Attinger Frères (p. 9-12).

II

Danger mortel couru par la France, par l’Europe.

Une paix prolongée eût permis aux Allemands du Deutschland et de l’Autriche, aidés des Magyars, leurs orgueilleux complices, de préparer dans l’ombre le coup de foudre d’une guerre infernalement machinée, contre les nations libres.

Ainsi l’araignée tisse sa toile, dévore et n’est jamais rassasiée.

Si la paix avait duré par malheur quarante à cinquante ans de plus, nous aurions été poursuivis tout à coup, comme à l’hallali, par une immense armée, double de celle de 1914, par quinze à vingt millions d’hommes, car ils augmentent fort, bien que leur natalité décroisse notablement. Et nous ne nous accroissons guère assassinés que nous sommes par la stérilité volontaire.

Puis, et surtout, Anglais, Belges, Français, Russes, Serbes, et les Hollandais, les Scandinaves, les Suisses, les Italiens, les Roumains, tous les neutres d’aujourd’hui, dont c’est une honte qu’ils soient restés neutres quand des fleuves de notre sang coulaient pour eux aussi bien que pour nous, tous nous nous serions vus tout à coup ligotés dans la camisole de force, la poire d’angoisse au gosier. On connaît aujourd’hui toutes les traîtrises de l’avant-guerre et toutes les gentillesses de la préparation des Allemands pour la « défense de leurs droits méconnus ».

On sait trop comment ce troupeau d’esclaves a été façonné par ses maîtres à la pratique de l’espionnage transcendental ; comment ils ont emprisonné la France, la Belgique, la Hollande, l’Italie, on peut dire la terre entière, dans des filets à mailles serrées. Partout des amis souriants avec les voisins de la ville, du bourg, du village, du hameau, dont ils livreront un jour tous les secrets à l’envahisseur : otages précieux, maisons riches, beaux chevaux, beau bétail, fourrage, sentiers, raccourcis ; partout des fermiers espions dans des fermes de situation choisie, près d’un pont, d’une bouche de tunnel, sur un lieu culminant ; partout des usines où l’on cache des plateformes de béton pour obusiers monstres, des maisons de commerce et des banques pseudo-françaises qui sont teutonnes, des mines de fer également teutonnes sous un masque national ; bref, la fausse paix avant la guerre sans merci.

Ainsi germait la victoire des Barbares dans les pays confiants, débonnaires, qu’ils voulaient conquérir sur des races supposées abâtardies. Et précisément la moindre d’entre elles leur est supérieure en vertus, en ressort vital, en honneur, en indépendance d’esprit.