Les 120 Journées de Sodome/Vingt et unième journée

Vingt et unième journée.


On s’occupa dès le matin de cette cérémonie suivant l’usage accoutumé, mais je ne sais si c’était fait exprès ou non, mais la jeune épouse se trouva coupable dès le matin, Durcet assura qu’il avait trouvé de la merde dans son pot de chambre, elle s’en défendit, elle dit que pour la faire punir, c’était la vieille qui était venue faire cela, et qu’on lui faisait souvent de ces tromperies-là, quand on avait envie de les punir. Elle eut beau dire, elle ne fut pas écoutée et comme son petit mari était déjà sur la liste, on s’amusait beaucoup du plaisir de les corriger tous deux. Cependant les jeunes époux furent conduits en pompe après la messe au grand salon de compagnie, où la cérémonie devait se compléter avant l’heure de repas ; ils étaient tous deux du même âge, et l’on livra la jeune fille nue à son mari, en permettant à celui-ci d’en faire tout ce qu’il voudrait, — rien ne parle comme l’exemple, il était impossible d’en recevoir de plus mauvais, et de plus contagieux, le jeune homme saute donc comme un trait sur sa petite femme et comme il bandait fort dur, quoiqu’il ne déchargea point encore, il l’aurait inévitablement enfilé ; mais quelque légère qu’eût été la brèche, messieurs mettaient toute leur gloire à ce que rien n’altérait ces tendres femmes, qu’ils voulaient ensouillir seuls, moyen en quoi l’évêque, arrêtant l’enthousiasme du jeune homme, profita lui-même de l’érection, et se fit mettre dans le cul l’engin très joli et déjà très ferme dont Zélamir allait enfiler sa jeune moitié, — quelle différence pour ce jeune homme ! Et quelle distance entre ce cul fort large du vieil évêque et le jeune con étroit d’une petite vierge de 13 ans ! Mais on avait à faire à des gens, avec lesquels il n’y avait pas à raisonner. Curval s’empara de Colombe et la foutit en cuisses par devant en lui léchant les yeux, la bouche, les narines et la totalité du visage, sans doute on lui rendit pendant ce temps-là quelques services, car il déchargea et Curval n’était pas homme à perdre son foutre pour de niaiseries semblables. On dîna, les deux époux furent admis au café, comme ils l’avaient été au repas et ce café fut servi ce jour-là par l’élite des sujets, je veux dire par Augustine, Zelmire, Adonis et Zéphire. Curval, qui voulait rebander, voulut de la merde absolument et Augustine lui lâcha le plus bel étron qu’on pût faire, le duc se fit sucer par Zelmire, Durcet par Colombe et l’évêque par Adonis, ce dernier chia dans la bouche de Durcet, quand il eut expédié l’évêque. Mais point de foutre, il devenait rare, on ne s’était point ménagé dans les commencements, et comme l’on sentait l’extrême besoin, que l’on en aurait vers la fin, on se ménageait. On passa au salon d’histoire, où la belle Duclos invitée à montrer son derrière avant que de commencer, après l’avoir exposé libertinement aux yeux de l’assemblée, reprit le fil de son discours. — „ Encore un trait de mon caractère, messieurs,“ dit cette belle fille, „après lequel vous l’ayant assez fait connaître, vous voudrez bien juger ce que je vous cacherai sur ce que je vous aurai dit et me dispenser de vous entretenir davantage de moi. La mère de Lucile venait de tomber dans une misère effroyable, et c’était par le plus grand hazard du monde, que cette charmante fille, qui n’avait point eu de leurs nouvelles, depuis qu’elle s’était sauvée de chez eux, apprit sa malheureuse détresse ; une de nos marcheuses aux haquets d’une jeune fille, qu’une de mes pratiques me demandait dans le même goût que celle, que m’avait demandée le Marquis de Mésanges, c’est-à-dire à acheter pour n’en jamais entendre