Calmann-Lévy (p. 179-180).


XXIV


Les dimanches, tout parfumés d’encens, se consumaient en offices dans une allégresse langoureuse. À vêpres, pendant que les psalmodies claires des élèves traînaient dans la chapelle, Jean contemplait quelque figure de femme effacée dans l’ombre des tribunes. C’est là que, pendant l’office, les mères, les sœurs des élèves se tenaient, agenouillées et pourtant hautaines. Au chant de l’Ave maris stella, le fils du relieur levait les yeux sur ces femmes de vieille race dont les moins belles se sentent d’un grand prix et gardent une fierté naturelle et simple. Les chants, l’encens, les fleurs, les images pieuses, tout ce qui fait qu’on se trouble et qu’on prie amollissait son âme et la livrait tremblante à ces patriciennes. Mais c’est Gabrielle qu’il aimait en elles. Il l’appelait, l’évoquait, et tout ce qui dans la religion donne à l’amour l’attrait de la chose défendue prenait pour lui un intérêt puissant. Athée, il aimait le Dieu de Madeleine et goûtait la religion qui a donné aux amants une volupté de plus, la volupté de se perdre.