Traduction par Hurtaud.
Lethielleux (p. 79-84).

CHAPITRE XVII

(126)

Comment, dans les mauvais ministres, règne le péché de luxure.

Ma fille très chère, je t’ai donné un rapide aperçu de la vie de ceux qui appartiennent à la sainte Religion, et je t’ai dit comment, misérablement, ils demeurent dans l’Ordre, sous le vêtement des brebis, tout en n’étant que des loups ravisseurs. Je reviens maintenant aux clercs et aux ministres de la sainte Église, pour déplorer avec toi leurs péchés, qui découlent tous de ceux dont je t’ai déjà parlé à propos des trois colonnes du vice. Je te les montrai, une autre fois, en me plaignant à toi de leur impureté, de leur insatiable orgueil, et de leur cupidité qui leur fait vendre la grâce de l’Esprit-Saint.

Comme je te l’ai dit, ces trois vices sont étroitement unis, et leur fondement commun, c’est l’amour-propre. Tant que ces trois colonnes demeurent debout, tant qu’elles ne sont pas jetées à terre, par cette force, qui est l’amour de la vertu, elles suffisent à retenir l’âme immobile et obstinée dans tous les vices. Tous les vices, en effet, naissent de l’amour-propre, dont le premier-né est l’orgueil. L’homme orgueilleux est privé de l’amour de la charité, et l’orgueil le conduit à l’impureté et à l’avarice. Ces vices se relient ainsi l’un à l’autre, par une chaîne diabolique.

Considère encore, ma très chère fille, par quel orgueil, par quelle impureté, ils souillent leur corps et leur âme I

Je t’en ai déjà dit quelque chose, mais je veux t’en parler à nouveau, pour te faire mieux connaître la source de ma miséricorde, et t’inspirer une compassion plus grande pour ces malheureux.

Quelques-uns d’entre eux, sont tellement devenus démons, tellement possédés par l’amour de certaines créatures, qu’ils en sont comme hors d’eux-mêmes. Ce n’est pas assez, pour eux, de n’avoir plus aucun respect pour mon Sacrement, et de n’attacher plus aucun prix à la dignité dont les a revêtus ma Bonté. Exaspérés de ne pouvoir posséder, par eux-mêmes, l’objet de leurs coupables convoitises, ils recourent aux incantations du démon. Pour satisfaire leurs pensées impures et misérables pour réaliser leurs désirs, ils emploient à la composition de maléfices, le Sacrement que je vous ai donné comme une nourriture de vie. Les pauvres brebis confiées à leurs soins, dont ils devraient nourrir les âmes et les corps, ils les tourmentent ainsi, par ces détestables moyens, et par d’autres encore, dont je t’épargnerai le récit, pour ne pas t’affliger davantage. Ta les as vues, ces pauvres brebis, affolées et comme hors d’elles-mêmes, sentir leur volonté fléchir sous les entreprises de ces démons incarnés, et en arriver à faire ce qu’elles ne voulaient pas ; et la violence qu’elles se faisaient à elles-mêmes, causait à leurs corps de cruelles souffrances.

Ces malheurs, quel en est le principe ? Leur vie impure et misérable. Il est bien d’autres maux encore que je pourrais dire ; mais, pourquoi te les rappeler ? Tu les connais.

O fille bien-aimée, la chair qui a été élevée au-dessus de tous les chœurs des anges par l’union de votre nature humaine à ma nature divine, voilà àquelles iniquités, ils la font servir ! O homme abominable, ô homme misérablle, non pas homme, mais brute, cette chair que j’ai consacrée par mon onction sainte, tu la livres aux prostituées, et pis encore ! Cette chair, qui est tienne, elle avait été guérie, comme celle de toute la race humaine, de la blessure que lui avait faite le péché d’Adam, par le corps de mon Fils unique, meurtri et percé sur l’arbre de la très sainte Croix ! O malheureux ! Il t’a rendu l’honneur, et ta lui apportes la honte ! Il a guéri tes plaies par son sang, bien plus, il t’a fait ministre du Sang, et toi, tu le meurtris de tes péchés impurs et honteux ! Le bon Pasteur avait lavé ses

brebis, dans son propre sang ! Toi, tu souilles celles qui sont pures, tu fais tout ce qui est en ton pouvoir, pour les jeter dans l’ordure ! Tu devrais être un miroir de pureté, tu es un modèle de débauche ! Tous les membres de ton corps, tu les fais servir à commettre le mal, et, dans toutes tes actions, tu t’appliques à contredire à ce qu’a fait ma Vérité. J’ai souffert qu’on lui bandât les yeux, pour te donner la lumière, et toi, tes yeux lascifs lancent des flèches empoisonnées, mortelles pour ton âme et pour le cœur de ceux qui sont l’objet de tes regards criminels !

