Le Rideau levé ou l’éducation de Laure/03

(attribué à).
Au palais sous les robes (p. 15-87).
Éducation de Laure

ÉDUCATION DE LAURE

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Je sortais de ma dixième année ; ma mère tomba dans un état de langueur qui, après huit mois, la conduisit au tombeau. Mon père, sur la perte duquel je verse tous les jours les larmes les plus amères, me chérissait ; son affection, ses sentiments si doux pour moi, se trouvaient payés, de ma part, du retour le plus vif.

J’étais continuellement l’objet de ses caresses les plus tendres ; il ne se passait point de jour qu’il ne me prît dans ses bras, et que je ne fusse en proie à des baisers pleins de feu.

Je me souviens que ma mère lui reprochant un jour la chaleur qu’il paraissait y mettre, il lui fit une réponse dont je ne sentis pas alors l’énergie ; mais cette énigme me fut développée quelque temps après :

— De quoi vous plaignez-vous, madame ? Je n’ai point à en rougir ; si c’était ma fille, le reproche serait fondé ; je ne m’autoriserais pas même de l’exemple de Loth ; mais il est heureux que j’aie pour elle la tendresse que vous me voyez : ce que les conventions et les lois ont établi, la nature ne l’a pas fait ; ainsi, brisons là-dessus.

Cette réponse n’est jamais sortie de ma mémoire. Le silence de ma mère me donna dès cet instant beaucoup à penser sans parvenir au but ; mais il résulta de cette discussion et de mes petites idées que je sentis la nécessité de m’attacher uniquement à lui, et je compris que je devais tout à son amitié. Cet homme, rempli de douceur, d’esprit, de connaissances et de talents, était formé pour inspirer le sentiment le plus tendre.

J’avais été favorisée de la nature : j’étais sortie des mains de l’Amour. Le portrait que je vais faire de moi, chère Eugénie, c’est d’après lui que je le trace. Combien de fois m’as-tu redit qu’il ne m’avait point flattée : douce illusion dans laquelle tu m’entraînes, et qui m’engage à répéter ce que je lui ai entendu dire souvent ! Dès mon enfance, je promettais une figure régulière et prévenante ; j’annonçais des grâces, des formes bien prises et dégagées, la taille noble et svelte ; j’avais beaucoup d’éclat et de blancheur. L’inoculation avait sauvé mes traits des accidents qu’elle prévient ordinairement ; mes yeux bruns, dont la vivacité était tempérée par un regard doux et tendre, et mes cheveux, d’un châtain cendré, se mariaient avantageusement. Mon humeur était gaie, mais mon caractère était porté, par une pente naturelle, à la réflexion.

Mon père étudiait mes goûts et mes inclinations : il me jugea ; aussi cultivait-il mes dispositions avec le plus grand soin. Son désir particulier était de me rendre vraie avec discrétion ; il souhaitait que je n’eusse rien de caché pour lui ? il y réussit aisément. Ce tendre père mettait tant de douceur dans ses manières affectueuses, qu’il n’était pas possible de s’en défendre. Ses punitions les plus sévères se réduisaient à ne me point faire de caresses, et je n’en trouvais point de plus mortifiantes.

Quelque temps après la perte de ma mère, il me prit dans ses bras :

— Laurette, ma chère enfant, votre onzième année est révolue ; vos larmes doivent avoir diminué, je leur ai laissé un terme suffisant ; vos occupations feront diversion à vos regrets : il est temps de les reprendre.

Tout ce qui pouvait former une éducation brillante et recherchée partageait les instants de mes jours. Je n’avais qu’un seul maître, et ce maître c’était mon père : dessin, danse, musique, sciences, tout lui était familier.

Il m’avait paru facilement se consoler de la mort de ma mère ; j’en étais surprise, et je ne pus enfin me refuser de lui en parler.

— Ma fille, ton imagination se développe de bonne heure ; je puis donc dès à présent te parler avec cette vérité et cette raison que tu es capable d’entendre. Apprends donc, ma chère Laure, que dans une société dont les caractères et les humeurs sont analogues, le moment qui la divise pour toujours est celui qui déchire le cœur des individus qui la composent et qui répand la douleur sur leur existence : il n’y a point de fermeté ni de philosophie, pour une âme sensible, qui puisse faire soutenir ce malheur sans chagrin, ni de temps qui en efface le regret ; mais quand on n’a pas l’avantage de sympathiser les uns avec les autres, on ne voit plus la séparation que comme une loi despotique de la nature, à laquelle tout être vivant est soumis. Il est d’un homme sensé, dans une circonstance pareille, de supporter comme il convient cet arrêt du sort, auquel rien ne peut le soustraire, et de recevoir avec sans-froid et une tranquilité modeste, absolument dégagée d’affection et de grimaces, tout ce qui le soustrait aux chaînes pesantes qu’il portait.

N’irai-je pas trop loin, ma chère fille, si, dans l’âge où tu es, je t’en dis davantage ? Non, non, apprends de bonne heure à réfléchir et à former ton jugement, en le dégageant des entraves du préjugé dont le retour journalier t’obligera sans cesse d’aplanir le sillon qu’il tâchera de se tracer dans ton imagination. Représente-toi deux êtres opposés par leur humeur, mais unis intimement par un pouvoir ridicule, que des convenances d’état ou de fortune, que des circonstances qui promettaient en apparence le bonheur ont déterminés ou subjugués par son enchantement momentané, dont l’illusion se dissipe à mesure que l’un des deux laisse tomber le masque dont il couvrait son caractère naturel : conçois combien il seraient heureux d’être séparés. Quel avantage pour eux s’il était possible de rompre une chaîne qui fait leur tourment et imprime sur leurs jours les chagrins les plus cuisants, pour se réunir à des caractères qui sympathisent avec eux ! Car, ne t’y trompe pas, ma Laurette, telle humeur qui ne convient pas à tel individu s’allie très bien avec un autre, et l’on voit régner entre eux la meilleure intelligence, par l’analogie de leurs goûts et de leur génie ; en un mot, c’est un certain rapport d’idées, de sentiments, d’humeur et de caractère qui fait l’aménité et la douceur des unions ; tandis que l’opposition qui se trouve entre deux personnes, augmentée par l’impossibilité de se séparer, fait le malheur et aggrave le supplice de ces êtres enchaînés contre leur gré ?

— Quel tableau ! quelles images ? Cher papa, tu me dégoûtes d’avance du mariage. Est-ce là ton but ?

— Non, ma chère fille ; mais j’ai tant d’exemples à ajouter au mien, que j’en parle avec connaissance de cause, et pour appuyer ce sentiment si raisonnable, et même si naturel, lis ce que le président de Montesquieu en dit dans ses Lettres persannes, à la cent douzième. Si l’âge et des lumières acquises te mettaient dans le cas de le combattre par les prétendus, inconvénients qu’on voudrait y trouver, il me serait facile de les lever et de donner les moyens de les parer ; je pourrais donc te rendre compte de toutes les réflexions que j’ai faites à ce sujet ; mais ta jeunesse ne me met pas à même de m’étendre sur un objet de cette nature.

Mon père termina là.

C’est à présent, tendre amie, que tu vas voir changer la scène. Eugénie, chère Eugénie ! passerai-je outre ? Les cris que je crois entendre autour de moi soulèvent ma plume, mais l’amour et l’amitié l’appuient : je poursuis.

Quoique mon père fût entièrement occupé de mon éducation, après deux ou trois mois je le trouvai rêveur, inquiet ; il semblait qu’il manquât quelque chose à sa tranquillité. Il avait quitté, depuis la mort de ma mère, le séjour où nous demeurions, pour me conduire dans une grande ville, et se livrer entièrement aux soins qu’il prenait de moi ; peu dissipé, j’étais le centre où il réunissait toutes ses idées, son application et toute sa tendresse. Les caresses qu’il me faisait, et qu’il ne ménageait pas, paraissaient l’animer ; ses yeux en étaient plus vif, son teint plus coloré, ses lèvres plus brûlantes. Il prenait mes petites fesses, il les maniait, il passait un doigt entre mes cuisses, il baisait ma bouche et ma poitrine. Souvent il me mettait totalement nue, et me plongeait dans un bain : après m’avoir essuyée, après m’avoir frottée d’essences, il portait ses lèvres sur toutes les parties de mon corps, sans en excepter une seule ; il me contemplait ; son sein paraissait palpiter, et ses mains animées se reposaient partout : rien n’était oublié. Que j’aimais ce charmant badinage et le désordre où je le voyais ! mais au milieu de ses plus vives caresses, il me quittait et courait s’enfoncer dans sa chambre.

Un jour, entre autres, qu’il m’avait accablée des plus ardents baisers, que je lui avais rendus par mille et mille aussi tendres, où nos bouches s’étaient collées plusieurs fois, où sa langue même avait mouillé mes lèvres, je me sentis tout autre. Le feu de ses baisers s’était glissé dans mes veines ; il m’échappa dans l’instant où je m’y attendais le moins : j’en ressentis du chagrin. Je voulus découvrir ce qui l’entraînait dans cette chambre, dont il avait poussé la porte vitrée, qui formait la seule séparation qu’il y avait entre elle et la mienne. Je m’en approchai, je portai les yeux sur tous les carreaux dont elle était garnie, mais le rideau, qui était de son côté développé dans toute son étendue, ne me laissa rien apercevoir, et ma curiosité ne fit que s’en accroître.

Le surlendemain de ce jour, on lui remit une lettre qui parut lui faire plaisir. Quand il en eut fait lecture :

— Ma chère Laure, vous ne pouvez rester sans gouvernante ; on m’en envoie une qui arrivera demain : on m’en fait beaucoup d’éloges, mais il est nécessaire de la connaître pour juger s’ils ne sont point outrés.

Je ne m’attendais nullement à cette nouvelle ; je t’avoue, chère Eugénie, qu’elle m’attrista : sa présence me gênait déjà, sans savoir pourquoi, et sa personne me déplaisait, même avant de l’avoir vue.

En effet, Lucette arriva le jour qu’elle était annoncée. C’était une grande fille très bien faite, entre dix-neuf et vingt ans : belle gorge, fort blanche, d’une figure revenante, sans être jolie ; elle n’avait de régulier qu’une bouche très bien dessinée, des lèvres vermeilles, les dents petites, d’un bel émail et parfaitement rangées. J’en fus frappée d’abord. Mon père m’avait appris à connaître une belle bouche, en me félicitant cent fois sur cet avantage. Lucette unissait à cela un excellent caractère, beaucoup de douceur, de bonté, et une humeur charmante. Mon amitié, malgré ma petite prévention, se porta bientôt vers elle, et j’ai eu lieu de m’y attacher fortement. Je m’aperçus que mon père la reçut avec une satisfaction qui répandit la sérénité dans ses yeux.

L’envie et la jalousie, ma chère, sont étrangères à mon cœur, rien ne me paraît plus mal fondé ; d’ailleurs, ce qui fait les désirs des hommes ne tient souvent pas à notre beauté et à notre mérite : ainsi, pour notre propre bonheur, laissons-les libres, sans inquiétude. Il y en a dont l’infidélité est souvent un feu léger, qu’un instant voit disparaître aussitôt qu’il a brillé. S’ils pensent, s’ils réfléchissent, bientôt on les voit revenir auprès d’une femme dont l’humeur douce et agréable les met dans l’impossibilité de vivre sans elle ; s’ils ne pensent pas, la perte est bien faible. Eh ! quelle folie de s’en tourmenter.

Je ne raisonnais pas encore avec autant de sagacité ; cependant je ne sentais point de jalousie contre Lucette : il est vrai que ses amitiés, ses caresses, et celles que mon père continuait de me faire, la bannissaient loin de moi. Je n’apercevais de différence que dans la réserve qu’il observait lorsque Lucette était présente ; mais je donnais cette conduite à sa prudence. Un temps se passa de cette manière, pendant lequel je m’aperçus enfin de ses attentions pour elle. Toutes les occasions qui pouvaient s’en présenter, il ne les laissait point échapper ; cependant mon affection pour Lucette fut bientôt d’accord avec celle de mon père.

Lucette avait désiré coucher dans ma chambre, et mon père s’y était prêté. Le matin, à son réveil, il venait nous embrasser ? j’étais dans un lit à côté d’elle. Cet arrangement et le prétexte de venir me voir lui donnaient la facilité de s’amuser avec nous, et de faire à Lucette toutes les avances qu’il pouvait hasarder devant moi. Je voyais bien qu’elle ne le rebutait pas, mais je ne trouvais pas qu’elle répondît à ses empressements comme je l’aurais fait et le désirais d’elle ; je ne pouvais en concevoir la raison. Je jugeais par moi-même, et je croyais qu’en aimant avec tant de tendresse ce cher papa, tout le monde devait avoir mon cœur, penser et sentir comme moi ; je ne pus me refuser de lui en faire des reproches :

— Pourquoi, ma bonne, n’aimez-vous pas mon papa, lui qui paraît avoir tant d’amitié pour vous ? Vous êtes bien ingrate !

