Le Rêve (Félix Milliet)

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Le Rêve
M. Giard & E. Brière (p. 34).

LE RÊVE

Mon bien-aimé, j'ai fait un rêve
Que je veux te conter tout bas ;
Viens sur le sable de la grève,
L'écho ne nous entendra pas.

Tu partais pour un long voyage ;
Moi, sous la forme d'un nuage.
Je nageais dans l'éther serein
À mes flancs portant ta pensée.
Je suivais ta marche pressée,
Et donnais l'ombre à ton chemin.

Suspendant ta course lointaine.
Tu t'arrêtais à la fontaine
Aux bords verdoyants et fleuris ;
Et moi, soudain, trois fois heureuse,
Je devenais l'onde amoureuse,
Baignant tes pieds endoloris.

Puis, le ciel s'étant voilé d'ombre.
Tu rencontrais, près du bois sombre,
Un ennemi provocateur ;
J'étais alors ta bonne épée,
Prompte, fidèle et bien trempée,
Ma pointe allait le mordre au cœur.

Mon bien-aimé, voilà mon rêve,
Ma bouche te l'a dit tout bas,
Viens en mes bras pour qu'il s'achève,
L'écho ne nous entendra pas.