Chansonniers mes confrères

La Chanson française du XVe au XXe siècle, Texte établi par Jean GillequinLa Renaissance du livre (p. 150-151).


CHANSONNIERS MES CONFRÈRES

Air : Ces braves insulaires.


    Chansonniers mes confrères,
Le cœur, l’amour, ce sont des chimères ;
    Dans vos chansons légères,
    Traitez de vieux abus,
        De Phœbus,
        De Rébus,
        Ces vertus
        Qu’on n’a plus.
    Tâchez d’historier
    Quelque conte ordurier,
    Mais avec bienséance ;
        De mots
        Trop gros,
     L’oreille s’offense ;
    Tirez votre indécence
    Du fond de vos sujets
        Et de faits
        Faux ou vrais,
        Scandaleux
        Mais joyeux.

    Les madrigaux sont fades,
        L’apprêt
        Qu’on met
     À ces vers maussades,
    Ne vaut pas les boutades
    D’un chansonnier sans art,
        Et sans fard,
        Mais gaillard ;
        Indécent,
        Mais plaisant :


    Et puis tous ces nigauds
    Qui font des madrigaux,
    Supposent à nos dames
        Des cœurs,
        Des mœurs,
     Des vertus, des âmes,
    Et remplissent de flammes
    Et de beaux sentiments
        Nos amants
        Presque éteints,
        Ces pantins
        Libertins.

Collé.