Elle souriait à ces reproches, en m’assurant que je les lui faisais injustement : en effet, cet éloignement apparent ne tarda pas à se dissiper.

Un soir, après le repas, nous rentrâmes dans la pièce que j’occupais ; il nous présenta de la liqueur. Une demi-heure était à peine écoulée, que Lucette s’endormit profondément ; il me prit alors entre ses bras, et m’emportant dans sa chambre, il me fit mettre dans son lit. Surprise de cet arrangement nouveau, ma curiosité fut à l’instant réveillée. Je me relevai un moment après, et courus d’un pas léger à la porte vitrée, où j’écartai le bord du rideau. Je fus bien étonnée de voir toute la gorge de Lucette entièrement découverte. Quel sein charmant ! Deux demi-globes d’une blancheur de neige, du milieu desquels sortaient deux fraises naissantes, d’une couleur de chair plus animée, reposaient sur sa poitrine ; fermes comme l’ivoire, ils n’avaient de mouvement que celui de sa respiration. Mon père les regardait, les maniait, les baisait et les suçait ; rien ne la réveillait. Bientôt il lui ôta tous ses habits, et la porta sur le bord du lit qui était en face de la porte où j’étais. Il releva sa chemise : je vis deux cuisses d’albâtre, rondes et potelées, qu’il écarta ; j’aperçus alors une petite fente vermeille, garnie d’un poil fort brun ; il l’entr’ouvrit, il y posa les doigts, en remuant la main avec activité : rien ne la retirait de sa léthargie. Animée par cette vue, instruite par l’exemple, j’imitai sur la mienne les mouvements que je voyais. J’éprouvai une sensation qui m’était inconnue. Mon père la coucha dans le lit et vint à la porte vitrée pour la fermer. Je me sauvai, et courus m’enfoncer dans celui où il m’avait mise. Aussitôt que j’y fus étendue, profitant des lumières que je venais d’acquérir, et réfléchissant sur ce que j’avais vu, je recommençai mes frottements. J’étais toute en feu ; cette sensation que j’avais éprouvée s’augmenta par degrés, et parvint à une telle énergie, que mon âme, concentrée dans le milieu de moi-même, avait quitté toutes les autres parties de mon corps pour ne s’arrêter que dans cet endroit : je tombai, pour la première fois, dans un état inconnu, dont j’étais enchantée.

Revenue à moi, quelle fut ma surprise, en me tâtant au même endroit, de me trouver toute mouillée ! J’eus dans le premier instant une vive inquiétude, qui se dissipa par le souvenir du plaisir que j’avais ressenti et par un doux sommeil qui me retraça pendant la nuit, dans des songes flatteurs, les agréables images de mon père caressant Lucette. J’étais même encore endormie quand il vint le lendemain me réveiller par des embrassements, que lui rendis avec usure.

Depuis ce jour, ma bonne et lui me parurent de la meilleure intelligence, quoiqu’il ne restât plus le matin si longtemps près de nous. Ils n’imaginaient pas que je fusse au fait de rien, et, dans leur sécurité, ils se faisaient dans la journée mille agaceries qui étaient ordinairement le prélude des retraites qu’ils allaient souvent faire ensemble dans sa chambre, où ils restaient assez longtemps. J’imaginais bien qu’ils allaient répéter ce que j’avais déjà vu ; je ne poussais pas alors mes idées plus loin : cependant je mourais d’envie de jouir encore du même spectacle. Tu vas juger, ma chère, du violent désir qui me tourmentait : il était enfin arrivé cet instant où je devais tout apprendre !

Trois jours après celui dont je viens de te rendre compte, voulant à quelque prix que ce fût, satisfaire mon désir envieux, lorsque mon père fut sorti et ma bonne occupée, j’imaginai de mettre une soie au coin du rideau et de la faire passer par le coin opposé d’un des carreaux ; cet arrangement préparé, je ne tardai pas à en profiter. Le lendemain, mon père, qui n’avait sur lui qu’une robe de taffetas, entraîna Lucette, qui était aussi légèrement vêtue : ils prirent le soin de fermer exactement la porte et d’arranger le rideau, mais j’avais vaincu tous les obstacles, et mon expédient me réussit, au moins en partie. Ils n’y eurent pas été deux minutes, qu’impatiente je fus à la porte, et je soulevai faiblement le rideau : j’aperçus Lucette ; ses tétons étaient entièrement découverts ; mon père la tenait dans ses bras, et la couvrait de ses baisers, mais, tourmenté de désirs, bientôt jupes, corset, chemise, tout fut à bas. Qu’elle me parut bien dans cet état ! et que j’aimais à la voir ainsi ! La fraîcheur et les grâces de la jeunesse étaient répandues sur elle. Chère Eugénie, la beauté des femmes a donc un pouvoir bien singulier, un attrait bien puissant, puisqu’elle nous intéresse aussi ! Oui, ma chère, elle est touchante, même pour notre sexe, par ses belles formes arrondies, le satiné et le coloris brillant d’une belle peau ! Tu me l’as fait ressentir dans tes bras, et tu l’as éprouvé comme moi.

Mon père fut aussitôt dans un état pareil à celui où il avait mis Lucette : cette vue m’attacha par sa nouveauté ; il l’emporta sur un lit de repos que je ne pouvais découvrir. Dévorée par ma curiosité, je ne ménageai plus rien, je levai le rideau, jusqu’à ce que je pusse les voir entièrement. Rien ne fut soustrait à mes regards, puisque rien ne gênait leurs plaisirs. Lucette, couchée sur lui, les fesses en l’air, les jambes écartées, me laissait apercevoir toute l’ouverture de sa fente, entre deux petites éminences grasses et rebondies. Cette situation, que je devais au hasard, semblait prise pour satisfaire entièrement ma curieuse impatience. Mon père, les genoux élevés, présentait plus distinctement à mes yeux un vrai bijou, un membre gros, raide, entouré de poils à la racine, où pendait une boule au-dessous ; le bout en était rouge, et à demi couvert d’une peau qui paraissait pouvoir se baisser davantage. Je le vis entrer dans la fente de Lucette, s’y perdre, et reparaître tour à tour. Ils se baisaient avec des transports qui me firent juger des plaisirs qu’ils ressentaient ; enfin, je vis cet instrument ressortir tout à fait, le bout totalement découvert, rouge comme le carmin, et tout mouillé, jetant une liqueur blanche, qui, s’élançant avec impétuosité, se répandit sur les fesses de Lucette. Conçois, chère Eugénie, dans quelle situation je me trouvais moi-même, ayant sous mes yeux un pareil tableau ! Vivement émue, emportée par des désirs que je n’avais pas encore connus, je tâchai au moins de participer à leur ivresse ; chère amie, que ce retour sur mes jeunes années est encore agréable pour moi !

Enfin, l’attrait du plaisir me retint trop longtemps dans mon embuscade, et mon imprudence me trahit. Mon père, qui jusque-là avait été trop hors de lui pour penser à ce qui l’entourait, vit, en se dégageant des bras de Lucette, le coin du rideau levé ; il m’aperçut ; il s’enveloppa dans sa robe, en s’approchant de la porte ; je me retirai avec précipitation ; il vint examiner le rideau, et y découvrit ma manœuvre ; il se fixa près de la porte pendant que Lucette se rhabillait. Voyant qu’il restait, je m’imaginai qu’il n’avait rien aperçu ; curieuse de ce qu’ils faisaient encore dans cette chambre, je retournai au carreau : quelle fut ma surprise quand j’y vis le visage de mon père ! La foudre tombée sur moi ne m’eût pas causé plus de frayeur. Mon stratagème n’avait pas entièrement réussi ; le rideau n’avait pu redescendre de lui-même, comme je m’en étais flattée ; cependant, il ne fit semblant de rien dans cet instant. J’avais aperçu que Lucette était déjà rhabillée ; il revint avec elle, et l’envoya veiller à l’ordre de la maison. Je me trouvai seule avec lui ; il s’approcha pour examiner l’ouvrage que j’avais eu à faire ; juge, ma chère, à quel point il en était ! J’étais pâle et tremblante. Quel fut mon étonnement quand ce cher et tendre papa me prit dans ses bras et me donna cent baisers !

— Rassure-toi, ma chère Laurette : qui peut t’inspirer la terreur où je te vois ? Ne crains rien, ma chère fille, tu sais la manière dont j’ai toujours agi vis-à-vis de toi ; je ne te demande rien que la vérité ; je désire que tu me regardes plutôt comme ton ami que comme ton père. Laure, je ne suis que ton ami ; je veux qu’en cette qualité tu sois sincère avec moi ; ma Laure, je l’exige aujourd’hui ; ne me déguise rien, et dis-moi ce que tu faisais pendant que j’étais avec Lucette, et pourquoi l’arrangement singulier de ce rideau ? Sois vraie, je t’en conjure, et sans détours, tu n’auras pas lieu de t’en repentir, mais si tu ne l’es pas, tu me refroidis pour toi, et tu peux compter sur un couvent.

Le nom de cette retraite m’avait toujours effrayée. Que je la connaissais peu ! Je mettais alors une différence totale à être renfermée dans ce séjour ou à être chez mon père ; d’ailleurs, je ne pouvais pas douter qu’il ne fût assuré que j’avais tout vu, et je m’étais enfin toujours si bien trouvée de ne lui avoir jamais caché la vérité, que je ne balançai point à lui rendre compte de tout ce qui m’était connu depuis l’instant où il m’avait emportée, lorsque ma bonne était endormie, jusqu’à celui auquel il venait de me surprendre.

Chaque détail que je lui faisais, chaque tableau que je retraçais, loin d’allumer sa colère, était payé par des baisers et des caresses ; je balançais, néanmoins, à lui dire que je m’étais procuré des sensations aussi nouvelles pour moi qu’elles m’avaient paru délicieuses, mais il en eut le soupçon.

— Ma chère Laurette, tu ne me dis pas tout encore ; — et passant sa main sur mes fesses, en me baisant, — achève, tu ne dois ni ne peux rien me cacher : rends-moi compte de tout.

Je lui avouai que je m’étais procuré, par un frottement semblable à celui que je lui avais vu faire à Lucette, un plaisir des plus vifs, dont j’avais été toute mouillée, et que je l’avais répété trois ou quatre fois depuis ce jour-là.

— Mais, ma chère Laure, voyant ce que j’enfonçais à Lucette, cela ne t’a-t-il pas donné l’idée de t’enfoncer le doigt ?

— Non, cher papa, je n’en ai pas seulement eu la pensée.

— Prends garde, Laure, de m’en imposer ; tu ne peux me cacher ce qui est ; viens me faire voir si tu as été sincère.

— De tout mon cœur, cher papa ; je ne t’ai rien déguisé.

Il me donna pour lors les noms les plus tendres ; nous passâmes dans sa chambre ; m’étendant sur le lit de repos, il me troussa et m’examina avec beaucoup d’attention, puis entr’ouvrant un peu les bords de ma fente, il voulut y mettre le petit doigt ; la douleur qu’il me faisait, annoncée par mes plaintes l’arrêta.

— Elle est tout enflammée, ma chère enfant, je vois cependant que tu ne m’as pas trompé ; sa rougeur vient sans doute du frottement auquel tu t’es amusée pendant que j’étais avec Lucette.

J’en convins, et je lui avouai même que je n’avais pu me procurer le plaisir que je cherchais. La sincérité de ma bouche fut récompensée d’un baiser de la sienne ; il la porta même et fit frétiller sa langue sur un endroit qui en éprouvait une sensation délicieuse ; ce genre de caresse me parut neuf et divin, et pour porter l’enchantement à son comble, le membre que j’avais vu parut à mes yeux ; je le pris involontairement d’une main, et de l’autre j’écartai tout à fait la robe de mon père ; il me laissa faire. Je tenais et voyais enfin de près le bijou charmant que j’avais déjà si bien distingué entre les cuisses de Lucette. Que je le trouvais aimable et singulier ! Je sentis dès ce moment qu’il était le véritable mobile des plaisirs. Cette peau, qui haussait et baissait par les mouvements de ma main, en couvrait et découvrait le bout ; mais quelle fut ma surprise lorsque, après quelques moments de ce badinage, je le vis répandre la liqueur dont les fesses de ma bonne avaient été inondées. Il y mêlait des transports et des redoublements de caresses que je partageais. Le plaisir produisait en moi l’effet le plus vif. Bientôt il passa dans mes sens, et y mit une émotion indicible ; sa langue continuait son exercice, j’étais suffoquée.

— Ah ! cher papa ! holà ! je me meurs !…

Je me pâmai dans ses bras.

