À la mère de mon enfant

À la mère de mon enfant
M. Giard & E. Brière (p. 35).

A LA MÈRE DE MON ENFANT

Mère, petite mère!... oh, comme à ton oreille
Ce mot harmonieux paraîtra bien plus doux.
Lorsqu'il s'échaipera de la bouche vermeille
De ton petit Fernand, assis sur tes genoux.

[...]
Mais dans ce livre blanc toi seule encor sais lire ;
Tu lis dans son regard, tu lis dans son sourire,
O mère, ainsi que Dieu lit dans le fond du cœur.

Oh, quelle poésie et pure et sans mélange
Doit rayonner pour toi sur ce visage d'ange
Qui pour les autres yeux n'exprime rien encor !
Et dans les sons confus de sa voix enfantine.
Langage bégayé que toi seule devines.
Quelle douce harmonie et quel céleste accord !

Dis-moi ce que tout bas son haleine murmure,
Lorsque sur tes genoux tu berces son sommeil ;
Sans doute, quand vers lui tu penches ta figure,
Ton oreille recueille un son qui vient du ciel.

Dis-moi ce que son œil, miroir de sa jeune àme,
Reflète de divin, de pur et d'enivrant ;
Dis-moi ce qu'en ton cœur et de mère et de femme
Verse de volupté ce sourire d'enfant.

Oh, dis-moi tout cela, je saurai te comprendre,
Dis-moi tout ton bonheur, je t'en prie à genoux,
Car je te porte envie et, si j'étais moins tendre,
Et si je t'aimais moins, j'en deviendrais jaloux.

Pontivy, octobre 1840.