parler, une de nos marcheuses, dis-je, vint me rapporter comme j’étais au lit avec Lucile, qu’elle avait trouvé une petite fille des 15 ans, très sûrement pucelle, extrêmement jolie et ressemblant, disait-elle, comme deux gouttes d’eau à Mlle. Lucile, mais qu’elle était dans un tel état de misère qu’il faudrait la garder quelques jours, pour l’empâter, avant de la vendre, et alors elle fit la description de la vieille femme avec qui elle l’avait trouvée et de l’état d’indigence effroyable dans lequel était cette mère. À ces traits au détail de l’âge et de la figure, à tout ce qui concernait l’enfant, Lucile eut un pressentiment secret que ce pouvait bien être sa mère et sa sœur. Elle savait qu’elle avait laissé celle-ci en bas âge avec sa mère lors de sa fugue, et elle me demanda permission d’aller vérifier ses doutes. — Mon infernal esprit me suggéra ici une petite horreur, dont l’effet embrasa si promptement mon physique, que faisant aussitôt sortir notre marcheuse, et ne pouvant calmer l’embrasement de mes sens, je commençai par prier Lucile de me branler, ensuite m’arrêtant au milieu de l’opération. — „Que veux-tu aller faire chez cette vieille femme,“ lui dis-je, „et quel est ton dessein ?“ — „Eh mais,“ dit Lucile, qui n’avait pas encore mon cœur, s’il s’en fallait. — „La soulager, si je puis, et principalement si c’est ma mère.“ — „Imbécile,“ lui dis-je, en la repoussant, „va, va sacrifier seule à tes préjugés populaires, et perds en n’osant les braver la plus belle occasion d’irriter tes sens, par une horreur qui te fera décharger dix ans.“ — Lucile étonnée me regarda, et je vis bien alors qu’il fallait lui expliquer en philosophie, qu’elle était loin d’entendre, je lui fis comprendre, combien sont viles les liens, qui nous enchaînent aux auteurs de nos jours, je lui démontrai qu’une mère pour nous avoir porté dans son sein au lieu de mériter de nous quelque reconnaissance, ne méritait que de la haine, puisque pour son seul plaisir et au risque de nous exposer à tous les malheurs, qui pouvaient nous atteindre dans le monde, elle nous avait cependant mises au jour, dans la seule intention de satisfaire à sa brutale lubricité. J’ajoutai à cela tout ce qu’on pouvait dire pour étaler ce système, que le bon sens dicte et que le cœur conseille, quand il n’est pas absorbé par les préjugés de l’enfance. — „Et que t’importe,“ ajoutai-je, „que cette créature-là soit heureuse ou infortunée, éprouves-tu quelque chose de sa situation ? Écarte ces viles liens dont je viens de te démontrer l’absurdité, et isolant alors entièrement cette créature, la séparant tout à fait de toi, tu verras que non seulement son infortune doit t’être indifférente, mais qu’il peut même devenir très voluptueux, de la redoubler, car enfin tu lui dois de la haine, cela est démontré, et tu te venges, tu fais ce que les sots appellent une mauvaise action, et tu sais l’empire que le crime eut toujours sur les sens, voici donc des motifs du plaisir dans les outrages, que je veux que tu lui fasses, et ces délices de la vengeance, et ceux qu’on goûte toujours à faire le mal.“ Soit que je misse avec Lucile plus d’éloquence, que je bien employe pour vous rendre le fait, soit que son esprit déjà libertin et très corrompu avertît sur-le-champ son cœur de la volupté de mes principes, mais elle les goûta, et je vis sa belle joue se colorer de cette flamme libertine qui ne manque jamais de paraître chaque fois qu’on brise le frein. — „Eh bien,“ me dit-elle, „que faut-il faire ?“ — „Nous en amuser,“ lui dis-je, „et en tirer de l’argent, quant au plaisir, il est sûr, si tu adoptes mes principes, quant à l’argent, il l’est de même, puisque je peux les faire servir, et ta vieille mère et ta sœur, à deux différentes parties, qui nous deviendront très lucratives.