Le Livre de jade (1867)/Les Poëtes/Les Caractères éternels
Alphonse Lemerre, éditeur, (p. 165-166).
LES CARACTÈRES ÉTERNELS
Selon Li-Taï-Pé.
out en faisant des vers je regarde de ma
fenêtre les balancements des bambous ;
on dirait de l’eau qui s’agite ; et les feuilles en
frôlant leurs épines imitent le bruit des cascades.
Je laisse tomber des caractères sur le papier ; de loin on pourrait croire que des fleurs de prunier tombent à l’envers dans de la neige.
La charmante fraîcheur des oranges mandarines se fane lorsqu’une femme les porte trop longtemps dans la gaze de sa manche, de même que la gelée blanche s’évanouit au soleil ;
Mais les caractères que je laisse tomber sur le papier ne s’effaceront jamais.