Le Magasin d’antiquités/Tome 2/40

Traduction par Alfred Des Essarts.
Hachette (2p. 17-25).



CHAPITRE III.


Plein de cette espèce d’ennui vague qui s’éveille d’ordinaire le lendemain des jours de fête, Kit se leva dès l’aurore et, un peu dégrisé des plaisirs de la soirée précédente par l’importune fraîcheur de la matinée et la nécessité de reprendre son service et ses travaux journaliers, il songea à aller chercher au rendez-vous convenu avec Barbe et sa mère. Mais il eut soin de ne point éveiller sa petite famille qui dormait encore, se reposant de ses fatigues inaccoutumées : aussi posa-t-il son argent sur la cheminée en traçant à la craie un avis pour appeler sur ce sujet l’attention de mistress Nubbles et lui apprendre que cet argent provenait de son fils dévoué ; puis il sortit, le cœur un peu plus lourd que les poches, mais malgré cela sans trop d’accablement.

Oh ! les jours de fête ! pourquoi nous laissent-ils un regret ? Pourquoi ne nous est-il pas permis de les refouler dans notre mémoire, ne fût-ce qu’une semaine ou deux, pour pouvoir en quelque sorte les mettre à la distance convenable où nous ne les verrions plus qu’avec une indifférence calme ou bien avec un doux souvenir ? Pourquoi nous laissent-ils un arrière-goût, comme le vin de la veille nous laisse le mal de tête et la fatigue, avec une foule de bonnes résolutions pour l’avenir qui devraient être éternelles, mais qui ne durent guère que jusqu’au lendemain exclusivement.

Nul n’aura lieu de s’étonner si nous disons que Barbe avait mal à la tête, ou que la mère de Barbe ressentit de la lassitude ; qu’elle n’était plus tout à fait aussi enthousiaste du théâtre d’Astley et trouvait que le clown devait être décidément plus vieux qu’il ne leur avait paru la veille. Kit ne fut pas du tout surpris de ces critiques ; lui-même, il se disait tout bas que les acteurs de ce spectacle éblouissant n’étaient que des baladins qui avaient déjà rempli le même rôle l’avant-veille, et qu’ils le rempliraient encore ce soir et demain, et bien des semaines et des mois devant d’autres spectateurs. Voilà la différence du jour au lendemain. Nous allons tous à la comédie ou nous en revenons.

Cependant on sait que le soleil n’a que de faibles rayons lorsqu’il se lève et qu’il acquiert de la force et de l’énergie à mesure que le jour se développe. Ainsi par degrés les trois compagnons de route commencèrent à se rappeler diverses circonstances des plus agréables jusqu’à ce que, moitié causant, moitié marchant et riant, ils arrivèrent à Finchley en si bonnes dispositions que la mère de Barbe déclara ne s’être jamais trouvée moins fatiguée ni en meilleur état d’esprit, et que Kit en fit autant. Barbe, qui s’était tue durant toute la route, fit la même déclaration. Pauvre petite Barbe ! Elle était si douce et si gentille !

Il était de si bonne heure quand ils rentrèrent à la maison, que Kit avait étrillé le poney et l’avait rendu aussi brillant qu’un cheval de course avant que M. Garland fût descendu pour déjeuner. La vieille dame, le vieux monsieur et M. Abel lui firent hautement compliment de son exactitude et de son activité. À son heure accoutumée, ou plutôt à la minute, à la seconde, car il était la ponctualité en personne, M. Abel partit pour prendre la diligence de Londres, et Kit et le vieux gentleman allèrent travailler au jardin.

Ce n’était pas la moins agréable des fonctions de Kit ; car lorsqu’il faisait beau, ils étaient absolument en famille : la vieille dame s’installait auprès d’eux avec son panier à travail posé sur une petite table ; le vieux gentleman bêchait, émondait, taillait avec une grande paire de ciseaux, ou aidait Kit avec beaucoup d’activité à diverses besognes ; et Whisker, du fond du parc où il paissait, les regardait tous paisiblement. Ce jour-là, ils avaient à tailler la vigne en cordons : Kit monta jusqu’à la moitié d’une échelle courte et se mit à couper les bourgeons et à attacher les branches, à coups de marteau, tandis que le vieux gentleman, suivant avec attention tous ses mouvements, lui tendait les clous et les chiffons au fur et à mesure qu’il en avait besoin. La vieille dame et Whisker les regardaient comme à l’ordinaire.

