Les Chroniques de Sire Jean Froissart/Livre I, Partie II/Chapitre LXXIII

Texte établi par J. A. C. Buchon (Ip. 382-385).

CHAPITRE LXXIII.


Comment le prévôt des marchands et ses alliés avoient proposé de courir et détruire Paris ; et comment le dit prévôt fut mis mort ; et comment le duc de Normandie vint à Paris.


Le prévôt des marchands de Paris et ceux de son alliance et accord avoient souvent entr’eux plusieurs secrets conseils pour savoir comment ils se pourroient maintenir ; car ils ne pouvoient trouver par nul moyen mercy ni remède au duc de Normandie ; dont ce les ébahissoit plus que autre chose. Si regardèrent finablement que mieux valoit qu’ils demeurassent en vie et en bonne prospérité du leur et de leurs amis que ce qu’ils fussent détruits ; car mieux leur valoit à occire que être occis. Si s’arrêtèrent du tout sur cel état, et traitèrent secrètement devers ces Anglois qui guerroyoient ceux de Paris ; et se porta certain traité et accord entre les parties, que le prévôt des marchands et ceux de sa secte devoient être tous prêts et ordonnés entre la porte Saint-Honoré et la porte Saint-Antoine, tellement que, à heure de minuit, Anglois et Navarrois devoient tous d’une sorte y venir, si pourvus que pour courir et détruire Paris, et les devoient trouver toutes ouvertes ; et ne devoient les dits coureurs déporter homme ni femme, de quelque état qu’ils fussent, mais tout mettre à l’épée, excepté aucuns que les ennemis devoient connoître par les signes qui seroient mis à leurs huis et fenêtres.

Celle[1] propre nuit que ce devoit avenir, inspira Dieu et éveilla aucuns des bourgeois de Paris qui étoient de l’accord, et avoient toujours été, du duc de Normandie ; desquels messire Pépin des Essarts et messire Jean de Charny se faisoient chefs : et furent iceux par inspiration divine, ainsi le doit-on supposer, informés que Paris devoit être courue et détruite. Tantôt ils s’armèrent et firent armer tous ceux de leur côté, et révélèrent secrètement ces nouvelles en plusieurs lieux, pour avoir plus de confortans.

Or s’en vint le dit messire Pépin et plusieurs autres, bien pourvus d’armures et de bons compagnons, et prit le dit messire Pépin la bannière de France, en criant : « Au roi et au duc ! » et les suivoit le peuple ; et vinrent à la porte Saint-Antoine, où ils trouvèrent le prévôt des marchands qui tenoit les clefs de la porte en ses mains[2]. Là étoit Jean Maillart, qui pour ce jour avoit eu débat au prévôt des marchands, et à Josseran de Mascon[3], et s’étoit mis avecques ceux de la partie du duc de Normandie. Et illecques fut le dit prévôt des marchands fortement argué, assailli et débouté ; et y avoit si grand’noise et criée du peuple qui là étoit, que l’on ne pouvoit rien entendre ; et disoient : « À mort ! à mort ! tuez, tuez le prévôt des marchands et ses alliés, car ils sont traîtres. »

Là eut entr’eux grand’hutin ; et le prévôt des marchands, qui étoit sur les degrés de la bastide Saint-Antoine, s’en fût volontiers fui, s’il eût pu : mais il fut si hâté que il ne put ; car messire Jean de Charny le férit d’une hache en la tête et l’abattit à terre ; et puis fut féru de maître Pierre de Fouace et autres qui ne le laissèrent jusques à tant que il fut occis, et six de ceux qui étoient de sa secte, entre lesquels étoient Philippe Guiffart, Jean de Lille, Jean Poiret, Simon le Paonnier[4], et Gille Marcel[5] ; et plusieurs autres traîtres furent pris et envoyés en prison. Et puis commencèrent à courir et à chercher parmi les rues de Paris, et mirent la ville en bonne ordonnance, et firent grand guet toute nuit[6].