Depuis ce temps, tout fut pour moi une source de lumière ; ce que je n’avais pas conçu jusqu’alors se développa dans l’instant. Mon imagination s’ouvrit entièrement ; elle saisissait tout ; il semblait que l’instrument que je touchais fût la clef merveilleuse qui ouvrît tout à coup mon entendement. Je sentis alors cet aimable papa me devenir plus cher, et ma tendresse pour lui prendre un accroissement incroyable : tout son corps fut livré au plaisir dans mes mains ; mes baisers et mes caresses sans nombre se succédaient sans interruption, et le feu qu’ils excitaient dans lui m’animait à les multiplier.

Il me ramena dans ma chambre, où ma bonne revint quelques instants après. Je ne prévoyais pas ce qu’il allait lui dire.

— Lucette, il est désormais inutile que nous nous gênions pour Laure : elle en sait autant que nous !

Et il lui répéta tout ce que je lui avais détaillé, en lui montrant le jeu du rideau. Elle en parut affectée, mais je me jetai à son cou, et mes caresses, unies aux raisons dont il la tranquillisa, dissipèrent le petit chagrin qu’elle avait témoigné. Il sortit et revint une heure après avec une femme qui, dès qu’elle fut entrée, me fit déshabiller et prit sur moi la mesure d’une sorte d’ajustement dont je ne pouvais concevoir ni la forme ni l’usage.

Quand l’heure de se coucher fut venue, il me mit dans le lit de Lucette, en la priant de veiller sur moi : il nous laissa ; mais l’inquiétude le ramenant bientôt près de nous, il se mit dans le même lit. J’étais entre elle et lui ; il me tenait embrassée, et couvrant de sa main l’entre-deux de mes cuisses, il ne me laissait pas y porter la mienne. Je pris alors son instrument, qui me causa beaucoup de surprise, en le trouvant mou et pendant. Je ne l’avais point encore vu dans cet état, m’imaginant au contraire qu’il était toujours gros, raide et relevé : il ne tarda pas à reprendre dans ma main la fermeté et la grosseur que je lui connaissais. Lucette, qui s’aperçut de nos actions, étonnée de sa conduite, ne pouvait la concevoir, et me fit beaucoup de peine par ses propos :

— La manière, monsieur, dont vous agissez avec Laurette, a lieu de me surprendre. Vous, monsieur, vous, son père !

— Oui et non, Lucette ; c’est un secret que je veux bien confier à votre discrétion et à celle de Laure, qui y est assez intéressée pour le garder ; il est même nécessaire, par les circonstances, de vous en faire part à l’une et à l’autre. Il y avait quinze jours que je connaissais sa mère quand je l’épousai. Je découvris, dès le premier jour, l’état où elle était ; je trouvai qu’il était de la prudence de n’en rien faire paraître… Je la menai dans une province éloignée, sous un nom de terre, afin qu’on ne pût rassembler les dates. Au bout de quatre mois, Laure vint au monde, jouissant de la force et de la santé d’un enfant de neuf mois bien accomplis. Je restai six mois encore dans la même province, et je les ramenai toutes deux au bout de ce terme. Vous voyez à présent, l’une et l’autre, que cette enfant qui m’est devenue si chère n’est pas ma fille suivant la nature. Absolument étrangère pour moi, elle n’est ma fille que par affection ; le scrupule intérieur ne peut donc exister, et toute autre considération m’est indifférente, avec de la prudence.

Je me souvins aussitôt de la réponse qu’il avait faite à ma mère : le silence qu’elle observa dans ce moment ne me parut plus extraordinaire ; je le dis à Lucette, dont l’étonnement cessa d’abord :

— Mais comment donc en avez-vous agi vis-à-vis de votre épouse, lorsque cet événement fut à votre connaissance ?

— Tout simplement ; j’ai vécu toujours avec elle d’une manière indifférente, et je ne lui en ai jamais parlé que la seule fois dont Laure vient de vous rendre compte ; encore y avait-elle donné lieu. Le comte de Norval, à qui elle doit le jour, est un cavalier aimable, bien fait, et d’une figure intéressante, doué des qualités qui plaisent aux femmes ; je ne fus point étonné qu’elle se fût livrée à son penchant ; cependant, elle ne put l’épouser, ses parents ne le trouvant pas assez riche pour elle ; mais si Laure ne m’est rien par le sang et la nature, la tendre affection que j’ai conçue pour cette aimable enfant me la fait regarder comme ma fille et me la rend peut-être plus chère. Néanmoins, cet événement fut cause que je n’approchai jamais de sa mère, me sentant pour elle une opposition que sa fausseté fit naître, et que je n’ai pu vaincre, d’autant plus que son caractère et son humeur ne faisaient que l’augmenter ; ainsi je ne tiens à ma chère Laurette, que par les liens du cœur, ayant trouvé en elle tout ce qui pouvait produire et m’inspirer l’attachement et l’amitié les plus tendres.

Ma bonne m’embrassa et me fit cent caresses qui dénotaient que le scrupule de ses préjugés était enfin totalement effacé : je les lui rendis avec chaleur. Je pris ses tétons que je trouvais si jolis ; je les baisai, j’en suçai le bout. Mon père passa sa main sur elle ; il rencontra la mienne, qu’il prit ; il me la promena sur le ventre de Lucette, sur ses cuisses. Sa peau était d’un velouté charmant ; il me la porta sur son poil, sur sa motte, sur sa fente : j’appris bientôt le nom de toutes ces parties. Je mis mon doigt où je jugeai bien que je lui ferais plaisir. Je sentis dans cet endroit quelque chose d’un peu dur et gonflé.

— Bon ! ma Laure, tu tiens l’endroit sensible ; remue la main, et ne quitte pas son clitoris, tandis que je mettrai mon doigt dans son petit conin.

Lucette me serrait entre ses bras, me caressait les fesses ; elle prit le vit de mon papa, le mit entre mes cuisses, mais il n’enfonçait ni ne s’agitait. Bientôt ma bonne ressentit l’excès du plaisir ; ses baisers multipliés, ses soupirs nous l’annoncèrent :

— Holà ! holà ! vite, Laurette ! chère amie, enfonce… Ah ! je décharge !… je me meurs !

Que ces expressions de volupté avaient de charmes pour moi. Je sentis son petit conin tout mouillé ; le doigt de mon papa en sortit tout couvert de ce qu’elle avait répandu. Ah ! chère Eugénie, que j’étais animée ! Je pris la main de Lucette, je la portai entre mes cuisses ; je désirais qu’elle fit pour moi ce que je venais de faire pour elle, mais mon papa, couvrant de sa main ma petite motte, arrêta ses mouvements, suspendit mes desseins. Il était trop voluptueux pour n’être pas ménager des plaisirs : il modérait ses désirs. Il suspendit mon impatience, et nous recommanda d’être tranquilles. Nous nous endormîmes entre les bras les uns des autres, plongés dans la plus agréable ivresse. Je n’avais pas encore passé de nuit qui me plût autant.

Nous étions au milieu des caresses du réveil, lorsque mon père fut ouvrir à cette femme qu’il avait fait venir la veille. Quels furent ma surprise et mon chagrin lorsqu’elle mit sur moi un caleçon de maroquin doublé de velours qui, me prenant au-dessus des hanches, ne descendait qu’au milieu des cuisses. Tout était assez lâche, et ne me gênait point ; la ceinture seulement me prenait juste la taille, et avait des courroies, semblables au caleçon, qui passaient pardessus mes épaules et étaient assemblées en haut par une traverse pareille qui tenait de l’une à l’autre. On pouvait élargir tout cet assemblage, autant qu’on le jugeait à propos. La ceinture était ouverte par devant, se prolongeant plus de quatre doigts au-dessous. Le long de cette ouverture, il y avait des œillets des deux côtés, dans lesquels mon père passa une petite chaîne de vermeil délicatement travaillée, qu’il ferma d’une serrure à secret :

— Ma chère Laure, aimable enfant, ta santé et ta conservation m’intéressent : le hasard t’a instruite sur ce que tu ne devais savoir qu’à dix-huit ans ; il est nécessaire que je prenne des précautions contre tes connaissances et contre un penchant que tu tiens de la nature et de l’amour ; tu apprendras du temps à m’en savoir gré, et tout autre moyen n’irait point à ma façon de penser et à mes desseins.

Je fus d’abord très fâchée, et je ne pouvais cacher l’humeur que j’en avais ; mais j’ai trop bien appris depuis combien je lui en devais de reconnaissance.

Il avait prévu à tout. Au bout de ce caleçon était une petite gondole d’argent, dorée en dedans, qui était de la largeur de l’entre-deux de mes cuisses ; toute ma petite motte y était renfermée ; elle se prolongeait en élargissant par une plaque qui s’étendait quatre doigts au dessous de mon petit conin, et elle se terminait en pointe arrondie jusqu’au trou de mon cul, sans aucune incommodité. Elle était fendue en long, et cette fente s’ouvrait et se refermait par des charnières à plat en écartant ou resserrant les cuisses : un canal d’anneaux à charnières plates, de même métal, y était attaché et me servait de conduit. Ce caleçon avait un trou rond, assez grand, vis-à-vis celui de mon cul, qui me laissait la liberté de faire toutes les fonctions nécessaires sans l’ôter, mais il m’était impossible d’introduire le doigt dans mon petit conin, et encore moins de le branler, point essentiel que mon père voulait éviter, et dont la privation me faisait le plus de peine.

J’ai pensé bien des fois depuis, ma chère, qu’on ferait bien d’employer quelque chose de semblable pour les garçons, afin d’éviter les épuisements où ils se plongent avant l’âge ; car, de quelque façon, qu’on veille sur eux, la société qu’ils ont ensemble ne leur apprend que trop, et trop tôt, la manière de s’y livrer.

Pendant quatre ou cinq années qui se sont écoulées depuis ce jour-là, tous les soirs mon père ôtait lui-même ce caleçon ; Lucette le nettoyait avec soin, et me lavait : il examinait s’il me blessait et il me le remettait. Depuis ce moment jusqu’à l’âge de seize ans, je ne le quittai pas. Durant tout ce temps, mes talents s’accrurent et j’acquis des lumières dans tous les genres. Une curiosité naturelle me faisait désirer d’apprendre les raisons de tout ; chaque année voyait augmenter mes connaissances, et je ne cessais de chercher à en acquérir. Je m’étais accoutumée à l’emprisonnement où j’étais, et la perspective de sa fin m’avait rendu supportable le temps où j’y étais condamnée ; je m’étais fait une raison sur cette nécessité, d’autant plus aisément, qu’elle ne m’empêchait pas de jouir des caresses que je faisais, ou de celles dont j’étais témoin, puisque j’avais mis ma bonne et mon papa dans le cas de n’être pas gênés par ma présence.

Parmi toutes les questions que je lui faisais, je n’oubliais guère celle où je trouvais le plus d’intérêt. Plus j’avançais en âge, plus la nature parlait en moi, avec d’autant plus de force, que leurs plaisirs l’animaient vivement ; aussi lui demandais-je souvent sur quelles raisons était fondée la nécessité de la contrainte où il me tenait, et quel était le sujet des précautions qu’il avait prises vis-à-vis de moi. Il m’avait toujours renvoyée à un âge plus avancé. J’étais enfin dans ma seizième année, lorsqu’il me donna la solution de cette demande.

— Puis-je donc à la fin, cher papa, savoir quelles sont les causes qui vous ont engagé à me faire porter ce fâcheux caleçon, puisque vous m’assurez avoir tant de tendresse pour votre Laurette ! Ma bonne est plus heureuse que moi, ou vous m’aimez moins qu’elle : expliquez-moi donc aujourd’hui les vues qui vous y ont déterminé ?

— Cette même tendresse, cette même affection que j’ai pour toi, ma chère fille, je ne te regarde plus comme une enfant ; tu es à présent dans l’âge où l’on peut t’instruire à peu près de tout et peut-être le dois-je encore plus avec toi. Apprends donc, ma Laurette, que la nature chez l’homme travaille à l’accroissement des individus jusqu’à quinze ou seize ans. Ce terme est plus ou moins éloigné, suivant les sujets, mais il est assez général pour ton sexe ; cependant il n’est dans le complément de sa force qu’à dix-sept ou dix-huit ans. Dans les hommes, la nature met plus de temps à acquérir sa perfection. Lorsqu’on détourne ses opérations par des épanchements prématurés et multipliés d’une matière qui aurait dû servir à cet accroissement, on s’en ressent toute la vie, et les accidents qui en résultent sont les plus fâcheux. Les femmes, par exemple, ou meurent de bonne heure ou restent petites, faibles et languissantes, ou tombent dans un marasme, un amaigrissement qui dégénère en maux de poitrine, ou elles privent leur sang d’un véhicule propre à produire leurs règles dans l’âge ordinaire et d’une manière avantageuse, ou elles sont enfin sujettes à des vapeurs, à des crispations de nerfs, à des vertiges ou à des fureurs utérines, à l’affaiblissement de la vue et au dépérissement ; elles terminent leurs jours dans un état quelquefois fort triste. Les jeunes gens essuient des accidents à peu près semblables : ils traînent des jours malheureux, s’ils ne meurent prématurément.

