Le Capitaine Fracasse/Chapitre XIII

G. Charpentier (Tome 2p. 122-146).

XIII

DOUBLE ATTAQUE


Le duc de Vallombreuse n’était pas homme à négliger son amour plus que sa vengeance. S’il haïssait mortellement Sigognac, il avait pour Isabelle une de ces passions furieuses que surexcite le sentiment de l’impossible chez ces âmes hautaines et violentes habituées à ce que rien ne leur résiste. Triompher de la comédienne devenait la pensée dominante de sa vie ; gâté par les faciles victoires qu’il avait remportées en sa carrière galante, il ne pouvait s’expliquer cette défaite, et souvent il se disait, à travers les conversations, les promenades, les exercices au théâtre comme au temple, à la ville comme à la cour, pris d’un étonnement subit en sa rêverie profonde : « Comment se fait-il qu’elle ne m’aime pas ? »

En effet, cela était difficile à comprendre pour quelqu’un qui ne croyait pas à la vertu des femmes, et encore moins à celle des actrices. Il se demandait si la froideur d’Isabelle n’était pas un jeu concerté pour obtenir de lui davantage, rien n’allumant le désir comme ces pudicités feintes et mines de n’y vouloir toucher. Cependant la façon dédaigneuse dont elle avait renvoyé le coffret à bijoux placé dans sa chambre par Léonarde prouvait surabondamment qu’elle n’était pas de ces femmes qui marchandent pour se vendre plus cher. Des parures encore plus riches n’eussent pas produit meilleur effet. Puisque Isabelle n’ouvrait même pas les écrins, que servait qu’ils continssent des perles et des diamants à tenter une reine ? L’amour épistolaire ne l’eût pas touchée non plus, quelque élégance et passion que les secrétaires du jeune duc eussent pu mettre à peindre la flamme de leur maître. Elle ne décachetait pas les lettres. Ainsi prose et vers, tirades et sonnets n’auraient fait que mollir. D’ailleurs ces moyens langoureux, bons pour les galants transis, ne congruaient pas à l’humeur entreprenante de Vallombreuse. Il fit appeler dame Léonarde, avec laquelle il n’avait cessé d’entretenir des intelligences secrètes, étant toujours bon de maintenir un espion dans la place, même fût-elle imprenable. Parfois la garnison se relâche, et une poterne est bien vite ouverte, par quoi s’insinue l’ennemi.

Léonarde, par un escalier dérobé, fut introduite en la chambre particulière du duc, où il ne recevait que ses plus intimes amis et fidèles serviteurs. C’était une pièce de forme oblongue, revêtue d’une boiserie à pilastres cannelés d’ordre ionique, dont les entrecolonnements étaient occupés par des cadres ovales d’un goût luxuriant et touffu sculptés dans le bois plein et que semblaient suspendre à la corniche d’un haut relief des nœuds de rubans et des lacs d’amour dorés d’une ingénieuse complication. Ces médaillons renfermaient sous apparences de mythologies, telles que Flores, Vénus, Charites, Dianes, nymphes chasseresses et bocagères, les maîtresses du jeune duc, accoutrées à la grecque et montrant l’une sa gorge alabastrine, l’autre sa jambe faite au tour, celle-ci des épaules à fossettes, celle-là des charmes plus mystérieux avec un artifice si subtil qu’on eût dit des tableaux dus à la fantaisie du peintre plutôt que des portraits d’après le vif. Les plus prudes avaient cependant posé pour ces peintures qui étaient de Simon Vouet, célèbre maître du temps, croyant faire une faveur unique et ne s’imaginant pas former une galerie.

Au plafond creusé en conque était figurée une toilette de Vénus. La déesse se regardait du coin de l’œil, après avoir été attifée par ses nymphes, à un miroir que lui présentait un grand Cupidon hors de page à qui l’artiste avait donné les traits du duc, mais on voyait bien que son attention était plus pour l’Amour que pour le miroir. Des cabinets incrustés en pierres dures de Florence, bourrés de billets doux, de tresses de cheveux, de bracelets et de bagues et autres témoignages de passions oubliées ; une table de même matière où sur un fond de marbre noir se découpaient des bouquets de fleurs aux couleurs vives, muguetées par des papillons ailés de pierreries ; des fauteuils à pieds tournés en bois d’ébène couverts d’une brocatelle saumon ramagée d’argent, un épais tapis de Smyrne où peut-être s’étaient assises les sultanes, et rapporté de Constantinople par l’ambassadeur de France, composaient l’ameublement aussi riche que voluptueux de ce réduit, que Vallombreuse préférait aux appartements d’apparat et qu’il habitait d’ordinaire.