Vous devez savoir que sitôt que le prévôt des marchands et les autres dessus nommés furent morts et pris, ainsi que vous avez ouï, et fut le mardi dernier jour de juillet, l’an mil trois cent cinquante huit, après dîner, messages partirent de Paris très hâtivement pour porter ces nouvelles à monseigneur le duc de Normandie qui étoit à Meaux, lequel en fut très grandement réjoui, et non sans cause. Si se ordonna pour venir à Paris. Mais avant sa venue, Josseran de Mascon qui étoit trésorier du roi de Navarre, et Charles Coussac échevin de Paris, lesquels avoient été pris avecques les autres, furent exécutes et eurent les têtes coupées en la place de Grève[7], pourcequ’ils étoient traîtres et de la secte du prévôt des marchands. Et le corps du dit prévôt et de ceux qui avecques lui avoient été tués, furent atraînés en la cour de l’église de Sainte-Catherine du val des écoliers ; et tout nus, ainsi qu’ils étoient, furent étendus devant la croix de la dite cour, ou ils furent longuement, afin que chacun les pût voir qui voir les voudroit ; et après furent jetés en la rivière de Saine.

Le duc de Normandie qui avoit envoyé à Paris de ses gens et grand’foison de gens d’armes, pour reconforter la ville et aider à la défendre contre les Anglois et Navarrois qui étoient environ et y faisoient guerre, se partit de Meaux où il étoit, et s’en vint hâtivement à Paris, à noble et grand’compagnie de gens d’armes ; et fut reçu en la bonne ville de Paris de toutes gens à grand’joie ; et descendit pour lors au Louvre[8]. Là étoit Jean Maillart de-lez lui, qui grandement étoit en sa grâce et en son amour ; et au voir dire, il l’avoit bien acquis, si comme vous avez ouï ci-dessus recorder ; combien que par avant il fut de l’alliance au prévôt des marchands, si comme l’on disoit.

Assez tôt après, manda le duc de Normandie la duchesse sa femme, les dames et les damoiselles qui se tenoient et avoient été toute la saison à Meaux en Brie. Si vinrent à Paris ; et descendit la duchesse en l’hôtel du duc, que on dit à Saint-Pol, où il étoit retrait ; et là se tinrent un grand temps.

Or vous dirai du roi de Navarre comment il persévéra, qui pour le temps se tenoit à Saint-Denis, et messire Philippe de Navarre son frère de-lez lui.

  1. Le continuateur de Nangis, qui parle de ce traité, p. 620, comme ayant été conclu directement avec le roi de Navarre, ajoute que ce prince, une fois maître de la ville devait s’emparer de la couronne, du moins à ce que l'on croyait, ut opinabatur, et en faire exclure non-seulement le régent, mais le roi qui était prisonnier en Angleterre. Villani dit pareillement que le roi de Navarre devait mettre sur sa tête la couronne de France et en faire hommage au roi d’Angleterre auquel il restituerait le comté d’Anghien (vraisemblablement de Guines) et d’autres domaines ; à quoi il ajoute que le roi d’Angleterre devait aider le roi de Navarre à se mettre en possession du royaume, et aussitôt après l’exécution de ces projets faire couper la tête au roi Jean son prisonnier. Cette dernière circonstance n’est nullement vraisemblable ; Édouard était trop généreux pour commettre une pareille atrocité, quel qu’en dût être le fruit. Il n’en est pas de même des autres conventions faites avec le roi de Navarre : elles n’ont rien d’opposé au caractère connu des deux princes. M. Secousse croit même avoir trouvé le traité qu’ils conclurent alors, dans Rymer. Il est daté du 1er août 1351. M. Secousse prétend que la date a été mal lue et que ce traité ne peut se lier avec les événemens de cette année, pendant laquelle le roi de Navarre était dans les bonnes grâces du roi Jean, qui lui avait fait épouser sa fille et l’avait établi son lieutenant général en Languedoc. Il conclut de ce raisonnement et de plusieurs autres qui n’ont pas moins de probabilité, qu’on doit rapporter cet accord au 1er août 1358, lendemain de la mort de Marcel. Mais s’il fut fait dans cette circonstance, Villani s’est trompé sur la principale clause ; car il y est dit qu’à l’exception du comté de Champagne et de Brie et des autres pays cédés au roi de Navarre, le roi d’Angleterre aurait la couronne et le royaume de France.
  2. Suivant l’auteur des Chroniques de France, il portait une boîte dans laquelle étaient renfermées les lettres du roi de Navarre qu’il refusa de montrer au peuple ; et ce refus fut la cause de sa mort. Suivant les Chroniques manuscrites conservées à la Bibliothèque du Roi, cotées l’une 9,618, l’autre 9,656, ces lettres étoient non du roi de Navarre, mais du régent.
  3. Voici en peu de mots ce que les Chroniques de France disent de cette contestation : le mardi, dernier juillet, Marcel, ayant dîné à la bastille Saint-Denis, ordonna aux gardes d’en remettre les clefs à Josseran de Mascon, trésorier du roi de Navarre. Ils refusèrent d’obéir, ce qui donna lieu à une dispute assez vive. Jean Maillard, garde de l’un des quartiers de la ville, de la partie de ladite bastille, informé de ce qui se passait, accourut, prit le parti des gardes, puis montant à cheval, une bannière du roi de France à la main, se mit à crier : Montjoie Saint-Denis au roi ! et au duc ! et arriva aux halles où il demeura pendant le reste de l’action.
  4. Il est nommé Simon de Paumier dans les Chroniques de France.
  5. Suivant les mêmes chroniques, Gilles Marcel et Jean de Lille furent tués dans l’hôtel des Hérauts, près de la porte Baudoyer ; et Jean Poiret fut tué à la bastille Saint-Martin.
  6. Un grand nombre de manuscrits et tous les imprimés rapportent ces faits d’une manière si différente que nous devons les citer ici : les imprimés abrègent toutefois le récit.

