Le joli jour de Saint-Michel

La Chanson française du XVe au XXe siècle, Texte établi par Jean GillequinLa Renaissance du livre (p. 148-149).


LE JOLI JOUR DE SAINT-MICHEL

Sur l’air des Triolets.


Le joli jour de Saint-Michel
Fut un des beaux jours de ma vie.
Que soit à jamais solennel
Le joli jour de Saint-Michel !
A genoux devant son autel,
Depuis douze jours je m’écrie :
Le joli jour de Saint-Michel
Fut un des beaux jours de ma vie.

Ce jour il me tomba du ciel
Douze pintes de malvoisie :
Un rare et joli casuel
Ce jour-là me tomba du ciel.
Mon palais trouvait bien cruel
De ne savourer que du Brie :
Ce jour, il me tomba du ciel
Douze pintes de malvoisie.

Du Cap aux rives d’Archangel,
De la Chine à la Virginie,
Il ne croit que du vin tel quel,
Du Cap aux rives d’Archangel.
Du Tage même à l’Archipel,
Trouvez-moi table mieux fournie,
Du Cap aux rives d’Archangel,
De la Chine à la Virginie.

Vive et plus suave que miel,
Du goût elle passe au génie :
Voltaire ne boit rien de tel,
Vive et plus suave que miel :

Aussi n’est-il qu’un arc-en-ciel,
Et je suis étoile accomplie ;
Vive et plus suave que miel,
Du goût elle passe au génie.

Muet, triste et matériel,
Me voilà redevenu pie ;
J’étais un Bourguignon sans sel,
Muet, triste et matériel :
Le piot, baume universel,
De pie est l’étymologie.
Muet, triste et matériel,
Me voilà redevenu pie.

Il me venait du bel hôtel
Que la France vous édifie :
En fussiez-vous l’hôte éternel,
De ce noble et superbe hôtel !
En style simple et naturel,
Monseigneur, je vous remercie.
Le joli jour de Saint-Michel
Fut un des beaux jours de ma vie.

Piron.