Le duc fit de la main un signe de condescendance à Léonarde et lui indiqua un placet pour s’asseoir. Léonarde était l’idéal de la douegna, et ce luxe frais et jeune faisait encore ressortir son teint de vieille cire jaune et sa laideur répulsive. Son costume noir passementé de jais, ses coiffes rabattues lui donnaient d’abord un aspect sévère et respectable ; mais le sourire équivoque qui se jouait dans les bouquets de poils obombrant les commissures de ses lèvres, le regard hypocritement luxurieux de ses yeux cerclés de rides brunes, l’expression basse, avide et servile de sa mine vous détrompaient bientôt et vous disaient que vous n’aviez pas devant vous une dame Pernelle, mais une dame Macette, de celles qui lavent les jeunes filles pour le sabbat et qui chevauchent le samedi un balai entre les jambes.

« Dame Léonarde, dit le duc rompant le silence, je vous ai fait venir, car je sais que vous êtes une personne fort experte aux choses d’amour pour les avoir pratiquées en votre jeune temps et servies en votre maturité, afin de me concerter avec vous sur les moyens de séduire cette farouche Isabelle. Une duègne qui a été jeune première doit connaître toutes les rubriques.

— Monsieur le duc, répondit la vieille comédienne d’un air de componction, fait beaucoup d’honneur à mes faibles lumières et ne peut douter de mon zèle à lui complaire en tout.

— Je n’en doute point, fit négligemment Vallombreuse ; mais, cependant, mes affaires n’en sont guère plus avancées. Que devient cette beauté revêche ? Est-elle toujours aussi entichée de son Sigognac ?

— Toujours, répliqua dame Léonarde en poussant un soupir. La jeunesse a de ces entêtements bizarres qui ne s’expliquent point. Isabelle, d’ailleurs, ne semble point pétrie dans le limon ordinaire. Aucune tentation ne mord sur elle, et dans le Paradis terrestre elle eût été femme à ne point écouter le serpent.

— Comment donc, s’écria le duc avec un mouvement de colère, ce damné Sigognac a-t-il pu se faire entendre de cette oreille si bien fermée aux propos des autres ? Possède-t-il quelque philtre, quelque amulette, quelque talisman ?

— Aucun, monseigneur, il était malheureux, et pour ces âmes tendres, romanesques et fières, consoler est le plus grand bonheur qui soit ; elles préfèrent donner à recevoir, et la pitié, les yeux humides de larmes, ouvre la porte à l’amour. C’est le cas d’Isabelle.

— Vous me dites des choses de l’autre monde ; être maigre, sans le sol, piteux, délabré, mal en point, ridicule, ce sont là, selon vous, des raisons d’être aimé ! les dames de la cour riraient bien d’une pareille doctrine.

— En effet, elle n’est pas commune, heureusement, et l’on voit peu de femmes donner dans ce travers. Votre Seigneurie est tombée sur une exception.

— Mais c’est à devenir fou de rage, de penser que ce hobereau réussit là où j’échoue et entre les bras de sa maîtresse se raille de ma déconvenue.

— Votre Seigneurie peut s’épargner ce chagrin. Sigognac ne jouit point de ses amours au sens que l’entend monsieur le duc. La vertu d’Isabelle n’a reçu aucune brèche. La tendresse de ces parfaits amants, bien que vive, est toute platonique et se contente de quelque baiser sur la main ou sur le front. C’est pour cela qu’elle dure ; satisfaite, elle s’éteindrait toute seule.

— Dame Léonarde, êtes-vous bien sûre de cela ? est-il croyable qu’ils vivent ainsi chastement ensemble dans la licence des coulisses et des voyages, couchant sous le même toit, soupant à la même table, rapprochés sans cesse par les nécessités des répétitions et des jeux de scène ? Il faudrait qu’ils fussent des anges.

— Isabelle est à coup sûr un ange, et elle n’a pas l’orgueil qui fit choir Lucifer du ciel. Quant à Sigognac, il obéit aveuglément à sa maîtresse, et accepte tous les sacrifices qu’elle lui impose.

— S’il en est ainsi, dit Vallombreuse, que pouvez-vous faire pour moi ? Allons, cherchez dans quelque tiroir secret de votre boîte à malice un vieux stratagème irrésistible, une fourberie triomphante, une machination à rouages compliqués qui me donne la victoire ; vous savez que l’or et l’argent ne me coûtent rien. »

Et il plongea sa main, plus blanche et aussi délicate que celle d’une femme, dans une coupe de Benvenuto Cellini, posée sur une table auprès de lui et remplie de pièces d’or. À la vue de ces monnaies qui bruissaient avec un tintement persuasif, les yeux de chouette de la douegna s’allumèrent, perçant de deux trous lumineux le cuir basané de sa face morte. Elle parut réfléchir profondément et resta quelques instants muette.

Vallombreuse attendait avec impatience le résultat de cette rêverie ; enfin la vieille reprit la parole.

« À défaut de son âme, peut-être puis-je vous livrer son corps. Une empreinte de serrure à la cire, une fausse clef et un bon narcotique feraient l’affaire.