Cet affreux tableau, chère Eugénie, m’effraya et m’engagea à lui témoigner ma reconnaissance de son amitié et de ses soins en mettant de bonne heure obstacle au penchant que je me sentais pour le plaisir et la volupté. La vie me paraissait agréable, et quelque goût que j’eusse pour le plaisir, je ne voulais point l’acheter, lui disais-je, aux dépens de mes jours et de ma santé.

— Je l’ai reconnu d’abord en toi, ma chère Laurette, cependant ; je savais que dans l’âge où tu étais, toutes les raisons du monde ne pourraient t’en détourner ; c’est ce qui m’a fait prendre des précautions que tu n’as pu vaincre, et que je n’ai pas dessein de lever encore. Il serait même avantageux qu’elles pussent être mises en usage pour toutes sortes de jeunes gens que des circonstances imprévues ou des personnes imprudentes ont malheureusement instruits beaucoup trop tôt.

La frayeur d’une santé délabrée, la crainte d’une mort prématurée se présentaient vivement à mon imagination : cependant, ce que je lui avais vu faire à Lucette, la manière dont il vivait avec elle suspendait en quelque sorte l’énergie de ses images, la force et l’effet de ses raisons ; je ne pus me refuser à lui faire part de mes doutes.

— Pourquoi donc, cher papa, ne prenez-vous pas avec ma bonne les mêmes précautions qu’avec moi ? Pourquoi lui procurez-vous souvent, au contraire, ce que vous me refusez entièrement ?

— Mais, ma fille, fais donc attention que Lucette est dans un âge absolument formé ; qu’elle n’abandonne que le superflu de son existence ; que c’est le temps où elle peut nourrir dans son sein d’autres êtres, et que dès cet instant elle a plus qu’il ne faut pour la conservation du sien, ce qui s’annonce si bien par l’exactitude de ses règles. Il ne faut pas te cacher non plus, ma chère Laurette, que chez elle une trop grande quantité de semence retenue, en refluant dans son sang, y porterait le feu et le ravage, ou en stagnant dans les parties qui la séparent du reste des humeurs, pourrait se corrompre ou embarrasser la circulation ; elle serait exposée, peut-être, à des accidents aussi dangereux que ceux de l’épuisement : tels sont les vapeurs, les vertiges, la démence, les accès frénétiques et autres. N’en voit-on pas des exemples fâcheux dans certains monastères où le cagotisme règne en despote, et où rien ne soulage les malheureuses recluses qui n’ont pas l’esprit de se retourner ?

L’extravagance monacale a inventé de mêler dans leurs boissons des décoctions de nénuphar ou des infusions de nitre, en vue de détourner les dispositions d’une nature trop active ; mais pris un certain temps, ces palliatifs deviennent sans effet ou détruisent tellement l’organisation de l’estomac et la santé de ces prisonnières, qu’il leur en survient des flueurs blanches, des défaillances, des oppressions et des douleurs internes pendant le peu de temps qu’il leur reste à vivre. Il y a même de ces endroits où la sottise est portée au point de traiter de même leurs pensionnaires, et souvent elles sortent de ces maisons ou cacochymes, ou avec le genre nerveux attaqué, ou hors d’état de produire leur espèce, soit par la destruction des germes, soit par l’inertie où cet usage a plongé les forces de la nature et l’esprit vital, et c’est à quoi les parents qui chérissent leurs enfants ne font pas assez d’attention.

Apprends encore, ma chère Laure, qu’à un certain âge la fougue du tempérament commence à s’éteindre, ce qui arrive plus tôt chez les uns que chez les autres, par une disposition et qualité différente des liqueurs qui sont en nous, ou par une diminution de sensibilité dans les organes : cette semence, alors refluée dans le sang, se tourne en embonpoint, qui quelquefois devient monstrueux par la suppression totale des épanchements et ces individus, loin d’être propres à l’union des sexes, y sont même indifférents, et ne conçoivent presque plus comment on peut y être sensible.

Mais, ma chère enfant, dans l’âge où le superflu commence à s’annoncer, où le feu du tempérament est un ardent brasier, si l’on s’en dégage avec la prudence qu’il est nécessaire de conserver, loin de nuire à sa santé, loin de faire tort à sa beauté, on entretient l’une et l’autre dans toute sa vigueur et dans toute la fraîcheur qu’elles peuvent avoir. Cependant, ma Laurette, il y a bien de la différence dans les moyens : une femme entre les bras d’un homme est bien plus animée par la différence du sexe ; combien l’est-elle plus à proportion du goût qu’elle a pour lui ? elle l’est même par l’approche et l’attouchement d’une personne du sien qui lui plaît ; l’imagination et la nature se prêtent avec bien plus de facilité et beaucoup moins d’efforts que si elle se procurait d’elle-même et seule ces sensations voluptueuses. Apprécie donc mieux à présent la conduite que je tiens entre Lucette et toi.

— Eh bien, cher papa, car je vous donnerai toujours ce nom, je me rends à des raisons si solides, et je conçois toute votre prudence ; mais à quel âge ferez-vous donc avec moi ce que vous faites avec elle ? Cet instant manque à ma félicité, puisque je ne puis remplir tous vos désirs et les satisfaire dans toute leur étendue.

— Attends, fille charmante, que la nature parle en notre faveur d’une manière intelligible. Tes tétons n’ont point encore acquis leur forme ; le duvet qui couvre les lèvres de ton petit conin est encore trop faible : à peine a-t-il porté ses premières fleurs ; attends un peu plus de force ; alors, chère Laurette, enfant de mon cœur, c’est de ta tendresse que je recevrai ce présent ; tu me laisseras cueillir cette fleur que je cultive, mais attendons cet heureux instant. Ne crois pas cependant, ma chère fille, qu’à cette époque je te laisse livrée tout à fait à toi-même : dans une constitution robuste, cet instant arrivé suffit souvent, encore est-il nécessaire de se ménager ; mais dans un tempérament délicat, il faut pousser l’attention bien plus loin, et contraindre jusqu’à dix-sept ou dix-huit ans, où les femmes sont dans toute leur force, les penchants qu’elles peuvent avoir à se laisser aller aux attraits de la volupté.

Tout ce qu’il me disait, Eugénie, s’imprimait fortement dans ma mémoire ; ses raisonnements me paraissaient appuyés sur les fondements les plus solides, et sa complaisance à répondre sans déguisement à mes questions m’engageait à lui en faire de nouvelles. Lucette si profondément endormie la première fois que je les découvris ensemble formait un mystère pour moi que je désirais d’éclaircir ; un jour enfin je lui en demandai la raison.

— Pourquoi, cher papa, Lucette dormait-elle si fort le premier jour que vous lui découvrîtes les tétons et que vous fîtes avec elle tout ce que vous désiriez, sans qu’elle s’éveillât ? Ce sommeil était-il feint ou réel ?

— Très réel, ma chère Laure ; mais c’est mon secret : dois-je t’en instruire ? Oui, cet exemple pourra te devenir utile pour t’en garantir. Je t’avoue que depuis longtemps le besoin me tourmentait ; j’étais souvent très animé avec toi, je ne pouvais me satisfaire ; je vis Lucette, elle me plut, et parut me convenir de toutes manières, mais voyant qu’elle reculait et balançait à se rendre à mes désirs, je pris mon parti : je lui fis avaler quinze ou vingt gouttes d’une potion dormitive dans le verre de liqueur que je lui donnai ; tu en as vu l’effet ; mais je ne me contentai pas de cela ; je redoutais le moment de son réveil, et je craignais que la surprise et la colère ne l’emportassent trop loin. Pour l’éviter, j’avais préparé d’avance une composition capable d’exciter la nature à la concupiscence : c’est ce qu’on appelle un philtre. Quand je t’eus portée dans mon lit, je revins en prendre trois ou quatre gouttes dans ma main, dont je frottai toute sa motte, son clitoris et l’entre-deux des lèvres. Cette liqueur a même la propriété d’exciter un homme affaibli et de le faire bander s’il s’en frotte à la même dose le périnée et toutes les parties quelque temps avant d’entrer en lice. Lucette ne fut pas une heure couchée, qu’elle s’éveilla : elle ressentait une démangeaison, une ardeur, une passion que rien ne pouvait éteindre. Elle ne parut point étonnée de me voir dans ses bras ; elle les passa autour de moi, et loin d’opposer de la résistance à mes caresses et à mes désirs, tout émue par les siens, elle écarta d’elle-même les genoux et bientôt je goûtai les plaisirs les plus vifs, que je lui fis partager ; mais attentif aux suites qui pouvaient en arriver, au moment où je sentis la volupté prête à s’élancer comme une flamme, je me retirai et j’inondai sa motte et son ventre d’une copieuse libation que je répandis sur l’autel où je portais alors tous mes vœux.

Depuis ce moment, Lucette s’est toujours prêtée à mes volontés, et c’est par sa complaisance, mon inattention et ta curiosité, que je ne soupçonnais pas de ton âge, que tu as découvert ce mystère ; elle ignore ce que je viens de t’apprendre, et tu dois garder ma confidence.

— Soyez-en assuré, cher papa, mais achevez-la, je vous prie, tout entière. Ne craignez-vous pas de lui faire un enfant, si vous ne vous retirez pas toujours à temps ? en est-on absolument le maître ? n’est-on pas quelquefois emporté par le plaisir, et la crainte qu’on peut avoir de ses suites n’en diminue-t-elle pas l’étendue et l’excès ?

— Ah ! ma fille, jusqu’où ton imagination curieuse ne va-t-elle pas ? Je vois bien que je ne dois rien te cacher. Si je ne te garantissais pas de tout événement, je ferais, sans doute, une folie de t’éclairer, mais je ne risque rien avec toi, et ta raison est au delà de ton âge.

Apprends donc que la semence qui n’est point dardée dans la matrice ne peut rien produire ; qu’elle ne peut s’y rendre lorsqu’on intercepte le sucement qui lui est ordinaire. Cela reconnu, plusieurs femmes ont imaginé de repousser par un mouvement interne, la semence, au moment où elles croyaient leur amant dans les délices du plaisir ; mais pour qu’elles aient cette liberté d’esprit, il ne faut pas qu’elles le partagent, privation bien dure ! Encore rien n’est-il moins assuré. Des hommes ont pensé qu’en se retirant presque à l’entrée, il n’y avait rien à craindre, mais ils se trompent, la matrice étant une pompe avide ; d’ailleurs, il y a des hommes qui, emportés par les délicieuses sensations qu’ils éprouvent, ne sont pas maîtres de se retirer à temps : l’inquiétude, la crainte des suites, diminuent ordinairement l’excès du plaisir ; mais un moyen auquel on peut avoir la plus grande confiance est celui que j’emploie avec Lucette : il donne la liberté de se livrer sans inquiétude à tous les transports et au feu du plaisir. J’engageai donc ta bonne, depuis le jour où tu nous as découverts, à se munir, avant nos embrassements, d’une éponge fine, avec un cordon de soie, délicat qui la traverse en entier et qui sert à la retirer. On imbibe cette éponge dans de l’eau mélangée de quelques gouttes d’eau-de-vie ; on l’introduit exactement à l’entrée de la matrice, afin de la boucher, et quand bien même les esprits subtils de la semence passeraient par les pores de l’éponge, la liqueur étrangère qui s’y trouve mêlée avec eux, en détruit la puissance et la nature. On sait que l’air même suffit pour la rendre sans vertu : dès lors il est impossible que Lucette fasse des enfants.

— J’avais déjà pressenti, cher papa, l’utilité de cette éponge, mais j’en désirais l’explication, et celle que tu m’en donnes satisfait toutes mes idées.

— Je t’avoue, ma Laurette, qu’elle est un effet de ma tendresse pour toi, et c’est un aveu que je ne m’attendais pas à te faire, surtout dans un âge aussi tendre : de pareils secrets sont propres à chasser bien loin la timidité de beaucoup de filles que la crainte des suites retient le plus souvent.

Je n’ai pas oublié cette découverte dans le besoin. Je t’ai déjà fait part, chère Eugénie, de cette ressource favorable et salutaire, à laquelle tu as eu assez de foi, sur ma propre expérience, pour te livrer à la tendresse et aux sollicitations de ton amant.

