Le Chemin des ombres heureuses/Sosandre
Édition du Mercure de France, (p. 85-86).
SOSANDRE
Artisan qui m’apportes une coupe d’argent
savamment ciselée, je prise ton ouvrage,
mais tu as, sur le bord, tracé des ornements
qui déchirent ma lèvre en quête d’un breuvage.
Reprends donc cette coupe dont je n’aurais que faire :
j’aime mieux une tasse de poterie grossière
ou de cristal tout nu. J’ai soif et je veux boire.
Reviens demain avec une coupe commode ;
quand je l’aurai vidée, j’admirerai sa forme.
Qu’elle soit de métal précieux, j’y consens ;
qu’une troupe de Faunes et de Nymphes dansant
en décore le galbe, et ce sera merveille.
Bien que Sosandre n’ait pas été orfèvre,
cet apologue lui fut de bon conseil.