“ Lucile accepte, je la branle pour l’exciter encore mieux au crime, et nous ne nous occupons plus que des arrangements — occupons nous d’abord de vous détailler le premier plan, puisqu’il fait nombre dans la classe des goûts que j’ai à vous conter, quoique je le dérange un peu de sa place, pour suivre l’ordre des événements, et quand vous serez instruits de cette première branche de mes projets, je vous éclairerai sur la seconde. [101]Il y avait un homme dans le monde fort riche, fort en crédit et du dérèglement d’esprit, qui passe tout ce qu’on peut dire, comme je ne le connaissais, que sous le titre du comte, vous trouverez bon, quelque instruite que je puisse être de son nom, que je ne vous le désigne que par ce seul titre. Le cte. était dans toute la force des passions, âgé au plus de 35 ans, sans foi, sans loi, sans Dieu, sans religion et doué surtout comme vous, messieurs, d’une invincible horreur pour ce qu’on appelle le sentiment de la charité, il disait, qu’il était plus fort que lui, de le comprendre, et qu’il n’admettait pas qu’on pût imaginer d’outrager la nature au point de déranger l’ordre qu’elle avait mis dans les différentes classes de ses individus, en élevant un par des secours à la place de l’autre, et en employant à ces secours absurdes et révoltants des sommes bien plus agréablement employées à ses plaisirs. Pénétré de ses sentiments, il ne s’en tenait par là, non seulement il trouvait une jouissance réelle dans le refus des secours, mais il améliorait même cette jouissance par des outrages à l’infortuné, une de ses voluptés par exemple était de faire chercher de ces asiles ténèbres où l’indigence affamée mange comme elle peut un pain arrosé de ses larmes et dû à ses travaux, il bandait à aller, non seulement jouir de l’amertume de telles pleurs, mais même,184) à en redoubler la source et arracher s’il le pouvait ce malheureux soutien des jours de ces infortunés, et ce goût-ci n’était pas une fantaisie, c’était une fureur, il n’avait pas, disait-il, de délices plus vives et rien ne pouvait irriter, enflammer son âme comme cet excès-là. Ce n’était point, m’assurait-il un jour, le fruit de la dépravation, il avait dès l’enfance cette extraordinaire manie, et son cœur perpétuellement endurci aux accents plaintifs du malheur, n’avait jamais conçu des sentiments plus doux ; comme il est essentiel que vous connaissiez ce sujet, il faut que vous sachiez d’abord que le même homme avait trois passions différentes, celle que je vais vous conter, une que vous expliquera la Martaine en vous la rappellant par son titre, et une plus atroce encore que la Desgranges vous réservera sans doute pour la fin de ses récits, comme une des plus fortes qu’elle ait sans doute à vous raconter. Mais commençons par ce qui me regarde : aussitôt que j’eus prévenu le cte. de l’asile infortuné, que je lui avais découvert, et des attenances qu’il avait, il fut transporté de joie, mais comme des affaires de la plus grande importance pour ses fortunes et son avancement, — qu’il négligeait d’autant moins, qu’il y voyait une sorte d’étai à ses écarts, comme, dis-je, ses affaires allaient l’occuper près de 15 jours, et qu’il ne voulait pas manquer la petite fille, il aima mieux perdre quelque chose du plaisir, qu’il se promettait à cette première scène et s’assurer la seconde, en conséquence il m’ordonna de faire à l’instant enlever l’enfant à tel prix que ce fût, et de la faire remettre à l’adresse, qu’il m’indiqua, et pour ne pas vous tenir plus longtemps en suspends, messieurs, cette adresse était celle de la