Telle était une partie des conversations que nous mêlions à nos plaisirs, à nos caresses et aux autres instructions qu’il me donnait, dont il avait l’art de me faire profiter sans peine. Les livres de toute espèce étaient entre mes mains, il n’y en avait aucun d’excepté, mais il dirigeait mon goût sur ceux qui traitaient des sciences, aussi loin qu’ils pouvaient convenir à mon sexe. Je veux t’en donner un échantillon et un léger précis dans une matière où je l’avais souvent questionné.

Peux-tu concevoir, ma Laure, et fixer un point d’arrêt sur l’immensité dont notre globe est environné ? Pousse-le aussi loin que ton imagination puisse l’étendre : à quelle distance inconcevable seras-tu encore du but ! Que penses-tu qui remplisse cet espace immense ? Des éléments dont la nature et le nombre sont et seront toujours inconnus ; il est impossible de savoir s’il n’y en a qu’un seul dont les modifications présentent à nos yeux et à notre pensée ceux que nous apercevons, ou si chacun de ces éléments a une racine absolument propre, qui ne puisse être convertie en une autre. Dans une ignorance si parfaite de la nature des choses dont nous faisons tous les jours usage, il paraît ridicule que les hommes aient fixé le nombre de ces éléments ; rien n’est plus digne de la sphère étroite de leurs idées, et néanmoins à les entendre, il semble qu’ils aient assisté aux dispositions de l’Ordonnateur éternel. Mais enfin, qu’ils soient un ou plusieurs, l’assemblage de leurs parties forme les corps et se trouve uni dans un nombre très multiplié de globules de feu et de matière qui paraît inerte aux yeux préoccupés. Que pense-tu donc de ces points de feu brillants, connus parmi nous sous le nom d’étoiles ? Eh bien, ma fille, ce sont de vastes globes enflammés, semblables à notre soleil, établis pour éclairer, échauffer et donner la vie à une multitude de globes terrestres, peut-être chacun aussi peuplé que le nôtre. Quelques-uns ont cru qu’ils étaient placés là pour nous éclairer pendant la nuit ; l’amour-propre leur fait rapporter tout à nous, afin que tout aille à eux. Et de quoi nous servent-ils, ces globes, quand l’air est obscurci par les nuages ou les vapeurs ? La lune paraîtrait plutôt être destinée à cet office ; elle nous éclaire dans l’absence du soleil, même à travers les parties nébuleuses qui couvrent souvent notre horizon, et cependant ce n’est pas là son unique destination : on ne peut même affirmer qu’elle n’est pas un monde dont les habitants doutent si nous existons et sont peut-être assez stupides pour se flatter de jouir seuls de la magnificence des cieux ; peut-être aussi sont-ils plus pénétrants plus ingénieux que nous, ou pourvus de meilleurs organes, et qu’ils savent juger plus sainement des choses. Les planètes sont des terres comme la nôtre, peuplées, sans doute, de végétaux et d’animaux différents de ceux que nous connaissons, car rien dans la nature n’est semblable.

Dans ce point de vue, et parmi cette infinité de boules de matière, que devient notre terre ? un point qui fait nombre parmi les autres ; et nous ! fourmis répandues sur cette boule, que sommes-nous donc, pour être le type, le point central et le but où se rendent les prétendues vérités dont on berce l’enfance ?

C’est à peu près ainsi que mon père tâchait chaque jour de tracer dans mon esprit des impressions de philosophie. Je lui demandais un jour :

— Quel est cet Être créateur de tout, que je sentais mal défini dans les notions qu’on m’en avait données ?

Il me dit :

— Cet Être magnifique est incompréhensible ; il est senti, sans être connu ; c’est nos respects qu’il exige ; il méprise nos spéculations. S’il existe plusieurs éléments, c’est de ses mains qu’ils sortent ; il les a créés par la puissance de sa volonté, il est donc l’âme de l’univers ; s’il n’existe qu’un élément, il ne peut être que lui-même. Connaissons-nous les bornes de son pouvoir ? n’a-t-il pas pu dépendre de lui de se transformer dans la matière que nous voyons, dont nous ne connaissons ni la nature ni l’essence ? Et ce qu’il a pu faire dans un temps, ne l’a-t-il pas pu de toute éternité ? C’en est assez, ma chère enfant, pour le présent ; quand tu seras dans un âge plus avancé, j’écarterai de tout mon pouvoir les voiles qui couvrent la vérité.

Mon père se plaisait à me faire lire des livres de morale, dont nous examinions les principes, non sous la perspective vulgaire, mais sous celle de la nature. En effet, c’est sur les lois dictées par elle, et exprimées dans nos cœurs, qu’il faut la considérer. Il la réduisait à ce seul principe, auquel tout le reste est étranger, mais qui renferme une étendue considérable : faire pour les autres ce que nous voudrions qu’on fît pour nous, lorsque la possibilité s’y trouve, et ne point faire aux autres ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît. Tu vois, ma chère, que cette science, dont on parle tant, n’est jamais relative qu’à l’espèce humaine, et si elle n’est rien en elle-même, au moins est-elle utile à son bonheur.

Les romans étaient presque bannis de mes yeux, et il me faisait voir dans presque tous une ressemblance assez générale dans le tissu, les vues et le but, à la différence près du style, des événements et de certains caractères. Il y en avait cependant plusieurs qui étaient exceptés de cette règle ; il me donnait volontiers ceux dont le sujet était moral. Peu des autres peignent les hommes et les femmes de leurs véritables couleurs : ils y sont présentés sous le plus bel aspect. Ah ! ma chère, combien cette apparence est en général loin de la réalité : les uns et les autres vus de près, quelle différence n’y trouve-t-on pas ! Je puisais dans les voyageurs et dans les coutumes des nations un genre d’instruction qui me faisait mieux apprécier l’humanité en général, comme la société fait apercevoir les nuances des caractères.

Les livres d’histoire qui me rendaient compte des mœurs antiques et des préjugés différents qui, tour à tour, ont couvert la surface de la terre, étaient ma balance. Les ouvrages de nos meilleurs poètes formaient le genre amusant, pour lequel mon goût était le plus décidé, et que j’inculquais avec empressement dans ma mémoire.

Il me remit un jour entre les mains un livre qui venait de paraître, en me recommandant d’y réfléchir.

— Lis, ma chère Laurette ; cet ouvrage est la production d’un génie dont tu as lu presque tout ce qu’il a mis au jour, et dont ta mémoire possède plusieurs morceaux, qui unit un style élevé, élégant, agréable et facile, propre à lui seul, à des idées profondes. Zadig, paré de ses mains, t’apprendra sous l’allégorie d’un conte, qu’il n’arrive point d’événements dans la vie qui soient à notre disposition.

De quelque aveuglement dont l’amour-propre et la vanité nous fascinent, sois assurée que pour un esprit attentif et réfléchi, il est d’une vérité palpable et constante que tout s’enchaîne afin de suivre un ordre fixé pour l’ensemble et pour chacun en particulier ; des circonstances imprévues forcent les idées et les actions des humains ; des raisons éloignées, et souvent imperceptibles, les entraînent dans une détermination qui presque toujours leur paraît volontaire ; elle semble venir, d’eux et de leur choix, tandis que tout les y porte sans qu’ils s’en aperçoivent. Ils tiennent même de la nature les formes, le caractère et le tempérament qui concourent à leur faire remplir le rôle qu’ils ont à jouer et dont toute la marche est dessinée d’avance dans les décrets du moteur éternel.

Si l’on peut prévoir quelques événements, ce n’est que par une perspicacité, une sagacité de vue sur la chaîne de ces circonstances qu’on ne peut cependant changer, et qui est d’une force irrésistible même pour ce qui constitue le malheur. Le plus sage est celui qui sait se prêter au cours naturel des choses.

Pour toi, ma chère Eugénie, ton esprit facile sait se plier à tout ; ta docilité te rend heureuse, et tu sais l’être malgré les entraves mises à ta liberté ; tu savoures les plaisirs que tu inventes, sans t’inquiéter de ceux qui te manquent.

J’avançais en âge, et j’atteignais la fin de ma seizième année, lorsque ma situation prit une face nouvelle : les formes commençaient à se décider ; mes tétons avaient acquis du volume ; j’en admirais l’arrondissement journalier ; j’en faisais voir tous les jours les progrès à Lucette et à mon papa ; je les leur faisais baiser ; je mettais leurs mains dessus, et je leur faisais faire attention qu’ils les remplissaient déjà ; enfin, je leur donnais mille marques de mon impatience : élevée sans préjugés, je n’écoutais, je ne suivais que la voix de la nature ; ce badinage l’animait et l’excitait vivement ; je m’en apercevais ;

— Tu bandes, cher papa, viens…

Et je le mettais entre les bras de Lucette. Je n’étais pas moins émue, mais je jouissais de leurs plaisirs. Nous vivions, elle et moi, dans l’union la plus intime ; elle me chérissait autant que je l’aimais ; je couchais ordinairement avec elle, et je n’y manquais pas lorsque mon papa était absent. Je remplissais son rôle du mieux que je le pouvais ; je l’embrassais, je suçais sa langue, ses tétons ; je baisais ses fesses, son ventre, je caressais sa jolie motte ; je la branlais, mes doigts prenaient souvent la place du vit que je ne pouvais lui fournir, et je la plongeais à mon tour dans ces agonies voluptueuses où j’étais enchantée de la voir. Mon humeur et mes manières lui avaient fait prendre pour moi une affection dont je ne puis, ma chère, te donner d’idée que d’après la tienne. Elle m’avait vue bien des fois, au milieu de nos caresses, violemment animée, et dans ces moments elle m’assurait qu’elle désirait que je fusse au terme où elle pût aussi me procurer, sans danger, les mêmes plaisirs que je lui donnais. Elle souhaitait que mon papa me l’eût mis, et eût ouvert la route sur laquelle ils sont semés :

— Oui, ma chère Laure, disait-elle, quand cet instant arrivera, je projette d’en faire une fête ; je l’attends avec empressement ; mais, ma chère amie, je crois apercevoir qu’il ne tardera pas : tes tétons naissants sont presque formés ; tes membres s’arrondissent ; ta motte se rebondit ; elle est déjà toute couverte d’un tendre gazon ; ton petit conin est d’un incarnat admirable, et j’ai cru découvrir dans tes yeux que la nature veut qu’on te mette bientôt au rang des femmes ; l’année dernière, au printemps, tu vis des préludes d’une éruption qui va s’établir tout à fait.

En effet, je ne tardai pas à me sentir plus pesante, la tête chargée, les yeux moins vifs des douleurs de reins et des sensations d’une colique extraordinaire pour moi ; enfin, huit ou dix jours après, Lucette trouva la gondole ensanglantée ; mon père ne me la remit pas ; ils avaient pressenti l’effet de ma situation ; j’en étais prévenue. Je restai près de neuf jours dans cet état, après lesquels je redevins aussi gaie et je jouis d’une santé aussi brillante qu’auparavant. Que j’eus de joie de cet événement ! J’en étais folle, j’embrassai Lucette :

— Ma chère bonne, que je vais être heureuse !

Je volai au cou de mon papa, je le couvris de mes baisers :

— Me voilà donc enfin à l’époque où tu me désirais !… Que je serais contente, si je puis faire naître tes désirs et les satisfaire !… Mon bonheur est d’être tout entière à toi ; mon amour et ma tendresse en font l’objet de ma félicité…

Il me prit dans ses bras, il me mit sur ses genoux. Ah ! qu’il me rendait bien les caresses que je lui faisais ! Il pressait mes tétons, il les baisait, il suçait mes lèvres, sa langue venait caresser la mienne ; mes fesses, mon petit conin, tout était livré à ses mains brûlantes.

— Il est enfin arrivé, charmante et chère Laure, cet heureux instant où ta tendresse et la mienne vont s’unir dans le sein de la volupté ; aujourd’hui même, je veux avoir ton pucelage et cueillir la fleur qui vient d’éclore ; je vais la devoir à ton amour et ce sentiment de ton cœur y met un prix infini, mais tu dois être prévenue que si le plaisir doit suivre nos embrassements et nos transports, le moment qui va me rendre maître de cette charmante rose te fera sentir quelques épines qui te causeront de la douleur.

— Qu’importe ! fais-moi souffrir, mets-moi toute en sang, si tu veux ! je ne puis te faire trop de sacrifices ; ton plaisir et ta satisfaction font l’objet de mes désirs.

