Le Drame d'Alexandre Dumas (Parigot)/02/08

CHAPITRE VIII

LE DRAME POPULAIRE DE CAPE ET D’ÉPÉE

La Tour de Nesle.

I

LE GENIE DU DRAME POPULAIRE.

Enfin j’arrive à la Tour de Nesle, chef d’œuvre du théâtre extra-historique et de l’esprit d’aventures, vraiment chef-d’œuvre en son genre et son temps. Le génie du drame populaire y souffle en tempête. Affranchi des exigences de l’histoire, Dumas s’engage dans le plein courant de la fantaisie énorme de la foule. Il ressuscite un moyen âge pantagruélique, une épopée napoléonienne fantastique, une révolution de 1830 fantasmagorique, mêlant tout, fondant tout, avec une belle et claire allégresse. Cela est nôtre excellemment ; voilà ce que vous ne trouverez pas ailleurs, en dépit de quelques réminiscences exotiques que j’ai signalées à leur place[1]. Cette Tour de Nesle apparaît sinistre et dramatique, poterne séculaire qui hanta l’esprit de Brantôme, et que la Seine durant de longues années lécha de ses courtes lames, à l’extrémité de la bonne ville du roi Louis le Hutin, lointain ancêtre du bon roi Louis-Philippe. Parce que la verve qui anime cette œuvre est au rebours d’une verve aristocratique, ne glissons pas dans le distingué ridicule de la méconnaître : elle est française.

Ni Gaillardet ni Janin n’avaient cette encolure. Il y fallait un ouvrier de Paris, solide et sûr de son tour de main. Il y fallait je ne sais quelle mesure dans l’orgie ; et une certaine discipline nécessaire à cette débauche d’imagination. Certes, cet art n’a rien de commun avec le goût des humanistes, et c’est néanmoins de l’art considérable, qui met l’imagination des foules sens dessus dessous. Il est avisé, il est sobre à sa manière. Je ne rougis ni ne me pique d’y insister, sans crainte des beaux esprits, qui ne sont pas toujours de bons esprits, comme sans souci du paradoxe, celui-ci n’étant à l’ordinaire qu’une vérité incomplète ou insuffisamment éclaircie.

Le 25 avril 1832, quelques semaines avant la première représentation de la Tour de Nesle, parut l’Écolier de Cluny de Roger de Beauvoir [2]. Que Dumas ait connu l’ouvrage préalablement, ou non, la question n’a aucune importance[3]. Ce qui est autrement notable, c’est la comparaison qu’on en peut faire et les éclaircissements qu’on en doit tirer. Le romancier ne manque pas d’imagination. Il possède même tout justement celle qui plaît aux romantiques, et qui consiste à ranimer la couleur d’une époque. Il a des visions, mais confuses ; le xive siècle ne ressuscite pas, il grouille. Il y a, dans ces peintures, de l’énorme et du minutieux, de l’éclat et peu de clarté. Il y manque du jour et de la vie. Tout cela est badigeonné consciencieusement, réchampi, et à pièces rapportées. L’auteur s’est employé, échauffé tant qu’il a pu ; mais c’est une tour de Babel, et non point la Tour de Nesle. Il allègue des textes très anciens en des notes très compendieuses[4]. Il est proprement ce qu’il reproche à d’autres, un « artisan de fouilles historiques », qui se fait « caduc à plaisir », et « ride son style au point d’effrayer parfois l’intelligence du lecteur[5] ». Cet air de science et conscience n’est que le prétexte d’une truculente fantaisie. Walter Scott semble peu documenté et Dumas fade auprès de Roger de Beauvoir.

Dumas a le génie du drame et la mesure du théâtre ; deux exemples tirés du roman suffisent à le mettre en évidence.

L’écolier de Cluny, Buridan, poursuivi par le guet

« des métiers » s’échappe, grâce à l’obscurité, le long des fossés de la Porte de Nesle. Le vent siffle, le ciel est noir ; les cris « sus ! sus ! » redoublent avec fureur. Soudain « la trace rougeâtre et fugitive d’un éclair » lui montre à l’une des fenêtres « treillissées » de la Tour une femme, qui lui fait signe. « Ce fut l’ange d’une vision[6]. » Il se précipite vers la porte entr’ouverte, « non sans ouïr sur-le-champ retomber sur lui, comme par miracle ( ?), les lourds battants à clous de fer[7]. » On voit déjà l’intolérable procédé ; mais cela n’est qu’un avant-goût de ce style coloré, érudit et romanesque. Lisons donc plus avant. « Un panneau de bois glissa sur ses gonds, et maître Jehan se trouva introduit dans une chambrette assez basse et bien close, d’où s’échappait dès l’ost forte odeur de parfum et de verdure fraîchement coupée. C’était du reste la seule esjouissance de ce lieu nu autant qu’étroit, éclairé à demi par une lampe apposée sur un bahut, près de la couchette aux larges courtines, que surmontait un long tableau représentant les dix commandements d’amour, œuvre d’un frère lai de Saint-Benoit, enrichie d’oiseaux et d’enluminures. L’âtre enfermait toutefois tisons de bruyères sèches qui pétillaient ardemment, non sans répandre douce et avenante clarté. — « Soyez le bienvenu, bel amy… » — L’écolier resta muet, lorsque, en ramenant les plis de son capuce, il rencontra le sourire mystérieux d’une femme à demi vêtue. Au premier aspect de cette figure pâle de blancheur, immobile sous ses longs cheveux, et comme parée de son désordre, il y avait fascination. Sa taille était grande, ses bras nus, aussi éclatants qu’hermine, un œil insidieux de mollesse, tout un éclair de volupté. « Et donc, sire bachelier, votre cape ruisselle encore, besoin est tout d’abord[8]… » C’est le pastiche, le rebutant et facile pastiche qui obscurcit et hérisse le style, un ramas de mots techniques et archaïques, un abus d’inversions et de suppressions d’articles, beautés douteuses piquées comme épingles en la pelote. Exercice d’écolier, où l’a peu près tient lieu de savoir. À ces enjolivures, qui en sont la couleur historique, se mêle le plus banal de la phraséologie romantique, qui en fait la couleur romanesque. Pastiche des deux parts. Je ne dis pas que cela fût pour choquer le goût de Dumas, ni pour déplaire à son imagination avide de vocables éclatants et sonores. Mais lisez et comparez. Le génie dramatique a imposé sa loi au mauvais goût et opéré la transposition nécessaire. Il a conservé des archaïsmes juste l’essentiel, quelques mots, exclamations ou tours de phrase encore très clairs dans le drame. Drame mort-né, s’il eût été écrit en cette langue tour à tour laborieuse et emphatique, et surtout impropre à l’action.

La scène principale du roman de Roger de Beauvoir, la nuit de Buridan à la tour, se trouvait indiquée chez Brantôme ; elle avait de quoi séduire les conteurs de 1830. Dumas, qui a fait au peuple libre, au peuple ennemi des rois Veto et des reines amoureuses la bonne mesure d’abominations dans la Tour de Nesle, Dumas est un auteur sage et presque sobre. Si vous alléguez la tirade des « grandes dames », écrite d’ailleurs par J. Janin[9] : « … À peine sommes-nous entrés dans cet endroit éblouissant et chaud à enivrer, qu’elles nous ont accueillis avec mille tendresses, qu’elles se sont livrées à nous sans détour, sans retard ! à nous, tout de suite, à nous inconnus et tout mouillés de cet orage. Vous voyez bien que ce sont de grandes dames[10]… » — si vous vous récriez, non pas seulement contre la logique, mais aussi contre la vivacité d’un couplet, où ces grandes dames avérées se sont « abandonnées à tout ce que l’amour et l’ivresse ont d’emportement et d’oubli…, etc., etc. », — lisez, lisez les mêmes choses dans l’Écolier de Cluny ; et suivez jusqu’au bout, s’il vous est loisible, l’indécente et incandescente imagination du romancier.