— Pas de cela ! interrompit le duc, qui ne put se défendre d’un mouvement de dégoût. Fi donc ! posséder une femme endormie, un corps inerte, une morte, une statue sans conscience, sans volonté, sans souvenir, avoir une maîtresse qui au réveil vous regarderait les yeux étonnés comme sortant d’un rêve, et reprendrait aussitôt son aversion pour vous avec son amour pour un autre ! être un cauchemar, un songe lubrique qu’on oublie au matin ! jamais je ne descendrai si bas.

— Votre Seigneurie a raison, dit Léonarde, la possession n’est rien si l’on n’a le consentement, et je ne proposais cet expédient qu’à bout de ressources. Je n’aime pas non plus ces moyens ténébreux, et ces breuvages qui sentent la pharmacopée de l’empoisonneuse. Mais pourquoi étant beau comme Adonis favori de Vénus, splendide en vos ajustements, riche, puissant à la cour, ayant tout ce qui plaît aux femmes, ne faites-vous pas tout simplement la cour à l’Isabelle ?

— Eh ! pardieu, la vieille a raison, s’écria Vallombreuse, en jetant un regard de complaisance à un miroir de Venise supporté par deux amours sculptés qui se tenaient en équilibre sur une flèche d’or, de telle façon que la glace se penchait et se redressait à volonté pour qu’on pût s’y voir plus à son aise. Isabelle a beau être froide et vertueuse, elle n’est pas aveugle, et la nature n’a pas été pour moi si marâtre que ma présence inspire l’horreur. Je lui ferai toujours bien l’effet d’une statue ou d’un tableau qu’on admire, encore qu’on ne l’aime pas, mais qui retient les yeux, et les charmes par sa symétrie et son coloris agréable. Et puis je lui dirai de ces choses à quoi les femmes ne résistent point, avec ces regards qui fondent la glace des cœurs, et dont le feu, soit dit sans fatuité, a incendié les belles les plus hyperboréennes et les plus glacées de la cour ; cette comédienne d’ailleurs a de la fierté, et la poursuite d’un duc ne peut que flatter son orgueil. Je l’appuierai à la Comédie et dresserai des cabales en sa faveur. Ce sera miracle alors si elle pense encore à ce petit Sigognac duquel je saurai bien me défaire.

— Monsieur le duc n’a rien à me dire de plus, fit dame Léonarde, qui s’était levée et restait les mains croisées sur sa ceinture dans une pose d’attente respectueuse.

— Non, répondit Vallombreuse, vous pouvez vous retirer, mais auparavant prenez ceci (et il lui tendait une poignée de louis d’or), ce n’est pas votre faute s’il se trouve en la troupe d’Hérode une pudicité invraisemblable. »

La vieille remercia le jeune duc et se retira à la reculade jusque vers la porte, sans se prendre les pieds dans ses jupes, avec une habitude que lui avait donnée le théâtre. Là elle se retourna tout d’une pièce et disparut bientôt dans les profondeurs de l’escalier. Resté seul, Vallombreuse sonna son valet de chambre pour qu’il le vînt accommoder.

« Çà, Picard, dit le duc, il te faut surpasser et me faire une toilette triomphante ; je veux être plus beau que Buckingham s’efforçant de plaire à la reine Anne d’Autriche. Si je reviens bredouille de ma chasse à la beauté, tu recevras les étrivières, car je n’ai aucun défaut ou vice à dissimuler postichement.

— Votre Seigneurie a la meilleure grâce du monde, répondit Picard, et chez elle l’Art n’a qu’à mettre la Nature en son lustre. Si monsieur le duc veut s’asseoir devant la glace et se tenir tranquille quelques minutes, je vais le testonner et l’adoniser de telle sorte qu’il ne rencontrera pas de cruelles. »

Ayant dit ces mots, Picard plongea des fers à friser dans une coupe d’argent où, recouverts de cendre, des noyaux d’olive faisaient un feu doux comme celui des braseros espagnols, et quand ils furent chauds au degré juste, ce qu’il reconnut en les approchant de sa joue, il commença à pincer par le bout ces belles boucles d’ébène dont la souplesse ne demandait pas mieux que de se tourner mignardement en spirales.

Lorsque M. le duc de Vallombreuse fut coiffé, et qu’un cosmétique d’un parfum suave mieux flairant que baume eut fixé ses fines moustaches semblables à l’arc de Cupidon, le valet de chambre, satisfait de son ouvrage, se renversa un peu en arrière pour le contempler, comme un peintre qui regarde, en clignant l’œil, la dernière touche posée à son tableau.

