Le Laurier noir/III/Sabbat

Société de la Revue Le Feu (p. 61-62).

SABBAT


          Comme d’un tambour de basque
          Les trois sorcières du Rhin
          Dans le vent et la bourrasque
          Jouent du désespoir humain.

          La première dit : « Les cendres
          Montent plus haut que ma tour. »
          La seconde qui vit pendre,
          Aux ormeaux des carrefours


          Des enfants à la mamelle
          Rit si fort que, dans la nuit,
          Se brisent sur les margelles
          Les amphores des vieux puits.

          La troisième est toujours ivre
          Et ses doigts de chat-huant
          Nattent ses cheveux de cuivre
          Alourdis de trop de sang.

          C’est le sabbat de la guerre,
          L’Empereur est courroucé.
          Sur les Vosges, les sorcières
          Recommencent à danser.

          Macbeth pince la guitare,
          La chouette hullule encor,
          Et Salomé joue aux barres
          Avec des têtes de morts.