Desgranges, qui la fournissait dans la troisième partie secrète, ensuite non loin jour jusque là nous fûmes trouver la mère de Lucile, tel pour préparer la reconnaissance avec sa fille que pour aviser aux moyens d’enlever sa sœur. Lucile, bien instruite, ne reconnut sa mère que pour l’insulter, lui dire qu’elle était cause de ce qu’elle s’était jetée dans le libertinage, et mille autre propos semblables qui déchiraient le cœur de cette pauvre femme, et troublaient tout le plaisir qu’elle avait à retrouver sa fille. Je crus dans ce début trouver nos textes, et je présentai à la mère qu’ayant retiré sa fille aînée du libertinage, je m’offrais d’en retirer la seconde, mais [le] moyen ne réussit pas, la malheureuse pleura et dit que pour rien au monde on ne lui arracherait le seul secours, qui lui restait dans sa seconde fille, qu’elle était vieille, infirme, qu’elle recevait des soins de cet enfant, et que l’en priver, serait lui arracher la vie, ici, je l’avoue à ma honte, messieurs, mais je sentis un petit mouvement au fond de mon cœur, qui me fit connaître que ma volupté allait croître du raffinement d’horreur que j’allais dans ce cas mettre à mon crime, et ayant prévenu la vieille que dans peu de jours, sa fille viendrait lui rendre une seconde visite avec un homme en crédit, qui pourrait lui rendre de grands services, nous nous retirâmes, et je ne m’occupai que d’employer mes cordes ordinaires, pour me rendre maîtresse de cette jeune fille. Je l’avais bien examinée, elle en valait la peine, 15 ans, une jolie taille, une très belle peau, et de très jolis traits ; trois jours après, elle arriva, et après l’avoir examinée sur toutes les parties de son corps, et n’y avoir rien trouvé que de charmant, que de très potelé et de très frais, malgré la mauvaise nourriture, où elle était condamnée depuis si long temps, je la fis passer à Md. Desgranges avec qui j’avais cette fois le commerce pour la 1e fois de ma vie ; notre homme revient enfin de ses affaires, Lucile le conduisit chez sa mère et c’est ici que commence la scène que j’ai à vous peindre. On trouva la vieille mère au lit, sans feu, quoique au milieu d’un hiver très froid ; ayant près de son lit un vase de bois, dans lequel était un peu de lait, où le cte. pissa dès en entrant, pour empêcher toute espèce de train et être bien maître du réduit. Le cte. avait mis deux grands coquins à sa gage dans l’escalier, qui devaient fortement s’opposer à toute montée ou des [entrées] hors de propos. „Vieille bougresse,“ lui dit le cte., „nous venons ici avec ta fille, que voilà et qui est, par ma foi, une très jolie putain, nous venons, vieille sorcière, pour soulager tes maux, mais il faut nous les peindre, allons,“ dit-il, en s’asseyant et commençant de palper les fesses de Lucile, „allons, détaille-nous tes souffrances.“ — „Hélas,“ dit la bonne femme, „vous venez avec cette coquine plutôt pour les insulter que pour les soulager. „Coquine,“ dit le cte., „tu oses insulter ta fille ? allons,“ dit-il, en se levant et arrachant la vieille de son grabat, hors du lit, tout à l’heure, „et demande-lui excuse à genoux de l’insulte que tu viens de lui faire,“ il n’y avait pas moyen de résister, „et vous, Lucile, troussez-vous, faites baiser vos fesses, à votre mère, que je m’assure bien qu’elle va les baiser, et que la réconciliation se rétablisse.“ L’insolente Lucile frotte son cul sur le visage de sa pauvre mère, en l’accablant de sottises, le cte. permit à la vieille de se recoucher, et il rentama la conversation. „Je vous dis encore un coup,“ continua-t-il, „que si vous me contez toutes vos doléances je les soulagerai !