Les Français dans l’Ouest canadien/26
Chapitre XXVI
La Pérouse sur la côte du Pacifique
La Colombie-Britannique possède la réputation bien établie d’être la plus typiquement anglaise des provinces canadiennes, ce qui ne l’empêche pas d’arborer partout des noms français, le plus souvent très pittoresques. C’est que notre race a joué son rôle traditionnel de pionnière dans la découverte et le développement de cette région.
La plupart des historiens et géographes oublient de mentionner le nom de Jean-François de La Pérouse, à la suite de ceux de Cook et de Vancouver. Ce grand Français explora pourtant la côte du Pacifique, du cap Saint-Élie à San-Francisco, en 1786. C’était au cours de ce fameux voyage autour du monde, qui devait avoir une fin tragique. La Pérouse y découvrit une baie (Lituya) qui avait échappé aux autres navigateurs et qu’il baptisa Port-des-Français. Mais la passe en était dangereuse : dans une simple opération de sondage, vingt et un de ses hommes périrent, emportés par les brisants. « Ce souvenir, écrivit-il, me rendra éternellement malheureux… » Pendant un mois et demi, l’explorateur français circula à travers les îles innombrables du littoral, s’efforçant de préciser les points principaux, donnant ici et là des noms dont quelques-uns ont été conservés : mont Crillon, caps Necker, Louis, Fleurieu. C’est beaucoup plus tard que l’on songea à lui rendre hommage en baptisant une cime mont La Pérouse.
L’obstacle formidable des montagnes Rocheuses avait barré aux fils de La Vérendrye l’accès à ce territoire par l’intérieur du continent. Ce fut un homme de la Compagnie du Nord-Ouest, Alexander Mackenzie, qui, aux prix de dangers incroyables, parvint à l’océan Pacifique en 1793. Il avait avec lui six compagnons descendants de Français : Joseph Landry, Charles Doucette, François Beaulieu, Jean-Baptiste Bisson, François Courtois et Jacques Beauchamp. Simon Fraser, David Thompson et les autres ne purent également accomplir leur œuvre de découverte que grâce à l’aide d’auxiliaires de notre race.
L’arrivée des Oblats
Le nom d’Orégon embrassa d’abord toute l’immense région à l’ouest des Rocheuses, avec les États d’Orégon et de Washington d’aujourd’hui. La partie devenue la Colombie-Britannique s’appela quelque temps Nouvelle-Calédonie. Mais la France désignant ainsi sa colonie pénitentiaire d’Océanie, la reine Victoria suggéra le nom actuel qui fut accepté. Les premiers habitants, après les aborigènes, furent des Canadiens et des Métis français. Dès 1837, ils recevaient de la province de Québec deux missionnaires : les abbés François-Norbert Blanchet et Modeste Demers, destinés à devenir les premiers évêques de la région. Ce fut la répétition de ce qui s’était passé à la Rivière-Rouge. Ces chefs religieux durent attendre pendant vingt ans des auxiliaires en nombre suffisant pour entreprendre un travail d’évangélisation vraiment efficace. Là aussi, l’arrivée des Oblats français allait sauver la situation. Le Jésuite belge Pierre-Jean de Smet avait bien visité presque toutes les tribus indiennes, mais il n’existait aucun service de missions régulières.
Les trois premiers Oblats venus de France, en 1848, dans l’ancien grand Orégon furent les PP. Pascal Ricard, né à Allauch (Bouches-du-Rhône), Casimir Chirouse, du diocèse de Valence, et Charles Pandosy, un Marseillais. Après avoir traversé tout le continent avec les caravanes de charrettes à bâches, ils évangélisèrent pendant dix ans, au prix d’incroyables efforts, les tribus errantes de l’État de Washington. Leur dernier poste se trouvait à Olympia, sur le détroit de Puget, au sud de l’île Vancouver. Le P. Chirouse assista à ses derniers moments le vieux chef Seattle, qui a donné son nom au grand port américain du Pacifique.