La scène se déroule sous nos yeux : c’est le dangereux avantage du roman qu’il a plus de liberté et d’espace. La scène s’espace donc. La reine est moins grande dame. Elle sèche son écolier près de l’âtre. Elle lui offre à boire et à manger pour le réparer. — « Humeriez peut-être, après si grand orage, tesson de Cervoise ou d’Épernay ? Parlez, mon gentil cœur… Si gâteau de mil, cidre, ou beurrée[11]… » Ce n’est pas encore une orgie, mais une collation à la Tour : on est nourri. Buridan se répare et se prépare. J’ai cité les détails du mobilier de cette garçonnière, au temps du roi Louis le Hutin. Ne retenons plus que quelques traits d’un réalisme suggestif… « On eût pu remarquer un léger désordre dans la symétrie des corbeilles et des traces récentes de lie au vieux gobelet à demi renversé sur sa large patène d’étain. La chambre avait aussi quelque apparence de surprise ou d’abandon. Des vêtements de femme épars çà et là, un hanin rouge à broderies fanées… Par-dessus tout les tentures enfumées de l’alcôve relevées comme à la hâte, et les courtines du lit grimaçantes à l’instar de figures cabalistiques… De tout cela l’écolier ne voyait rien… Enlacé d’avance par le charme, il restait là, pensif, dans un étonnement timide, comme une de ces figures soumises à la baguette du bohémien qui endort, ou l’une de ces têtes si délicieusement recueillies de Murillo dans un demi-jour vague et suave[12]. » Quant à la femme, «… vous eussiez dit une de ces beautés fatales que Callot, Michel-Ange ou autres (!!) semblent, dans leurs tableaux, traîner à plaisir par les cheveux devant un Saint du désert[13] ». C’est donc la passion échevelée qu’il s’agit de peindre, avec une pointe de sadisme que rehausse la timidité rêveuse d’un enfant en proie à cette goule, d’un enfant que « l’énigme tourmente » et dont « l’âme est un chaos »[14]. Roger de Beauvoir prend de la peine pour mêler l’angoisse à notre plaisir ; il y a du ragoût. Aux premières questions de la reine, messire Jehan Buridan répond (tel l’amoureux de Mon Isménie), qu’il n’a jamais aimé que deux personnes : sa mère et… son ami Arthur[15]. Enfin l’on vient au fait. « Tout à coup il sentit un bras l’étreindre avec puissance… « Ma mère ! ma mère ! »… « Je serai ta mère ! »… Il voulut écarter cette vision et repousser le fantôme. En ce moment le lit rougeâtre de clarté lui apparut. « L’enfer ! » — « L’enfer à deux[16]… » Je n’ai cité que l’indispensable, et je recours en hâte aux points suspensifs que l’auteur a semés tardivement. Encore ces points suspendent-ils la scène sans l’épuiser. Entre le réveil de Buridan, l’écolier malgré lui, et l’apparition du sac mortuaire dans lequel le juif Manassés, exécuteur de la reine, le doit envelopper, la femme insatiable, la créature de volupté, lasse et non soûle, embrase l’esprit et les sens de messire Jehan[17]. « C’est d’un style magique et ardent qu’elle peint la passion, n’est-ce pas[18] ? » dit un personnage de la Tour de Nesle. On devine que Dumas est un dramatiste beaucoup trop adroit pour offrir à nos regards ces scènes de feu, et que l’expression s’est apaisée, grâce à une claire conscience des nécessités dramatiques et au goût d’une certaine mesure à la fois imposée et subie par le spectateur, fût-il du commun.

À défaut du manuscrit original de Gaillardet, qu’il se peut que Gaillardet lui-même ait détruit, nous avons quelques renseignements de Dumas sur le travail de remaniement et d’invention auquel il se livra d’après ce manuscrit[19]. Certes, il convient plus que jamais d’être sur ses gardes à la lecture de Mes mémoires. Encore paraît-il bien que le véritable auteur du drame, je dis celui qui mit la chose au point, a dû s’écarter de l’exécution primitive autant et de la même façon qu’il s’éloigne de l’Écolier de Cluny. La même idée avait attiré Roger de Beauvoir et Gaillardet, qui la trouvaient dans Brantôme : c’était la peinture d’une nuit d’amour et d’orgie dans la Tour aux lueurs sinistres. Nous savons que Gaillardet avait exécuté cette scène la première[20] : mauvais signe. Ensuite, à travers les demi-aveux ou les discussions du procès, on devine que la pièce s’égarait, probablement comme l’Écolier de Cluny, dans les détours sans fin de la légende de Buridan[21]. Dumas, reprenant en main le sujet, fait, lui aussi, la scène de la Tour, mais il se garde de s’y engager de but en blanc ; et, après qu’il l’a faite, il la refait comme Molière celle de Tartuffe et d’Elmire, comme Racine celle de Titus et Bérénice, en grand dramaturge qu’il est. Buridan n’est plus un écolier : il s’agit bien d’autres licences. Au chef-d’œuvre populaire il infuse le charme qui plaît au peuple. Aux têtes combustibles il prépare un autre aliment ; plus circonspect et mesuré que Roger de Beauvoir, et plus malin que Gaillardet. Il a même la profitable crainte des sifflets, qui lui donne presque du goût. N’est-il pas établi, avéré, et d’une certitude incontestable, que Gaultier d’Aulnay, le jeune premier, le cavalier amoureux, dont la reine, après les nuits de débauche à la Tour, soupire le nom en des rêves suaves et purs, s’appelait Anatole[22] ?



II

LE DRAME DE « LA TOUR DE NESLE »

« … Oui, je suis passé à deux heures du matin au pied du Louvre, et la Tour de Nesle était brillante ; les flambeaux couraient sur les vitraux ; c’était une nuit de fête à la Tour. Je n’aime pas cette grande masse de pierre, qui semble, la nuit, un mauvais génie veillant sur la ville[23]… » Les hommes de peu d’imagination feront sagement de n’aller pas plus loin. Ce chef-d’œuvre leur est fermé. Mais le populaire, dont la fantaisie est avide et simple, sent dès ces mots que la Tour règne sur le théâtre, et qu’elle est là pour lui. Ses yeux se dessillent ; il remonte le cours des siècles ; il est le peuple des truands. Il s’identifie avec lui. « Si vous saviez ce que le peuple raconte[24] !… » Le peuple d’aujourd’hui déguste les récits de celui d’autrefois. Il savoure la légende de Brantôme. Au pied de la Tour de Nesle, de cette tour d’enfer, la Seine rejette chaque matin trois cadavres sur la grève ; pêcheurs, bateliers, écoliers commencent à menacer cette « hôtellerie royale[25] » en criant « malédiction ! » Malédiction sur les orgies de la reine Marguerite de Bourgogne, première femme du roi Louis X, et de ses deux sœurs Jeanne et Blanche : famille royale, famille perdue de vices ! Malédiction sur la Tour de Nesle ! Ces quatre mots résonnent, refrain lugubre : « Et nous, enfants, à la Tour de Nesle ! — … Alors, une échelle, une épée, et suis-moi. — Où cela, capitaine ? — À la Tour de Nesle[26], malheureux. » Dès les premiers tableaux, et durant tout le drame, la Tour de Nesle obsède nos yeux de ses clartés sinistres sous un ciel noir déchiré d’éclairs ; son nom poursuit nos oreilles comme un glas. Elle est le protagoniste immuable, l’unité mystérieuse, le symbole massif de l’œuvre. Peuple de France, peuple issu des manants de l’an 1314, qui frémis au seul bruit de ces quatre mots assemblés : la Tour de Nesle, frémis, mais écoute.