« Quel habit monsieur le duc désire-t-il mettre aujourd’hui ? Si j’osais risquer un avis à qui n’en a pas besoin, je conseillerais à Sa Seigneurie le costume de velours noir à taillades et à bouffettes en satin de la même couleur, avec les bas de soie et un simple col en point de Raguse. Les brocarts, les satins brochés, les toiles d’or et d’argent, les pierreries pourraient, par leur éclat intempestif, distraire les regards qui se doivent porter uniquement sur la figure de monsieur, dont les charmes ne furent jamais plus irrésistibles ; le noir relèvera cette pâleur délicate qui lui reste de sa blessure et lui donne tant d’intérêt.

— Le drôle a le goût bon, et sait flatter aussi bien qu’un courtisan, murmura intérieurement Vallombreuse ; oui, le noir m’ira bien ! Isabelle, d’ailleurs, n’est point femme à s’éblouir devant des orfrois de brocarts et des bluettes de diamants. Picard, continua-t-il tout haut, passez-moi le pourpoint et les chausses de velours, et donnez-moi l’épée d’acier bruni. Maintenant, dites à la Ramée qu’il fasse mettre les chevaux au carrosse, les quatre bais, et promptement. Je veux sortir dans un quart d’heure. »

Picard disparut aussitôt pour faire exécuter les ordres de son maître. Vallombreuse, en attendant la voiture, se promenait de long en large à travers la chambre, jetant, toutes les fois qu’il passait devant, un coup d’œil interrogatif au miroir de Venise, lequel, contre l’ordinaire des miroirs, lui faisait à chaque demande une réponse flatteuse.

« Il faudrait que cette péronnelle fût diantrement superbe, revêche et dégoûtée, pour ne pas devenir subitement toute vive amoureuse folle de moi, malgré ses simagrées de vertu et ses langueurs platoniques avec le Sigognac. Oui, ma toute belle, vous figurerez bientôt dans un de ces cadres ovales, peinte au naturel, en Phœbé forcée malgré sa froideur de venir baiser Endymion. Vous prendrez place parmi ces déités qui furent d’abord non moins prudes, farouches et hyrcaniennes que vous ne l’êtes, et qui sont plus grandes dames assurément que vous ne le serez jamais. Votre défaite ne manquera pas longtemps à ma gloire ; car sachez, ma petite comédienne, que rien ne peut faire obstacle à la volonté d’un Vallombreuse. Frango nec frangor, telle est ma devise ! »

Un laquais vint annoncer que le carrosse était avancé. La distance qui sépare la rue des Tournelles, où demeurait le duc de Vallombreuse, de la rue Dauphine, fut bientôt franchie au trot de quatre vigoureux mecklembourgeois touchés par un cocher de grande maison, qui n’eût pas cédé le haut du pavé à un prince du sang, et qui coupait insolemment toutes les voitures. Quelque hardi et sûr de lui-même que fût le duc, pendant le trajet, il ne put se défendre d’une certaine émotion assez rare chez lui. L’incertitude de savoir comment il serait reçu de cette dédaigneuse Isabelle lui faisait battre le cœur un peu plus vite que de coutume. Les sentiments qu’il éprouvait étaient de nature fort opposée. Ils variaient de la haine à l’amour, selon qu’il s’imaginait la jeune comédienne rebelle ou docile à ses vœux.

Quand le beau carrosse doré, traîné par des chevaux de prix et surchargé de laquais aux livrées de Vallombreuse, entra dans l’auberge de la rue Dauphine, dont les portes s’ouvrirent toutes grandes pour le recevoir, l’hôtelier, le bonnet à la main, se précipita plutôt qu’il ne descendit du haut du perron pour aller à la rencontre de ce magnifique visiteur, et savoir ce qu’il désirait.

Si vite que l’hôtelier eût couru, Vallombreuse, sautant du carrosse à terre sans l’aide du marchepied, s’avançait déjà vers l’escalier d’un pas rapide. Le front de l’aubergiste, prosterné tout bas, lui heurta presque les genoux.

Le jeune duc, de cette voix stridente et brève qui lui était familière lorsque quelque passion l’agitait, lui dit :

« Mademoiselle Isabelle demeure en cette maison. Je la voudrais voir. Est-elle au logis à cette heure ? Il n’est pas besoin de la prévenir de ma visite. Donnez-moi seulement un laquais qui m’accompagne jusqu’à sa porte. »

L’hôtelier avait répondu à ces questions par des respectueuses inclinaisons de tête, et il ajouta :

« Monseigneur, laissez-moi la gloire de vous conduire moi-même ; un tel honneur n’est point fait pour un maraud de valet. À peine si le maître de céans y suffit.

— Comme vous voudrez, dit Vallombreuse avec une nonchalance hautaine, mais faites vite ; voici déjà des têtes qui se mettent aux fenêtres et se penchent pour me regarder comme si j’étais le Grand Turc ou l’Amorabaquin.

— Je vais vous précéder pour vous montrer le chemin, » dit l’hôtelier, tenant des deux mains son bonnet pressé sur son cœur.