    « Celle propre nuit que ce devoit advenir, inspira Dieu aucuns des bourgeois de Paris qui toujours avoient été de l’accord du duc, desquels Jean Maillart et Simon Maillart son frère se faisoient chefs ; et furent ceux, par inspiration divine, ainsi le doit-on supposer, informés que Paris devoit être courue et détruite. Tantôt ils s’armèrent et firent armer tous ceux de leur côté, et révélèrent secrètement ces nouvelles en plusieurs lieux pour avoir plus de confortants. Et s’en vinrent Jean et Simon Maillart, pourvus d’armures et de bons compagnons bien avisés, pour savoir quelle chose ils devoient faire, un petit devant mi-nuit à la porte Saint-Antoine, et trouvèrent le dit prévôt des marchands, les clefs de la porte en ses mains. Le premier parler que Jean Maillart lui dit, ce fut que il lui demanda par son nom : « Étienne, Étienne, que faites-vous ci à cette heure ? » Le prévôt lui répondit : « Jean, à vous qu’en monte de savoir ? Je suis ci pour prendre garde de la ville dont j’ai le gouvernement. » — « Par Dieu, répondit Jean Maillart, il ne va mie ainsi ; mais n’êtes ci à cette heure pour nul bien ; et je le vous montre, dit-il à ceux qui étoient de-lez lui, comment il tient les clefs des portes en ses mains pour trahir la ville. » Le prévôt des marchands s’avança et dit : « Vous mentez. » — « Par Dieu, répondit Jean Maillart, traître, mais vous vous mentez ; » et tantôt férit à lui et dit à ses gens : « À la mort, à la mort tout homme de son côté, car ils sont traîtres. » Là eut grand hutin et dur : et s’en fût volontiers le prévôt des marchands fui s’il eût pu ; mais il fut si hâté qu’il ne put. Car Jean Maillart le férit d’une hache sur la tête et l’abattit à terre, quoique ce fût son compère, ni ne se partit de lui jusqu’à ce qu’il fût occis et six de ceux qui là étoient, et le demeurant pris et envoyé en prison ; et puis commencèrent à estourmir et à éveiller les gens parmi les rues de Paris. Si s’en vinrent Jean Maillart et ceux de son accord parmi la porte Saint-Honoré et trouvèrent gens de la sorte du dit prévôt. Si les encoulpèrent de trahison ; ni excusation qu’ils fissent ne leur valut rien. Là en y eut plusieurs pris et envoyés en divers lieux en prison ; et ceux qui ne se laissoient prendre étoient occis sans merci. Celle propre nuit on en prit plus de soixante en leur maison, qui furent tous encoulpés de trahison et du fait de quoi le dit prévôt étoit mort : car ceux qui pris étoient confessèrent tout le meschef. Lendemain au matin ce Jean Maillart fit assembler la plus grand’partie de la communauté de Paris au marché ès halles ; et quand ils furent tous venus, il monta sur un échafaud et puis remontra généralement pour quelle raison il avoit occis le prévôt des marchands et en quel forfait il l’avoit trouvé ; et recorda bellement et sagement, de point en point, toute l’avenue du prévôt et de ses alliés, et comment, en celle propre nuit, la cité de Paris devoit être courue et détruite, si Dieu par sa grâce n’y eût mis remède, qui les éveilla et les avoit inspirés de connoître celle trahison. Quand le peuple, qui présent étoit, ouït ces nouvelles, il fut moult ébahi du péril où il avoit été ; et en louoient les plusieurs Dieu, à jointes mains, de la grâce que faite leur avoit. Là furent jugés à mort, par le conseil des prud’hommes de Paris et par certaine science, tous ceux qui avoient été de la secte du prévôt des marchands. Si furent tous exécutés en divers tourments de mort. Les choses faites et accomplies, Jean Maillart qui grandement étoit en la grâce et amour de la communauté de Paris, et aucuns prudes hommes abers avecques lui, envoyèrent Simon Maillart et deux maîtres de parlement, maître Étienne Alphonse et maître Jean Pastourel, devers le duc de Normandie qui se tenoit à Charenton. Ceux lui recordèrent pleinement et véritablement l’avenue de Paris et la mort du dit prévôt et de ses alliés, dont le dit duc fut moult réjoui ; et prièrent les dessus dits au duc qu’il voulsist venir à Paris pour aider à conseiller la ville en avant ; car tous ces adversaires étoient morts. Le duc répondit que ce feroit-il volontiers ; et se partit du pont de Charenton, messire Arnoul d’Andrehen et le seigneur de Roye et aucuns chevaliers en sa compagnie, et s’en vint dedans la bonne ville de Paris, où il fut recueilli de toutes gens à grand’joie, et descendit adonc au Louvre. Là étoit Jean Maillart de-lez lui, qui grandement étoit en sa grâce et en son amour ; et à voir dire, il avoit bien acquis, si comme vous avez ouï ci-dessus recorder. Assez-tôt après manda le duc de Normandie la duchesse sa femme, etc. » comme dans le texte.

