Les Ailes d’or : poésies nouvelles, 1878-1880Bibliothèque-Charpentier (p. 115-116).

LE TEMPS DES ROSES

Mignonne, voici le printemps.
— Aimons-nous bien au temps des roses. —
L’azur, dans les cieux éclatants,
Rouvre ses portes longtemps closes,
D’où la lumière, en flots vainqueurs,
Descend jusqu’au fond de nos cœurs.
— Aimer ! chanter ! — les douces choses !

Les taillis sont pleins de chansons ;
— Aimons-nous bien au temps des roses. —
Et l’aurore met des frissons
Au cœur tremblant des fleurs écloses.

Sur nos fronts l’aile du matin
Fait passer un souffle incertain.
— Aimer ! rêver ! les douces choses !

Nos rêves sont vite lassés.
— Aimons-nous bien au temps des roses. —
Les beaux jours sont bientôt passés :
Le cœur a ses métamorphoses.
Mais le temps n’y saurait ternir
La floraison du souvenir.
— Aimer ! souffrir ! les douces choses !