LES INFUSOIRES

On sait que la classe des infusoires est immense dans sa variété, autant que dans les moyens de sa reproduction. Cette dénomination à’infusoires est due aux circonstances dans lesquelles nous les voyons se reproduire. En effet, ils semblent être une émanation directe des décompositions végétales soumises à l’infusion. On sait peu de chose sur leur origine ; les recherches entreprises par de patients investigateurs sur leur génération, ont cependant abouti à plusieurs observations importantes. On voit dans leur corps, des petits granules ronds gros ou petits, très-multipliés, qui occupent toute l’étendue de leur corps. On regarde ces corpuscules comme des œufs, appelés à jouer un rôle reproducteur (fig. 1).

Les infusoires ont aussi un mode de propagation fréquemment observé, qu’on nomme l’enkystement. Il se produit à l’intérieur du corps, par une sorte de sécrétion, un noyau qui n’est autre chose que l’animal futur ; par l’induration de ce kyste, il finit par s’intégrer dans son propre cercueil. Dès que cette métamorphose commence, il perd graduellement sa vivacité, et finit par tomber dans un état léthargique. Ensuite, le corps se rompt en petites pelotes, d’où sortent des cellules, qui laissent échapper des infusoires rudimentaires, destines à devenir semblables à leur procréateur.

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Fig. 1. — Infusoires divers.

Les infusoires occupent le damier degré de l’échelle zoologique, et cependant on reconnaît, à première inspection, que dans cette classe si étendue, il existe une graduation très-caractéristique. Sans les considérer sous le rapport de la taille, nous en trouvons qui sont doués d’une organisation ayant certains rapports avec celles des poissons. Ainsi le Carethra plumicornis (fig. 2) possède une tête nettement détachée, un œsophage, des intestins et un système de circulation élémentaire.

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Fig. 2. — Infusoires d’organisation supérieure : Corethra plumicornis.

Ces représentants supérieurs du monde microscopique des eaux vivent pour leur propre compte ; ils n’ont pas la solidarité qui lie leurs congénères inférieurs. Si ceux-ci ne sont pas doués d’une organisation complexe, ils possèdent néanmoins une faculté de reproduction inverse de l’exiguité de leur taille.

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Fig. 3. — Infusoires rudimentaires doués de motililé.

Ils ont aussi, autant que les infusoires organisés, la faculté de la motilité très-développée ; elle ne consiste pas en une reptation comme les infusoires compliqués, mais elle n’en est pas moins vive. Nous avons représenté dans la figure 3 certains mouvements qu’accomplissent les infusoires que l’on rencontre dans la plupart des infusions végétales naturelles. Les uns tourbillonnent avec une vitesse vertigineuse sous le champ du microscope ; les autres rampent méthodiquement, tantôt en ligne droite, tantôt suivait une courbe déterminée. Mais tous accomplissent leur évolution avec une régularité frappante.

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Fig. 4. — Vorticelles adhérentes à un noyau central par une queue rétractile.

Il y a même chez ceux qui ne paraissent qu’un point sous un très-fort grossissement, une force d’animalité moléculaire qui leur permet de tourbillonner avec une incroyable rapidité. On rencontre fréquemment dans les infusions végétales certains infusoires, offrant un curieux spectacle. Si le hasard amène sous l’œil de l’observateur des Vorticelles, on voit (fîg. 4), autour d’un corps inerte, plusieurs masses pelotonnées, qui sont adhérentes par une queue rétractile ; à la moindre appréhension, au moindre trouble produit dans l’eau, elles se pelotonnent avec cette sorte d’appendice caudal.

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Fig. 5. — Diatomées et Navicules des eaux stagnantes.

On est frappé, dans les études microscopiques, de l’affinité qui existe entre le règne végétal et le règne animal.

Si la mobilité est un signe caractéristique de l’animalité, on pourrait supposer que certains sujets participent de l’un et de l’autre. Les Navicules et les Diatomées possèdent à une certaine période de leur existence une animation qui les a fait classer pendant longtemps parmi les infusoires. Suivant M. de Brébisson, cette animation serait due à un effet d’osmose et d’endosmose, à une effervescence de la croissance (fig. 5 et 6).

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Fig. 6. — Diatomée. Arachnoidicus Ehrenbergii X 300

La plus petite expansion d’eau stagnante est un herbier perpétuel où les infusoires se confondent avec les oonferves. Si l’on prend un mince fragment de ces mucosités vertes qui flottent à la surface, on verra au microscope un végétal aquatique parfaitement organisé. Ce sont lie longs filaments membraneux, composés de tubulures sondées les unes aux autres ; autour, des ponctuations vertes sont disposées en hélice ou quelquefois agglomérées en paquets.

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Fig. 7. — Spirogyra avec l'endochrome.


Cette particularité leur a valu le nom de Spirogyra (fig. 7). La matière verte est l’endochrome, ou graine reproductrice. Souvent ces filaments sont

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Fig. 8. — Spirogyra conjugués à différentes périodes de croissance.

reliés deux à deux au moyen d’un appendice cellulaire (fig. 8), enté à angle droit sur le milieu d’une cellule, ce qui leur donne un parallélisme scalariforme. Ainsi constitués, ces étranges représentants de la famille des algues atteignent de grandes longueurs, car on voit rarement les extrémités. Certains mierographes ont avancé qu’ils avaient vu des filaments d’une longueur de plus de deux mètres.

J. Girard.