de ses feux, entre dans l’autre hémisphère, et laisse sur la gauche la triste Cayenne, que l’avenir a marquée pour l’exil et la douleur. Les deux puissances infernales, en perdant de vue cette terre qui les fait sourire, volent au-dessus des îles Caraïbes, et se trouvent engagées dans l’archipel du golfe mexicain. La montueuse Martinique, qui n’était point encore soumise à la valeur française, la Dominique conquise par les Anglais, disparaissaient sous les roues du char. Saint-Domingue, qui depuis s’enivra de richesses, de sang et de liberté, Saint-Domingue, dont les destinées devaient être si extraordinaires, se montrait alors en partie sauvage, tel que les intrépides flibustiers l’avaient laissé en héritage à la France. Et toi, île de San-Salvador, à jamais célèbre entre toutes les îles, tu fus découverte par l’œil de la Renommée, bien qu’une ingrate obscurité ait succédé à ta gloire. Élevant la tête entre tes sœurs des Bahamas, ce fut toi qui souris la première à Colomb ; ce fut toi qui vis descendre de ses vaisseaux l’immortel Génois, comme le fils aîné de l’Océan ; ce fut sur tes rivages que se visitèrent les peuples de l’Occident et de l’Aurore, qu’ils se saluèrent mutuellement du nom d’hommes ! Tes rochers retentissaient du bruit d’une musique guerrière annonçant cette grande alliance, tandis que Colomb tombait à genoux et baisait cette terre, autre moitié de l’héritage des fils d’Adam.

À peine la Renommée a-t-elle quitté San-Salvador, qu’elle aborde à l’isthme des Florides : elle arrête le char, s’élance avec l’archange sur les grèves dont la mer se retire. Satan promène un moment ses regards sur les forêts, comme s’il apercevait déjà dans ces solitudes des peuples destinés à changer la face du monde. La Renommée jette un nuage sur son char, étend ses ailes, donne une main à son compagnon : tous deux, renfermés dans un globe de feu, s’élèvent une hauteur démesurée, et retombent au bord du Meschacebé. Là Satan quitte sa trompeuse fille pour voler à d’autres desseins, tandis qu’elle se hâte d’exécuter les ordres de son père.

Elle prend la démarche et la contenance d’un vieillard, afin de donner un plus grand air de vérité à ses paroles. Sa tête se dépouille, son corps se courbe sur un arc détendu qu’elle tient à la main en guise de bâton ; ses traits ressemblent parfaitement à ceux du sachem Ondaga, un des plus sages hommes des Natchez. Ainsi transformé, le démon indiscret va frappant de cabane en cabane, racontant le doux penchant de Céluta pour René, et ajoutant toujours quelque circonstance qui éveille la curiosité, la haine, l’envie ou l’amour. La jalouse mère du jeune Soleil, Akansie, pousse un cri de joie à ces bruits semés par la Renommée, car elle espérait qu’ainsi rejeté de Céluta, Ondouré reviendrait peut-être à l’amante qu’il avait dédaignée ; mais le faux vieillard ajoute aussitôt qu’Ondouré est tombé dans le plus violent désespoir, et qu’il menace les jours de l’étranger.

Ces dernières paroles glacent le cœur d’Akansie. La femme infortunée s’écrie : « Sors de ma cabane, ô le plus imprudent des vieillards ! Va continuer ailleurs tes récits insensés. Puissent les sachems faire de toi un exemple mémorable et t’arracher cette langue qui distille le poison ! »

En prononçant ces mots, Akansie, nouvelle Médée, se sent prête à déchirer ses enfants et à plonger un poignard dans le cœur de sa rivale.

La Renommée quitte la Femme Chef, et va chercher Ondouré. Elle le trouva derrière sa cabane, travaillant dans la forêt à la construction d’un canot d’écorce de bouleau ; fragile nacelle destinée à flotter sur le sein des lacs, comme le cygne, dont elle imitait la blancheur et la forme.

