Les Chants du bivouac/À l’oncle Sam
À L’ONCLE SAM !…
envoyés aux petits enfants de France.)
Oncle Sam, écoute et regarde
Tous ces petits Français heureux
Qui me prient, moi, leur humble barde,
De te remercier pour eux ;
On leur avait dit : « Cette année
» Père Noël ne pourra pas
» Descendre dans la cheminée
» Car, chez nous, c’est la Guerre, hélas !
» Nul ne peut franchir avant l’aube
» La « zone armée » ; et puis, du ciel,
» Un sacrilège et méchant « Taube »
» Pourrait bien mitrailler Noël !
» Sur instance pontificale
» La Crèche est cachée avec soin :
» Comme une simple cathédrale
» On la bombarderait de loin !
» Quand il est revenu de mode,
» Innocents, de vous massacrer,
» Il est prudent de craindre Hérode :
» Couchez-vous sans bruit, sans pleurer ;
» Mettez dans un coin de la chambre,
» Et non dans l’âtre, vos souliers :
» Par ce triste vingt-cinq Décembre
» Les joujoux seront oubliés ! »
Et voici Noël — ô merveille ! —
Qui nous vient à bord du Jason
Et qui nous débarque à Marseille
Sa mirifique cargaison ;
Et, soudain, dans chaque chaumière
Retentissent de joyeux cris ;
Et l’Espoir, comme une lumière.
Éclaire les fronts assombris :
Des mamans au cœur lourd d’alarmes
Les bons rires sont retrouvés
Et — là-bas — les pères en armes
Rient de se sentir approuvés !
Ah ! sois donc béni par l’Enfance,
Oncle Sam, et sois-le par nous
Toi qui viens semer sur la France
De l’Espoir avec des joujoux ;
Et que les vents de l’Atlantique
Portent — lancés à tour de bras —
Aux petits enfants d’Amérique
Les baisers de nos petits gâs.