Les Éblouissements/Paysage du Hainaut

Comtesse Mathieu de Noailles ()
Calmann-Lévy, éditeurs (p. 73-74).

PAYSAGE DU HAINAUT


Le soleil crible la nature,
Mais aucun de ses brusques doigts
Ne perce la verte toiture…
L’été passe au-dessus des bois.

Sous les feuilles de la pervenche
Et des fraisiers aux vifs arceaux
La brise, jeune, fraîche, blanche
Circule comme un gai ruisseau.

Un océan d’air qui voyage
Penche tout à coup la forêt
Qui, faisant un bruit de tangage,
Délivre son parfum secret.

Toujours foulée ou dérangée,
La limace d’un sentier mol
Luit comme une tuile orangée,
Comme un coin de sol espagnol ;


Un sapin lourd de sombre gloire
A ses branchages occupés
Par la soyeuse balançoire
De l’araignée aux bras crispés.

Sur la montée et la descente
Du résineux et brun coteau
Où court la brise éblouissante,
Quel parfum de goudron et d’eau !

– Et je vois, sous les vertes voûtes,
Flamber le rougeâtre écureuil,
Tandis que tombent goûte à goutte
Les graines rondes du tilleul…