L’escalier franchi, le duc et son guide s’engagèrent dans un long corridor sur lequel s’ouvraient des portes comme dans un cloître de couvent. Arrivé devant la chambre d’Isabelle, l’hôte s’arrêta et dit :

« Qui aurai-je l’honneur d’annoncer ?

— Vous pouvez vous retirer maintenant, répondit Vallombreuse en mettant la main sur la clef, je m’annoncerai moi-même. »

Isabelle, assise près de la fenêtre dans une chaise haute, en manteau du matin, les pieds nonchalamment allongés sur un tabouret de tapisserie, était en train d’étudier le rôle qu’elle devait remplir dans la pièce nouvelle. Les yeux fermés, afin de ne pas voir les paroles écrites sur son cahier, elle répétait à voix basse, comme un écolier sa leçon, les huit ou les dix vers qu’elle venait de lire plusieurs fois. La lumière de la croisée, dessinant le contour velouté de son profil, piquait des étincelles d’or aux petits cheveux follets qui se crespelaient sur sa nuque, et faisait luire la nacre transparente de ses dents dans sa bouche entr’ouverte. Un reflet tempérait par sa lueur argentée ce que l’ombre, baignant les chairs et le vêtement, aurait eu de trop noir, et produisait cet effet magique si recherché des peintres, qu’ils appellent « clair-obscur » en leur langage. Cette jeune femme ainsi posée formait un tableau charmant, qui n’eût eu besoin que d’être copié par un habile homme pour devenir l’honneur et la perle d’une galerie.

Croyant que ce fût quelque fille de chambre qui entrât pour les besoins du service, Isabelle n’avait pas relevé ses longues paupières dont les cils, traversés du jour, ressemblaient à des fils d’or, et continuait dans une somnolence rêveuse à débiter machinalement ses rimes comme on égrène un chapelet, presque sans y penser. Elle n’avait d’ailleurs aucune défiance, en plein jour, dans cette auberge toute pleine de monde, tout près de ses camarades, et ne sachant pas que Vallombreuse fût à Paris. Les tentatives contre Sigognac ne s’étaient pas renouvelées, et la jeune comédienne, quelque timide qu’elle fût, commençait à reprendre un peu d’assurance. Sa froideur avait sans doute découragé le caprice du jeune duc, auquel en ce moment elle ne pensait non plus qu’au prêtre Jean ou à l’empereur de la Chine.

Vallombreuse s’était avancé jusqu’au milieu de la chambre, suspendant ses pas, retenant son haleine, pour ne pas déranger ce gracieux tableau qu’il contemplait avec un ravissement bien concevable ; en attendant qu’Isabelle levât les yeux et l’aperçût, il avait mis un genou en terre et tenait d’une main son feutre dont la plume balayait le plancher, tandis qu’il appuyait l’autre main sur son cœur dans une pose qu’on n’eût pu désirer plus respectueuse pour une reine.

Si la jeune comédienne était belle, Vallombreuse, il faut l’avouer, n’était pas moins beau ; la lumière donnait en plein sur sa figure d’une régularité parfaite et semblable à celle d’un jeune dieu grec qui se serait fait duc depuis la déchéance de l’Olympe. En ce moment, l’amour et l’admiration qui s’y peignaient en avaient fait disparaître cette expression impérieusement cruelle qu’on regrettait parfois d’y voir. Les yeux jetaient des flammes, la bouche semblait lumineuse ; à ses joues pâles il montait du cœur comme une sorte de clarté rose. Des éclairs bleuâtres passaient sur ses cheveux bouclés et lustrés de parfums comme des frissons de jour sur du jayet poli. Son col, délicat et robuste à la fois, prenait des blancheurs de marbre. Illuminé par la passion, il rayonnait, il étincelait, et vraiment on comprenait qu’un duc fait de la sorte ne pût admettre l’idée que déesse, reine ou comédienne lui résistât.

Enfin Isabelle tourna la tête et vit le duc de Vallombreuse agenouillé à six pas d’elle. Persée lui eût porté au visage le masque de Méduse, enchâssé dans son bouclier et faisant la grimace de l’agonie au milieu d’un éparpillement de serpenteaux, qu’elle n’eût pas éprouvé une stupeur pareille. Elle resta glacée, pétrifiée, les yeux dilatés de terreur, la bouche entr’ouverte et le gosier aride, sans pouvoir faire un mouvement ni pousser un cri. Une pâleur de mort se répandit sur ses traits, son dos s’emperla de sueur froide ; elle crut qu’elle allait s’évanouir ; mais, par un prodigieux effort de volonté, elle rappela ses sens pour ne pas rester exposée aux entreprises de ce téméraire.

« Je vous inspire donc une bien insurmontable horreur, dit Vallombreuse sans quitter sa position et de la voix la plus douce, que ma vue seule vous produit un tel effet. Un monstre d’Afrique sortant de sa caverne, la gueule rouge, les dents aiguisées et les griffes en arrêt vous eût, certes, moins effrayée. Mon entrée, j’en conviens, a été un peu inopinée et subite ; mais il ne faut pas en vouloir à la passion des incivilités qu’elle fait commettre. Pour vous voir, j’ai affronté votre courroux, et mon amour, au risque de vous déplaire, se met à vos pieds suppliant et timide.