Le feu brillait dans nos yeux ; l’aimable Lucette, voulant coopérer à l’effusion du sang de la victime, ne montrait pas moins d’empressement que si elle-même eût été le sacrificateur. Ils m’enlevèrent et me portèrent dans un cabinet qu’ils avaient fait préparer pendant le temps de mon état. La lumière du jour en était absolument bannie : un lit de satin gros bleu était placé dans un enfoncement entouré de glaces. Les foyers de quatre réverbères placés dans les encoignures, adoucis par des gazes bleues, venaient se réunir sur un petit coussin de satin couleur de feu, mis au milieu, qui formait la pierre sur laquelle devait se consommer le sacrifice. Lucette exposa bientôt à découvert tous les appas que j’avais reçu de la nature ; elle ne para cette victime volontaire qu’avec des rubans couleur de feu, qu’elle noua au-dessus de mes coudes à la ceinture, dont, comme une autre Vénus, elle marqua ma taille. Ma tête, couronnée simplement de sa longue chevelure, n’avait d’autre ornement qu’un ruban de la même grandeur qui la retenait. Je me jetai de moi-même sur l’autel.

Quelques parures que j’eusse auparavant portées, je me trouvais alors bien plus belle de ma seule beauté ; je me regardait dans les glaces avec une complaisance satisfaite, un contentement singulier. Je paraissais d’une blancheur éblouissante ; mes petits tétons, si jeunes encore, s’élevaient sur mon sein comme deux demi-boules parfaitement rondes, relevées de deux petits boutons d’une couleur de chair rose ; un duvet clair ombrageait une jolie motte grasse et rebondie, qui, faiblement entr’ouverte, laissait apercevoir un bout de clitoris semblable à celui d’une langue entre deux lèvres : il appelait le plaisir et la volupté. Une taille fine et bien prise, un pied mignon surmonté d’une jambe déliée et d’une cuisse arrondie, des fesses dont les pommettes étaient légèrement colorées, des épaules, un col, une chute de reins charmante et la fraîcheur d’Hébé ! Non, l’Amour ne m’eût rien disputé, s’il eût été de mon sexe. Tels étaient les éloges que Lucette et mon papa faisaient à l’envi de ma personne. Je nageais dans la joie et l’ivresse de l’amour-propre. Plus je me croyais bien, plus ils me trouvaient telle, et plus j’étais enchantée que ce papa, si cher à mon cœur, eût une entière jouissance de tout ce que je possédais. Il m’examinait, il m’admirait ; ses mains, ses lèvres ardentes se portaient sur toutes les parties de mon corps ; nous avions l’un et l’autre l’ardeur de deux jeunes amants qui n’ont rencontré que des obstacles, et qui vont enfin jouir du prix de leur attente et de leur amour.

Je souhaitais vivement le voir dans l’état où j’étais ; je l’en pressai avec instance ; il y fut bientôt. Lucette le dégagea de tous ses vêtements ; il me coucha sur le lit, mes fesses posées sur le coussin. Je tenais en main le couteau sacré qui devait à l’instant immoler mon pucelage. Ce vit que je caressais avec passion, semblable à l’aiguillon de l’abeille, était d’une raideur à me prouver qu’il percerait rigoureusement la rose qu’il avait soignée et conservée avec tant d’attention. Mon imagination brûlait de désir ; mon petit conin tout en feu appétait ce cher vit, que je mis aussitôt dans la route. Nous nous tenions embrassés, serrés, collés l’un sur l’autre ; nos bouches, nos langues se dévoraient. Je m’apercevais qu’il me ménageait ; mais passant mes jambes sur ses fesses et le pressant bien fort, je donnai un coup de cul qui le fit enfoncer jusqu’où il pouvait aller, La douleur qu’il sentit et le cri qui m’échappa furent ceux de sa victoire. Lucette, passant alors sa main entre nous, me branlait, tandis que, de l’autre, elle chatouillait le trou de mon cul. La douleur, le plaisir mélangés, le foutre et le sang qui coulaient, me firent ressentir une sublimité de plaisir et de volupté inexprimables. J’étouffais, je mourais ; mes bras, mes jambes, ma tête tombèrent de toutes parts ; je n’étais plus à force d’être. Je me délectais dans ces sensations excessives, auxquelles on peut à peine suffire. Quel état délicieux ! Bientôt, j’en fus retirée par de nouvelles caresses ; il me baisait, me suçait, me maniait les tétons, les fesses, la motte ; il relevait mes jambes en l’air, pour avoir le plaisir d’examiner sous un autre point de vue mon cul, mon con, et le ravage qu’il y avait fait. Son vit que je tenais, ses couilles que Lucette caressait, reprirent bientôt leur fermeté ; il me le remit. Le passage, facilité, ne nous fit plus sentir, dès qu’il fut entré, que des ravissements. Lucette, toujours complaisante, renouvela ses chatouillements, et je retombai dans l’apathie voluptueuse que je venais d’éprouver.

Mon papa, fier de sa victoire et charmé du sacrifice que mon cœur lui avait fait, prit le coussin qui était sous moi, teint de sang qu’il avait fait couler, et le serra avec soin et l’empressement de l’amant le plus tendre, comme un trophée de sa conquête. Il revint bientôt à nous :

— Ma Laure, chère et aimable fille, Lucette a multiplié tes plaisirs : n’est-il pas juste de les lui faire partager ?

Je me jetai à son cou, je l’attirai sur le lit ; il la prit dans ses bras et la mit à côté de moi ; je la troussai d’abord, et je la trouvai toute mouillée.

— Que tu es émue, ma chère bonne ; je veux te rendre une partie du plaisir que j’ai eu.

Je pris la main de mon papa, je lui introduisis un de ses doigts qu’il faisait entrer et reparaître, et je la branlai. Elle ne tarda pas à tomber dans l’extase où je venais de sortir.

Ah ! chère Eugénie, que ce jour eut de charme pour moi ! Je te l’avoue, tendre amie, il a été le plus beau de ma vie et le premier où j’aie connu les délices de la volupté dans leur plus haut degré. Je le rappelle encore à ma mémoire avec un saisissement de satisfaction que je ne peux te rendre, mais, en même temps, avec un cruel serrement de cœur. Faut-il que ce souvenir, qui me cause tant de plaisir et de joie, fasse naître, en même temps, les regrets les plus amers ! Écartons, pour un moment, cette image si triste pour mon âme.

Il régnait dans ce cabinet une douce chaleur ; je me trouvais si bien dans l’état où j’étais, que je ne voulus rien mettre sur moi ; j’étais d’une gaîté folle : je prétendis souper parée de mes seuls appas. Lucette, attentive, avait eu le soin d’écarter tous les domestiques et de jeter un voile épais sur la malignité de leurs regards ; elle eut la complaisance d’apporter seule et de préparer tout ce qu’il fallait, et ferma les portes avec soin. Je ne fus pas contente que je ne l’eusse mise dans la situation où nous étions ; je fis voler loin d’elle tout ce qui la couvrait ; elle était charmante à mes yeux. Nous nous mîmes à table. Mon papa était entre nous deux l’objet de nos caresses, qu’il nous rendait tour à tour. Les glaces répétaient cette charmante scène ; nos grâces et nos attitudes étaient variées par les saillies qu’inspirait un vin délicat ; son coloris brillant y répandait même des nuances différentes ; nous ressentîmes bientôt les effets de sa vertu et de nos attouchements. Nos cons étaient enflammés ; son vit avait repris toute sa raideur et sa dureté. Dans un état aussi animé, aussi pressant, la table nous déplut ; nous courûmes, nous volâmes sur le lit. Dans ce jour, qui m’était uniquement consacré, je fus encore plongée dans les délices d’une volupté suprême ; il se coucha sur ma gauche, ses cuisses passées sous les miennes, qui étaient relevées ; son vit se présentait fièrement à l’entrée. Lucette se mit sur moi, ma tête entre ses genoux ; son joli con était sous mes yeux ; je l’entr’ouvrais, je le chatouillais, je caressais ses fesses, qui étaient en l’air ; son ventre rasait mes tétons ; ses cuisses étaient entre mes bras. Tout excitait, tout animait la flamme du désir ; elle écarta les lèvres de mon petit conin, qui était d’un rouge vif ; je l’engageai à y mettre l’éponge, pour que mon papa jouît de moi sans inquiétude et pût décharger dedans. Il était sensible et douloureux : dès qu’on y touchait, je souffrais ; cependant, malgré cette sensation pénible, je l’endurai dans l’espérance que j’en aurais, bientôt de plus agréables.

Lucette conduisit le vit de mon papa dans le chemin dont elle avait écarté tous les dangers, et qui n’était plus semé que de fleurs : il s’y précipita, il enfonça, elle me branlait en même temps, et je lui rendais un pareil service, tandis qu’il faisait avec son doigt, dans le con de ma bonne, le même mouvement que son vit faisait dans le mien. Ces variétés, ces attitudes, cette multiplicité d’objets et de sensations dans les approches du plaisir, en augmentaient infiniment les délices. Nous le sentîmes venir à nous ; mais prêt à nous échapper, comme l’éclair étincelant fuit à nos regards, nous en savourâmes au moins toute l’étendue dans un délectable anéantissement, dont la douceur et les charmes ne peuvent qu’être sentis. Nous commencions à être fatigués ; Lucette se releva, fut mettre ordre à tout, et dès qu’elle fut de retour, nous nous mîmes dans le lit, entre les bras les uns des autres, où nous passâmes une nuit préférable pour nous au jour le plus pompeux.

Hélas ! chère Eugénie, pourquoi l’imagination va-t-elle toujours au delà de la réalité, qui suffit seule à notre bonheur ? Je croyais que tous les jours allaient le disputer à celui qui m’avait procuré tant de plaisirs ; mais mon père, plus soigneux, plus délicat peut-être, et veillant sans interruption à ma santé, m’engagea le lendemain à reprendre ce fatal caleçon.

— Ma chère Laurette, je ne te le cache pas, je me défie de toi, de nous tous ; ton tempérament n’est pas encore assez formé pour que je t’abandonne à toi-même, et tu m’es trop chère pour que je ne cherche pas à te ménager avec toute l’attention qui peut dépendre de moi ; cependant tu jouiras de nos caresses, tu nous en feras ; sans gêne avec toi, tu partageras, en quelque façon, nos plaisirs, et de temps en temps, nous te réserverons une nuit pareille, que tu trouveras d’autant plus agréable que tu l’attendras avec impatience ; enfin, si tu veux me plaire ; tu te prêteras à ce que je désire de toi, et tu y consentiras avec complaisance.

C’était un moyen assuré de ne me pas faire regarder cet emprisonnement comme insupportable. Ne crois pas non plus, ma chère, que ce soit par un trait de jalousie ; tu verras bientôt le contraire. Je le laissai donc faire. Ah ! chère Eugénie, que je m’en suis bien trouvée !

Il y avait déjà près de dix-neuf mois que j’avais passé l’heureuse soirée dont je viens de te retracer le tableau, lorsque j’eus le chagrin de voir l’éloignement de Lucette. Son père, qui demeurait en province, la rappela près de lui ; une maladie dangereuse lui fit désirer absolument son retour avant de mourir. Son départ nous causa la peine la plus sensible ; nos larmes sincères furent confondues avec les siennes ; pour moi, je ne pouvais retenir mes sanglots, qui ne furent enfin suspendus que par l’espérance et le désir qu’elle nous témoignait de revenir au plus tôt ; mais peu de temps après la mort de son père, elle tomba dans une maladie de langueur dont elle eut beaucoup de peine à se rétablir pendant plus de deux ans. Son père lui avait laissé un bien-être qui la fit rechercher dans son canton : elle ne voulait entendre parler de qui que ce soit ; elle trouvait, suivant ses lettres, une si grande différence entre mon papa et tous ceux qui se présentaient pour elle, qu’elle en était révoltée ; enfin, elle ne voulait écouter aucune proposition de mariage, et ne soupirait qu’après son retour près de nous. Néanmoins, sollicitée par sa mère et ses autres parents, qui lui représentaient les avantages qu’elle y trouvait et le besoin que sa mère infirme avait d’elle, la complaisance arracha son consentement contre son gré, après avoir cependant consulté mon papa, en qui elle avait la plus entière confiance. Comme le parti qui s’offrait était effectivement très avantageux, il se crut obligé, par ses principes, de lui conseiller de l’accepter, ce qu’il fit avec une véritable répugnance, m’ayant assuré plusieurs fois qu’il avait un pressentiment de son malheur auquel il ne voulait pourtant pas ajouter foi, le regardant comme une faiblesse ; cependant, elle mourut des suites de sa première couche.

Je regrettais souvent l’éloignement de Lucette, que je regardais perdue pour moi, mais je me consolais dans les bras de ce cher et tendre papa. J’avais enfin totalement quitté cet habillement secret que j’avais si souvent maudit, mais la langueur de Lucette, de quelque cause qu’elle pût venir, ajoutant du poids aux réflexions qu’il avait déjà faites et aux nouvelles dont il me faisait part, le détermina à me ménager avec plus d’attention qu’il n’en avait mise à son égard, en me faisant sentir combien cela était nécessaire à ma constitution délicate. Je me rendais à ses raisons avec d’autant plus de facilité, que j’avais en lui la foi la plus complète. Comme il s’éloignait peu de moi, et que je couchais toujours avec lui, il me veillait et m’arrêtait souvent lorsque je cédais à mes désirs avec trop d’ardeur.