La Renommée s’avance vers le guerrier, et examine d’abord en silence son ouvrage. Contempteur de la vieillesse et des lois, Ondouré dit au faux Ondaga, en le regardant d’un air moqueur : « Tu ferais mieux, sachem, d’aller causer avec les autres hommes dont l’âge a affaibli la raison et rendu les pensées semblables à celles des matrones. Tu sais que j’aime peu les cheveux blancs et les longs propos. Éloigne-toi donc, de peur qu’en bâtissant ce canot je ne te fasse sentir, sans le vouloir, la pesanteur de mon bras. Je t’étendrais à terre comme un if qui n’a plus que l’écorce et que le vent traverse dans sa course.

— Mon fils, semblable au terrible Areskoui[8], répondit le rusé vieillard, je ne m’étonne pas des propos odieux que tu viens de tenir à un père de la patrie : la colère doit être dans ton cœur et la vengeance agiter les panaches de ta chevelure. Lorsque la perfide Endaé, plus belle que l’étoile qui ne marche pas[9], rejeta autrefois mes présents pour recevoir ceux de Mengade, mon cœur brûla de la fureur qui possède aujourd’hui le tien. Je méconnus mon père lui-même, et, dans l’égarement de ma raison, je levai mon tomahawk[10] sur celle qui m’avait porté dans son sein et qui m’avait donné un nom parmi les hommes. Mais Athaënsic[11] plongea bientôt ma flèche dans le cœur de mon rival, et Endaé fut le prix de ma victoire. Malgré le poids des neiges[12], ma mémoire a conservé fidèlement le souvenir de cette aventure, comme les colliers[13] gardent les actions des aïeux. Je pardonne à l’imprudence de tes paroles. »

À peine la Renommée achevait ce perfide discours, que le fer dont Ondouré était armé échappe à sa main. Les yeux du sauvage se fixent, une écume sanglante paraît et disparaît sur ses lèvres ; il pâlit, et ses bras roidis s’agitent à ses côtés. Soudain recouvrant ses sens, il bondit comme un torrent du haut d’un roc, et disparaît.

Alors le démon de la Renommée, reprenant sa forme, s’élève triomphant dans les airs : trois fois il remplit de son souffle une trompette dont les sons aigus déchirent les oreilles. En même temps Satan envoie à Ondouré l’Injure et la Vengeance : la première le devance en répandant des calomnies qui, comme une huile empoisonnée, souillent ce qu’elles ont touché ; la seconde le suit, enveloppée dans un manteau de sang. Le prince des ténèbres veut qu’une division éclatante sépare à jamais René et Ondouré, et devienne le premier anneau d’une longue chaîne de malheurs. Cependant Ondouré ne sent pas encore pour Céluta tous les feux d’amour qui le brûleront dans la suite et qui l’exciteront à tous les crimes ; mais son orgueil et son ambition sont à la fois blessés ; il ne respire que vengeance. Il va exhalant son dépit en paroles insultantes.

« Quel est donc ce fils d’étranger qui prétend m’enlever la femme de mon choix ? Lui donne-t-on, comme à moi, la première place dans les festins et la portion la plus honorable de la victime ? Où sont les chevelures des ennemis qu’il a enlevées ? Vile chair blanche qui n’as ni père ni mère, qu’aucune cabane ne réclame ! Lâche guerrier, à qui je ferai porter le jupon d’écorce de la vieille femme, et que je formerai à filer le nerf de chevreuil ! »

Ainsi parlait ce chef, environné d’une légion d’esprits qui remplissaient son âme de mille pensées funestes. Lorsque l’automne a mûri les vergers, on voit des hommes agrestes, montés sur l’arbre cher à la Neustrie, abattre avec de longues perches la pomme vermeille, tandis que les jeunes filles et les jeunes laboureurs ramassent pêle-mêle, dans une corbeille, les fruits dont le jus doit troubler la raison : ainsi les anges du mal jettent ensemble leurs dons enivrants dans le sein d’Ondouré. Jalousie insensée ! l’amour ne pouvait entrer dans le cœur du frère d’Amélie : Céluta aimait seule. Ces passions, de tous côtés non partagées ne promettaient que des malheurs sans ressource et sans terme.

  1. Les Espagnols.
  2. Il descendit le premier le Mississippi.
  3. Faire la paix.
  4. Lettres, contrats, traites, etc.
  5. Le nord.
  6. Le midi.
  7. Louis XIV.
  8. Génie de la guerre.
  9. L’étoile polaire.
  10. Massue.
  11. Génie de la vengeance.
  12. Années.
  13. Traites, contrats, lettres, etc.