Chez l’auteur & Ledoyen & Mansart (p. 11-13).

CHAPITRE III.


Description du cimetière du Père-Lachaise. — Distribution. — Cimetière des Israélites. — Prise de terrains. — Mahometisme.


Le cimetière de l’Est, que désormais nous appellerons le Père-Lachaise, se trouve, selon l’indication officielle, à l’est de Paris. De nombreux terrains ont été, à différentes époques, ajoutés à l’acquisition primitive.

Le Père-Lachaise, dans sa partie sud-ouest, est longé par le boulevard d’Aulnay, boulevard extérieur ; sa porte principale se trouve en face de la barrière de la Roquette ; elle est pratiquée dans un arc de cercle dont la sous-tendante est de trente mètres. Sur l’un des pilastres se trouve gravée cette maxime évangélique : Qui credit in me, etiam si mortuus fuerit, vivet (Joan., XI[1]).

Sur l’autre pilastre on lit ces paroles du livre de la Sapience : Spes illorum immortalitate plena est (Sap., III, V[2]).

Sur les vantaux de la porte, pendant qu’elle est fermée, on remarque cette antique et sublime profession de foi de Job : Scio quod Redemptor meus vivit, et in novissimo die de terra surrecturus sum (Job, XIV[3]) ; mais lorsque cette porte est ouverte, il est presque impossible de lire cette inscription, parce qu’elle se trouve divisée en deux parties, et qu’ainsi disjointe, elle n’a plus de sens.

Au delà de cette porte, le Père-Lachaise longe le boulevard de Fontarabie jusqu’à la rue Saint-André, qui en fixe la limite dans cette partie. Une petite porte particulière a été pratiquée à côté de la porte principale.

La maison du conservateur a une entrée particulière sur la rue Saint-André ; plus loin, dans l’enhachement que forme cette rue, existe l’ancienne porte principale, qui sert actuellement au passage des matériaux et d’issue au cimetière des israélites.

Ce dernier cimetière, divisé du cimetière principal par des murs, est longé jusqu’à son extrémité par la rue Saint-André.

Des propriétés particulières avoisinent le Père-Lachaise dans toutes ses autres parties.

En conformité de l’article 3 du décret de 1804, des murs entourent le cimetière dans sa presque totalité ; les parties qui ne sont pas ainsi closes le sont au moyen de planches fixées avec de forts pieux ; ces clôtures provisoires disparaîtront aussitôt que l’agrandissement projeté sera effectué. Nous reviendrons sur cet agrandissement, après la description intérieure actuelle.

La distribution primitive du Père-Lachaise fut faite avec art. Cette ville des morts a, pour ainsi dire, reçu la vie du crayon du savant artiste qui en traça le dessin[4]. Toutes les allées sont sinueuses, à l’exception de celle qui se trouve en face de la grande porte, et de deux autres à côté de celle-ci, qui vont du bas du cimetière à celle qui se trouve au haut du plateau, près le mur actuel d’enceinte.

Les diverses allées du Père-Lachaise ne portent point de nom officiel ; mais, d’après leur distribution, elles renferment une portion quelconque de terrain complètement isolée du reste du cimetière ; l’administration a donné à ces portions le nom de divisions, qu’elle indique par des numéros.

L’ordre des numéros est placé de telle façon que l’application n’en est pas facile pour tout le monde. Nous avons, sur le plan général, indiqué ces portions par sections et par des lettres de l’alphabet placées en tête de chacune.

Dans la section F se trouve la chapelle, divisée de sa cour par l’allée conduisant au monument élevé à la mémoire de Casimir Périer.

Cette chapelle occupe exactement l’emplacement où se trouvait la maison du père Lachaise ; elle est d’ordre dorique et a été construite sur les dessins de M. Godde. Elle sert au service des exhumations.

Une somme considérable a été léguée pour l’érection de cette chapelle par la veuve du docteur Bosquillon ; c’est ce que nous apprend l’épitaphe mise sur son monument, section X, no  157 :

« Marie Naudin, veuve de E.-F.-M. Bosquillon, repose aussi dans ce tombeau. Elle était douée des vertus les plus estimables. Sa piété, surtout, était exemplaire. La première, elle légua une somme considérable pour contribuer à la construction de la chapelle dans ce cimetière.

Elle est morte le 25 avril 1817, âgée de soixante-un ans. »

Cette inscription est surmontée d’une autre, en langue latine, qui fait l’éloge de M. Bosquillon, comme médecin et comme profond helléniste.

Un cimetière spécial est consacré à la sépulture des israélites ; il forme sur le plan une figure distincte et séparée de celui des chrétiens ; sa porte d’entrée donne sur la cour du concierge attaché à l’ancienne porte ; son mur de clôture, au nord, est près du tombeau d’Héloïse et Abailard, et, comme on l’a déjà dit, le mur du sud est longé par la rue Saint-André.

Au Père-Lachaise, il n’y a pas d’appartement avec piscine pour, selon le rit israélite, rendre les derniers soins aux corps des morts, cette cérémonie s’accomplit avant le départ du domicile[5].

Un agrandissement d’environ trente hectares est en cours d’exécution ; une ligne bistrée figure cette nouvelle partie sur le plan général.

Dans la partie de ce terrain qui se trouve près la colonne Beaujour, existera un cimetière particulier pour la sépulture des mahométans.

  1. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort.
  2. Leur espérance est pleine d’immortalité.
  3. Je sais que mon Rédempteur est vivant et que je ressusciterai de la terre au dernier jour.
  4. Ce dessin est de M. Brongniart, architecte de la Bourse de Paris, qui repose maintenant dans le Père-Lachaise, section J, no  115 ; une figure en relief de la Bourse existe sur son monument.
  5. Les juifs, avant de déposer les corps en terre, ont l’habitude de les laver avec de l’eau tiède, de leur raser les cheveux et la barbe, et de les revêtir de la chemise des expiations.