— De grâce, monsieur le duc, relevez-vous, dit la jeune comédienne, cette position ne vous convient point. Je ne suis qu’une pauvre actrice de province, et mes faibles charmes ne méritent pas une telle conquête. Oubliez un caprice passager et portez ailleurs des vœux que tant de femmes seraient heureuses de combler. Ne rendez point les reines, les duchesses et les marquises jalouses à cause de moi.

— Et que m’importent toutes ces femmes, fit impétueusement Vallombreuse en se relevant, si c’est votre fierté que j’adore, si vos rigueurs ont plus de charmes à mes yeux que les faveurs des autres, si votre sagesse m’enivre, si votre modestie excite ma passion jusqu’au délire, s’il faut que vous m’aimiez ou que je meure ! Ne craignez rien, ajouta-t-il en voyant qu’Isabelle ouvrait la fenêtre comme pour se précipiter s’il se portait à quelque violence, je ne demande autre chose sinon que vous souffriez ma présence, que vous me permettiez de vous faire ma cour et d’attendrir votre cœur, comme font les amants les plus respectueux.

— Épargnez-moi ces poursuites inutiles, répondit Isabelle, et j’aurai pour vous, à défaut d’amour, une reconnaissance sans bornes.

— Vous n’avez ni père, ni mari, ni amant, dit Vallombreuse, qui se puisse opposer à ce qu’un galant homme vous recherche et tâche de vous agréer. Mes hommages ne sont pas une insulte. Pourquoi me repousser ? Oh ! vous ne savez pas quelle vie splendide j’ouvrirais devant vous si vous consentiez à m’accueillir. Les enchantements des féeries pâliraient à côté des imaginations de mon amour pour vous plaire. Vous marcheriez comme une déesse sur les nuées. Vos pieds ne fouleraient que de l’azur et de la lumière. Toutes les cornes d’abondance répandraient leurs trésors devant vos pas. Vos souhaits n’auraient pas le temps de naître, je les surprendrais dans vos yeux et je les devancerais. Le monde lointain s’effacerait comme un rêve, et d’un même vol, à travers les rayons, nous monterions vers l’Olympe plus beaux, plus heureux, plus enivrés que Psyché et l’Amour. Voyons, Isabelle, ne détournez pas ainsi la tête, ne gardez pas ce silence de mort, ne poussez pas au désespoir une passion qui peut tout, excepté renoncer à elle-même et à vous.

— Cette passion dont toute autre tirerait orgueil, répondit modestement Isabelle, je ne saurais la partager. La vertu que je fais profession d’estimer plus que la vie ne s’y opposerait point, que je déclinerais encore ce dangereux honneur.

— Regardez-moi d’un œil favorable, continua Vallombreuse, je vous rendrai un objet d’envie pour les plus grandes et les plus haut situées. À une autre femme je dirais : dans mes châteaux, dans mes terres, dans mes hôtels, prenez ce qui vous plaira, saccagez mes cabinets pleins de diamants et de perles, plongez vos bras jusqu’aux épaules au fond de mes coffres, habillez votre livrée d’habits trop riches pour des princes, faites ferrer d’argent fin les chevaux de vos carrosses, menez le train d’une reine ; éblouissez Paris, qui pourtant ne s’étonne guère. Tous ces appâts sont trop grossiers pour une âme de la trempe dont est la vôtre. Mais cette gloire peut vous toucher d’avoir réduit et vaincu Vallombreuse, de le mener captif derrière votre char de triomphe, de nommer votre serviteur et votre esclave celui qui n’a jamais obéi, et que nuls fers n’ont pu retenir.

— Ce prisonnier serait trop illustre pour mes chaînes, dit la jeune actrice, et je ne voudrais pas contraindre une liberté si précieuse ! »

Jusque-là le duc de Vallombreuse s’était contenu ; il forçait sa violence naturelle à une douceur feinte, mais la résistance respectueuse et ferme d’Isabelle commençait à faire bouillonner sa colère. Il sentait un amour derrière cette vertu, et son courroux s’augmentait de sa jalousie. Il fit quelques pas vers la jeune fille, qui mit la main sur la ferrure de la fenêtre. Ses traits étaient contractés, il se mordait les lèvres et l’air de méchanceté avait reparu sur son visage.

« Dites plutôt, reprit-il d’une voix altérée, que vous êtes folle de Sigognac ! Voilà la raison de cette vertu dont vous faites montre. Qu’a-t-il donc pour vous charmer de la sorte cet heureux mortel ? Ne suis-je pas plus beau, plus noble, plus riche, aussi jeune, aussi spirituel, aussi amoureux que lui !