« Eh bien, Christophe, dit M. Garland, vous avez donc acquis un nouvel ami ?

— Pardon, monsieur, je n’ai pas entendu, répondit Kit en abaissant les yeux vers le pied de l’échelle.

— Vous avez acquis un nouvel ami dans l’étude, à ce que m’a appris M. Abel.

— Oh ! oui, monsieur, oui. Il a agi très-généreusement avec moi, monsieur.

— J’en suis ravi, répliqua le vieux gentleman avec un sourire. Il est disposé à agir encore bien plus généreusement, Christophe.

— Vraiment, monsieur ! C’est trop de bonté de sa part, mais je n’en ai pas besoin, pour sûr, dit Kit frappant fortement un clou rebelle.

— Il désire beaucoup vous avoir à son service… Prenez donc garde à ce que vous faites ; sinon, vous allez tomber et vous blesser.

— M’avoir à son service, monsieur ! s’écria Kit qui s’était arrêté tout court dans sa besogne pour se retourner sur l’échelle avec l’agilité d’un faiseur de tours. Mais, monsieur, je pense bien qu’il n’a pas dit cela sérieusement.

— Au contraire, il l’a dit très-sérieusement, d’après sa conversation avec M. Abel.

— On n’a jamais vu ça, murmura Kit, regardant tristement son maître et sa maîtresse. Cela m’étonne bien de la part de ce monsieur ; je ne le comprends pas.

— Vous voyez, Christophe, dit M. Garland, c’est une affaire d’importance pour vous, et vous ferez bien d’y réfléchir. Ce gentleman peut vous donner de meilleurs gages que moi ; je ne dis pas vous traiter avec plus de douceur et de confiance : j’espère que vous n’avez pas à vous plaindre de vos maîtres : mais certainement il peut vous faire gagner plus d’argent.

— Après, monsieur ? … dit Kit.

— Attendez un moment, interrompit M. Garland ; ce n’est pas tout. Vous avez été un fidèle serviteur pour vos anciens maîtres, je le sais, et si le gentleman les retrouvait, comme il s’est proposé de le faire par tous les moyens possibles, je ne doute pas qu’étant à son service vous n’en fussiez bien récompensé. En outre, ajouta M. Garland avec plus de force, vous aurez le plaisir de vous trouver de nouveau en rapport avec des personnes auxquelles vous semblez porter un attachement si grand et si désintéressé. Songez à tout cela, Christophe, et ne vous pressez pas trop inconsidérément dans votre choix. »

Kit ressentit un coup violent à l’intérieur, au moment où ce dernier argument caressait doucement sa pensée et semblait réaliser toutes ses espérances, tous ses rêves d’autrefois. Mais cela ne dura qu’une minute, et son parti fut bien pris. Il répondit d’un ton ferme que le gentleman ferait bien de chercher ailleurs, et qu’il aurait aussi bien fait de commencer par là.

« Comment a-t-il pu s’imaginer, monsieur, que j’irais vous quitter pour m’en aller avec lui, dit Kit se retournant après avoir donné quelques coups de marteau. Il me prend donc pour un imbécile ?

— C’est ce qui pourra bien arriver, Christophe, si vous repoussez son offre, dit gravement M. Garland.

