Le Chemin des ombres heureuses/Bianor
Édition du Mercure de France, (p. 83-84).
BIANOR
Voyageur égaré dans des landes arides
par une nuit veuve d’étoiles
l’homme cherche là-haut avec un long espoir
quelque vérité qui le guide.
Parfois le vent qui court dans la plaine céleste
déchire les nuages, mais son souffle aussitôt
en accumule d’autres par-dessus leurs lambeaux.
L’homme à la fin lassé se courbe vers la terre ;
il y trouve un caillou et, joyeux
de tenir dans ses mains une réalité,
il l’emporte en courant parmi l’obscurité
et crie : — Un astre m’est tombé des cieux. —
Et son insanité veut convaincre des fous.
Moi, je n’ai pas levé les yeux
vers la mystérieuse voûte,
et, pareil à l’enfant qui joue,
j’ai ramassé, puis rejeté, tous les caillous.