    Telle est la leçon du plus grand nombre des manuscrits et de tous les imprimés ; tel est aussi le fondement sur lequel on a cru que Maillart avait tué de sa main le prévôt Marcel et avait seul opéré la révolution qui sauva Paris et peut-être le royaume ; car il n’est pas même nommé par les autres historiens contemporains, à l’exception de l’auteur des Chroniques de France qui, comme on vient de le voir, ne lui donne qu’une part très légère à l’action.

    Il faut exposer maintenant les principales raisons qui m’ont engagé à préférer à cette leçon celle du texte qui ôte à Maillart le titre de libérateur de Paris pour le donner à Pépin des Essars et à Jean de Charny.

    1o Le nouveau texte est tiré de deux manuscrits de la Bibliothèque du Roi, qui sont peut-être les plus anciens et les plus authentiques qu’on puisse trouver dans aucun dépôt. L’un sous le no 8318, porte une date qui en atteste l’ancienneté ; l’autre, no 8319, est si conforme au premier pour les caractères extérieurs, qu’on ne peut douter qu’il ne soit du même temps. On observe cependant assez de variété dans les leçons pour juger que ces deux manuscrits n’ont été copiés ni l’un sur l’autre, ni sur le même original. Ce texte se trouve encore dans un manuscrit de la Bibliothèque de Soubise, et dans un autre manuscrit de la Bibliothèque du Roi, sous le no 6750. Celui-ci est moins ancien que le précédent : mais comme il n’est copié sur aucun des trois, il représente nécessairement un manuscrit plus ancien et forme un quatrième témoignage en faveur du nouveau texte.

    2o Le nouveau texte s’accorde beaucoup mieux que l’ancien, tant avec les historiens contemporains qu’avec les autres monumens du temps, auxquels il peut même servir de commentaire ou de supplément. C’est ainsi, par exemple, qu’il supplée l’omission des Chroniques de Saint-Denis, en nous instruisant des détails de la mort de Marcel, en nommant les acteurs qui eurent la principale part à cet événement, circonstances omises par le chroniqueur et par les autres historiens ; en nous apprenant quelles furent les suites de l’action de Pépin des Essars que le chroniqueur nous laisse ignorer.