“ — Et les malheureux croyant tout ce qu’on leur dit, ils aiment à se plaindre, la vieille dit tout ce qu’elle souffrait et se plaignit surtout amèrement du vol, qu’on lui avait fait de sa fille, accusant vivement Lucile, de savoir où elle était, puisque la dame avec laquelle elle était venue la voir, il y avait peu de temps, lui avait proposé d’en prendre soin, et elle calculait de là avec assez de raison que c’était cette dame qui l’avait enlevée. Cependant le comte en face du cul de Lucile, dont il avait fait quitter les jupes, baisant de temps à autre ce beau cul et se branlant lui-même, écoutait, interrogeait, demandait des détails et réglait toutes les titillations de sa perfide volupté sur les réponses qu’on lui faisait. Mais quand la vieille dit, que l’absence de la fille qui par son travail lui procurait de quoi vivre, allait la conduire insensiblement au tombeau, puisqu’elle manquait de tout et n’avait vécu depuis quatre jours, que de ce peu de lait, qu’on venait de lui gober : „Eh bien, garce,“ dit-il, en dirigeant son foutre sur la vieille et en continuant de serrer fortement les fesses de Lucile, „eh bien, putain, tu crèveras, le malheur ne sera pas grand,“ et en achevant de lâcher son sperme, „je n’y aurai, si cela arrive, qu’un seul et unique regret, c’est de ne pas en hâter l’instant.“ — Mais tout n’était pas fait, le comte n’était pas un homme à s’appaiser par une décharge, Lucile, qui avait son rôle s’occupa dès qu’il eut fait, à empêcher que la vieille ne vit ses manœuvres, et le cte. furetant partout, s’empara d’un gobelet d’argent, unique reste du petit bien être qu’avait eu autrefois cette malheureuse et le mit dans sa poche. Ce redoublement d’outrage l’ayant fait rebander, il tira la vieille du lit, la mit nue, et ordonna à Lucile de le branler sur le corps flétri de cette vieille matrone, il fallut bien encore se laisser faire, et le scélérat darda son foutre sur cette vieille chair, en redoublant ses injures et en disant à cette pauvre malheureuse, qu’elle pouvait se tenir pour dit, qu’il n’en resterait pas là et qu’elle aurait bientôt de ses nouvelles, et de celles de sa petite fille, qu’il voulait bien lui apprendre être entre ses mains, il procéda à cette dernière décharge avec des transports de lubricité, vivement allumés parce que sa perfide imagination lui faisait déjà concevoir d’horreurs de toute cette malheureuse famille, et il sortit, mais pour n’avoir plus à revenir à cette affaire. Écoutez, messieurs, jusqu’à quel point je comblai la mesure de ma scélératesse : le cte. voyant qu’il pouvait avoir confiance en moi, m’instruisit de la seconde scène qu’il préparait à cette vieille et à sa petite fille, il me dit, qu’il fallait que je la lui fisse enlever sur-le-champ, et que de plus, comme il voulait réunir toute la famille, je lui cédasse aussi Lucile, dont le beau corps l’avait vivement ému et dont il ne me cachait pas, qu’il projetait la perte ainsi que des deux autres. J’aimais Lucile, mais j’aimais encore mieux l’argent, il me donnait un prix [net] de ces trois créatures, je consentis à tout, quatre jours après, Lucile, sa petite sœur et la vieille mère furent réunis, ce sera à Md. Desgranges, à vous conter, comment, pour quant à moi, je reprends le fil de mes récits interrompu par cette anecdote, qui n’aurait dû vous être racontée qu’à la fin de mes récits, comme une de mes plus fortes.