Ce symbole, qui a d’abord ému ton imagination, est pour remuer en toi un vieux levain de ressentiments et de rancunes. Il n’y a pas si longtemps que tes pères ont pris d’assaut une autre poterne et démoli la citadelle de la « tyrannie ». Ecoute, écoute et souviens-toi. En cette Tour maudite, femme et filles de rois prennent leurs ébats, « s’enivrent de vin, de caresses et de voluptés[27] ». Malheur ! malheur ! L’épernay ruisselle dans ces fêtes ; et sur les manants pleuvent comme grêle taxes, gabelles et impôts. En cette Tour ferme sur ses assises de pierre, qui semblent défier le temps et braver ton courroux, ô peuple, règne le plaisir, le bon plaisir féodal. Tu te souviens. L’idée et le symbole du drame sont bien pris à ta taille. Dans les murs, hors des murs de ce repaire s’engage la lutte entre le passé et l’avenir ; et ce sont encore tes destinées qui, sous d’autres noms et sous le couvert de la légende, se débattent une fois de plus. Le vice royal (royauté n’étant que vice et abus) est aux prises non pas avec la vertu de l’ancien théâtre, mais avec la volonté, l’intelligence, l’énergie et les hommes d’action du nouveau. Marguerite et Buridan poursuivent un combat inégal et acharné, l’une armée de tous les pouvoirs et de tous les prestiges, l’autre fort des seules ressources de son génie[28]. Peuple de 1830, postérité de Figaro, qu’on a tant grisée de grands mots, ne sens-tu pas d’abord combien ce dramaturge est ton homme, à quel point son talent et son sujet sont tiens, et comment, grâce à son zèle populaire, du texte de Brantôme naît dès le premier acte un drame qui est l’image de ta vie à travers les siècles, ou du moins celle que tu t’en fais en ta pensée.

Gaillardet novice avait coupé sa pièce en cinq actes, comme une tragédie[29]. Pour que cette lutte se précipite au gré de ton émotion impatiente, pour qu’au milieu de ces événements fictifs et de ces vicissitudes tu n’aies pas le caprice de te ressaisir, on te prendra par le régal des yeux : ton dramatiste connaît ta faiblesse, bon peuple. Il divise sa pièce en tableaux, parmi lesquels l’intérêt ne saurait languir. Et quels tableaux et combien de ton goût ! Tu entreras à la taverne d’Orsini, près la porte Saint-Honoré ; manants, ouvriers sont assis à la table de droite ; la noblesse à part, à gauche, Philippe d’Aulnay écrivant sur un parchemin entre un gobelet et un pot de vin[30]. Tu iras aussi à la Concurrence, chez Pierre de Bourges, par devers les Innocents. On te gâte, visiblement[31]. On te montrera le vieux Louvre et la prison du grand Châtelet[32] : cour, prison, tavernes, toute une synthèse qui ne dépasse point ton savoir, animée, colorée, théâtrale, sans luxe inutile. On ne te découvrira point l’alcôve de la Tour de Nesle, parce qu’on est, sinon trop moral, au moins plus prudent. On évite de prostituer l’intérêt du drame et d égarer ton émotion en des curiosités dommageables. Mais tu verras le cabinet de toilette et la reine en déshabillé[33]. C’est quelque chose ; c’est assez. En revanche, quelles joies égalitaires le spectacle te réserve ! Le premier ministre et la reine, tu les considéreras tantôt à la cour, et tantôt au cabaret ; surtout, ne perds pas un mot du dénoûment, qui te sera d’un plaisir extrême : la reine et le premier ministre y seront arrêtés devant toi et pour toi, dans le traquenard de la Tour de Nesle[34]. Alors tu pourras retourner au logis, satisfait d’avoir parcouru toutes les étapes de ce monde, et passé, sans ennui, de la taverne à la Tour, de la Tour au Louvre, du Louvre à la prison. Ces contrastes philosophiques t’auront graduellement amené jusqu’au seuil du néant, où s’abîment ces grandes puissances que nous voyons d’en bas, que tu regardes désormais en face. Sens-tu avec assez de joie combien cet auteur, qui avait droit à la particule, est avec toi ?

Il est un maître ouvrier. Tout n’a pas la même valeur dans sa pièce ; mais, hormis Patrie de M. Victorien Sardou, je ne connais point de drame, dont la composition soit réglée avec une telle exactitude sur le sentiment de la foule. C’est une progression et une diversité, un engrenage de spectacles, de scènes, de situations, un savant mélange de la terreur, du rire, et parfois du comique terrible, comme au huitième tableau, pour aboutir à un dénoûment que Dumas a pu, sans forfanterie, comparer à celui d’Œdipe Roi et même à la force scénique de Shakespeare[35].

L’exposition est fameuse. L’action s’engage au pas de charge, épée au clair. Invisible et présente, la Tour de Nesle verse sur les personnages l’ombre et le mystère. Tous ces hommes agiles en sont comme envelopés. Alerte ! au meurtre ! au guet ! Buridan et son « secret qui le tuera ou fera sa fortune[36] » ; Philippe et le récit de sa rencontre avec une femme qui lui fixe un rendez-vous ; et (voyez le dramaturge) la scène, qui vient d’être racontée, maintenant exécutée sur le théâtre, la femme voilée, qui entre et touche Buridan à l’épaule, et le même langage, et le même anneau : mystère ! mystère ! Cette scène a été faite vingt fois ; elle est dans la Chronique du règne de Charles IX, dans Ruy Blas, et même dans les premières poésies de Musset[37] ; nulle part, elle n’excite au même degré une curiosité pareillement inquiète. Et voici Gaultier d’Aulnay, frère de Philipi)e, favori de la reine Marguerite, et les croix rouges au bras gauche des deux jumeaux, et Buridan, capitaine d’aventure, qui s’engage à fond avec ces jeunes gens, dont il est le père sans le savoir. La Seine a charrié trois cadavres, et l’heure approche des trois rendez-vous. Orsini ferme son cabaret.