— Eh bien ! comme il voudra, monsieur. Que m’importe ce qu’il pensera ? Pourquoi m’en embarasserais-je, monsieur, quand je sais que je serais un imbécile, et bien pis encore que ça, si je laissais là le meilleur maître, la meilleure maîtresse qu’il y ait jamais eu, qu’il puisse jamais y avoir ; qui m’ont recueilli dans la rue quand j’étais pauvre, quand j’avais faim, quand peut-être j’étais plus pauvre et plus dénué que vous ne le croyez vous-même, monsieur. Et pourquoi ? pour m’en aller avec ce gentleman ou tout autre ? Si jamais miss Nell revenait, madame, ajouta Kit en se tournant tout à coup vers sa maîtresse, ah ! ce serait autre chose. Et si par hasard elle avait besoin de moi, je vous prierais de temps en temps de me laisser travailler pour elle quand toute ma besogne serait finie à la maison. Mais si elle revient, je sais bien qu’elle sera riche, comme le répétait toujours mon vieux maître ; et, une fois riche, elle n’aurait pas besoin de moi ! Non, non, dit encore Kit secouant la tête d’un air chagrin, j’espère qu’elle n’aura jamais besoin de moi… et cependant je serais bien heureux de la revoir ! »

Ici Kit enfonça un clou dans la muraille ; il l’enfonça très-fort, et même beaucoup plus avant qu’il n’était nécessaire : cela fait, il se retourna de nouveau.

« Et le poney, donc ! et Whisker, madame, qui me reconnaît si bien quand je lui parle, qu’il commence à hennir dès qu’il m’entend ; laisserait-il personne l’approcher comme je l’approche ? Et le jardin, donc, monsieur ; et M. Abel, madame. Est-ce que M. Abel consentirait à se séparer de moi, monsieur ? Trouveriez-vous quelqu’un qui fût plus curieux du jardin que moi, madame ? Cela briserait le cœur de ma mère, monsieur ; et jusqu’au petit Jacob, qui comprendrait assez la chose pour pleurer toutes les larmes de ses yeux, madame, s’il pensait que M. Abel voulût sitôt se séparer de moi, quand il me disait encore l’autre jour qu’il espérait que nous resterions bien des années ensemble ! … »

Nous n’essayerons pas de dire combien de temps Kit fût demeuré sur l’échelle, s’adressant tour à tour à son maître et à sa maîtresse, et généralement se tournant vers celui des deux auquel il ne parlait pas, si en ce moment Barbe n’était accourue annoncer qu’on était venu de l’étude apporter une lettre qu’elle remit entre les mains de son maître, tout en laissant paraître quelque étonnement à la vue de la pose d’orateur que Kit avait prise.

« Oh ! dit le vieux gentleman après avoir lu la lettre ; faites entrer le messager. »

Tandis que Barbe s’empressait d’exécuter cet ordre, M. Garland se tourna vers Kit pour lui dire que l’entretien en resterait là ; et que si Kit éprouvait de la répugnance à se séparer d’eux, ils n’en éprouvaient pas moins à se séparer de lui. La vieille dame s’associa chaudement à ces paroles de son mari.

« Si pour le moment, Christophe, ajouta M. Garland en jetant un regard sur la lettre qu’il avait à la main, le gentleman désirait vous emprunter pour une heure ou deux, ou même pour un ou plusieurs jours, quelque temps enfin, nous devrions consentir, nous à vous prêter, vous à ce qu’on vous prêtât. Ah ! ah ! voici le jeune gentleman. Comment vous portez-vous, monsieur ? »

Ce salut s’adressait à M. Chukster, qui, avec son chapeau tout à fait penché sur le côté et ses longs cheveux qui en débordaient, s’avançait d’un air fanfaron.

« J’espère que votre santé est bonne, monsieur, répondit celui-ci. J’espère que la vôtre est également bonne, madame. Une charmante petite bonbonnière, monsieur. Un délicieux pays, en vérité !

— Vous venez sans doute prendre Kit ? demanda M. Garland.

— J’ai pour cela un cabriolet qui m’attend à votre porte, répondit le maître clerc. Il est attelé d’un vigoureux gris-pommelé ; vous n’avez qu’à voir, si vous êtes connaisseur en chevaux, monsieur… »

Tout en s’excusant d’aller examiner le vigoureux gris-pommelé et fondant son refus sur son peu de connaissances en semblable matière, M. Garland invita M. Chukster à prendre un morceau en manière de collation. Le gentleman y consentit très-volontiers ; et quelques viandes froides, flanquées d’ale et de vin, furent bientôt disposées à son intention.