“ — „Un moment,“ dit Durcet, „je n’entends pas ces choses-là de sens froid, elles ont un empire sur moi, qui se peindrait difficilement, je retiens mon foutre depuis le milieu du récit, trouvez bon que je le perde,“ et se jetant dans son cabinet avec Michette, Zélamir, Cupidon, Fanni, Thérèse et Adélaïde, on l’entendit hurler au bout de quelques minutes, et Adélaïde rentra en pleurant et disant qu’elle était bien malheureuse, que l’on alla encore échauffer la tête de son mari, par des récits comme ceux-là, et que c’était à celles qui les contaient à être victimes elles-mêmes ; pendant ce temps-là le duc et l’évêque n’avaient pas perdu leur temps, mais la manière, dont ils avaient opéré, étant encore du nombre de celles que les circonstances nous obligent de voiler, nous prions nos lecteurs, de trouver bon, que nous tirions le rideau, et que nous passions tout de suite au quatre récits qu’il restait à faire à la Duclos pour terminer la 21e soirée. [102]— „Huit jours après le départ de Lucile, j’expédiai un paillard d’une assez plaisante manie : prévenue de plusieurs jours à l’avance, j’avais laissé dans ma chaise percée accumuler un grand nombre d’étrons et j’avais prié quelqu’unes de mes demoiselles, d’y en ajouter encore ; notre homme arrive, déguisé en Savoyard, c’était le matin, il balaiya ma chambre, s’empare du pot de la chaise percée, monte au lieu pour le vuider, ce qui, par parenthèse, l’occupa fort longtemps, il revient, me fait voir, avec quel soin il l’a nettoyé, et me demande son payement, mais prévenue du cérémonial, je tombe sur lui, la mouche à balai à la main : „Ton payement, scélérat,“ lui dis-je, „tiens-le, voilà ton payement ! Et je lui en affesse au moins une douzaine de coups, il veut fuir, je le suis, et le libertin, dont c’était-là l’instant, déchargea tout du long de l’escalier, en criant à tuer bête, qu’on l’estropie, qu’on le tue, et qu’il est chez une coquine, et non pas chez une honnête femme, comme il le croyait. — [103]Un autre voulait que je lui insinuasse dans le canal de l’urèthre un petit bâton noué, qu’il portait à ce dessein dans un étui, il fallait secouer vivement le petit bâton, qu’on introduisait de 3 pouces, et de l’autre main lui branler le vit à tête décalottée, à l’instant de sa décharge on retirait le bâton, on se troussait par devant, et il déchargeait sur la motte. [104]Un abbé, que je vis 6 mois après, voulait que je lui laissasse dégoutter de la cire de bougie brûlante sur le vit et les couilles, il déchargeait de cette seule sensation, et sans qu’on fût obligé de le toucher, mais il ne bandait jamais, et pour que son foutre partît, il fallait185) que tout fût enduit de cuir, et qu’on n’y reconnût plus figure humaine. — [105]Un ami de ce dernier se faisait cribler le cul d’épingles d’or et quand son derrière ainsi garni ressemblait à une casserole, bien plus, qu’à un fessier, il s’asseiyait pour mieux sentir les piqûres, on lui présentait les fesses très écartées, il se branlait lui-même, et déchargeait sur le trou de cul.186) „Durcet,“ dit le duc, „j’aimerais assez à voir ton beau cul, tout grassouillet, tout couvert comme cela, d’épingles d’or, je suis persuadé qu’il serait, — on ne saurait plus, — intéressant.“ — „Ms. le duc,“ dit le financier, „vous savez qu’il y a quarante ans, que je fais gloire et honneur de vous imiter, ayez la bonté de me donner l’exemple et je vous réponds de le suivre.“ — „Je renie Dieu,“ dit Curval, qu’on n’avait pas encore entendu, „comme l’histoire de Lucile m’a fait bander, je me tenais muet, mais je n’en pensais pas moins, tenez,“ dit-il, en faisant voir son vit collé contre son ventre, „voyez, si je vous ments, j’ai une furieuse impatience de savoir le dénouement de l’histoire de ces trois bougresses-là, je me flatte qu’un même tombeau doit les réunir.“ — „Doucement, doucement,“ dit le duc, „n’empiétons pas sur les événements, parce que vous bandez, M. le président, vous voudriez, qu’on vous parlât tout de suite de roues et de potences, vous ressemblez beaucoup aux gens de votre robe, dont on prétend que le vit dresse toujours, chaque fois qu’ils condamnent à mort.