Les Fleurs du mal/1857/Le Flambeau vivant
SPLEEN ET IDÉAL
Les Fleurs du mal (1857), Poulet-Malassis et de Broise, (p. 89-90).
XXXVIII
LE FLAMBEAU VIVANT
Ils marchent devant moi, ces yeux pleins de lumières,
Qu’un Ange très-savant a sans doute aimantés ;
Ils marchent, ces divins frères qui sont mes frères,
Suspendant mon regard à leurs feux diamantés.
Me sauvant de tout piège et de tout péché grave,
Ils conduisent mes pas dans la route du Beau ;
Ils sont mes serviteurs et je suis leur esclave ;
Tout mon être obéit à ce vivant flambeau.
Charmants Yeux, vous brillez de la clarté mystique
Qu’ont les cierges brûlant en plein jour ; le soleil
Rougit, mais n’éteint pas leur flamme fantastique ;
Ils célèbrent la Mort, vous chantez le Réveil ;
Vous marchez en chantant le réveil de mon âme,
Astres dont le soleil ne peut flétrir la flamme !