Le Parti socialiste/Livre II/Chapitre 1

A. Panis (p. 93-95).

d’un pouvoir judiciaire indépendant, véritable magistrature populaire, qui soit chargé de protéger les citoyens contre tout attentat de quelque part qu’il vienne, et qui soit chargé en même temps de leur garantir les droits inviolables et imprescriptibles conquis par la Révolution et consacrés dans le préambule de toutes nos constitutions.

Mais il existe dans notre organisation politique certaines institutions qui sont un obstacle à peu près absolu à l’établissement et au développement de la liberté : il faut donc avant tout et sans relâche poursuivre la suppression ou la transformation de ces institutions, d’autant plus qu’elles sont indépendantes des diverses formes de gouvernement, et se sont toujours maintenues sous tous les divers régimes qui se sont succédé en France depuis soixante ans.

La magistrature, le clergé et l’armée qui enveloppent et dominent par leur triple action et leur triple influence toute la société et le gouvernement lui-même sont les trois assises du despotisme moderne, et vainement donnerait-on au gouvernement l’organisation la plus libérale, tant que subsisteront telles quelles ces trois institutions, il n’y aura pour la liberté ni garanties ni sécurité.

Nous venons de montrer quelle transformation radicale et complète il fallait faire subir à la magistrature, et comment d’une institution despotique on pouvait faire une institution essentiellement libérale.

Nous allons dire comment il faut procéder à l’égard du clergé et de l’armée.

Il nous restera ensuite à envisager la quatrième plaie de notre société française, la centralisation et le fonctionnarisme qui paralysent toute initiative individuelle et qui étendent sur tout le pays les mailles serrées du despotisme administratif.

Enfin, réservant la question de la transformation définitive du gouvernement pour pouvoir la traiter d’une façon plus complète, quand nous aurons indiqué quelles sont les réformes sociales essentielles qui doivent être le corollaire des réformes politiques, nous examinerons la question de l’impôt, qui est la clef des rapports de l’individu et de l’État, puisque l’État ne subsiste que du produit des impôts. C’est par l’impôt que l’individu tient l’État sous sa dépendance et qu’il peut arriver par une voie énergique mais légale et pacifique à lui imposer, quand elles seront arrivées à maturité dans l’opinion publique, les réformes et les transformations qu’il se refuserait à consentir volontairement.