J’ai enduré qu’il fût abreuvé de fiel et de vinaigre, et toi, comme un animal glouton, tu cherches tes délices en des mets délicats, tu te fais un dieu de ton ventre ! Ta langue ne profère que des paroles déshonnêtes et vaines. Cette langue qui devrait être employée à redresser le prochain, à annoncer ma parole, à dire l’Office, en union avec le cœur, je n’en reçois que vilenies ; ce ne sont que jurements, mensonges, parjures, quand encore tu ùe vas pas jusqu’à blasphémer mon nom !

J’ai supporté qu’on lui liât les mains pour te délivrer toi et toute la race humaine, des liens du péché. Tes mains, à toi, ont reçu l’onction, elles ont été consacrées pour administrer le très saint Sacrement, et toi, vilainement, tu les fais servir, ces mains, à des usages infâmes. Toutes les œuvres de tes mains sont corrompues, toutes sont ordonnées au service du démon.

O malheureux I A quelle dignité pourtant ne t’avais-je pas élevé, en t’appelant, toi et toute créature raisonnable, à me servir, Moi seul !

J’ai voulu que les pieds de mon Fils unique fussent percés, pour te faire de son corps une échelle ; et, que son côté fut ouvert, pour te faire voir le secret du cœur. Je l’ai disposé, comme un asile toujours ouvert, où vous pourrez connaître et goûter l’Amour ineffable que je vous ai, en trouvant et en contemplant ma Nature divine unie à votre nature humaine.

Il t’apprend ce cœur, que le Sang dont tu es le ministre, répandu comme un bain, doit purifier vos iniquités, et toi, tu as fait de ton cœur un temple du démon ! Ton affection, qui est signifiée par les pieds, n’enferme et ne peut m’offrir rien d’autre, que honte et bassesse ; elle ne conduit ton âme, que dans les repaires du démon.

Ainsi, tu emploies ton corps tout entier à meurtrir le corps de mon fils ! Sans cesse, tes actes sont en opposition avec les siens ; sans cesse, tu fais le contraire de ce que toi et toutes les créatures, êtes obligês de faire. Tous les organes de ton corps sont devenus des instruments de péché, parce que les trois puissances de ton âme ont été assemblées au nom du démon, alors que c’est en mon nom que tu les devais réunir.

Ta mémoire devait être remplie des bienfaits que tu as reçus de moi, et elle est toute pleine d’images impures et de mille autres indignités. L’œil de ton intelligence, tu le devrais fixer dans la lumière de la Foi sur le Christ crucifié, mon Fils unique, dont tu es devenu le ministre ; et, par une misérable vanité, il n’a d’attention que pour les plaisirs, les honneurs, les richesses du monde. Ta volonté devait s’attacher à Moi, uniquement, m’aimer pour moi-même ; et, bassement, tu as placé ton amour dans les créatures, dans ton propre corps. Il n’est pas jusqu’à tes animaux, que tu n’aimes plus que moi ! La preuve, c’est ta colère contre moi, quand je t’enlève quelque cher objet de tes affections ; c’est ton irritation contre le prochain, quand tu crois en avoir reçu quelque dommage matériel. Tu le hais, alors, tu l’outrages, et tu te sépares de ma charité et de la sienne. O infortuné ! A toi a été confié le service de ce Feu sacré qu’est ma Charité divine, et tu l’éteins en toi, en lui préférant ton propre plaisir, tes affections déréglées ! Tu ne peux supporter, pour elle, un léger préjudice que t’aura causé le prochain !

O ma fille très chère, voilà l’une de ces trois fatales colonnes du mal, dont je t’ai parlé.