Le Correcteur typographe (Brossard)/volume 2/07/02
II
LE MANUSCRIT
Comme on l’a vu plus haut au chapitre Composition, le metteur en pages reçoit le manuscrit des mains du prote, du chef d’atelier, du chef de conscience, du correcteur chargé de mettre la copie au point ou du patron, suivant les usages et l’importance de la Maison.
b) En même temps — à moins de circonstances exceptionnelles ou qu’il ne s’agisse d’un volume se rattachant à d’autres antérieurement imprimés — le metteur en pages reçoit un spécimen, ou page imprimée du futur travail, qui lui servira de guide ou de memento pour les diverses indications ci-dessus, et souvent une échelle-type des différents caractères romains, italiques, gras ou autres, à employer pour les titres du volume, chapitres, parties, sections, paragraphes, alinéas, folios, etc.
Quelques maisons ont la louable habitude de s’entendre pour la désignation de ces caractères avec l’auteur ou l’éditeur auxquels un type a été préalablement soumis, en même temps que le spécimen courant ; d’autres imprimeries laissent le soin de ce choix à l’initiative de leur personnel. La première solution est, à tous points de vue, préférable : on évite, par cette entente préalable, la perte de temps, parfois d’argent, qui résulterait des corrections ultérieures exigées par un auteur méticuleux, auquel les caractères choisis ne conviendraient point et qui pourrait (chose rare, mais toujours possible !) se refuser à solder le travail supplémentaire exécuté pour lui donner satisfaction.
c) Le spécimen indiquera : le blanc séparatif des diverses divisions du volume : parties, chapitres, sections, paragraphes, articles, etc. ; le blanc qui accompagnera le folio, quel qu’il soit ; l’intervalle séparatif du texte et des citations ou du texte et des notes, enfin tout ce qui est non seulement indispensable, mais utile pour mener à bonne fin le travail.
d) Le prote doit faire connaître au metteur en pages les desiderata exprimés par le client, auteur ou éditeur, et même, s’il est nécessaire, certaines des conditions d’impression, en tant tout au moins que leur divulgation n’est pas contraire ou ne nuit pas à ce secret professionnel auquel tout chef de service doit volontairement s’astreindre.
Ni omissions, ni défaillances, ni négligences ne sont dès lors permises à un compositeur vraiment digne du nom de metteur en pages, lorsqu’il est aussi soigneusement documenté.
e) Dès réception du manuscrit, le metteur en pages vérifie la pagination, afin de s’assurer que le texte se suit bien, qu’aucune omission n’est à craindre, et de s’éviter à lui-même des recherches ultérieures inutiles, au cas où une lacune existerait. Si la pagination est erronée, il rectifie l’erreur, soit en doublant les chiffres, soit en cotant de nouveau les feuillets, c’est-à-dire en leur attribuant des folios différents.
f) Nombre d’imprimeries ont accepté l’excellente coutume de la préparation[1] ou de la mise au point, typographiquement parlant, du manuscrit avant sa mise en mains ; usage qui libère le metteur en pages de l’un de ses soucis les plus graves, et lui permet de consacrer à des besognes non moins importantes un temps précieux.
Lorsque le manuscrit n’a pas été revu, le metteur en pages doit l’examiner rapidement, ainsi qu’on l’a expliqué au paragraphe Composition ; il se rendra compte ainsi de la marche générale et pourra donner au compositeur toutes les indications nécessaires pour l’exécution du travail.
- ↑ Voir le Correcteur Typographe : Essai historique, documentaire et technique, chap. v, p. 257.