Depuis le départ de Lucette, il avait fait plusieurs changements dans son appartement : on ne pouvait plus entrer dans ma chambre qu’en passant par la sienne ; il avait répandu dans son domestique un air de sévérité, sur ce sujet, qui nous faisait quelquefois rire ensemble. Nos lits étaient appuyés contre le même mur, qu’il avait fait percer, et dans les doubles cloisons qui couvraient le fond de nos alcôves, il avait fait pratiquer des panneaux à coulisses qui s’ouvraient par un ressort que nous seuls connaissions. Il faisait emporter tous les soirs la clef de ma chambre par une femme qu’il avait prise à la place de Lucette et que nous tenions tout à fait dans le rang de domestique ; mais, quand nous étions dégagés de tout incommode, je passais par les coulisses et je venais dans ses bras jouir d’un sommeil doux et tranquille que me procuraient ces nuits heureuses, suivies des jours les plus agréables.

Ce fut dans une de ces charmantes nuits qu’il me fît goûter une nouvelle sorte de plaisir, dont je n’avais pas d’idée, et que, non seulement je ne trouvai pas moins délicieux, mais encore qui me parut des plus vifs.

— Ma chère Laure, aimable enfant, tu m’as donné ta première fleur ; mais tu possèdes un autre pucelage que tu ne dois ni ne peux me refuser, si je te suis toujours cher.

— Ah ! si tu me l’es ! Qu’ai-je donc en moi, cher papa, dont tu ne puisses disposer à ton gré, et qui ne soit pas à toi ? Heureuse quand je puis faire tout ce qui peut contribuer à ta satisfaction, mon bonheur est établi sur elle !

— Fille divine, tu m’enchantes ! la nature et l’amour ont pris plaisir à former tes grâces : partout en toi séjourne la volupté ; elle se présente avec mille attraits différents dans toutes les parties de ton corps ; dans une belle femme qu’on adore, et qui paie d’un semblable retour, mains, bouche, aisselles, tétons, cul, tout est con !

— Eh bien ! choisis, tu es le maître, et je suis toute à tes désirs.

Il me fit mettre sur le côté gauche, mes fesses tournées vers lui, et mouillant le trou de mon cul et la tête de son vit, il l’y fit entrer doucement. La difficulté du passage levée ne nous présenta plus qu’un nouveau chemin semé de plaisirs accumulés, et soutenant ma jambe de son genou relevé, il me branlait en enfonçant de temps en temps le doigt dans mon con. Ce chatouillement, réuni de toutes parts avait bien plus d’énergie et d’effet ; quand il reconnut que j’étais au moment de ressentir les derniers transports, il hâta ses mouvements, que je secondais des miens. Je sentis le fond de mon cul inondé d’un foutre brûlant, qui produisait de ma part une décharge abondante ; je goûtais une volupté inexprimable ; toutes les parties sensibles y concouraient, mes transports et mes élans en faisaient une démonstration convaincante, mais je ne les devais qu’à ce vit charmant, pointu, retroussé et peu puissant, porté par un homme que j’adorais.

— Quel séduisant plaisir, chère Laurette ! et toi belle amie, qu’en dis-tu ? Si j’en juge par celui que tu as montré, tu dois en avoir beaucoup !

— Ah ! cher papa, infini, nouveau, inconnu, dont je ne peux exprimer les délices et dont les sensations voluptueuses sont multipliées au delà de tout ce que j’ai éprouvé jusqu’à présent.

— En ce cas, ma chère enfant, je veux une autre fois y répandre plus de charmes encore, en me servant, en même temps, d’un godmiché, et je réaliserai, par ce moyen, l’Y du Saint-Père.

— Papa, qu’est-ce donc qu’un godmiché ?

— Tu le verras, ma Laure ; mais il faut attendre un autre jour.

Le lendemain je ne lui parlai que de cela ; je voulais le voir absolument ; je le pressai tant qu’il fallut enfin qu’il me le montrât. J’en fus surprise ; je désirais qu’il m’en fît faire l’essai le soir même, mais il me remit au surlendemain. Je veux, ma chère, faire avec toi comme papa me fit alors : je ne t’en ferai la description que dans une autre scène où nous le mîmes en usage. Je t’en ai déjà parlé de vive voix, et je regrettais de ne pas l’avoir dans nos caresses, où j’aurais avec tant de plaisir, joué le rôle d’un amant tendre avec toi ; mais je ne l’oublierai sûrement pas quand j’irai retrouver ma consolation dans tes bras.

Malgré la distance qu’il mettait dans les plaisirs qu’il me procurait, il n’y avait aucune sorte de variété qu’il ne répandît pour y ajouter de nouveaux attraits ; il m’était d’autant plus facile de les y trouver, que je l’aimais avec toute la passion dont j’étais capable. Quelquefois il se mettait sur moi, sa tête entre mes cuisses, et la mienne entre ses genoux ; il couvrait de sa bouche ouverte et brûlante toutes les lèvres de mon con ; il les suçait, il enfonçait sa langue entre deux ; du bout il branlait mon clitoris, tandis qu’avec son doigt, ou le godmiché, il animait, il inondait l’intérieur. Je suçais moi-même la tête de son vit, je le pressais de mes lèvres, je la chatouillais de ma langue, je l’enfonçais tout entier, je l’aurais avalé ! Je caressais ses couilles, son ventre, ses cuisses et ses fesses. Tout est plaisir, charmes, délices, chère amie, quand on s’aime aussi tendrement et avec autant de passion.

Telle était la vie délicieuse et enchantée dont je jouissais depuis le départ de ma chère bonne. Déjà huit ou neuf mois s’étaient écoulés, qui m’avaient paru fuir bien rapidement. Le souvenir et l’état de Lucette étaient les seuls nuages qui se montraient dans les beaux jours que je passai alors, variés par mille plaisirs, suivis de nuits qui m’intéressaient encore davantage ; je faisais consister toute ma satisfaction et ma félicité à les voir disparaître, pour employer tous les moments qu’ils me laissaient entre les bras de ce tendre et aimable papa, que j’accablais de mes baisers et de mes caresses. Il me chérissait uniquement ; mon âme était unie à la sienne ; je l’aimais à un degré que je ne puis te peindre.

Mais, chère Eugénie, que vas-tu penser de ton amie, sur une confession que je ne t’ai pas encore faite ? Quelle scène nouvelle tu vas voir paraître, et quel fondement peut-on faire sur soi-même ? À quel degré d’extravagance l’imagination exaltée n’entraîne-t-elle pas ? Qui peut donc répondre de ses caprices et de son tempérament ! Si le cœur est toujours le même, s’il est plein des mêmes sentiments, faut-il que des désirs violents, souvent pour un vain fantôme qu’on se crée, nous poussent au delà du but où nous devrions nous arrêter, et nous mènent bien plus loin que nous ne devrions aller ? J’en suis un exemple frappant. Dois-je te faire cet aveu ? Oui, ne cachons rien à l’amie de mon cœur ; je rougis moins de te le dire que d’en avoir eu la folie. Une circonstance va te la développer tout entière, et te fera voir en même temps la bonté, la douceur, le vif intérêt de mon père pour moi, la justesse de son esprit, la force de son âme, de son attachement et de sa complaisance ; elle me fit connaître plus que jamais à quel point il méritait tout mon cœur et mon amour : aussi son image le remplira-t-elle toujours, et ne s’en effacera qu’avec ma vie.

Dans la même maison que nous occupions, végétait une bonne dévote, veuve et âgée, qui ne croyait son temps bien employé qu’en passant la plus grande partie du jour à courir les églises. Elle avait trois enfants : l’aîné, débauché dans toute l’étendue de l’expression, ne fréquentait que la plus mauvaise compagnie : à peine le connaissions-nous de vue. Jouissant du bien qui lui revenait de son père, il le dissipait avec profusion. Son frère, de beaucoup plus jeune, avait quelques mois au-dessus de seize ans lorsqu’il quitta le collège pour revenir chez sa mère. C’était un garçon beau comme on peint l’Amour, d’une humeur égale, d’un caractère fort doux. Ils avaient une sœur fort gentille, qui atteignait ses quinze ans et demi.

Représente-toi, chère Eugénie, une petite brune claire, teint animé, œil vif, nez troussé bouche agréable et vermeille, taille découplée, toute mignonne, d’une vivacité pétulante, folle autant qu’il se puisse, et outre cela très amoureuse, mais fine et en même temps discrète sur ce qui pouvait avoir trait à ses plaisirs. Tous les jours elle plaisantait sur les sermons que lui faisait de temps en temps sa bonne dévote de mère. J’avais lié connaissance avec elle plus particulièrement, huit ou neuf mois après le départ de Lucette, et par cette occasion j’avais fait celle de son jeune frère, lorsqu’il revint avec elle. Souvent ils venaient me voir et il ne se passait guère de jour que nous ne fussions ensemble. Sa mère en était d’autant plus satisfaite, qu’elle me donnait journellement pour exemple à sa fille. Il est vrai que je tenais de la nature et de l’éducation que je recevais de mon papa un air plus réservé. Ne penses-tu pas, Eugénie, avec moi, que si dans nos usages l’amour dégrade notre réputation, l’imprudence dans le choix et dans la conduite y contribue totalement, et surtout ces airs de coquetterie, ces façons libres et qui ne tiennent à rien, quoique souvent elles n’aillent pas plus loin ; tandis qu’une hypocrite, une dévote, une femme attentive aux dehors, la sauvent, en jouissant sous le voile du mystère ! Mais si elles conservent leur réputation sous ses apparences, elles font bien, et mieux encore si elles ont la prudence de mettre un frein à leur langue sur la conduite des autres, modération qui détourne les curieux ou les intéressés de l’examen recherché qu’ils pourraient faire. Encore une fois ce n’est pas dans le fait, c’est dans les manières et par un mauvais choix, qu’on se perd.

Je m’aperçus bientôt que mon père les étudiait avec attention ; il jugea Vernol et sa sœur. Il me dit que Rose en savait plus que sa nourrice ne lui en avait enseigné, et que si sur le plaisir et la jouissance elle était plus ignorante que moi, ce dont il doutait, elle avait grande disposition à en apprendre davantage, et que si j’étais curieuse de juger de ses connaissances, je pouvais l’éprouver. Les différents badinages où je l’engageai depuis me mirent à même d’emporter le même jugement, mais il s’expliqua peu sur Vernol.

Mes talents s’étaient perfectionnés ; musicienne pinçant la harpe avec délicatesse, chantant avec goût, déclamant avec intelligence, j’avais encore formé une société où j’admis Rose et Vernol. Bientôt il eut par là le moyen de me faire apercevoir la passion qu’il avait prise pour moi. Il me cherchait, il me suivait sans cesse ; les prétextes ne lui manquaient pas. Ses gestes étaient animés, remplis d’attention, de soins, de complaisances ; tout me disait ce qu’il n’osait prononcer ; je m’en aperçus, et lorsque j’en fus persuadée, j’en fis part à mon papa, avec ce ton et ce sourire qui annoncent la plaisanterie.

— Laure, je l’ai soupçonné dès les premiers instants ; ses yeux, son teint deviennent plus animés quand il est près de toi ; son air quelquefois embarrassé et toutes ses démarches le décèlent. Eh bien ! ma fille, avec cette connaissance de mon amour pour toi, que ressens-tu pour lui ?

Je ne m’étais pas encore consultée, ma chère Eugénie ; je n’avais pas fouillé dans les replis de mon âme, et croyant n’avoir pour Vernol que ce sentiment qu’on nomme amitié, je lui en parlai sur ce ton ; mais un sourire de mon père, en me demandant si c’était là tout, suffit pour me faire rentrer en moi, et je reconnus bientôt, en y réfléchissant, que la présence de Vernol m’animait, et que lorsqu’il n’était pas avec sa sœur, il me manquait quelque chose, car sans y faire attention, je demandais à Rose, avec une sorte d’empressement, ce que son frère était devenu. Je ne pouvais concevoir comment je m’étais éprise d’un tel caprice, avec lequel mon cœur était si peu d’accord. Sa figure, il est vrai, me charmait ; sa douceur et ses soins en augmentaient les attraits

À l’air de mon père, il était aisé de juger qu’il avait découvert en moi ce que je n’osais presque encore m’avouer à moi-même ; il fut quelque temps sans m’en parler. Je l’aimais toujours autant et plus, s’il était possible, que je n’avais jamais fait ; mon empressement et mon goût pour lui ne diminuaient point ; enfant de la nature et de la vérité, je n’y mettais ni politique ni dissimulation. On prétend que nous sommes naturellement fausses : je crois que cette fausseté est d’acquisition et selon l’éducation reçue. Enfin, je me sentais capable de tout sacrifier pour ce cher et tendre père, et je pris une résolution intérieure d’éviter les poursuites et les soins de ce beau garçon. Je n’avais pu concevoir l’accord des sensations et de la fantaisie que j’éprouvais pour Vernol avec les sentiments de mon cœur pour ce tendre papa, mais la disposition où je me trouvais me fit connaître par la suite la différence des mouvements qui m’agitaient. Tu concevras difficilement, chère Eugénie, cette différence ; il faut l’avoir sentie pour la connaître ; bien des hommes pourraient t’apprendre à faire la distinction qui s’y trouve. Mon père voulut la juger en moi, et s’en assura, en me mettant à une épreuve à laquelle je ne m’attendais nullement.

