Les Chroniques de Sire Jean Froissart/Livre I, Partie II/Chapitre CCXCVII

CHAPITRE CCXCVII.


Comment le duc de Lancastre donna congé à tous les étrangers de sa compagnie et s’en retourna en Angleterre.


Moult furent les gens d’Abbeville et les amis de messire Hue de Châtillon courroucés de sa prise ; mais amender ne le purent quant à cette fois. Or chevauchèrent les Anglois et passèrent la rivière de Somme à la Blanche-Tache, et puis montèrent devers la ville de Rue sur mer et en après vers Montreuil ; et firent tant par leurs journées qu’ils rentrèrent en la ville de Calais. Là donna le duc de Lancastre congé à tous les étrangers ; et se partirent de lui messire Robert de Namur et ses gens, messire Waleran de Borne, et tous les Allemands. Si retourna le duc de Lancastre arrière en Angleterre, et les Allemands en leur pays ; et n’avoient mais intention de guerroyer jusques à l’été ; car jà étoit la Saint-Martin en hiver, et plus avant. Mais au temps qui revenoit le duc de Lancastre avoit dit aux étrangers qu’il repasseroit la mer plus efforcément qu’il n’avoit fait, et prieroit ses cousins le duc de Guerles et le duc de Juliers, et feroit un grand cran en France.

Or nous tairons et souffrirons à parler des besognes de Picardie ; car il n’en y eut nulles en grand temps depuis ce, et parlerons du pays de Poitou, où les faits d’armes avenoient moult plus souvent.