À la Tour de Nesle, pour terminer l’exposition. C’est le tableau de l’orgie et de Marguerite de Bourgogne. J’y reconnais la main de Dumas, ses audaces avisées, et son expérience du théâtre et du public. Nous sommes bien dans la Tour légendaire et détestée. Le décor est circulaire : c’en est la preuve. Mais la toilette, les chaises et les fauteuils que nous apercevons sur le théâtre ne sont que truchements. Dans la chambre à côté se font la débauche, l’amour et les tueries. Nous n’en verrons sur la scène que les intermèdes, les préparatifs, et les suites. Marguerite apparaîtra masquée : et cela suffit pour la deviner ; fripée et chiffonnée : et c’est assez pour la connaître. L’orage gronde ; les éclairs traversent les vitraux, « le fleuve grossit comme pour aller au-devant des cadavres… C’est un beau temps pour aimer[38]. » On sait le monologue d’Orsini ; il est terrible ; c’est un ambigu fantastique de cadavres, d’éclairs, d’amour, d’orgie, de caresses, de sadisme enluminé, très romantique, c’est-à-dire assez bourgeois. Mais il ea dit plus à l’imagination que le récit de Roger de Beauvoir, sur ces femmes de toutes les voluptés et sur la mort qui attend leurs victimes. « Il est deux heures ; la pluie tombe ; tout est tranquille ; Parisiens, dormez[39]. » Enfin Marguerite paraît. Elle veut, pour une fois, soustraire à la mort Philippe, « enfant tout damour et de passion »[40], qui ressemble à son Gaultier comme un frère. Le drame se noue. Philippe lui fait à la joue une éraflure d’épingle pour la reconnaître. L’imprudent signe son arrêt de mort. « Cette marque… Priez Dieu !… Qu’on se souvienne de mes premiers ordres[41] ! » Elle sort. Orsini ferme la fenêtre et emporte la lumière. Après l’éclat de la fête, la nuit, plus rien que la nuit sillonnée par le feu du ciel. Qui est là ? Philippe ! Buridan ! Le troisième compagnon anonyme s’attarde en compagnie de la troisième sœur. Oh ! ce sont de grandes dames[42]. Où sommes-nous ? « Regarde devant toi… — Le Louvre. — À tes pieds. — La Seine[43]. » Autour de nous, c’est la Tour de Nesle. Et c’est la mort. Vite, des tablettes, sur lesquelles le jeune homme écrit de son sang, à la pointe de l’épingle enlevée à la coiffure de la reine : « J’ai été assassiné par… « Buridan possède un gage, Philippe étant le frère du favori. La lutte est désormais engagée entre Marguerite et le capitaine. L’un saute par la fenêtre dans la Seine : c’est le chemin de la fortune et des héros romantiques ; l’autre reparaît, frémissante et fatale, une torche à la main, et penchant vers le pauvre Philippe à l’agonie son visage enfin démasqué : « … Regarde et meurs. » — « Marguerite de Bourgogne, reine de France[44] ! » La nuit est tranquille, les Parisiens dorment, et Buridan va s’évertuer.

Troisième tableau : au Louvre, dans la chambre à coucher de la reine. Depuis la journée du 10 août, le peuple force toutes les portes des palais. Marguerite est couchée sur un lit de repos : elle cuve son orgueil et sa débauche. Cette femme, quoique reine, sera vaincue. Elle n’a pas l’endurance de son ennemi, qui, après une telle nuit, s’en est allé à ses affaires et a revêtu un costume de Bohémien. Dumas déclare que ce tableau est mauvais[45]. Il est plutôt long, et il a le tort de continuer l’exposition. Nous apprenons que Marguerite aime Gaultier d’un amour pur. Pour romantique qu’elle soit, la gaillarde nous étonne. Dumas a des pudeurs que la pudeur ne connaît pas. Des deux fils de Marguerite un seul a eu ses faveurs. Cette réserve plaît, mais cette invraisemblance pèse sur le mouvement de la scène. Ce sont subtilités romanesques, où le bon sens populaire ne les attendait point et les écoute sans intérêt. Dumas se ressaisit bientôt. Buridan a l’épingle, qui a marqué la royale joue. « Tu vois, dit-il à voix basse, que je sais tout, Marguerite ; que ton amour, ton honneur, ta vie sont entre mes mains…[46] » Vertudieu ! Qui donc commande en ce palais ? Le Bohémien, l’aventurier, l’échappé de la Tour de Nesle, par le seul pouvoir de son énergie et de sa judiciaire. Réjouissons-nous, compagnons du parterre ; et applaudissons, comme il faut, l’homme d’action qui ne balance point, qui ne déclame point, comme Ruy-Blas, et qui ordonne à la reine de s’enfermer dans son appartement, en attendant le rendez-vous qu’il lui fixe à la taverne d’Orsini. En vain Gaultier vient demander compte à son idole du cadavre de son jeune frère ; en vain il pleure, « tombe et se roule », tel un héros d’Homère, de Sophocle ou de Shakespeare ; la porte est condamnée et la reine invisible par l’ordre de Buridan. Et l’on voit que si le début du tableau languit, la fin ouvre brusquement la carrière à l’imagination des milliers de Buridans, dont l’ambition et les appétits sont lâchés à travers le monde. Du muscle, du muscle, et encore du muscle !

Marguerite est venue à la taverne d’Orsini. Le peuple de France remarquera qu’elle n’y semble point dépaysée. Cela n’est pas pour déplaire à nos amours-propres de manants. Il n’y a pas plus loin du Louvre à la porte Saint-Honoré que du Louvre à la Tour de Nesle[47]. Cette observation judicieuse et démocratique est du capitaine Buridan. Vous dites que la scène est d’une prodigieuse invraisemblance ? Dumas le confesse, le regrette, et ne s’en attriste pas autrement[48]. Il n’a point tort. Car elle est tout entière soutenue par le sentiment égalitaire, qui l’anime, et qui en masque l’artifice. L’individu s’y dresse devant le pouvoir royal, et l’imagination, la toute-puissante imagination, emporte d’un mouvement hautain cette gageure de déclamation énorme, imprévue, et vraiment douce à l’âme de la garde nationale. Plus tard, Dumas développera la scène en six volumes, dans la Comtesse de Charny. Buridan, qui avait en main l’épingle, possède aussi les tablettes de Philippe. Cela donne à un homme de sa taille beaucoup d’aplomb et de l’esprit. Si les tablettes ne réussissent point, patience : il tient en réserve un autre talisman. « Que voulez-vous de moi alors[49] ? » dit la reine. Veut-il l’argent, le pouvoir, le sceau et le parchemin à discrétion ? « Je veux tout cela », repart Buridan. Le mot est grand comme le monde moderne ; il est l’épilogue de la Révolution et de l’Empire ; il dit l’ivresse de l’individualisme triomphant. Que ne dit-il point ? Qu’importe, après cela, que ce benêt de Gaultier se laisse dérober ces tablettes accusatrices à lui remises, dans une scène artificielle et compliquée ? La reine n’est pas de force à lutter avec le capitaine. Et vivent les hommes d’énergie ! Buridan triomphe.

