GUÉRISON D’UNE FEMME POSSÉDÉE, AU TOMBEAU D’UN SAINT

FRESQUE DE FRANCISCO GIORGIO. PALAIS PUBLIC, À SIENNE (DERNIER TIERS DU (XVe SIÈCLE)

L’Histoire de la peinture italienne, de Rosini, nous a fait connaître une fresque de Francesco di Giorgio, dans laquelle est figurée une démoniaque. Le docteur Tommaso-Tommasi, de Florence, en a fait faire à notre intention une photographie qui nous permet d’apprécier l’œuvre du peintre dans toute sa vérité.

Le corps d’un saint moine est exposé entouré de religieux. À droite, un groupe d’infirmes viennent implorer la guérison. À gauche, on amène une possédée. (Le dessin que nous donnons ici reproduit cette partie du tableau).


GUÉRISON D’UNE FEMME POSSÉDÉE AU TOMBEAU D’UN SAINT
Dessin au trait (d’après une photographie) d’un fragment de Francesco di Giorgio au Palais Public. Sienne.

La possédée s’agite maintenue par deux hommes dont l’un la saisit à bras le corps, pendant que l’autre, en avant, lui tient l’épaule. Elle se renverse en arrière, le visage tourné en haut, le bras gauche levé presque perpendiculairement, le bras droit au contraire abaissé. La bouche entr’ouverte laisse échapper un petit diable tenant une fourche. Le trait le plus saillant à relever est le geste de la main gauche. Nous y retrouvons une attitude bien voisine du geste hiératique prêté d’ordinaire aux exorcistes et aux personnages sacrés. Par quelle contradiction l’artiste a-t-il donné ce geste à la main de l’esclave du démon ? Nous pensons qu’il faut voir là une preuve de la sincérité du peintre, qui très vraisemblablement n’a eu d’autre motif de figurer cette attitude de la main (les trois premiers doigts étendus, les deux derniers fléchis), que celui de l’avoir observée sur la nature[1].

En effet, au milieu des contorsions de ces crises convulsives dont l’aspect est si effrayant que nous les avons décrites sous le nom de crises démoniaques nous avons vu souvent les doigts reproduire la pose en question. Dans l’espèce, c’est là un geste dû uniquement à la contracture, et dans lequel il n’entre aucune signification spéciale en rapport avec une hallucination. Nous savons d’ailleurs que cette attitude de la main, que nous avons étudiée au sujet des contractures de l’hypnotisme sous le nom de « griffe cubitale », est due à l’action simultanée de tous les muscles tributaires d’un des gros troncs nerveux du membre supérieur, le nerf cubital.

Cette peinture est considérée comme une des meilleures de Francesco di Giorgio, plus généralement connu comme architecte. Crowe et Cavalcasselle l’apprécient en ces termes flatteurs : Genuine, very careful and a pleasing work[2].


  1. Voir les figures des pages 103, 104 et 105.
  2. A New History of Painting in Italy from the second to the sexteenth Century, by J.-A. Crowe and G.-B. Cavalcasselle, vol. iii, p. 67. London, 1886.