— Il a du moins, répondit Isabelle, une qualité qui vous manque : celle de respecter ce qu’il aime.

— C’est qu’il n’aime pas assez, » fit Vallombreuse en prenant dans ses bras Isabelle dont le corps penchait déjà hors de la fenêtre, et qui, sous l’étreinte de l’audacieux, poussa un faible cri.

Au même instant la porte s’ouvrit. Le Tyran, faisant des courbettes et des révérences outrées, pénétra dans la chambre et s’avança vers Isabelle, qu’aussitôt lâcha Vallombreuse avec une rage profonde d’être ainsi interrompu en ses prouesses amoureuses.

« Pardon, mademoiselle, dit le Tyran en lançant au duc un regard de travers, je ne vous savais pas en si bonne compagnie ; mais l’heure de la répétition a sonné à toutes les horloges, et l’on n’attend plus que vous pour commencer. »

En effet, par la porte entre-bâillée on voyait le Pédant, Scapin, Léandre et Zerbine, qui formaient un groupe rassurant pour la pudeur menacée d’Isabelle. Le duc eut un instant l’idée de fondre l’épée en main sur cette canaille et de la disperser, mais cela eût fait un esclandre inutile ; en tuant ou blessant deux ou trois de ces histrions il n’aurait pas arrangé ses affaires : d’ailleurs ce sang était trop vil pour qu’il y trempât ses nobles mains, il se contint donc, et saluant avec une politesse glaciale Isabelle, qui, toute tremblante, s’était rapprochée de ses amis, il sortit de la chambre, mais au seuil de la porte il se retourna, fit un signe de la main, et dit : « Au revoir, mademoiselle ! » une phrase bien simple assurément, mais qui prenait du son de voix dont elle était prononcée des signifiances menaçantes et terribles. La tête de Vallombreuse, si charmante tout à l’heure, avait repris son expression de perversité diabolique ; Isabelle ne put s’empêcher de frémir, bien que la présence des comédiens la mît à l’abri de toute tentative. Elle eut ce sentiment d’angoisse mortelle de la colombe au-dessus de laquelle le milan trace dans l’air des cercles de plus en plus rapprochés.

Vallombreuse regagna son carrosse suivi par l’hôtelier qui se confondait derrière lui en politesses impatientantes et superflues, et bientôt le grondement des roues indiqua que le dangereux visiteur était enfin parti.

Maintenant, voici comment s’explique le secours venu si à propos pour Isabelle. L’arrivée du duc de Vallombreuse en carrosse doré à l’hôtel de la rue Dauphine avait produit une rumeur d’étonnement et d’admiration dans toute l’auberge, qui était bientôt parvenue aux oreilles du Tyran occupé, comme Isabelle, à étudier dans sa chambre. En l’absence de Sigognac, retenu au théâtre pour y essayer un costume nouveau, le brave Hérode, connaissant les mauvaises intentions de Vallombreuse, s’était bien promis de veiller au grain, et l’oreille appliquée au trou de la serrure il écoutait, par une indiscrétion louable, cet entretien hasardeux, sauf à intervenir lorsque la scène chaufferait trop. Sa prudence avait ainsi sauvé la vertu d’Isabelle des entreprises de ce méchant duc outrageux et pervers.

Cette journée devait être orageuse. Lampourde, on s’en souvient, avait reçu de Mérindol la mission de dépêcher le capitaine Fracasse ; aussi le bretteur, guettant l’occasion de l’attaquer, faisait-il pied de grue sur l’esplanade où s’élève le roi de bronze, car Sigognac, pour rentrer à l’auberge, devait forcément prendre le Pont-Neuf. Jacquemin était là déjà depuis plus d’une heure soufflant dans ses doigts pour ne pas les avoir gourds au moment de l’action, et battant la semelle afin de se réchauffer les pieds. Le temps était froid et le soleil se couchait derrière le pont Rouge, au delà des Tuileries, dans des nuages sanguinolents. Le crépuscule baissait rapidement, et déjà les passants se faisaient rares.

Enfin Sigognac parut marchant d’un pas hâté, car une vague inquiétude l’agitait à l’endroit d’Isabelle, et il se pressait de rentrer au logis. Dans cette précipitation, il ne vit pas Lampourde qui, lui prenant le bord du manteau, le lui tira d’un mouvement si sec et si brusque que les cordons en rompirent. En un clin d’œil Sigognac se trouva en simple pourpoint. Sans chercher à disputer sa cape à cet assaillant qu’il prit d’abord pour un vulgaire tire-laine, il mit, avec la promptitude de l’éclair, flamberge au vent et tomba en garde. De son côté, Lampourde n’avait pas été moins prompt à dégaîner. Il fut content de cette garde et se dit : « Nous allons nous amuser un peu. » Les lames s’engagèrent. Après quelques tâtonnements de part et d’autre, Lampourde essaya une botte qui fut aussitôt déjouée. « Bonne parade, continua-t-il ; ce jeune homme a des principes. »

Sigognac lia avec son épée le fer du bretteur et lui poussa une flanconnade que celui-ci para avec une retraite de corps, tout en admirant le coup de son adversaire pour sa perfection et sa régularité académique.

