Le Tombeau de Jean de La FontaineMercure de France (p. 83-85).

L’AMATEUR DES JARDINS


Voici des raisins blonds,
De suaves melons,
Des fleurs et des rayons,
Des guêpes, des frelons,
Et de blancs papillons,
Et les verts pavillons

De ce royal domaine
Où Jean de La Fontaine
Oublie un peu sa peine.
Il dort. Respectez-le,
Car l’averse de feu
Qui tombe du ciel bleu,
Au dehors, sur le sable.
N’offre rien d’agréable.
Mais que l’ombre est aimable
Dans ce rustique lieu
Où le bonhomme ronfle
Cependant que se gonfle
Sa joue, et qu’on dirait
Une outre-cornemuse
Dont la musique fuse
Au bal de la forêt !
Il gît comme une masse.
Mais il fait la grimace,
Car il rêve que l’ours
Tenant deux pavés lourds
Vient à pas de velours

Pour écraser la mouche
Qui butine sa bouche,
Comme faisait, dit-on,
Une abeille à Platon.