Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 300-305).
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PRenez assa fœtida, du plus net & beau, des bayes de laurier de Provence, ou d’Italie, & du sinabre, de chacun une livre, mettez les en poudre fine, l’un apres l’autre, & les mélez dans un mortier de fonte, avec bonne eau de vie tres subtile, pilant le tout & l’incorporant bien en sorte qu’on en puisse former des pilulles pesantes chacune quatorze gros, que vous laisserez sécher.

Il en faut donner deux aux Chevaux blessez, de deux en deux jours, ou tous les jours une, jusqu’à ce qu’ils en ayent avallé huit ou dix, selon la grandeur de la playe : Pour les faire prendre avec facilité, on donne chopine ou trois demy-septiers de vin : le Cheval doit estre bridé, ou au mastigadour si vous en avez un, deux heures avant chaque prise & autant apres.

Ces pilulles se conservent vingt-ans, & disposent le corps ou la chair d’iceluy à une prompte guerison, en purifiant le sang : Elles resistent à la corruption, & à la pourriture, contribuent à la guerison de la galle, & du farcin, & extirpent tous les vers qu’un Cheval peut avoir dans le corps : On doit faire cas de ce remede à l’armée, où il est de consequence de guerir promptement les playes des Chevaux, comme je diray cy-apres, & ces pilulles l’avanceront au delà de ce qu’on en peut croire.

Il y a souvent des Chevaux si fort échauffez dans le corps, que la teste & le col leur pélent, le poil tombe, & la place reste sans poil, enlevée en beaucoup d’endroits, ce qui marque une grande chaleur intérieure. Le seul remede qu’on pratique à ces maux est de leur tirer du sang ; mais la saignée feule ne suffit pas, il faut de plus donner trois prises de ces pilulles, trois jours de suitte, & frotter les endroits pélez deux fois lejours avec de bonne eau de chaux ; si cela ne guerit pas le Cheval, il faut reïterer le tout, & ensuitte luy faire manger de la fleur de souffre dans du son mouillé, peu au commencement, ensuite augmenter peu à peu ; finallement luy en donner jusqu’à une demy poignée tous les jours : le Cheval peut travailler quoy qu’il mange de la fleur de souffre.

Pour ces roignes vives & facheuses galles, si opiniâtres & si difficiles à déraciner des crins, & de la queuë, apres avoir saigné & purgé un Cheval, donnez-luy trois ou quatres prises, chaque Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/315 Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/316 Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/317 Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/318 Chap.
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J’en ay veu aux Hommes de grands effets pour des entorses, & des foulures des nerfs : on fait dissoudre de cette poudre dans l’eau plûtost plus que moins, on en mouille un linge qu’on met en cinq ou six doubles pour l’appliquer deux fois le jour sur le mal, & le bien bander : elle a guery plusieurs personnes fort promptement, & en moins de temps qu’avec tous les remedes ; quand ce seroit l’eau imperialle, angelique, celle de la Reyne de Hongrie, tous les Baumes, huiles, & onguents ; mais par cette methode ce n’est pas par l’effet de la Sympatie, il n’importe pourveu qu’on guerisse, & assurément on guerira.

Cette mesme methode restablira aux Chevaux ces entorses qui sont si dangereuses ; & ces efforts de jarret qui tiennent les Chevaux hors d’état de servir, jusqu’à ce qu’apres plusieurs remedes, on est obligé d’y mettre le feu.

Mais comme tout le monde n’est pas dans le mesme goût, ou bien on n’a pas de cette poudre dans le temps qu’on en a besoin, je vous donneray la description d’un onguent pour les playes, qui fera plus d’effet en un jour que les autres onguents en plusieurs.