Les Honnêtetés littéraires/Édition Garnier/8

Œuvres complètes de VoltaireGarniertome 26 (p. 127).

HUITIÈME HONNÊTETÉ.

Un homme d’un génie vaste, d’une érudition immense, d’un travail infatigable, et dont le nom perce dans l’Europe du sein de la retraite la plus profonde[1], entreprend le plus grand et le plus difficile ouvrage dont la littérature ait jamais été honorée ; le meilleur géomètre de la France se joint à lui. Ce géomètre[2], qui unit à la délicatesse de Fontenelle la force que Fontenelle n’a pas, donne un plan de cette célèbre entreprise, et ce plan vaut lui seul une Encyclopédie. Un homme d’un nom illustre, qui s’est consacré aux lettres toute sa vie, physicien exact, métaphysicien profond, très-versé dans l’histoire et dans les autres genres[3], fait lui seul près du quart de cet ouvrage utile ; des hommes savants, des hommes de génie, s’y dévouent ; d’anciens militaires, d’anciens magistrats, d’habiles médecins, des artistes même, y travaillent avec succès, et tous dans la vue de laisser à l’Europe le dépôt des sciences et des arts, sans aucun intérêt, sans vain amour-propre. Ce n’est que malgré eux que le libraire a publié leurs noms. M. de Voltaire surtout avait prié que son nom ne parût point. Quelle a été la reconnaissance de certains hommes, soi-disant gens de lettres, pour une entreprise si avantageuse à eux-mêmes ? Celle de la décrier, de diffamer les auteurs, de les poursuivre, de les accuser d’irréligion et de lèse-majesté[4].


NEUVIÈME HONNÊTETÉ.

Maître Abraham[5] Chaumeix (je ne sais qui c’est), ayant demandé à travailler à ce grand ouvrage, et ayant été éconduit,

  1. Diderot.
  2. D’Alembert.
  3. Jaucourt.
  4. Voyez tome XXIV, pages 469 et suiv.
  5. Voyez tome XVII, page 5 ; et tome XX, page 321.