Le Mespris de la vie et consolation contre la mort/« Celuy quiconqu’a beu à tasse regorgeante »

Le Mespris de la vie et consolation contre la mort
Le Mespris de la vie et consolation contre la mortNicolas de Moinge (p. 57).
LXVI.


Celuy quiconqu’a beu à tasse regorgeante
Les faus plaisirs du monde, au lever du festin
El est comme un yvrogne estourdi le matin,
Ou bien si degousté que le goust le tourmente,

Ou tellement matté que sa bouche puante
N'y veut plus retourner ; s'il resiste, mutin
A l'instinct de la chair, il se donne au butin
D'un duel hasardeus, qui jour & nuit le tente :

En fin il est si las de ce choc assidu
Qu'ou bien il est tout prest d'estre bien tost rendu
Ou contraint de mourir s'abandonnant soy-mesme :

Voila quel est l'estat de l'homme mal-accort
Entre ces deux chemins, qui plus prise & mieus aime
Les dangers de la mer, que la seurté du port.