À l’époque de la ruée de l’or en Colombie-Britannique (1858), les Oblats se retirèrent graduellement des missions de Puget Sound pour se consacrer à celles de Mgr Demers, dont la juridiction s’étendait alors à toute la province actuelle. Ils s’installèrent à Esquimalt, dans l’île Vancouver. Le village voisin, Victoria, fondé treize ans plus tôt, siège épiscopal de Mgr Demers, prenait déjà l’aspect d’une petite ville. Le P. Louis D’Herbomez, né à Brillon (Nord), dirigea vers divers points de l’île et du continent des missionnaires qui furent les premiers Blancs à pénétrer chez certaines peuplades peu accueillantes.
Les Français venus de Californie
L’île Vancouver, dans sa partie méridionale, devait demeurer longtemps la région la plus peuplée et Victoria la plus forte agglomération de la colonie. L’invasion de prospecteurs, de mineurs, d’aventuriers et de brasseurs d’affaires pressés de s’enrichir venait de la Californie, où les gisements du précieux métal commençaient à s’épuiser. Il y avait parmi eux une bonne proportion de Français. On a dit qu’ils furent quelque temps plus nombreux que les Canadiens et les Américains, mais c’est probablement exagéré. Cette émigration de Français vers la Californie datait des années 1849-1851, période de malaise économique et de chômage. D’autres Français venaient du Mexique, du Chili, de la Louisiane.
Qu’est-ce qui distinguait ces Français d’Europe dont une partie allait se déverser en Colombie-Britannique ? Un journal de San-Francisco, Alta California, écrivait le 13 mai 1853 : « Il y a dans notre ville quelque six mille Français. Ils se livrent à toutes sortes d’occupations : ils sont banquiers, médecins, spéculateurs en terrains, importateurs, revendeurs en gros, marchands au détail, mécaniciens et journaliers. Une bonne proportion d’entre eux sont riches, presque tous industrieux et bons citoyens… Ils viennent de toutes les parties de la France… Très peu se proposent d’établir leur foyer en Californie ; ils soupirent après le temps où ils auront amassé assez d’or pour retourner vivre à l’aise et indépendants chez eux. Ils mettent peu d’empressement à apprendre l’anglais, sans doute parce qu’ils n’ont pas l’intention de se fixer ici définitivement. »
Il y avait certes des hommes capables parmi ces mineurs français et le gouverneur Douglas accorda de bonne heure à l’un d’eux un emploi officiel. O.-J. Travaillot — mieux connu comme le capitaine Travaillot — arrivé dans la colonie au printemps 1858, s’était porté très avant à l’intérieur. Ayant envoyé quelques rapports au gouverneur, il fut nommé presque aussitôt officier de la douane pour le district de Fort Dallas, au coude de la rivière Thompson. Ses fonctions consistaient à émettre des permis aux mineurs et à percevoir de ceux-ci les droits légaux. Il avait le pouvoir de lever et d’entretenir un personnel de huit hommes pour le service du gouvernement. Travaillot fut ensuite longtemps commissaire adjoint de l’or. Ce fut lui qui arpenta l’emplacement de la ville de Hope et en traça le plan. À noter qu’un grand nombre des rapports adressés par ce haut fonctionnaire au gouverneur étaient rédigés en français et passèrent tels quels dans les documents parlementaires.
« Le Courrier de la Nouvelle-Calédonie »
Un autre fait qui met en relief l’importance de l’élément français fut un journal publié dans sa langue — le premier à l’ouest des Grands Lacs. Le Courrier de la Nouvelle-Calédonie vit le jour à Victoria le 11 septembre 1858 et paraissait trois fois par semaine. Il se présentait comme « journal politique et littéraire, organe de la population française dans les possessions anglaises ». Son directeur était un certain comte Paul de Garro, réfugié politique du Second Empire. Le matériel d’imprimerie, assez rudimentaire, appartenait à Mgr Demers. Il consistait en une presse à bras et quelques casses de caractères reçues en don de l’Œuvre de la Propagation de la Foi, pour les besoins du diocèse. L’aventure était osée et l’animateur l’avouait carrément dans son premier numéro. « En entreprenant la publication d’un journal français dans cette colonie, écrivait-il, je ne me suis pas dissimulé les nombreuses difficultés que j’aurais à surmonter pour édifier une œuvre durable… Il m’a fallu en quelque sorte créer avec presque rien Le Courrier de la Nouvelle-Calédonie. Cependant, fort de la sympathie que mes compatriotes ne manqueront pas d’accorder à une feuille française, je suis hardiment entré dans la lice, comptant sur l’appui de mes amis et de tous ceux qui, à un titre quelconque, aiment le nom français… Si le concours de la communauté ne me fait pas défaut, j’espère que Le Courrier de la Nouvelle-Calédonie tiendra plus qu’il ne promet et que le résultat sera aussi satisfaisant pour les intérêts des uns et des autres que pour ceux de votre dévoué serviteur — P. de Garro. »
Ces espoirs ne se réalisèrent pas. Au bout de trois semaines, le journal dut cesser de paraître, sans doute à cause d’une clientèle trop restreinte et de ressources insuffisantes. Son directeur devint garçon de restaurant. Trois années plus tard, le malheureux périt victime d’une explosion de chaudière sur un bateau qui le transportait, avec d’autres chercheurs d’or, vers les mines du Caribou.
