Alphonse Picard et Fils (p. 15-17).
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XIII

Très doulx sire Dieu ie te suppli qu’il te plaize a moy pardonner mes pechiez et me donne doulz sires en mon cuer repentance et a lesperit contriction et à mes yeulx fontaine de lermes, et à mes mains largesce d’aumosnes. Roy glorieux amorte en moy le désir de la char et arme la vigueur de tamour. Mon Redempteur jete de moy l’esperit d’orgueil et motroye le beneure trésor de vraye humilité. Mon doulz Sauveur oste de moy la fureur dyre et motroye vraye lumière de pacience. Mon Créateur oste de moy rancuer de couraige et me donne douceur de bénigne pensée. Donne moy très piteux père foy, convenient, espérance et continuel charité. Mon doulz Créateur, oste de moy vanité de courage et inconstance de pensée, vacation de cuer, legiereté de bouche, elation de yeulx, gloutonnie de ventre, vituperation de mes proximes, pechiez de diffamation, desordenée curiosité, convoytise de richesces, violence de rapine, desirer de vaine gloire, mal hypocrisie, venin de adulation, desprisement des povres, oppression des feibles, ardeur davarice, rancour dennie, mart de blasfeime. Trenche moy mon facteur, temerité et inique pertinence, desordene travail, perversité sompnolence, pigresce, difficulté de pensée, cecité de cuer, obstination de sens, mauvaistié de coustumes, inobedience de bien, impugnation de conseil, rapine de povres, violence de non puissans, calumpnie des innocens, negligence des subgies, cruauté de domestiques, impiété de familiers, durté de proximes. Mon Dieu ma doulce misericorde, ie te pry qu’il te plaize à moy donner à faire les euvres de misericorde, et estude de pitié, compassion es traveillies, aide es souffreteux, secourir es melchiefs, a conseillier les errans, consoler les tristes, relever les oppreins, recréer les povres, nourrir les feibles, pardonner ceulx qui mont fait mal, ceulx qui me heent amer. Rendre bien pour mal et nul ne desprisier, maiz tous honnourer, les bons ressembler, les mauvais eschiver, vertuz embracier, vices hors geter ; en adversité patience et en prospérité continence, garde de bouche et porte de defense, en mes levres silence, les choses du monde laissier, les choses célestiennes désirier. Vecy mon formateur que trop de choses tay demandées comment que ie sache que ie ne saye dignes de avoir eu nulles, maiz mon cuer sen hardist de toy supplier, car ie preng exemple aux larrons et murtriers et aux autres vils pecheurs, lesquel en un seul point pardonnes et aux pardonnes quant il te ploist. Car mon doulx Dieu et mon Créateur de toutes choses, ia soit que en toutes euvres soyes tu merveilleus, toutes voyes, tu es plus merveilleux en piteuses euvres, dont tu meismes par un ton servant as dit « la misericorde de moy est sur toutes les euvres de moy », car sires tue ne desprises nul, ne as eu horreur, fors le droit fol qui na cognoissance de toy. Le mien Dieu don de mon salut et mon recepteur ie maleureux tay courroucie et ouvré mal devant toy, et toy promeu a fureur et ay bien deservy ta grant yre, ie ay pechié et tu las souffert, se ie me repens tu me pardonnes, se ie me retourne vers toy tu me recoifz, et se ie demeure en mon pechié encore tu matens. Vecy donc doulx sires mon vray salut, ie ne say que ie te die, ne ie ne say que ie te responde, ne ie ne scay ou ie me pourray mucier car tu as puissance sur tout et mas montré les voyes de bien vivre, donné mas chemin de errer et mas menascié denfer et promise la gloire de paradis. Or pères de misericorde et Dieu de toute consolation forme ma char en ta cremour en guise que des choses que tu menasces en doubtant ie eschappe, et rent à moy le confort de ta salut, par quoy les biens que tu mas promis ie puisse recevoir par tamour.