Il est vaincu. C’est le troisième acte. Buridan arrête Marigny, et Gaultier Buridan. Ainsi passent les puissances. Le tableau est spirituel ; mais surtout il nous plaît par un respect notable de l’autorité, qui est, comme chacun sait, la caractéristique de l’esprit français. Marigny, le premier ministre, sera pendu : c’est une douceur. Et Buridan est enfermé au Châtelet[50], lié et couché sur la paille d’un cachot, où l’on accède par deux cent vingt marches et douze portes qu’il a comptées, en souvenir du républicain Verrina[51]. Son prestige est fort compromis. Mais il le relèvera. Il le faut. On a trop bien su éveiller en sa faveur nos instincts indépendants. Cet aventurier a de la poigne et du sens. Il y joint, à l’égard des femmes, une philosophie expérimentale, qui n’est pas sans valeur ; si ces femmes sont reines, cette philosophie nous devient tout à fait savoureuse. L’épingle, les tablettes ont échoué. Mais Buridan a la boîte, la boîte enfouie dans sa chambre sous la septième dalle à partir du crucifix[52], une boîte de lettres écrites jadis à certain Lyonnet de Bournonville par une certaine Marguerite. Or ceci est l’acte de la prison, qui, outre la psychologie féminine qu’il révèle, est un des plus jolis tours de théâtre, et tout à fait dans le sens des audaces chères au peuple que nous sommes. C’est une règle d’intérêts composés, que Dumas a nettement expliquée[53], et dont l’énoncé revient à ceci : étant donné un ennemi vaincu, désarmé, enfermé, qui n’a plus que la parole pour se défendre, et la femme victorieuse, mais curieuse de jouir de son triomphe, trouver les formules et la solution qui renverseront les rôles, délieront les bras et les pieds meurtris, élèveront l’humble, abaisseront le puissant, et feront de l’aventurier un premier ministre. La solution en est élégante, simple, émouvante, stupéfiante, et graduée avec coquetterie. Granier de Gassagnac a prétendu que la scène était tirée de Lope de Vega ; Gaillardet affirmait qu’elle était de lui[54]. Oh ! qu’elle est de Dumas, et préparée et filée avec un art digne des plus belles œuvres scéniques, avec cette pointe d’impertinence, qui est au fond du caractère de l’auteur et des hommes de sa génération, et qui fait de Buridan un d’Artagnan révolutionnaire. Il sourit, il est chevalier, il est Français ; il ajuste le degré d’insolence qui convient dans la défaite ; il est délicieux de grâce et d’élégance dans la victoire finale. Qu’était-il tout à l’heure ? Rien. Que veut-il être ? Tout. Ce n’est ni Lope, ni Gaillardet ; c’est la propre verve puissante, gasconne, adroite et communicative de Dumas. Cette scène de la prison, Gaillardet (qui ne l’avait pas exécutée dans son premier manuscrit) reconnaît l’avoir ainsi placée dans le second, que Buridan devait terminer son récit en tendant les mains à Marguerite et en lui disant : « Délie ces cordes ! » Marguerite le déliait, à genoux. « M. Dumas a triplé cet effet…, ajoutet-il, voilà ce que je dois avouer et dire[55]. » Fit-il pas mieux que de se taire ? La trouvaille dramatique est là, et non ailleurs ; de là jaillit rémotion croissante du récit, qui finit par dominer le public au point d’absoudre un assassin (car il assassina, l’infâme !) et de provoquer son apothéose. Buridan a un crime sur la conscience, il triomphe d’une femme, qui fut autrefois sa complice, qui est aujourd’hui son ennemie ; et tous les cœurs vont à lui, toutes les mains. Oh ! le beau coup de théâtre ! Et combien populaire ! « Où allons-nous ? — Au-devant du roi Louis X, qui rentre demain dans sa bonne ville de Paris[56]. »

Le quatrième acte est long, mais plein d’esprit, de cet esprit qui n’est pas royaliste, ni aristocratique assurément. Le roi rentre dans sa ville et impose une nouvelle taxe. Le peuple crie : Noël ! se fait crosser ; crossé, il crie : Vive le roi ! C’est un bon peuple[57] ; il crie, donc il payera. Cependant arrive l’ordre de pendre Enguerrand de Marigny. On sait de mémoire ces mots fameux qui montent jusqu’au cintre… « Nous voilà toujours fixés sur un point : c’est que le premier ministre sera pendu… Le roi avait promis de faire quelque chose pour son peuple[58]. » Buridan se débarrasse de son prédécesseur, dont il nous a dit : « Cet homme est un juste[59] » ; un prédécesseur est toujours bon à pendre. Gaultier d’Aulnay, favori de la reine, est relégué par lettres patentes en Champagne. Buridan suit la pure tradition révolutionnaire. Il est parvenu, politique, exclusif, à la française. Il tend un double piège à la reine et au favori, à l’une pour avoir tué Philippe, à l’autre pour avoir oublié le cadavre de son frère. À ce soir donc, à la Tour de Nesle, où Gaultier sera l’instrument de la ruine de Marguerite, où Marguerite compte écraser Buridan, où Buridan pense se défaire de Marguerite et de Gaultier. En sorte que la fin du quatrième acte réunit les fils, resserre l’action, tend l’émotion, en quelques répliques symétriques, à la façon du vieux Corneille, selon la formule des Dumas. De nouveau la Tour de Nesle apparaît à l’horizon chargé d’orages : soupirail de l’enfer, caverne du vice et de la vengeance. Enfin, par un effet de symétrie plus dramatique encore, de même qu’au quatrième tableau Enguerrand fut arrêté par Buridan, qui fut appréhendé par Gaultier d’Aulnay, — pareillement, à cette heure décisive, Marguerite donne dans la souricière de Buridan, qui se prend au guet-apens de Marguerite. Cela fait une suite de beautés philosophiques. À nous deux la France, et non à nous trois ; et non pas même à nous deux, mais à moi[60]. À personne, messire : la France au peuple français. On ne perd rien à le lui dire.

Pour lui est fait le cinquième acte, pour lui le pathétique et les frissons d’orgueil. Deux tableaux. Le huitième est rapide. Buridan brûle ses vaisseaux ; mais il n’a pas brûlé les fameuses lettres, son dernier moyen, que la reine redoute, qui dessille les yeux de Gaultier, gentilhomme loyal, mais que l’amour absorbe : lettres de pensionnaire que le roi Louis le dixième lira demain avec bien du plaisir. Qui donc a dit que ce drame est immoral ? Nous sommes à la taverne : Buridan se recueille et songe à la vie de famille. Il voit clair dans son passé. Il apprend de Landry que Philippe était son fils, que Gaultier est frère de Philippe, l’un qu’il a vu assassiner, l’autre qu’il vient d’envoyer à la Tour de Nesle, c’est-à-dire à la boucherie. Désormais apparaissent inévitables la punition des crimes et le rachat des fautes, dans la Tour justicière.

Ce dernier tableau est d’un grand dramaturge qui tient la terreur à sa merci. Ni les moyens ni le style ne sont pour satisfaire les délicats. Aussi bien n’est-ce pas de délicatesse qu’il s’agit, mais d’une fatalité populaire, plus mécanique que celle d’Œdipe roi, et aussi plus moderne. Je crois savoir ce qui manque ici pour atteindre à la même grandeur. Mais je sais reconnaître tout ce que Dumas y a concentré d’émotion pressante, inéluctable. C’est une fièvre de l’action qui se hâte vers la fin, une tension des nerfs et des sentiments parmi l’atmosphère étouffante des suprêmes catastrophes. Buridan entre par le balcon, à la façon de Figaro : c’est une manie de ces héros, la plus innocente. Il déclare hautement qu’il dira plus tard, « pourquoi par cette fenêtre et non par cette porte[61] ». Je ne suis pas assuré qu’il le dise jamais. Mais à quoi bon noter ces bagatelles ? Il pénètre dans la Tour comme la foudre et la mort. Juste au moment que par une scène de double confidence Marguerite et Buridan apprennent l’un de l’autre leur misère morale, et cependant se reprennent à la vie pour l’amour de celui de leurs deux enfants qui reste, alors Orsini fait son œuvre dans l’escalier et assassine Gaultier. On entend les cris ; le père et la mère veulent porter secours au malheureux. L’infernale porte résiste, cède ; le jeune homme paraît ensanglanté, mourant, et maudissant sa mère. Et Buridan tire une conclusion à l’antique de ce dénoûment effroyable : « Enfants damnés au sein de leur mère… Un meurtre a présidé à leur naissance, un meurtre a abrégé leur vie[62]. » Ce n’est peut-être pas la pure morale chrétienne, encore que le péché originel frappe tous les hommes pour une faute du premier homme. Une bonne fois, ne chicanons ni sur la fin ni sur les moyens. On n’entraîne pas les fils des grenadiers par des effets de saynète. Ces imaginations en disponibilité ne se sauraient assouvir (elles s’en flattent au moins) des menues prouesses de la criminalité coutumière. Shakespeare, après des temps aussi troublés, s’en était douté pareillement. Et avant lui Eschyle et même Sophocle. Mais aucun d’eux, même en des œuvres d’une portée supérieure, n’a pénétré plus avant dans l’obscure conscience de tes instincts et de tes désirs, ô Populaire tumultueux et sensible.