    Il ne se concilie pas moins bien avec les autres monumens. Tout ce qu’on y lit concernant Maillart et Pépin des Essars est confirmé par deux pièces du trésor des Chartes*, dont l’authenticité ne peut être suspecte. Par la première, datée de l’ost devant Paris, au mois de juillet 1358, le régent donne au comte de Porcien (Jean de Chastillon) pour lui et ses héritiers à perpétuité, en considération de ses services, 500 livres de revenu, en rente ou en terre, à prendre sur tous les biens qu’avait possédés Jean Maillart dans le comté de Dammartin et ailleurs, et qui avaient été confisqués sur ledit Maillart, pour ce que, dit le régent, il a été et est rebellé, ennemi et adversaire de la couronne de France, de monseigneur et de nous, et se arme en la compagnie du prévôt des marchands, échevins et bourgeois de la ville de Paris, rebelles et adversaires de la dite couronne, de notre dit seigneur et de nous, en commettant crime de lèze-majesté royale, etc.

    Il est inutile d’indiquer le rapport de ces lettres avec la nouvelle leçon et leur opposition avec l’ancienne, suivant laquelle Maillart est un sujet fidèle qui a toujours été constamment attaché au parti du régent.

    La seconde des pièces dont on vient de parler concerne Pépin des Essars. Ce sont des lettres de rémission datées du mois de février 1368, la cinquième année du règne de Charles V, dans lesquelles il est dit qu’avant que Marcel eût été tué, Pépin des Essars, chevalier, son frère Martin des Essars, Jacques de Pontoise, huissier d’armes, et plusieurs autres, allèrent à l’hôtel de Josseran de Mascon, situé près de Saint-Eustache, pour icellui comme traître faire occire et mettre à mort ; au quel hostel il ne put être trouvé ; et pour ce se départirent d’icellui… se transportèrent en l’hôtel de notre dite ville (c’est le roi qui parle) prirent notre bannière qui là étoit, et atout s’en allèrent à la bastille de Saint-Antoine… au quel lieu le prévôt des marchands, Philippe Giffart et autres traîtres furent occis et mis à mort.

    Si ces raisons ne paraissaient pas suffisantes pour justifier la préférence que je donne au nouveau texte sur l’ancien, on peut consulter un mémoire imprimé dans le Recueil de l’Académie des Belles-Lettres, vol. xliii, p. 563, où ce point d’histoire est discuté avec l’étendue nécessaire et de manière à ne laisser aucun doute sur cet objet.

    * Registre 86, pièce 142, et reg. 99, p. 695. Elles ont été publiées dans les Mémoires de Charles-le-Mauvais, t. ii, p. 79 et p. 296.

  7. Cette exécution se fit le 2 août, veille du jour où le régent rentra dans Paris, suivant les Chroniques de France.
  8. Le régent rentra dans Paris le vendredi 3 août vers le soir.

    Christine de Pisan, dans la Vie qu’elle nous a laissée de ce prince, rapporte, à l’occasion de son retour à Paris, un trait de modération que nous transcrirons ici. Nous citerons ses propres expressions. Ainsi comme il (le régent) passoit par une rue, un garnement traître, outrecuidé par trop grand’présomption, va dire si haut qu’il le put ouïr : Par Dieu, sire, si j’en fus cru, vous n’y fussiez ja entré ; mais au fort on y fera peu pour vous. Et comme le comte de Tancarville qui droit devant le roi chevauchoit eut ouï la parole et voulut aller tuer le vilain, le bon prince le retint et répondit en souriant, comme si il n’en tenait compte : On ne vous en croira pas, beau sire.

    J’ai laissé cette phrase de l’ancien texte, en contradiction avec le nouveau, pour montrer combien les manuscrits de Froissart ont été altérés dans différens intérêts, et avec quel esprit de critique il faut les collationner. La note précédente, qui m’a été fournie par M. Dacier, a dû mettre le lecteur en état de prononcer.