Les Martyrs/Remarques sur le livre XXI

Garnier frères (Œuvres complètes de Chateaubriand, tome 4p. 536-539).

LIVRE VINGT-UNIÈME.


1re Remarquepage 285.

Les mains chargées de branches d’anet, le front ceint d’une couronne de roses et de violettes, etc.

On peut voir dans Athénée tous les détails sur les banquets et les couronnes des anciens. L’anet dont on se servoit dans les festins ressembloit assez au fenouil.


2e. — page 285.

Aussi profonde que celle de Nestor, etc.

Πὰρ δὲ δέπας περικαλλές, ὁ οἴκοθεν ἦγ’ ὁ γεραιός,
Χρυσείοις ἥλοισι πεπαρμένον, οὔατα δ’ αὐτοῦ

Τέσσαρ’ ἔσαν, δοιαὶ δὲ πελειάδες ἀμφὶς ἕκαστον
Χρύσειαι νεμέθοντο, δύω δ’ ὑπὸ πυθμένες ἦσαν.
Ἄλλος μὲν μογέων ἀποκινήσασκε τραπέζης,
Πλεῖον ἐόν, Νέστωρ δ’ ὁ γέρων ἀμογητὶ ἄειρεν.

(Iliad., lib. xi, v. 631.)


3e. — page 285.

Comme au banquet d’Alcibiade, etc.

Le Banquet de Platon a été traduit par l’abbesse de Fontevrault et par Racine. Le discours d’Alcibiade manquoit ; M. Geoffroy l’a donné dans son Commentaire sur Racine.


4e. — page 285.

On eût dit qu’ils marchoient au martyre, etc.

On aura pu remarquer que c’est le beau tableau de Lesueur.


5e. — page 286.

Sublime invention de la charité ! etc.

« On a vu des prélats, faute d’autel, consacrer sur les mains des diacres ; et l’illustre martyr saint Lucien d’Antioche consacra sur sa poitrine, étant attaché de sorte qu’il ne pouvoit se remuer. » (Fleury, Mœurs des Chrétiens.)


6e. — page 287.

La frise en étoit ornée, etc.

On sait comment Homère, Virgile, le Tasse, ont fait usage de ces détails poétiques. Les traits que j’ai placés dans les bas-reliefs sont puisés dans l’histoire romaine. Je ne leur ai point donné un rapport direct avec la position de Démodocus. J’ai trouvé plus naturel de suivre l’exemple d’Homère qui peint des scènes variées sur le bouclier d’Achille.


7e. — page 289.

Cette chrétienne timide, etc.

Le petit rôle de Blanche est peut-être dans la nature. On trouve, surtout parmi le peuple, un grand nombre de ces femmes qui ont un cœur compatissant, mais dont le caractère est foible et timide, et qui n’osent pour ainsi dire faire de bonnes actions qu’à la dérobée. Il ne faut pas croire d’ailleurs qu’à cette époque tous les chrétiens fussent des héros et toutes les chrétiennes des héroïnes. Il y eut beaucoup de chutes pendant la persécution de Dioclétien. Comment, après cela, a-t-on pu trouver que Cymodocée, qui donne son sang avec tant de simplicité, n’est pas assez courageuse ?


8e. — page 290.

Festus, suivant les formes usitées, dit, etc.

J’aurois cru commettre un sacrilége si j’avois osé changer un mot à cette grande tragédie du martyre, dont les témoins du Dieu vivant furent les sublimes acteurs. J’ai conservé, et j’ai dû conserver la simplicité du dialogue, la majesté des réponses, l’atrocité des tourments. Pourquoi me serois-je montré plus délicat que la peinture ? Et cependant j’ai tout adouci, tout dérobé aux yeux. J’ai écarté ce qui pouvoit révolter les sens, comme l’odeur des chairs brûlées, et mille autres détails qu’on lit dans l’histoire. J’ai, par des comparaisons riantes, par la présence des anges, par l’espèce d’impassibilité d’Eudore, diminué l’horreur des tortures. Ce sont les hommes de l’art que je désire surtout avoir ici pour juges ; eux seuls peuvent connoître la difficulté du sujet. Je renvoie le lecteur aux Actes des Martyrs, recueillis par dom Ruinart et traduits par Maupertuis ; à l’Histoire ecclésiastique de Fleury et aux Mémoires de Tillemont.


9e. — page 291.

Remarquez bien mon visage, etc.

Ce mot d’Eudore étoit tiré des Machabées, mais un critique m’a fait l’honneur de le croire de mon invention : ce mot se retrouve dans le martyre de sainte Perpétue. N’est-il pas aussi bien étrange qu’on ait ignoré que la torture précédoit toujours la mort des chrétiens accusés ? Il y a tel confesseur qui fut appliqué trois et quatre fois à la question avant d’être condamné à mort. Que penser de ceux qui, prenant contre moi la défense de la religion, montrent à la fois leur ignorance et leur impiété dans de honteuses plaisanteries sur les souffrances des martyrs ?


10e. — page 291.

Eudore, dans le cours de ses actes glorieux, etc.

Là commence l’épisode du purgatoire. Je n’ai point eu d’appui pour ce travail, et il a fallu tout tirer de mon fonds. Le purgatoire du Dante ne m’a pas offert un seul trait dont je pusse profiter.


11e. — page 293.

Que les anges ont appelée Belle, etc.

Toutes ces saintes femmes sont trop connues pour qu’on ait besoin d’un commentaire.


12e. — page 293.

L’enfer étonné crut voir entrer l’Espérance.

Le Dante a dit :

Lasciate ogni speranza, voi ch’entrate.


13e. — page 293.

À mesure qu’on s’élève, etc.

Après cette phrase se trouvoit la description de la demeure des sages. Bien des personnes ont pensé que j’aurois pu, même théologiquement, être moins rigoureux, et conserver le morceau ; mais il ne faut point discuter avec la religion.


14e. — page 294.

Les mondes divers, etc.

« Benedicite omnia opera Domini. » (Ps.)


15e. — page 294.

Ouvrez-vous, etc.

« Attollite portas… Et elevamini, portæ æternales. » (Ps. xxiii, 7), que Milton a si bien imité :

Open ye everlasting doors !


16e. — page 294.

Je vous salue, Marie, etc.

« Ave, Maria, etc. »


17e. — page 294.

Vous qui êtes bénie entre toutes les femmes, refuge des pécheurs, etc.

« Benedicta tu in mulieribus, consolatrix afflictorum, refugium peccatorum. »

Et toujours nos simples prières fournissent les traits les plus nobles, les plus sublimes ou les plus touchants !