Pendant ce repas, M. Chukster déploya toutes ses ressources d’esprit pour charmer ses hôtes et les convaincre de la supériorité intellectuelle des citadins comme lui. En conséquence, il plaça la conversation sur le terrain des petits scandales du jour, matière dans laquelle ses amis lui reconnaissaient un merveilleux talent. Il était, par exemple, en position de fournir les détails exacts de la querelle qui avait éclaté entre le marquis de Mizzler et lord Bobby à propos d’une bouteille de vin de Champagne, et non d’un pâté aux pigeons, comme les journaux l’avaient rapporté par erreur. Lord Bobby n’avait nullement dit au marquis de Mizzler : « Mizzler, un de nous deux a menti, et ce n’est pas moi, » comme les mêmes journaux l’avaient prétendu à tort ; mais bien : « Mizzler, vous savez où l’on peut me trouver, et, Dieu me damne ! monsieur, vous me trouverez si vous avez à me parler ; » ce qui naturellement changeait entièrement l’aspect de cette intéressante question et la plaçait sous un jour tout différent. M. Chukster fit connaître aussi à M. et mistress Garland le chiffre exact de la rente assurée par le duc de Thigsberry à Violetta Stetta, de l’Opéra italien, rente payable par quartier, et non par semestre, comme on l’avait donné à entendre au public, non compris, ainsi qu’on avait eu l’impudence monstrueuse de le dire, des bijoux, des parfums, de la poudre à perruque pour cinq valets de pied, et deux paires de gants de chevreau par jour pour un page. Après avoir engagé ses auditeurs à être parfaitement convaincus de l’exactitude de ses assertions sur ces points importants, qu’il possédait à merveille, M. Chukster les entretint des bruits de coulisses et des nouvelles de la cour. Ce fut ainsi qu’il termina cette brillante et délicieuse conversation qu’il avait soutenue à lui seul, sans la moindre assistance, durant plus de trois quarts d’heure.

« Et maintenant que le cheval a repris haleine, dit M. Chukster se levant avec grâce, j’ai peur d’être forcé de filer. »

Ni M. Garland ni sa femme ne s’opposèrent le moins du monde à ce qu’il se retirât, jugeant sans doute qu’il serait fâcheux qu’un homme si bien informé fût arraché longtemps à sa sphère d’activité. En conséquence, au bout de quelques instants M. Chukster et Kit roulaient sur le chemin de Londres, Kit perché sur le siège, à côté du cocher, et M. Chukster assis dans un coin à l’intérieur de la voiture, les deux pieds perchés à chacune des portières.

En arrivant à la maison du notaire, Kit se rendit dans l’étude, où M. Abel l’invita à s’asseoir et à attendre, car le gentleman qui l’avait fait demander était sorti et ne rentrerait peut-être pas de sitôt. Ce n’était que trop vrai. Kit, en effet, avait eu le temps de dîner, de prendre son thé et de lire les plus brillantes pages de l’almanach des vingt-cinq mille adresses ; plus d’une fois même il avait failli s’endormir avant que le gentleman fût de retour. Enfin ce dernier arriva en toute hâte.

Il commença par s’enfermer avec M. Witherden, et M. Abel fut invité à assister à la conférence, en attendant que Kit, fort en peine de savoir ce qu’on voulait de lui, fût appelé à son tour dans le cabinet du notaire.

« Christophe, dit le gentleman s’adressant à lui au moment où il entrait, j’ai retrouvé votre vieux maître et votre jeune maîtresse.

— Impossible, monsieur !… Comment ! vous les auriez retrouvés ?… répondit Kit dont les yeux s’allumèrent de joie. Où sont-ils, monsieur ? Dans quel état sont-ils, monsieur ? Sont-ils… sont-ils près d’ici ?

— Loin d’ici, répliqua le gentleman secouant la tête. Mais je dois partir cette nuit pour les ramener, et j’ai besoin que vous m’accompagniez.