Mais la petite presse pionnière de fabrication française ne devait pas rester inactive. Elle imprima d’abord, à Victoria, le British Colonist, toujours vivant et centenaire, qui eut pour fondateur le célèbre et pittoresque Amor de Cosmos, futur premier ministre de sa province. Ensuite, elle prit le chemin de la grande région minière et travailla longtemps pour le Cariboo Sentinel, à Barkerville. En 1880, elle passa au service de l’Inland Sentinel, qui se publia successivement à Emory (bas Fraser) et à Kamloops. En 1912 seulement, après plus d’un demi-siècle de constant et loyal labeur, la vaillante petite presse française prit enfin sa retraite en revenant aux lieux de ses premiers exploits. On la conserve comme une relique historique au pensionnat de Sainte-Anne, de Victoria, non loin du Palais législatif.
La colonie française de Victoria
Beaucoup de chercheurs d’or français, comme les autres, ne firent qu’un bref séjour en Colombie, ou rebroussèrent chemin sans même s’être rendus jusqu’aux placers, d’accès très difficile. Mais un noyau représentatif resta au pays, surtout à Victoria et dans la région, où on les vit bientôt à la tête de fermes prospères. Pour répondre aux besoins de la population, les Oblats ouvrirent le Collège Saint-Louis, qui recevait indistinctement les fils des indigènes et ceux des nouveaux venus, catholiques, protestants, israélites ; mais il devait se transporter assez vite à New-Westminster.
Il est notoire que les Français jouissaient d’une excellente réputation dans la capitale. Vers la fin de 1861, le bruit ayant couru que de nouvelles familles de San-Francisco se préparaient à venir rejoindre leurs compatriotes, le Colonist écrivait : « Qu’elles viennent ! Nous leur ferons bon accueil. Les Français sont des colons paisibles, rangés, industrieux et économes. Plus nous en aurons, mieux ce sera ». Dix années d’expérience en Californie leur avaient profité : on n’eut jamais à leur reprocher de se tenir à l’écart des autres groupes et de répugner à apprendre l’anglais. En retour, notre propre langue gagna aisément des sympathies dans ce milieu cosmopolite, grâce à des professeurs de choix qui furent très appréciés.
B. Deffis, ancien lieutenant de l’armée sous Louis-Philippe, était venu en Californie après la Révolution de 1848, et plus tard en Colombie-Britannique. Il avait coutume de passer l’été dans les mines et l’hiver à Victoria où, pendant plusieurs années, il dirigea des cours très suivis de français, d’espagnol et d’anglais. Cet homme avait reçu une formation scientifique poussée. Correspondant du Colonist dans la région du Caribou, il envoyait à ce journal des nouvelles intéressantes et détaillées sur l’activité minière. Deffis s’intéressait particulièrement à l’exploitation des mines de quartz. Il découvrit un filon dans le voisinage de Williams Creek et demeura au Caribou jusqu’à sa mort, survenue accidentellement en 1873.
L’une des premières Françaises à atteindre la Californie avait été Mme V.-A. Pattibeau, qui y laissa un renom d’éducatrice. Ayant suivi ses compatriotes en Colombie, elle fonda à Victoria une école qu’elle dirigea avec succès pendant de longues années. Elle finit ses jours dans la capitale en 1880.