III

LES TYPES DE « LA TOUR DE NESLE »

L’habileté du dramaturge n’y eût pas suffi. Musset a beau se moquer et dire : « A-t-elle vu la Tour de Nesle et lit-elle les romans de M. de Balzac[63] ? » Dumas n’est pas Balzac, non pas même en cette maîtresse

œuvre. Mais il a eu du monde fictif qui fascinait la fantaisie de ses contemporains les mêmes visions que l’auteur de la Comédie humaine allait avoir de la vie réelle. L’un aboutit à l’autre. Il y a beaucoup d’imagination dans le réalisme de Balzac, et une part de réalisme moderne dans les types légendaires de la Tour de Nesle. Brantôme, Jean Second ont inspiré notre homme ; le xive siècle lui est apparu entre les portants d’un décor de drame de cape et d’épée. Mais examinez de près les personnages qui s’y agitent, pressez-les : ils sont à la fois imaginaires et réels, friands de la rapière, mais au fond tout exultants des prétentions de Figaro. La légende se moque de l’histoire, ou plutôt c’est une histoire plus contemporaine qui se mêle à la fantasmagorie de la légende. Voilà pourquoi ces types ont remué d’emblée les couches profondes de la nation.

Louis le Hutin est « un drôle de corps »[64], pas encore roi d’opérette, mais déjà un bon roi de révolution, je veux dire contre lequel il serait plaisant de soulever l’émeute. Il est doué du genre d’esprit politique qui réjouit les clubs et fait sortir du sol les barricades. Au reste, entouré à souhait. Gaultier d’Aulnay n’a pas la fermeté de Saint-Mégrin ; Chérubin plus âgé, sans la grâce indécise, sans le continuel frisson, il rôde dans le quartier des femmes, il aime passionnément, et à crédit ; il est le type du favori, du haïssable favori de la reine ; jeune cavalier, presque un page et déjà capitaine, et que les révolutions de cour peuvent placer d’un jour à l’autre à la tête de la Champagne, à moins qu’il ne meure de son amour. Car on en meurt en 1830.

Personne ne niera que Marguerite soit une mère très coupable. Mais d’abord elle est une reine : absolue dans ses caprices, ses volontés, et ses débauches. Elle est un « vampire » ; elle est « la femme de toutes les voluptés ». On trouvera dans la Comtesse de Charny et le Chevalier de Maison-Rouge le commentaire peu flatteur de cet état de reine sur les lèvres des gens du faubourg. Le citoyen Rocher et la veuve Tison ne jugeront pas autrement l’Autrichienne. Marguerite de Bourgogne, grande dame vicieuse, subit la revanche de l’imagination populaire. Le cri suprême de Philippe : « Marguerite de Bourgogne ! reine de France »[65], elle le paye chèrement. Capable de tous les forfaits, puisqu’elle a tous les pouvoirs : voilà le lot de l’infâme. « Poursuivie par le remords, je me suis réfugiée dans le crime… j’ai voulu étouffer dans le sang et les plaisirs cette voix de la conscience qui me criait incessamment : Malheur ! Autour de moi, pas un mot pour me rappeler à la vertu, des bouches de courtisans qui me souriaient[66] … » On le voit : la royauté est du même coup flétrie. Marguerite a commencé par l’échelle de soie de Juliette ; elle ne peut finir que comme Messaline. Un jour la place de Grève retentira du refrain de la Carmagnole, et ce sera grande liesse parmi les truands… J’exagère à peine. Quand Marguerite répond à Buridan : « Une reine de France peut-elle sortir seule à cette heure ?[67] » il la renvoie à la Tour de Nesle ; et si, au cabaret d’Orsini, elle réclame les témoignages de déférence dus à son rang : « Je te parlerai debout et découvert, réplique le capitaine, parce que tu es femme, et non parce que tu es reine[68]. » C’est la démagogie chevaleresque, où aspirait déjà Beaumarchais, sans s’en rendre exactement compte. Reine, Marguerite est digne de toutes les réprobations. Femme, elle a droit au respect et à la pitié. Ceci ne nous éloigne pas trop du xviiie siècle, ni de la sensibilité larmoyante. Il faudra qu’à deux révolutions le peuple français en ajoute une troisième pour que les dramaturges réalistes, au lieu de la reine chargée de toutes les horreurs et de la femme digne de tous les égards, nous représentent la femme-reine du xixe siècle, idole d’un culte universel, tourmentée d’une pareille soif de plaisirs et de la même impuissance d’aimer.

Nous n’en sommes pas encore là. En attendant, Marguerite escompte la sensibilité romantique et le bon cœur du peuple. Cette partie du rôle est de convention, sans aucun doute, de médiocre qualité littéraire, avec des scènes où la voix du sang le dispute à la jalousie, la curiosité à la coquetterie féminine, que Dumas n’a pas inventées et dont il ne prend guère la peine de renouveler l’expression ni les moyens. Pendant longtemps encore l’imagination du public se plaira à la vue de ces monstres féminins, de ces faibles femmes folles de leur corps, aux yeux de qui brille à point nommé la petite larme : perle inestimable qui n’efface point les crimes d’amour, les crimes que l’Océan ne pourrait laver, mais qui détend les nerfs de Jenny l’ouvrière accoudée à la rampe du paradis. Après Marguerite de Bourgogne, reine de France, voici venir les reines de beauté, la dame aux Camélias, Marguerite comme l’autre, Gautier comme les victimes, et qui aura à son commandement le pleur bienfaisant qui fond le courroux des pères. Alors ce ne sera plus l’heure d’appliquer aux héroïnes du drame le vers du poète :

Sincerum est nisi vas, quodcumque inlundis acescit[69].

Dumas n’a pas poussé jusqu’à la rédemption. La reine a nui à la mère. Mais il s’est manifestement adouci vers la fin : il a sauvé Marguerite d’un second inceste. Il s’est contenté de la faire appréhender après l’avoir réduite à crier grâce, et juste à l’instant qu’elle se redresse en disant : « Moi, la reine ![70] » Même il a esquissé les circonstances atténuantes. « Oh ! ce Lyonnet, ce Buridan, ce démon… c’est à lui que je dois tous mes crimes ; c’est lui qui m’a faite toute de sang

[71]. » Et enfin, reine, elle ne sait « si elle oserait s’absoudre[72] » ; mais femme, trois fois femme, elle n’est pas en peine de savoir qui accuser de ses vices.