“ — „Laissons-là l’état et la robe,“ dit Curval, „le fait est que je suis si échauffé des procédés de Duclos, que je la trouve une fille charmante et que son histoire du comte m’a mis dans un état affreux ; dans un état, où je crois que j’irais volontiers sur le grand chemin arrêter et voler une coche.“ — „Il faut mettre ordre à cela, président,“ dit l’évêque, „autrement nous ne serions pas ici en sûreté, et le moins que tu puisses faire, serait, de nous condamner tous à être pendus.“ — „Non pas vous, mais je ne vous cache pas, que je condamnerais de bon cœur ces demoiselles et principalement Md. la duchesse, que voilà-là couchée, comme un veau sur mon canapé, et qui parce qu’elle a un peu de foutre modifié dans la matrice, s’imagine qu’on ne peut plus la toucher.“ — „Oh,“ dit Constance, „ce n’est assurément pas avec vous, que je compterais sur mon état, pour m’attirer un tel respect, on sait trop, à quel point vous détestez les femmes grosses.“ — „Oh prodigieusement,“ dit Curval, „c’est la vérité,“ et il allait dans son transport commettre je crois quelque sacrilège — sur ce beau ventre, lorsque Duclos s’en empara : „Venez, venez,“ dit-elle, M. le président, „puisque c’est moi, qui ai fait le mal, je veux le réparer,“ — et ils passèrent ensemble dans le boudoir de fond, suivis d’Augustine, d’Hébé, de Cupidon et de Thérèse, on ne fut pas longtemps sans entendre brailler le président, et malgré tous les soins de Duclos, la petite Hébé revint toute en pleurs, il y avait même quelques choses de plus que des larmes, mais nous n’osons pas encore dire ce que c’était, les circonstances ne nous le permettent pas ; un peu de patience, ami lecteur, et bientôt nous ne te cacherons plus rien. Curval rentré et grummulant encore entre ses dents, disant que toutes ces lois-là faisaient qu’on ne pouvait pas décharger à son aise, — si on fut se mettre à table. Après le souper on s’enferma pour les corrections, elles étaient ce soir-là peu nombreuses, il n’y était en faute que Sophie, Colombe, Adélaïde et Zélamir. Durcet dont la tête dès le commencement de la soirée s’était fortement échauffée contre Adélaïde, ne la ménagea pas, Sophie, de qui l’on avait surpris des larmes pendant le récit de l’histoire du comte, fut punie pour son ancien délit et pour celui-là, et le petit ménage du jour, Zélamir et Colombe fut, dit-on, traité par le duc et Curval avec une sévérité, qui tenait un peu de la barbarie. Le duc et Curval singulièrement en train, dirent qu’ils ne voulaient pas se coucher, et ayant fait apporter de liqueur, ils passent la nuit à boire avec les quatre historiennes et Julie dont le libertinage s’augmentant tous les jours la faisait passer pour une créature fort aimable, et qui méritait d’être mise au rang des objets, pour lesquels on avait des regards. Tous les sept furent trouvés le lendemain ivres morts par Durcet qui vint les visiter, on trouve la fille nue entre le père et le mari, et dans une attitude, qui ne prouvait ni la vertu, ni même la décence dans le libertinage, il paraissait enfin, pour ne pas tenir le lecteur en suspends, qu’ils en avaient joui tous les deux à la fois. Duclos qui vraisemblablement avait servi de second, était couchée morte-ivre auprès d’eux, et le reste était l’un sur l’autre dans un autre coin, vis-à-vis le grand feu, qu’on avait eu soin d’entretenir toute la nuit.


Notes de l’éditeur :

184) „mais même“ écrit en double.

185) „il fallait“ en double.

186) Les nos. 103—105 sont des cas classiques d’algolagnie passive. Cf. sur de semblables cas v. Krafft-Ebing 1. c. p. 85.