Le Jardin des dieux/Aux flancs d’une cruche kabyle/Ma terre
MA TERRE
Maintenant que j’ai vu luire tes lacs de sel
Parmi les joncs fiévreux de tes steppes lunaires
Et tes cèdres portant la majesté du ciel
Mêler aux tonnerres
Leur rêve éternel,
Maintenant que j’ai vu par un jour accablé
S’avancer en flairant à travers les orties
Le visage des Dieux sous qui Rome a tremblé,
Les hyènes sorties
D’un temple ensablé,
Et, parmi les chardons où le vent chaud du soir,
Ô terreuses Cités, disperse votre cendre,
Appuyant sa sandale au marbre des voussoirs
La Nuit redescendre
Rêver et s’asseoir,
Maintenant que j’ai vu pâlir vers le couchant
Le lent cheminement des troupeaux et des femmes
Tandis que d’une flûte un chant triste et touchant
Faisait son bruit d’âme
Au-dessus des champs,
Ô mon vaste pays d’espace et de clarté,
Ma terre, se peut-il désormais que j’oublie
Ta solitude immense et fauve où j’ai goûté
La mélancolie
De l’éternité !