— Moi, monsieur ? » s’écria Kit plein de satisfaction et de surprise.

Le gentleman dit en se tournant vers le notaire d’un air pénétré :

« Le lieu indiqué par l’homme aux chiens est… à combien d’ici ? vingt lieues, je crois ?

— De vingt à vingt-trois lieues.

— Hum ! si nous allons un bon train de poste toute la nuit, nous pourrons y arriver dès demain matin. Maintenant, voici la question : comme ils ne me connaissent pas, et comme l’enfant, que Dieu la bénisse ! pourrait penser qu’un étranger qui court à sa recherche a des projets contre la liberté de son grand-père, puis-je faire rien de mieux que d’emmener ce garçon qu’ils connaissent assez bien tous deux pour le reconnaître tout de suite, afin de leur donner par là l’assurance de mes intentions amicales ?

— Vous ne pouvez rien faire de mieux, répondit le notaire. Il faut absolument que vous preniez Christophe avec vous.

— Je vous demande pardon, dit Kit, qui avait prêté attentivement l’oreille à ces paroles ; mais si c’est là votre raison, j’ai peur de vous être plus nuisible qu’utile. Pour miss Nelly, monsieur, elle me connaît bien, elle, et elle aurait confiance en moi, bien certainement ; mais le vieux maître, je ne sais pourquoi, messieurs, ni moi ni personne, n’a plus voulu me voir depuis qu’il a été malade, et miss Nelly elle-même m’a dit que je ne devais plus approcher son grand-père, ni me montrer à lui désormais. Je craindrais donc de gâter tout ce que vous feriez. Je donnerais tout au monde pour vous suivre, mais vous ferez mieux de ne point me prendre avec vous, monsieur.

— Là ! encore une difficulté ! s’écria l’impétueux gentleman : y eut-il jamais un homme aussi embarrassé que moi ? N’y a-t-il donc personne qui les ait connus, personne en qui ils aient confiance ? La vie retirée qu’ils ont menée m’empêchera-t-elle donc de trouver quelqu’un pour servir mon dessein ?

— N’y a-t-il personne, Christophe ? demanda le notaire.

— Personne, monsieur, répondit Kit. Ah ! mais si, pardon, il y a ma mère.

— Est-ce qu’ils la connaissent ? dit le gentleman.

— S’ils la connaissent, monsieur ! Elle allait et venait sans cesse chez eux. Ils étaient aussi bons pour elle que pour moi. Et tenez, monsieur, elle espérait toujours qu’ils reviendraient chez elle.

— Eh bien, alors, où diable est cette femme ? dit avec impatience le gentleman en prenant son chapeau. Pourquoi n’est-elle pas ici ? Pourquoi ne se trouve-t-elle jamais là où l’on a besoin d’elle ? »

En un mot, le gentleman allait s’élancer hors de l’étude, déterminé à s’emparer de force de la mère de Kit, à la jeter dans une chaise de poste et à l’enlever, quand M. Abel et le notaire réussirent par leurs efforts réunis à conjurer ce nouveau mode d’enlèvement : ils l’arrêtèrent par la puissance de leurs raisonnements et lui démontrèrent qu’il était plus convenable de sonder Kit pour savoir de lui si sa mère consentirait volontiers à entreprendre si précipitamment ce voyage.

À ce sujet, Kit exprima quelques doutes, le gentleman s’abandonna à de violentes démonstrations, et le notaire ainsi que M. Abel prononcèrent à l’envi des discours pour l’apaiser. Le résultat de la conférence fut que Kit, après avoir pesé dans son esprit et examiné soigneusement la question, promit, au nom de sa mère, qu’à deux heures de là elle serait prête pour l’expédition projetée et s’engagea à l’amener chez le notaire tout équipée pour le voyage, avant même que le terme indiqué fut expiré.

Ayant pris cet engagement assez téméraire, car il n’était pas sûr de pouvoir le tenir, Kit ne perdit pas de temps pour sortir et aviser aux mesures d’où dépendait l’accomplissement immédiat de sa parole.