Premières Poésies : 1883-1886Société du Mercure de FranceLes Syrtes. Les Cantilènes (p. 159-161).


NOCTURNE


Wisst ihr warum der Sarg wobl
So gross und schwer mag sein ?
Ioh legt auch meine Liebe
Und meinen Schmerz hinein.

Heinrich Heine.


I


Toc, toc, toc toc, — il cloue à coups pressés ;
Toc, toc, — le menuisier des trépassés.

« Bon menuisier, bon menuisier,
dans le sapin, dans le noyer,
taille un cercueil très grand, très lourd,
pour que j’y couche mon amour. »


II


Toc toc, toc toc, — il cloue à coups pressés,
Toc toc, — le menuisier des trépassés.
« Qu’il soit tendu de satin blanc
Comme ses dents, comme ses dents ;
Et mets aussi des rubans bleus
Comme ses yeux, comme ses yeux. »


III


Toc toc, toc toc, — il cloue à coups pressés.
Toc toc, — le menuisier des trépassés.
« Là-bas, là-bas près du ruisseau,
Sous les ormeaux, sous les ormeaux,
A l’heure où chante le coucou,
Un autre l’a baisée au cou. »


IV


Toc toc, toc toc, — il cloue à coups pressés,
Toc, toc, — le menuisier des trépassés.

« Bon menuisier, bon menuisier,
Dans le sapin, dans le noyer,
Taille un cercueil très grand, très lourd,
Pour que j’y couche mon amour. »