Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 511-512).
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LEsparvin sec à la difference de l’autre, est celuy où il ne paroist rien au jarret, ce n’est autre chose qu’un mouvement dépravé & gâté, qui semble tenir quelque chose du mouvement convulsif : il procede de ce que le jarret est embarrassé par des matieres crasses & visqueuses, qui descendent des parties d’en-haut, & s’arrestent aux muscles qui font le mouvement, elles empéchent le jarret de se mouvoir ; de sorte que le Cheval est contraint de faire tout le mouvement de la hanche, & ainsi il leve la jambe tout à coup, & la hausse plus qu’il ne seroit necessaire. Une marque de cét embarras est que la pluspart des Chevaux qui harpent, d’abord que le jarret est échauffé, c’est à dire quand ils ont fait cinq ou six pas, ils ne harpent plus : arrestez un moment que le jarret se refroidisse, les premiers pas que le Cheval fera, il haussera la jambe comme il avoit fait au sortir de l’écurie, qui est ce que nous appellons harper. Ce mal est connu de tous les hommes qui ont des yeux, car voyant hausser une jambe de derriere à un Cheval plus qu’il n’est necessaire pour marcher, on connoist que c’est un esparvin qui en est la cause. Ils ont ce mal par fois à tous les deux jarrets, il n’est pas toûjours douloureux, & ne porte pas un préjudice si notable que l’esparvin de bœuf ; mais si le Cheval est étroit du derriere, il en vaudra beaucoup moins, si ce n’est qu’on le mette à courbettes, auquel cas il les rabattra de plus haut, & avec plus de grâce ; mais il en sera bien plûtost usé, car les esparvins quoy que secs, ne sont pas toûjours sans douleur : on dit de ces Chevaux qu’ils harpent.

Cette incommodité n’empéche pas beaucoup de gens d’achepter un Cheval ; mais on en doit prendre meilleur marché de beaucoup ; car c’est un grand deffaut de quelque sens qu’on le tourne, & finalement le Cheval en demeure estropié ou peu s’en manque, & il n’est jamais vîte.

Je ne mettray point icy de remedes, hors du feu pour ce mal, car je n’y en ay jamais veu pratiquer ; c’est pourquoy à mon égard il demeurera incurable, si on n’est resolu d’y donner le feu.

Lors que les Chevaux à force de harper deviennent boitteux, comme il arrive souvent, lors il ne faut pas hesiter d’y donner le feu, tout comme si c’estoit un esparvin de bœuf, & il Chap.
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reüssit quelquefois, dans deux ou trois mois les Chevaux le peuvent rétablir ; & quoy qu’un Cheval qui harpe ne boitte pas, c’est une tres-bonnc methode d’y donner le feu, car il resout & consomme une partie de ces matieres crasses & visqueuses, qui estant arrestées & fixées dans les muscles du jarret causent le mouvement extraordinaire qu’on appelle harper, qui enfin avec le temps fait presque toujours boitter le Cheval.