Les émigrés français se distinguèrent aussi dans le chant et la musique. Le professeur Georges Sandrie présida aux destinées de la doyenne des organisations musicales, la « Philharmonic ». Ses compatriotes, tout en participant aux manifestations culturelles de la majorité, désiraient aussi maintenir leur individualité propre. Ils lancèrent la « Société des Enfants de Paris », que dirigea également Sandrie. Son premier concert, au programme exclusivement français, eut lieu sous les auspices du gouverneur Douglas et remporta un brillant succès. Cependant le groupe des artistes français fut rapidement absorbé par son aîné. Un incident des dernières années de Sandrie montre l’harmonie qui existait entre les Français et leurs concitoyens d’autres origines. Le vieux professeur, infirme, étant devenu incapable de subvenir à ses besoins et à ceux de son épouse, on organisa un bal au profit du couple vers qui allaient toutes les sympathies.
Deux grands philanthropes :
Driard et Rueff
Mais il faut placer au premier rang des Français qui vécurent à Victoria pendant cette période Sosthènes Driard et Jules Rueff. Ces deux amis, venus de San-Francisco en 1858, allaient très bien réussir en affaires, celui-ci comme marchand, l’autre comme propriétaire d’hôtels. Victoria, porte d’entrée des États-Unis dans les possessions anglaises, où l’on vient de découvrir l’or, offre à l’industrie hôtelière une mine plus sûre que beaucoup d’autres. Le premier établissement dont il est fait mention s’appelait « Hôtel de France », ce qui nous fixe sur la nationalité de son maître. Driard fut bientôt à la tête du « Colonial » et d’un autre portant son nom, qui allait devenir fameux sur tout le continent américain pour sa table incomparable et comme centre de ralliement d’une jeune ville en plein essor. Grâce à sa position sociale unique, à ses dons d’organisateur et à son intérêt pour les œuvres charitables, Driard devint tout de suite le chef reconnu de la colonie française. L’hôtelier et son ami allaient, par leurs réalisations philanthropiques, mériter la gratitude non seulement de leurs compatriotes, mais de la population tout entière.
Dès 1860, ils fondaient la « Société française de bienfaisance et de secours mutuels de Victoria ». Moyennant une cotisation modeste d’un dollar par mois, les membres — Français et autres — recevaient soins médicaux et remèdes gratuits dans un hôpital qui dut être transformé, agrandi et fonctionna pendant près d’un quart de siècle, sans un sou de dette. Le premier médecin fut le Dr Nicolet-Michel Clerjon, un Parisien, qui pratiquait dans la colonie depuis 1858. La Société était ouverte aux personnes de toutes nationalités ; cependant il était stipulé dans les statuts que le comité de onze directeurs comprendrait une majorité de Français et que les procès verbaux seraient rédigés en langue française. L’hôpital ferma ses portes en 1884, mais la Société continua d’assurer à ses membres, en cas de maladie, l’assistance médicale et une indemnité de dix dollars par semaine. En 1891, le « Royal Jubilee Hospital », qui venait de s’ouvrir, se fusionnait avec la Société française de bienfaisance et acquérait sa propriété, d’une valeur de dix à douze mille dollars. En retour, celle-ci obtenait le droit d’élire trois représentants au bureau de direction et tous ses membres en règle devenaient membres à vie du « Royal Jubilee Hospital », ce qui leur accordait le traitement gratuit d’un malade de première classe. Les derniers bénéficiaires de ce remarquable arrangement ont disparu il y a moins de dix ans.
Les deux fondateurs n’avaient pas assisté à cette évolution de leur œuvre exigée par les temps nouveaux. Sosthènes Driard était mort en 1872, regretté de tous pour sa grande âme charitable. L’Assemblée législative de Victoria ajourna ses débats pour permettre à ses membres d’assister aux funérailles. Quelques mois après, Jules Rueff, miné par la maladie, retournait en France et y décédait deux ans plus tard.
