Les Aventures du roi Pausole/Livre I/Chapitre 7

Bibliothèque Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (p. 61-63).





CHAPITRE VII



QUI EST CONSIDÉRABLEMENT ÉCOURTÉ
EU ÉGARD AUX LOIS EN VIGUEUR.



Ô mourir ! ô trépas bienheureux !
S’il y a quelque chose en ce monde d’heureux,
C’est un tombeau tout nud d’une cuisse yvoirine,
Ces esprits vont au ciel d’un ravissement doux.

Théophile de Viau. — 1625.


Je ne décrirai point le repas qui suivit.

On m’a dit, en effet, que les lois de notre pays permettent aux romanciers de proposer en exemple tous les crimes de leurs personnages, mais non point le détail de leurs voluptés, tant le massacre est aux yeux du législateur un moindre péché que le plaisir.

Et comme je ne sais plus exactement si l’on bannit de nos œuvres les voluptés du lit ou celles de la table ; comme d’ailleurs, en consultant toute ma conscience et toute ma sincérité, il m’est impossible d’augurer lequel est le plus pendable, de manger une tartine ou de créer un enfant, j’aime mieux prendre mes précautions et ne parler ici ni de seins ni de grenades.


On saura donc en peu de mots que le dîner du Roi Pausole et de la belle Diane à la Houppe comprenait :


Des hors-d’œuvre.
Une première entrée.
Un relevé.
Une deuxième entrée.
Un rôti.
Une salade.
Un légume.
Un entremets.
Des fruits et des confiseries.
Les vins X… Y… Z…


C’était un petit dîner. N’en disons pas plus.

Voilons de la même manière ce qui s’ensuivit.

Diane, privée du Roi depuis une année et cloîtrée dans le harem après un seul matin d’amour, était redevenue jeune fille. — Comprenne qui peut. Je n’explique rien. — Bref le Roi trouva lui aussi que cette seconde entrevue intime ressemblait beaucoup à la première.

Un peu avant le lever du soleil, tous deux allèrent prendre le frais sur la terrasse semée de tapis ; et pour cueillir les plus hautes figues, Diane à la Houppe levant les bras s’étirait douloureusement, lisse comme une fleur et trois fois tachée de noir.