Les Chansons des trains et des gares/Lampisterie

Édition de la Revue blanche (p. 28-29).


LAMPISTERIE


La lampisterie est cet endroit plein de silence,
Où sont les lampes,
Où, dans les huiles et les pétroles,
Les mèches trempent,
Les mèches molles, —

Lampisterie, endroit obscur où sont les lampes.

Et le lampiste coule là,
Coule des jours monotones et sans éclat,
Sans gloire, sans smart : — en général,
Le lampiste s’habille mal,

Et les occasions sont rares,
(Peut-être le premier
Janvier ?)
Bien rares où le chef de gare
Serre sa main, sa main loyale,
Mais sale.

Mais le lampiste est un modeste,
Qu’inquiètent peu les égards :
Il se fiche du tiers, du quart,
Et du ziste comme du zeste, —
Pourvu que les lampes lui restent.

Il ne demande même pas à monter en grade :
Tout au plus, parfois, songe-t-il
Que, s’il avait des appointements comme Rothschild,
Peut-être mettrait-il une autre huile
Que celle de l’administration, dans sa salade…
(Et puis, au fond,
C’est encore une affaire d’appréciation.)

Lampisterie, endroit plein d’ombre et de silence, où trempe

La salade du lampiste, dans l’huile des lampes.