Le renom de l’hôtel Driard
Son propriétaire disparu, l’hôtel Driard passa entre les mains de Redon, un fils du Périgord, pays des truffes et des pâtés de foie gras, qui sut lui conserver son haut renom pendant une vingtaine d’années. Pierre Foursin, de passage à Victoria en 1890, assure que le banquet qui y fut offert par les notables de la ville à un groupe de délégués européens dont il faisait partie était « un chef-d’œuvre ». Et il ajoute : « Le Driard n’a pas seulement obligé tous les Yankees à confesser la supériorité de la gloire de la cuisine française ; il a créé sur place une collection de connaisseurs, une clientèle locale digne de lui. Nulle part en Amérique on ne trouve de plus fervents disciples de la bonne chère, des vins français meilleurs et des fines champagnes aussi authentiques. On a même poussé le culte jusqu’à acclimater, en vue de l’immolation, des faisans qui se multiplient en liberté dans les bois environnants. M. Redon, animé par le zèle d’un sacrificateur antique, convaincu à juste titre que la gloire du Driard est une gloire française, désirerait voir des fermiers français venir s’établir dans les environs de Victoria, qu’ils approvisionneraient d’agréables primeurs, de beurre fin, de côtelettes de pré-salé, de tendres filets, d’œufs frais et de volailles à point. »
À cette époque, on le voit, il n’y avait plus trace des premiers cultivateurs français amenés par la ruée de l’or. Depuis 1870, ils avaient suivi les mineurs, les uns regagnant leur patrie, les autres la Californie. Si le groupe avait pu malgré son petit nombre, faire bonne figure alors que le pays était encore peu peuplé (Victoria n’avait que 3,000 âmes en 1870 et 5,000 en 1880), l’affluence d’immigrants après l’ouverture du chemin de fer transcontinental, en 1887, devait fatalement le submerger.
À Nanaimo, les premiers Français et Belges avaient été attirés par les mines d’anthracite. Ce noyau s’est maintenu et a heureusement progressé. Un colon de cet endroit, Fort, du département du Nord, fut longtemps le fournisseur de vin de cerise pour la maison du gouverneur — vin qu’il fabriquait lui-même avec les cerises de son verger.
Un Français de naissance lieutenant-gouverneur de la province
Avant de quitter l’Île Vancouver, il nous reste à parler d’un personnage qui tranche sur les précédents. En 1900, un Français très distingué débarquait à Victoria, non comme réfugié ou colon, mais pour y occuper le premier rang à la direction de la province. Chose étrange, cette Colombie-Britannique si foncièrement anglaise par ses origines, est la seule qui eut pour lieutenant-gouverneur un Français de naissance.
La carrière politique de sir Henri-Gustave Joly de Lotbinière est assez curieuse. Il naquit à Épernay (Marne) en 1829. Son père, Pierre-Gaspard-Gustave Joly de Marval, était un calviniste dont les ancêtres avaient longtemps habité Genève. Par sa mère, Julia-Christine Chartier de Lotbinière, il se rattachait à cette famille qui, sous le régime français, avait occupé des charges au Canada pendant plus d’un siècle. Venu au pays autour de sa vingtième année, Joly étudia le droit, fut admis au barreau du Bas-Canada, devint député libéral du comté de Lobtinière et recueillit tout naturellement ce nom de sa mère.
Comme homme politique, il se montra l’un des plus ardents adversaires de la Confédération. Longtemps chef de l’opposition à Québec, il fut premier ministre pendant quelques mois, réussissant à se maintenir sans majorité. Au moment de l’affaire Riel, se trouvant en désaccord avec tous ceux de son parti, il crut devoir remettre son mandat, geste où le public vit une belle marque de probité. Lorsque les libéraux arrivèrent au pouvoir à Ottawa, Joly était membre de la Chambre des Communes. Laurier lui confia un portefeuille et quatre ans plus tard (1900), il le nommait lieutenant-gouverneur de la Colombie-Britannique. Ce gentleman de haute distinction, marié à une Anglaise et versé en sylviculture, s’acquitta parfaitement de ses fonctions.
Sir Henri-Gustave Joly de Lotbinière mourut à Québec en 1908. Son nom demeure attaché à la Fête des Arbres, dont il fut le grand inspirateur.[1]
- ↑ Jean-François de Galaup, La Pérouse, Baltimore, 1937
Th. Ortolan. O.M.I. Les Oblats de Marie-Immaculée, Paris, 1914.
Willard E. Ireland. The French in British Columbia, dans « British Columbia Historical Quarterly », 1949, vol. XIII, No 2.
Aegidius Fauteux, The Introduction of Printing into Canada, Montréal, 1930.
Pierre Foursin, La Colonisation française au Canada.