— Laure, quelques-uns de vos amis actuels me font de la peine ; je désirerais que vous ne voyiez plus Rose ni son frère.

Je ne balançai pas un instant, et me mettant à son cou, le serrant, le pressant contre mon sein :

— J’y consens bien volontiers, cher papa ; je te conjure même de quitter cette demeure, ou que tu me mènes à la campagne, je ne serais plus dans le cas de me trouver avec eux. Partons dès demain, je serai bientôt prête.

— En effet, je courus préparer mon trousseau ; j’y étais occupée, lorsqu’il me rappela ; il me prit sur ses genoux, et me dit en m’embrassant :

— Chère Laurette, je suis content de ta tendresse et de ton affection ; tes yeux secs me disent que c’est sans peine que tu veux me faire un sacrifice. Avoue-le-moi, je t’y engage, ouvre-moi ton cœur, car, sans doute, ce n’est pas la crainte qui est le principe de ta résolution ; tu n’as pas lieu d’en avoir avec moi.

Toujours vraie, toujours sincère, je ne cherchai point à déguiser.

— Non, très assurément, cher papa, depuis longtemps la crainte vis-à-vis de toi n’est plus entrée dans mon âme ; le sentiment seul me guide. Je conviens que Vernol a fait naître dans mon imagination une illusion, un caprice dont je ne puis me rendre compte, mais mon cœur, qui est plein de toi, n’est pas un moment indécis entre vous deux : je ne veux plus le voir.

— Non, ma chère enfant, non, j’ai désiré connaître la nature de tes sentiments pour moi, j’en suis satisfait. Vernol excite en toi des sensations que ton imagination augmente ; tu en jouiras, tu connaîtra ainsi toute ma tendresse pour toi, tu sentiras que tu ne peux cesser de m’aimer, et c’est tout ce que je désire ; va, je ne suis pas jaloux de ton cœur, dont la possession m’est si chère.

Ce trait me confondit ; une lumière vint dissiper le trouble de cette imagination fascinée, je tombai à ses genoux, toute en larmes, et mon sein palpitait ; je baisais ses mains, que j’arrosais de mes pleurs : mes sanglots me laissaient à peine la liberté de m’exprimer.

— Tendre papa, je t’aime, je t’adore, je ne chéris que toi ; mon âme, mon cœur, tout est plein de toi !

Il fut touché de ma douleur ; il me releva et me pressant à son tour, en me couvrant de baisers.

— Console-toi, trop aimable et chère enfant ; crois-tu que je ne connaisse pas la nature et ses lois invincibles. Va, je ne suis point injuste. C’est par expérience, par comparaison et par la complaisance la plus étendue de ma part, que produit seule l’affection, l’amitié la plus tendre, que je désire être aimé de toi ; il est temps que tu apprennes à juger des différences. Je t’ai promis que tu jouirais de Vernol : ferme dans mes principes, constant dans mes idées, je tiendrai ma parole ; d’ailleurs, il est aimable, bien fait, beau garçon, je lui dois cette justice, et si ce n’était pas pour lui que tu eusses senti ce désir, tu pourrais l’avoir éprouvé pour quelque autre qui vaudrait encore moins ; ainsi j’ai pris mon parti.

Depuis ce jour je me trouvais bien moins affectée pour Vernol, et si je me suis prêtée, ma chère, à tout ce que tu vas voir, ce fut par une réunion de condescendance pour ce cher papa, de curiosité et de tempérament excité, premier principe de mon désir fantastique, que je me laissai aller. Je passai la nuit entre ses bras ; le matin, au milieu des baisers que je lui donnais à mon réveil, il me dit :

— Laurette, il faut que tu voies aujourd’hui la mère de Rose ; engage-la à laisser venir sa fille passer la journée à la campagne avec toi ; en même temps préviens-la qu’elle ne soit point inquiète si elle ne revenait pas le soir, que tu pourrais, peut-être, ne la ramener que demain. Nous prétexterons que la voiture nous a manqué, et tu la garderas ici jusqu’à demain. Quand tu seras avec elle en liberté, tu pourras juger de sa façon de penser et de tout ce qu’elle sait ; elle paraît avoir de la confiance et de l’amitié pour toi ; aussitôt que tu sauras à quoi t’en tenir, tu m’en instruiras…

Je crus de ce moment qu’il avait formé des desseins sur elle ; il ne m’en fallut pas davantage pour m’empresser, sans autre réflexion, à entrer dans ses idées et à me prêter à tout ce qu’il aurait projeté. Je soupçonnais déjà Rose aussi savante que je l’étais, ou à peu près. Tout fut conduit comme il l’avait arrangé. Elle vint ; la porte fut close à tout le monde ; nous passâmes la journée seuls dans toutes les folies que nous pûmes imaginer. Je lui faisais cent agaceries ; elle me les rendait avec usure. Je découvrais sa gorge, je faisais baiser ses tétons à mon père ; ses fesses, sa motte, son con essuyèrent mes lutineries ; je la tenais entre mes bras pour qu’il lui en fit autant ; elle riait, folâtrait et, quoique à chaque espièglerie nouvelle elle fit des demi-façons, elle se prêtait à tout ; aussi son teint était-il très animé et ses yeux étincelants. Le souper vint, où je ne la ménageai pas ; je lui versais à plein verre ; je soufflais le feu qui la brûlait déjà. Levés de table, nous recommençâmes nos folies, elle ne fit plus aucune résistance ; je la renversai le visage sur le canapé ; je troussai ses jupes, et son cul découvert nous présenta une perspective que mon papa, par un dernier coup de pinceau, aurait rendue parfaite ; il m’aidait à me venger de toutes les lutineries qu’à son tour elle m’avait fait éprouver. Je voulus juger de l’effet que produisaient ces jeux sur elle ; je la trouvai toute mouillée, et je conjecturai qu’elle avait eu bien du plaisir pendant ce folâtre badinage.

Nous passâmes, enfin Rose et moi, dans ma chambre, et nous nous préparâmes à nous mettre au lit. Dès qu’elle me vit en chemise, elle me l’arracha ; je lui rendis le change, et je mis la sienne à bas ; elle m’entraîna dans le lit ; elle me baisait, elle prenait mes tétons, ma motte ; je mis aussitôt le doigt où je voyais bien qu’elle le désirait ; je ne me trompais pas : elle écarta les cuisses et se prêta à mes mouvements. Je voulus en savoir davantage ; je glissai mon doigt dans son con, et la facilité avec laquelle il entra me donna des lumières sur l’usage qu’elle en avait fait.

Je désirais apprendre d’elle par quelle aventure elle avait perdu son pucelage. Je me préparais à la questionner, lorsque mon père entra dans ma chambre et vint nous embrasser avant de se coucher. D’un seul coup, Rose rejeta la couverture ; il ne s’attendait pas à nous voir totalement nues et nos mains placées au centre de la volupté. Elle passa le bras autour de son cou, l’attira et lui fit baiser mes tétons ; je ne fus pas en reste ; je lui fis prendre et baiser les siens ; je promenai sa main sur tout son corps, et je l’arrêtai sur sa motte. Il s’animait, mais il nous quitta brusquement, en nous souhaitant beaucoup de plaisir.

Déjà la pendule marquait dix heures, lorsque le lendemain il rentra dans ma chambre ; il nous éveilla par ses caresses et ses baisers réitérés, en nous demandant si nous avions passé une nuit agréable.

— Nous avons veillé, cher papa, longtemps après que tu nous as quittées ; tu as bien vu dans quelle humeur nous étions.

Rose, que nos jeux avaient apaisée et le sommeil rafraîchie, rougit et mit aussitôt sa main sur ma bouche ; je la détournai.

— Non, Rose, non, tu ne me retiendras jamais de raconter à mon papa tout ce que nous avons fait et tout ce que tu m’as dit ; je ne lui cache rien, ma confiance est entière pour lui, et la tienne ne doit pas être moindre.

Alors, passant ses bras et ses jambes autour de moi, elle me laissa continuer.

— Quand tu nous eus abandonnées, Rose, déjà vivement émue, vint baiser ma bouche, sucer mon sein ; elle m’attira sur elle, nous entrelaçâmes nos cuisses ; nos cons se frottaient ; mes tétons étaient appuyés sur les siens, mon ventre sur son ventre ; elle me demanda ma langue, et d’une main caressant mes fesses, de l’autre elle chatouillait mon clitoris, et m’invitait par le jeu de son doigt à l’imiter ; je mis le mien où elle l’attendait avec impatience, et bientôt nous ressentîmes les délices de ces amusements, mais elle ne voulut pas que mon doigt la quittât sans les avoir goûtées quatre fois avec des transports incroyables.

Dans le temps même que je rendais compte de nos ébats, Rose, réchauffée par ce tableau, avait remis sa main entre mes cuisses et répétait ce que je racontais. Je conçus aussitôt ce qu’elle désirait ; nous étions restées nues ; je la découvris à mon tour, je pris la main de mon papa, qui s’empara de tout ce qu’elle avait ; il n’avait sur lui que sa robe, qui s’était entr’ouverte par ses mouvements ; je m’aperçus, par une avance distincte et par le pavillon que faisait sa chemise, de l’effet que ces caresses produisaient sur lui ; je le fis remarquer à Rose, et je lui dis de lui ôter cette robe et de le faire mettre près de nous. Elle se leva sans balancer, se jeta à son cou, le dépouilla dans l’instant, et l’enveloppant de ses bras, elle l’attira dans le lit. Rose, retombée sur le dos, écartait ses cuisses ; j’élevai une de ses jambes sur lui, et il passa l’autre entre les siennes ; par cette attitude, son vit se trouvait naturellement vis-à-vis de son con ; elle courut au-devant du charme qui l’entraînait, et par un coup de cul elle hâta l’entrée du temple au dieu qu’elle adorait.

Je la branlais, elle précipitait la marche par les mouvements qu’elle y ajoutait ; et ses transports emportés, dont elle seule me donnait le modèle, nous firent connaître le plaisir excessif qu’elle ressentait. Mon père qui éprouvait avec quelle âpreté elle suçait son vit, n’y tenait plus ; il se hâta de se retirer, et j’achevai de faire avec ma main couler la libation qu’il craignait de verser dans le con de Rose, qui, pendant le temps qu’il y fut, éprouva cinq fois, de son aveu, les délices de la décharge. Son ventre fut inondé de foutre qu’il répandit sur elle et qu’il lança jusque sur ses tétons. Tandis que je rendais ces divers services, elle s’était emparée de mon con, elle le chatouillait ; ce petit jeu, joint à l’émotion que me causait le plaisir que je leur faisais me mettait dans une agitation violente. À mon tour, je désirais d’apaiser le feu qui me dévorait ; elle s’en aperçut, et passant sur ma gauche, elle prit la main de mon papa, dont elle introduisit un des doigts qu’il agitait, et par un jeu pareil à celui que j’avais employé pour elle, Rose acheva de me faire partager les doux plaisirs que nous lui avions procurés, et dont elle ressentait encore les effets pendant le service qu’elle me rendait.

Quand nous fûmes revenus dans un état plus tranquille :

— Écoute, cher papa, tu es peut-être étonné de l’habileté de Rose ; je n’en étais pas moins surprise ; je l’ai engagée à m’apprendre d’où venaient ces connaissances ; je vais répéter tout son récit ; mais non, c’est de sa bouche que tu dois l’entendre, et je désire qu’elle s’y prête ; ce que tu viens de faire avec elle la met à même de ne te rien cacher et de te confier tout ce qu’elle m’a dit.

Les baisers, les caresses furent employés pour l’y déterminer : elle se rendit aisément.

— Eh bien ! j’y consens, et puisque j’en ai fait part à Laurette, je ne risque plus rien ; les plaisirs dont nous venons de jouir ensemble me donnent lieu d’être persuadée que vous le sauriez d’elle ; ma confiance s’établit sur celle que vous me montrez, et se rapporte à mes désirs ; il vaut donc mieux que je vous le répète moi-même.