Celui-ci joute avec les puissances, il est la popularité même. Buridan, autrefois Lyonnet de Bournonville, fut contemporain de Louis le Hutin. Il le faut croire, puisqu’on nous l’affirme. Et trois choses en font foi : son costume, ses jurons, et son mépris des manants[73]. Au reste, consilio manuque[74] : c’est sa devise. Malgré sa généalogie, il appartient à la lignée de ce coquin de barbier. Si je me trompe, et s’il est vraiment noble, son père était de la nuit du 4 août. Lui-même a retroussé ses manches et fait de pires besognes. À quinze ans, il a perdu d’honneur Marguerite, qui avait le même âge, et tué le père, « une noble tête de vieillard »[75], pour cacher la faute de la fille… Eh mais ! qu’est-ce donc que ce capitaine ? Buridan n’est pas un type historique : il personnifie à lui seul une histoire du peuple. Après le crime de la jeunesse, il s’est ressaisi. Trahi par son idéal, il s’est embarqué dans les aventures et les guerres d’Italie. Il est un satellite de la grande légende. Pour jouer le rôle d’un Bonaparte, il ne lui a manqué que l’occasion d’un Brumaire. En attendant, il fait sa révolution du palais. Il veut devenir ministre, et il le devient ; ministre, il se gardera du pédantisme et du petit génie de Ruy Blas. Musclé, cambré, de sang-froid, de cœur chaud, de belle mine même après une nuit d’orgie, sans morgue avec le soldat, mais insolent envers le pouvoir, brave et souriant dans la défaite, et jamais désemparé, il résume toute une époque de l’imagination française. Moins bon gentilhomme que d’Artagnan, il est plus proche de Figaro. Seulement, il a laissé la guitare pour l’épée ; et, comme il s’est déniaisé de certaines prétentions au dilettantisme et à l’esprit, l’exemple de Napoléon l’a fait ambitieux et prêt à tout. À peine retient-il de son ancêtre une pointe de sensiblerie, qu’il reporte de la femme sur les enfants. Homme fort, et qui ne s’en fait pas accroire, tant que sa force n’est pas couronnée. Une fois parvenu, c’est une autre affaire. Au moment de rendre son épée, il se dresse et dit de sa hauteur : « Moi, le premier ministre[76] ! » Mot malheureux, qui lui attire une réplique sévère, mais d’un bon citoyen : « Il n’y a ici ni reine ni premier ministre[77]… » Il était temps qu’on l’arrêtât : il allait se compromettre.

Buridan est de la race du barbier, mais plus moderne dans sa façon de s’évertuer. Qui ne voit qu’il suffirait de quelques transpositions dans le rôle pour en prolonger la portée ? Ce capitaine, qui cherche fortune, nous le retrouverons dans le civil : portant haut, beau parleur, effronté, politicien, journaliste, coulissier, l’aventurier qui ne craint rien, ni surtout que le ciel tombe. La prison lui sera toujours un écueil ; car il lui sera plus facile d’y entrer que d’en sortir. Buridan a sur ces espèces l’avantage de la naissance et d’une certaine générosité de la lame, que les autres, petits-fils d’intendants ou bâtards d’apothicaires, n’apprécieront point[78]. Mais déjà il est un garçon avisé, suffisamment sceptique pour réussir, et athée[79] sans ostentation. Pour la galanterie, il en a, mais pas plus qu’il n’en faut, et jamais contre ses intérêts ni de façon à se barrer l’avenir. À l’âge de quinze ans, Roméo a déjà la prudence de mettre sous clef les pattes de mouche des petites filles riches et délurées[80]. Cela peut servir à sa fortune. Il n’hésitera pas, le jour venu, à les utiliser. Qu’on ne nous dise point qu’il faut bien sauver sa vie. Il les gardait par devers lui ; elles ont fait campagne avec lui dans son portemanteau. À peine débarqué à Paris, il les cache secrètement, comme un trésor. Il comptait sur elles ; il les escomptait, comme des lettres de change. La Tour de Nesle n’est pas pour lui un guet-apens, mais une échéance.

C’est d’ailleurs le même homme qui reproche à Marguerite ses nuits voluptueuses. Il se fait justicier ; il est le bras de Dieu. Il est très fort. Au fond, il connaît ou devine la femme moderne, telle que la bourgeoisie est occupée à la façonner depuis le début du siècle, reine et faible femme, faible de caractère, s’entend, et pour la pratique de la vertu. Figaro est encore un peu novice auprès de lui. « Oh ! démons, démons qui faites le cœur des femmes, s’écrie le capitaine, oh ! j’espère que vous n’avez oublié dans le sien aucun des sentiments pervers que je lui crois[81]. » Il n’en est plus à l’adoration romantique ; déjà il s’arme d’une ironie plus faubourienne, mais non moins cinglante que celle des de Ryons et des de Jalin. Jamais Ruy Blas ne parlerait de ce ton à la pire des reines. Buridan fait mieux. Pour arriver à ses fins, il table sur la femme. Il ne dédaignera point de feindre l’amour ni la jalousie. Est-ce que vous ne voyez pas poindre certaines scènes d’Angèle, et aussi des Effrontés, de la Contagion, sans compter le dénoûment du Demi-Monde ? Et comme, chez les aventuriers les plus modernes, la loi du plus fort est souveraine, il n’hésite pas à sacrifier tout et tous autour de lui, Marguerite, Gaultier qu’il envoie au diable, c’est-à-dire à la Tour de Nesle, après avoir expédié Enguerrand à la potence. Il ajoute un seul mot, mais qui est de valeur, à la royale devise : « Je me maintiendrai ». Finalement il succombe, de compagnie avec la reine, mais parce que nous sommes au théâtre, pour purger la passion populaire et encourager certaine morale que Bossuet n’avait pas prévue : « Dieu frappe les grands pour nous réjouir. »

J’ai affronté le ridicule d’étudier la Tour de Nesle. Il eût été plus commode de badiner, de relever et railler, après tant d’autres, quelques formules qui font désormais sourire. Il m’a paru meilleur de comprendre la pièce et d’en montrer l’importance dans l’œuvre de Dumas et dans l’histoire du théâtre de ce siècle. Rencontrant Beaumarchais à l’origine du drame historique, je l’ai trouvé au cœur de ce drame de cape et d’épée ; et voici que nous touchons au drame moral et social, dont il est le véritable devancier. J’ai poussé l’étude des types de la Tour de Nesle jusqu’au point où il est manifeste qu’ils sont également proches d’Antony et d’Angèle, et que, si le monologue de Figaro fut l’inspiration toute française, Dumas est le créateur tout populaire. Entre la Tour de Nesle et Antony la parenté est désormais visible, n’eût-on point la scène du « feuilleton ». Dumas, l’homme d’imagination de 1830, est aussi l’homme d’action des temps nouveaux.