« À vous celle-ci, » s’écria-t-il, et son épée décrivit un cercle étincelant, mais elle rencontra celle de Sigognac déjà revenu à son poste.

Épiant un jour pour y pénétrer, les lames liées par les pointes tournaient l’une autour de l’autre, tantôt lentes, tantôt rapides, avec des malices et des prudences qui prouvaient la force des deux combattants.

« Savez-vous, monsieur, dit Lampourde, ne pouvant contenir plus longtemps son admiration pour ce jeu si sûr, si serré et si correct, savez-vous que vous avez une méthode superbe !

— À votre service, » répondit Sigognac, en allongeant une botte à fond au bretteur qui la détourna avec le pommeau de son épée par un coup de poignet aussi roide que la détente d’un cranequin.

« Magnifique estocade, fit le bretteur de plus en plus enthousiasmé, coup merveilleux ! Logiquement j’aurais dû être tué. Je suis dans mon tort ; ma parade est une parade de raccroc, irrégulière, sauvage, bonne tout au plus pour ne pas être embroché en un cas extrême. Je rougis presque de l’avoir employée avec un beau tireur comme vous. »

Toutes ces phrases étaient entremêlées de froissements de fer, de quartes, de tierces, de demi-cercles, de coupés, de dégagés qui augmentaient l’estime de Lampourde pour Sigognac. Ce gladiateur ne prisait au monde que l’escrime, et il réglait le cas qu’il devait faire des gens d’après leur force aux armes. Sigognac prenait à ses yeux des proportions considérables.

« Serait-ce une indiscrétion, monsieur, que de vous demander le nom de votre maître ? Girolamo, Paraguantes et Côte-d’Acier seraient fiers d’un tel élève.

— Je n’ai eu pour professeur qu’un vieux soldat nommé Pierre, répondit Sigognac, que ce babil étrange amusait ; tenez, parez celle-là ; c’est une de ses bottes favorites. » Et le baron se fendit.

« Diable ! s’écria Lampourde en rompant d’une semelle, j’ai failli être touché ; la pointe a glissé sous le bras. En plein jour vous m’auriez perforé, mais vous n’avez pas encore l’habitude de ces combats crépusculaires et nocturnes qui exigent des yeux de chat. N’importe ! c’était bien passé, bien allongé, bien porté. Maintenant, faites bien attention, je ne vous prends pas en traître. Je vais essayer sur vous ma botte secrète, le résultat de mes études, le nec plus ultra de ma science, l’élixir de ma vie. Jusqu’à présent ce coup d’épée infaillible a toujours tué son homme. Si vous le parez, je vous l’apprends. C’est mon seul héritage, et je vous le léguerai ; sans cela, j’emporterai cette botte sublime dans la tombe, car je n’ai encore rencontré personne capable de l’exécuter, si ce n’est vous, admirable jeune homme ! Mais voulez-vous vous reposer un peu et reprendre haleine ? »

En disant ces mots, Jacquemin Lampourde baissait la pointe de son épée. Sigognac en fit autant, et au bout de quelques minutes le duel recommença.

Après quelques passes, Sigognac, qui connaissait toutes les ruses de l’escrime, sentit, au travail particulier de Lampourde, dont l’épée se dérobait avec une rapidité éblouissante, que la fameuse botte allait fondre sur sa poitrine. En effet, le bretteur s’aplatit subitement comme s’il tombait sur le nez, et le Baron ne vit plus devant lui d’adversaire, mais un éclair fouetté dans un sifflement lui arriva si vite au corps, qu’il n’eut que le temps de le couper par un demi-cercle qui cassa net la lame de Lampourde.

« Si vous n’avez pas le reste de mon épée dans le ventre, dit Lampourde à Sigognac en se redressant et en agitant le tronçon qui lui restait dans la main, vous êtes un grand homme, un héros, un dieu !

— Non, répondit Sigognac, je ne suis pas touché, et si je voulais je pourrais même vous clouer contre un mur comme un hibou ; mais cela répugne à ma générosité naturelle, et d’ailleurs vous m’avez amusé par votre bizarrerie.

— Baron, permettez-moi d’être désormais votre admirateur, votre esclave, votre chien. On m’avait payé pour vous tuer. J’ai même reçu des avances que j’ai mangées. C’est égal ! Je volerai pour rendre l’argent. » Cela dit, il ramassa le manteau de Sigognac, le lui remit sur les épaules en valet de chambre officieux, le salua profondément et s’éloigna.

Les deux attaques du duc de Vallombreuse avaient manqué.