  1. Voir plus haut, pp. 90, 96.
  2. Calmann Lévy, éditeur. Nouvelle collection Michel Lévy.
  3. Dumas indique dans ses Mémoires, t. IX, cb. ccxxxvi, p. 202, qu’un certain Fourcade était venu, quelques jours avant que Harel lui parlât du manuscrit de Gaillardet, lui proposer le sujet de Marguerite de Bourgogne. Roger de Beauvoir était ami de Dumas ; il est certain que, de ce côté-là aussi, il a eu des propositions ; voir ibid., p. 202. « Je ne puis le prendre, répond-il d’abord à Harel, j’ai refusé, l’autre jour, de le traiter à quelqu’un qui me l’offrait. — Et pourquoi cela ? — Parce qu’un de mes amis, qui, je crois, a beaucoup plus d’esprit que vous, ce qui n’est pas peu dire, en fait un drame. — Qui donc ? — Roger de Beauvoir. — Vous vous trompez ! C’est un roman intitulé l’Écolier de Cluny. » Voir même affirmation, ch. ccxxxiv, p. 163.
    Voir pour toute cette question de la Tour de Nesle, sources, succès, procès, duel, Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxv-v-vi-vii, pp. 126-234. De toutes les pièces citées par Dumas il me semble résulter qu’en somme il fut de bonne foi, et qu’Harel fut seul coupable de trop d’habileté : c’était Mascarille à la direction d’un théâtre.
  4. Pour les sources de la pièce, cf. notes de l’Écolier de Cluny et l’article publié par Gaillardet dans le Musée des familles et cité par Dumas, Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxvi, pp. 193-199.
  5. Préface de l’Écolier de Cluny, p. ii.
  6. L’Écolier de Cluny, ch. i, p. 66.
  7. Ibid.
  8. L’Écolier de Cluny, ch. i, p. 67.
  9. Voir plus haut, p. 175, n. 3.
  10. La Tour de Nesle (Th., IV), I, tabl. ii, sc. v, p. 21.
  11. L’Écolier de Cluny, ch. i, p. 68.
  12. L’Écolier de Cluny, ch. i, p. 68.
  13. Ibid., p. 69.
  14. Ibid., p. 70 et p. 71.
  15. Ibid., p. 71.
  16. L’Écolier de Cluny, ch. i, p. 72. Voir, ibid., tout le tintamarre du pire romantisme. « C’était une haleine de feu passant d’abord sur les boucles de ses cheveux, puis un regard d’ange tombé lascif et suave ; un bras qui repousse, un bras qui cède, une bouche qui prie, un front ployé sous une caresse, un combat de réprouvé, un étonnement d’élu. — « Je serai ta mère ! » disait-elle… »
  17. L’Écolier de Cluny, ch. i, pp. 74 à 75.
  18. La Tour de Nesle, V, tabl. viii, sc. iii, p. 85.
  19. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxiv, pp. 170-171, ch. ccxxxv, pp. 177-182, et ch. ccxxxvi} : Lettre de Dumas au Musée des familles, p. 205 : « Quant aux deuxième, troisième, quatrième et cinquième actes, ils s’écartaient tellement des habitudes du théâtre, qu’il était impossible d’en rien tirer. »
  20. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxiv, p. 170.
  21. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxiv, p. 170. « Je commençai le second (acte) ; mais je proteste que je n’allai pas plus loin que la huitième ou dixième page. Le drame déviait complètement de la route qu’à mon avis il devait suivre. »
  22. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxvi, p. 205.
  23. La Tour de Nesle, II, tabl. iii, sc. ii, p. 29.
  24. La Tour de Nesle, II, tabl. iii, sc. ii, p. 29.
  25. Ibid., p. 30.
  26. La Tour de Nesle, fin du tableau i, p. 14, et fin du tableau viii, p. 90.
  27. La Tour de Nesle, I, tabl. ii. sc. i, p. 15.
  28. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxiv, p. 170. « Ce qui ressortit pour moi comme l’essence du drame, ce fut la lutte entre Buridan et Marguerite de Bourgogne, entre un aventurier et une reine, l’un armé de toutes les ressources de son génie, l’autre de toutes les puissances de son rang. »
  29. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxvi, p. 214.
  30. La Tour de Nesle, tabl. i.
  31. La Tour de Nesle, tabl. viii.
  32. La Tour de Nesle, tabl. iii et viii ; — tableau vi.
  33. La Tour de Nesle, tabl. ii.
  34. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. v, p. 98.
  35. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxv, p. 182.
  36. La Tour de Nesle, I, tabl. i, sc. ii, p. 8.
  37. La Tour de Nesle, I, tabl. i, sc. iii, pp. 10 sqq. — Elle date de Macette de Mathurin Régnier. Molière l’a reprise dans l’École des femmes, II, sc. vi.
  38. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. i, p. 15.
  39. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. i, p. 15.
  40. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. iii, p. 17.
  41. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. iv, p. 20.
  42. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. v, p. 21.
  43. La Tour de Nesle, ibid., p. 22.
  44. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. vi, p. 24.
  45. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxv, p. 180.
  46. La Tour de Nesle, II, tabl. iii, sc. iii, p. 34.
  47. La Tour de Nesle, II, tabl. iii. sc. iii, p. 34.
  48. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxv, p. 181.
  49. La Tour de Nesle, II, tabl. iv, sc. ii, p. 40.
  50. La Tour de Nesle, acte III, tabl. vi, deuxième tableau du III.
  51. La Tour de Nesle, III, tabl. vi, sc. i, p. 54. Cf. la Conjuration de Fiesqne à Gênes, III, sc. i, p. 281.
  52. La Tour de Nesle, III, tabl. vi, sc. ii, p. 57.
  53. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxiv, p. 170.
  54. Voir plus haut, p. MO, n. 1 ; et Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxvi, Lettre de Gaillardet à M. S.-Henry Berthaud, citée par Dumas, pp. 210 sqq.
  55. Mes mémoires, ibid., p. 215.
  56. La Tour de Nesle, III, tabl. vi, sc. v, p. 60.
  57. La Tour de Nesle, IV, tabl. vii, sc. iii, p. 70 : « Je vais donner l’ordre qu’une taxe soit levée sur la ville à l’occasion de la rentrée. — Vive le roi ! vive le roi ! — Oui, mes enfants, je m’occupe de diminuer des impôts… »
    Cf. Meilhac et Halévy, la Belle Hélène, III, sc. vii, p. 107 : « … La reine fera ce voyage, et c’est mon peuple qui payera les génisses blanches. — Vive le roi Ménélas ! — Oui, mes enfants, vous les payerez. »
  58. La Tour de Nesle, IV, tabl. vii, sc. v, p. 73.
  59. La Tour de Nesle, III, tabl. v, sc. v, p. 51.
  60. La Tour de Nesle, II, tabl. iv, sc. ii. p. 41, et IV, tabl. vii. sc. viii, p. 77.
  61. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. iii, p. 93. Il est évident que ces entrées par le balcon sont réglées sur celle de Figaro et du comte Almaviva à l’acte IV, sc. v, du Barbier de Séville. Voir plus haut, p. 135.
  62. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. iv, p. 97.
  63. Il ne faut jurer de rien, I, sc. i, p. 336 (Œuvres compl., t. IV, Charpentier éditeur, 1881).
  64. Lettre de Harel à Dumas. Mes mémoires, t. IX, ch. ccxxxiv, p. 174.
  65. La Tour de Nesle, I, tabl. ii, sc. vi, p. 24.
  66. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. iii, p. 94.
  67. La Tour de Nesle, II, tabl. iii, sc. iii, p. 34.
  68. La Tour de Nesle, II, tabl. iv, sc. ii, p. 38.
  69. Horace, liv. I, Ép. ii, vers 54.
  70. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. v. p. 98.
  71. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. ii, p. 92.
  72. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. ii, p. 92.
  73. Au surplus, après les avoir crossés, il ne leur garde pas rancune ; il les l’ait boire à sa santé et porte la leur. La Tour de Nesle, I, tabl. i, sc. ii, p. 7.
  74. C’est l’enseigne de Figaro. Voir le Barbier de Séville, I, sc. VI.
  75. La Tour de Nesle, III, tabl. iv, sc. v, p. 61.
  76. La Tour de Nesle, V, tabl. ix, sc. v, p. 98.
  77. Ibid.
  78. Voir le dénoûment de la Contagion et le duel de d’Estrigaud.
  79. La Tour de Nesle, II, tabl. iv, sc. ii, p. 38.
  80. Cf. le Demi-Monde (Th., III), II, sc. v, pp. 126-129. Cf., plus bas, p. 363.
  81. La Tour de Nesle, III, tabl. vi, sc. i, p. 54.